City Hunter Fanfictions
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
Le deal à ne pas rater :
Réassort du coffret Pokémon 151 Électhor-ex : où l’acheter ?
Voir le deal

Aller en bas
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Dim 7 Mar - 4:50
Mick disparaît et son absence rouvre des plaies mal refermées...
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Dim 7 Mar - 4:55
Chapitre 1

- Tu vas te tenir tranquille, espèce de sale pervers libidineux. Impossible de sortir avec toi sans se faire remarquer !, s’énerva Kaori, traînant un Ryo récalcitrant par le col.
- Te plains pas. Au moins une fois dans ta vie, quelqu’un t’aura vue ! J’espère juste qu’il n’aura pas eu la frayeur de sa vie !, répliqua le nettoyeur, d’un ton acerbe.
- Ah ah très drôle… Ryo, non, reviens ici !, recommença-t-elle alors que son très cher partenaire venait de voir Miki et volait vers elle, semi dénudé.
- Ma Miki, viens dans les bras de Ryochou.
- Cette fois-ci, tu n’y couperas pas., tonna Kaori en dégainant la massue.

Le nettoyeur numéro un du Japon vola dans les airs et alla s’écraser comme une crêpe sur l’un des murs du café, évitant toutes les choses qui pouvaient casser.

- Encore un sans faute, Kaori !, s’extasia la barmaid, lui tapant dans la main.
- Ca fait des années que je m’entraîne quand même…, répondit la rouquine, cachant sa lassitude sous un masque de satisfaction.
- Je suis un incompris !, se mit à geindre Ryo, assis en tailleur au sol, des torrents de larmes sortant de ses yeux.

Les deux jeunes femmes n’en firent pas de cas et, au bout de quelques minutes, il vint s’asseoir dépité à côté de sa partenaire. Sans qu’il l’eut demandé, Miki lui tendit une tasse de café puis retira son tablier.

- Je vais faire les courses, nounours. Je te confie le café. Soyez sages., dit-elle, déposant un baiser sur sa joue.

Nounours, plus connu sous le nom d’Umibozu ou Falcon, impitoyable mercenaire, dont le seul nom en faisait frémir plus d’un, se mit à rougir furieusement et à fumer de toute la surface de son crâne.

- Tu m’étonnes que Tête de Poulpe soit chauve. Il a cramé tous ses cheveux à force d’entendre des mots doux. Fallait mieux élever ta future, Genji le chauve., se moqua Ryo, hilare.
- Tais-toi ou je te refais le portrait, l’âne bâté de Shinjuku !, riposta le géant.
- Qui tu traites d’âne bâté, l’Eleph’ ?, fit Ryo, se levant appuyé sur le bar.
- A ton avis ? Il n’y a qu’un seul prétendu animal dans ce café…
- Ce n’est pas gentil de parler ainsi de Kaori. La pauvre, elle ne peut déjà pas prétendre être une femme…

Le reste de la phrase mourut étouffé par le sucrier rond en métal que sa tendre et douce partenaire lui enfonça dans la gorge. Il n’osa même pas se plaindre face au regard meurtrier qu’elle lui lança et se fit tout petit pour échapper à son courroux car il sentait la massue arriver malgré la première punition infligée. Heureusement pour lui, le destin était de son côté et la clochette de la porte tinta.

- Mon ange adoré est parmi nous. Dans mes bras, ma Kaori !, s’écria Mick, volant dans les airs en caleçon imprimé de petites têtes de Kaori envoyant des bisous.

Elle ne se laissa néanmoins pas surprendre et Mick fut propulsé exactement au même endroit et dans la même position que Ryo précédemment à l’aide d’une massue estampillée « Enlève ma tête de là ! ». Elle reprit ensuite place au bar face à Umi qui avait repris l’essuyage de ses assiettes.

- Pourquoi faut-il qu’ils soient aussi primaires ?, soupira-t-elle.

Il ne répondit pas mais lui glissa une tasse de café comme elle l’aimait.

- Merci, Umi., répondit-elle en lui souriant.

Ryo, qui avait enfin réussi à recracher le sucrier, vint reprendre place à ses côtés sans mot dire. Il vit Mick se remettre d’aplomb, rajuster sa veste et sa chemise, replacer sa mèche et jeter un dernier coup d’oeil à son reflet dans la vitrine avant de s’approcher de sa partenaire, le regard séducteur.

- Ma douce Kaori, n’as-tu donc toujours pas envie de goûter aux plaisirs amoureux dans mes bras ?, susurra-t-il, passant un bras autour de sa taille.

Il était trop sérieux pour être honnête, ce qui l’amusa, et elle partit d’un rire joyeux sous le regard impassible de son partenaire qui touillait son café noir. Cependant, l’impassibilité n’était qu’apparente et il bouillonnait intérieurement.

- Garde tes mains dans tes poches, Mick., le reprit-elle, alors que sa main glissait vers sa poitrine.
- Oh pardon, Elle a vraiment une sale manie, cette main. Alors, ma colombe, toi, moi, un grand lit…, lui susurra-t-il à l’oreille.
- Même pas en rêve. Je ne donne pas dans les aventures d’un soir.
- Pour toute la vie alors., répondit-il le plus sérieusement du monde.
- Non, Mick. Tu as Kazue et vous êtes heureux ensemble., répondit Kaori d’un ton léger.
- Un mot de ta part…

Kaori posa un doigt sur ses lèvres, la tournure de la conversation devenant dérangeante. Quelque chose lui disait qu’il était à moitié sérieux.

- Ne dis pas de bêtise. Kazue et toi êtes mes amis. Je ne pourrais pas vous faire de mal.
- Je plaisantais, Kaori chérie… Tu me connais., se mit-il à rire.

Ryo regarda son ami et ressentit un pincement au coeur : la plaisanterie n’en était une qu’à moitié. Il n’aurait pas pu jurer que Mick ne quitterait pas Kazue si Kaori lui offrait une possibilité de décrocher son coeur. Elle était son premier amour et Ryo savait quelle importance cela pouvait revêtir pour lui : c’était la même chose qu’il ressentait. Cela raviva sa frustration.

- Je ne vois pas pourquoi tu quitterais une miss mokkori pour un garçon manqué. Es-tu donc aveugle à ce point ?, l’interrogea amèrement le nettoyeur japonais.
- Non, au contraire. J’ai les yeux bien ouverts, pas comme certains. Et Kaori est une très belle femme même si tu n’es pas prêt à le reconnaître.
- Pour le reconnaître, il faudrait un minimum de vérité et, franchement, ça ne saute pas aux yeux.
- Vraiment ? Tu devrais peut-être consulter un ophtalmo, Ryo… ou alors tout simplement enlever les oeillères que tu portes.
- Tu devrais cesser de te voiler la face, Mick. La seule chose qui t’attire, c’est la résistance qu’elle t’oppose.
- Oh que non. Contrairement à toi, je n’ai pas de mal à reconnaître les choses que j’aime chez les gens et surtout à leur avouer que je les aime et j’aime Ka...
- Vous voulez bien arrêter, s’il vous plaît. Je n’aime pas que vous parliez ainsi de moi., les interrompit la jeune femme, rouge de confusion.

Elle n’aurait osé l’avouer mais elle était blessée par les paroles de Ryo. Elle l’aimait à un tel point qu’elle aurait apprécié avoir un semblant d’intérêt à ses yeux mais, depuis le mariage de Miki et Umi et sa déclaration, il avait fait marche arrière une nouvelle fois. Leurs relations s’étaient donc refroidies.

- Je vais aller au tableau voir si nous avons des messages., informa-t-elle son partenaire.
- Très bien.

Elle attendit quelques secondes pour voir s’il lui proposerait de l’accompagner puis poussa un long soupir avant de sortir du Cat’s. Elle sentit les gouttes de pluie commencer à tomber et remonta le col de son imper. Elle hâta le pas et se dirigea vers la gare, le coeur lourd. Malgré la situation, elle ne pouvait s’empêcher d’aimer son partenaire au-delà de toute raison. Quelle jeune femme saine d’esprit pouvait accepter d’être aussi mal traitée pendant si longtemps par un homme et l’aimait plus que la raison n’aurait dû le permettre ? Elle soupira et accéléra, la pluie redoublant.

Dans le café, Mick vint s’asseoir près de Ryo, consterné. Ils restèrent ainsi un long moment silencieux, le seul bruit venant du frottement du torchon sur l’assiette qu’Umibozu essuyait. Finalement, l’américain se tourna vers son ami.

- Pourquoi Ryo ? Pourquoi es-tu si désagréable avec elle ?, lui demanda-t-il.
- Je ne vois pas de quoi tu parles., répondit le nettoyeur.
- Tu avais avancé avec Kaori, tu lui avais avoué tes sentiments, maladroitement mais c’était sorti. Pourquoi tu reviens en arrière ? Tu ne penses pas avoir attendu assez longtemps ?
- Si Kaori t’intéresse tant que ça, peut-être n’aurais-tu pas dû baisser les bras si rapidement…
- Arrête de dire des conneries, Ryo. Elle t’aime et toi aussi. Je ne sais pas ce qui t’empêche encore d’agir pour la rendre heureuse…
- Je n’en ai peut-être pas envie tout simplement. Regarde-la et regarde les autres femmes, Miki, Kazue ou même Saeko. Pourquoi je m’intéresserais à la camelote quand je peux profiter de véritables bijoux ?, déclara très sérieusement Ryo.

Il ne fut pas surpris lorsque le poing de Mick entra en contact avec sa mâchoire. Il ne l’avait pas volé. C’était même ce qu’il cherchait : avoir la correction qu’il méritait pour tout le mal qu’il lui faisait. Il savait qu’il avait agi comme un salaud en se rétractant une nouvelle fois, en mettant à nouveau un mouchoir sur les évènements et, là, il ne pouvait se cacher derrière une amnésie. Ils en étaient tous les deux conscients et en souffraient autant l’un que l’autre.

Ryo se retrouva donc par terre et se releva, se frottant la mâchoire, mais ne chercha même pas à riposter, ce qui calma Mick qui lui adressa un regard perçant.

- Alors c’est ça que tu cherches ? Que l’on te punisse de tes péchés. Tu ne supportes pas ce que tu fais mais tu n’es pas non plus capable d’agir autrement. Comment peux-tu dire que tu l’aimes, Ryo, et la faire souffrir autant ?
- Je ne lui ai jamais dit que je l’aimais., répondit-il, les dents serrés.
- Peut-être pas en ces termes mais c’était ce que ça signifiait., intervint Umi.
- Ne dis pas que je n’en sais rien. J’étais là, Ryo, et j’étais aussi là quand tu l’as prise dans tes bras. Les sentiments que tu as ressentis à ce moment-là, je les ai lus dans tes yeux et tu n’avais jamais été aussi serein., ajouta-t-il.
- Peut-être ou pas… Mais tout est rentré dans l’ordre ensuite et j’ai recouvré mes esprits. J’ai trop de choses à faire pour m’encombrer d’elle., décréta-t-il, coupant court à la conversation d’un geste de la main avant de sortir.
- Quel idiot !, maugréa Mick.

Umi ne répondit pas mais était bien d’accord avec lui.

Après être passée à la gare, Kaori rentra à l’appartement. Elle se lança dans une grande campagne de ménage pour oublier toute cette journée le temps d’une heure ou deux. Elle aurait de toute façon tout le loisir d’y repenser le soir même après s’être couchée, attendant une nouvelle fois le retour de Ryo qui serait de nouveau sorti faire le tour des cabarets du Kabuki. Elle ne voulait pas penser à la possibilité qu’il passait quelques heures dans les bras d’une autre femme alors qu’elle aurait tout donné pour lui montrer à quel point elle l’aimait. Non, elle ne pouvait pas y penser : cela faisait trop mal. Elle frappa dans les coussins pour les retaper, ça la défoulait en même temps.

Elle passa une bonne partie de l’après-midi dans l’appartement, ne voyant pas le temps passer. Lorsqu’elle releva la tête, il était dix-sept heures et elle se pressa. Elle devait encore aller faire les courses. Elle attrapa son sac, enfila ses chaussures puis sortit en dévalant les escaliers. Arrivée dans la rue, elle tomba dans les bras de Mick en tournant au coin de la rue.

- Je savais bien qu’un jour, tu te jetterais à mon cou., plaisanta-t-il.

Elle rougit puis se dégagea doucement de ses bras.

- Ne me manque que le goût de tes lèvres., murmura-t-il d’une voix séductrice, approchant son visage du sien.

Kaori avait dû mal à sortir de l’emprise de son regard d’un bleu profond et ne bougea qu’au moment où ses traits se figèrent dans un masque pervers. Elle sentit ses mains se promener sur son fessier et s’écarta d’un bond avant de l’assommer et de s’en aller au pas de charge. Elle fut vite rattrapée par l’américain.

- Je suis désolé, ma belle. Comment résister à ton charme et ta beauté ? Tu sais bien que je te vénère, ma divine.

Elle s’arrêta, gênée. Mick l’imita et l’observa très sérieusement.

- Je n’en demande pas tant…, soupira-t-elle.
- Je sais.

Elle releva les yeux et le regarda un instant. Ce n’était pas le simulacre d’amoureux qui lui faisait face mais l’ami.

- Est-ce que j’en demande trop ?, murmura-t-elle.
- Non. Tu es tombée sur un dur à cuire. Il a du mal à se laisser faire mais tu l’as atteint, Kaori. Il résiste, c’est tout.
- Je ne veux rien de particulier, Mick. Je ne veux pas les fleurs, les bijoux ou les violons. Je veux juste un minimum de considération, de tendresse.
- C’est Ryo. Il saurait peut-être mieux faire les fleurs, bijoux et violons que la tendresse. Garde espoir, Kaori.
- Oui… Bon, il faut que je me dépêche sinon je ne serais pas rentrée pour faire le repas dans les temps., remarqua-t-elle, consultant sa montre.
- Tu es trop bonne avec lui, ma douce. Je peux faire un bout de route avec toi ? Je vais en ville.
- Avec plaisir., répondit-elle en lui décochant un ravissant sourire.

Il lui tendit son bras et elle passa le sien autour avec plaisir. Ils marchèrent ainsi une dizaine de minutes avant de se séparer devant le magasin, Mick embrassant la jeune femme sur la joue. Il la regarda entrer dans le magasin, ses sentiments profonds transparaissant momentanément avant qu’il ne se reprit et se rendit à son rendez-vous.

L’ignorant tous deux, ils avaient été vus par Ryo qui se cacha en les voyant arriver dans sa direction. Il les observa interagir, jaloux. Mick avait plus de libertés avec elle qu’il ne s’en autorisait et pourtant l’américain était en couple. Kazue était une jeune femme adorable, faite pour son ami et Mick l’aimait sincèrement même si ses sentiments pour Kaori refaisaient surface par moments.

Il tourna soudain la tête sentant une forte aura dans les parages. Il ne sentait pas de tension négative mais il resta sur ses gardes jusqu’à ce que Kaori fut dans le magasin et que l’aura s’éloigna en même temps que Mick. Il devrait lui en toucher deux mots.

Prudent, il attendit que sa partenaire sortit du magasin et la suivit sur le chemin du retour. Il ne rentra cependant pas avec elle et attendit une bonne demie heure avant de la rejoindre. Il monta alors les escaliers, les mains dans les poches, et claqua la porte sans ménagement.

- Kaori, quand est-ce qu’on bouffe ?, cria-t-il.
- Ce sera près dans cinq minutes. Tu peux mettre la table, s’il te plaît ?, lui demanda-t-elle, passant la tête par la porte de la cuisine.
- Puis quoi encore ? Tu voudrais pas que j’aille faire la lessive non plus ?, répondit-il, jetant négligemment sa veste sur une patère qu’il rata mais ne la ramassa pas pour autant et jetant ses chaussures n’importe où.

Il attendit la correction qui ne vint pas et vit juste arriver Kaori qui mit le couvert, le visage fermé. Deux minutes après, elle ramena le plat à table et il la rejoignit. Il grogna en voyant le bouillon dans lequel était plongé des nouilles et des légumes frais.

- Tu n’as rien trouvé de plus consistant ?, râla-t-il.
- Non, mais rien ne t’oblige à manger., répondit-elle d’une voix éteinte.
- Il faut bien que je nourrisse ce corps d’athlète., fit-il avec aplomb.
- Bon appétit alors., dit-elle simplement.

Ryo ne répondit pas. Il mangea avec empressement, cachant le fait qu’il se régalait derrière des manières de rustre. Quand il eut fini, il reposa ses baguettes et s’étira en prenant une grande inspiration.

- Ca marche toujours de ne pas respirer en mangeant : on ne sent pas le goût., dit-il.

Kaori ramassa les couverts et partit en cuisine. Elle posa le tout brusquement sur le plan de travail avant de s’y appuyer pour reprendre le dessus et ne pas soit repartir et l’étriper ou éclater en sanglots tant elle n’en pouvait plus.

Ryo jugea de l’humeur de sa partenaire au son qu’elle fit avec les bols. Il faisait fort en la poussant à bout. C’était plus facile de la tenir éloignée quand elle était en colère que lorsqu’elle souriait timidement et lui lançait des regards trahissant son attente. Il savait qu’il sortirait encore ce soir, qu’il retournerait se saouler dans les bars pour oublier qu’il lui faisait vivre un enfer, qu’il mourrait d’envie de la prendre dans ses bras et de l’embrasser à en perdre la tête… Pris d’un accès de colère contre lui-même, il se leva et se dirigea vers la porte.

- Je sors. Ne m’attends pas !., informa-t-il Kaori, claquant la porte juste après.

Il ne voulait pas attendre sa réponse. Il ne voulait pas entendre sa voix peinée. Il se dit en arrivant dehors qu’il devait voir Mick pour lui parler de la présence qu’il avait ressentie. Il monta à l’appartement de son ami et frappa. Kazue ouvrit la porte et se tint prête à parer une attaque de son voisin.

- Bonsoir, Kazue. Mick est là ?
- Non, il n’est pas encore rentré de son rendez-vous.
- Dis-lui de m’appeler demain sauf si tu le laisses sortir ce soir…, la taquina-t-il.
- Je lui passerai le message. Mick est assez grand pour savoir ce qu’il a à faire. S’il veut sortir, il le fera que je l’en empêche ou non., répondit-elle sèchement.
- Tu veux que je te tienne compagnie ?, lui demanda-t-il d’une voix sensuelle.

Kazue lui lança un regard noir.

- Ce n’est pas à moi que tu devrais tenir compagnie, Ryo. Mais, si tu veux rester, il me reste bien une ou deux seringues que je me ferai un plaisir d’utiliser sur toi.

Le nettoyeur se sentit blêmir et recula lentement sans la quitter du regard jusqu’à l’ascenseur. Il ne respira qu’une fois à l’intérieur. Partant d’un rire profond, il sortit finalement de l’immeuble, le sourire aux lèvres, et se dirigea vers Kabuki Cho, salivant d’avance de la compagnie appétissante des bunnies aux corps plantureux. Il rentra à pas d’heure ce soir-là, complètement ivre, et s’écroula habillé dans son lit.

Quand Kaori se réveilla le lendemain matin, elle se dirigea vers la chambre du nettoyeur et le vit profondément endormi, ronflant de manière assourdissante. Désabusée, elle sortit de l’appartement et se dirigea vers la gare, profitant de l’air frais pour chasser ses idées sombres. Elle regarda les gens filer dans la rue, indifférents les uns des autres. Cette ville grouillait, c’était une véritable fourmilière, et pourtant elle s’y sentait seule.

Il n’y avait encore une fois pas de message au tableau et elle soupira, agacée. Elle avait besoin de travailler, moins pour leurs finances que pour se changer les idées, mais le travail se faisait rare. Elle reprit son chemin et s’arrêta au Cat’s où elle papota une petite heure avec Miki avant de rentrer à l’appartement. Ryo n’était toujours pas levé et elle décida de préparer le repas avant de le réveiller. Cela lui ferait après tout encore quelques minutes de répit, quelques minutes sans reproches ni dénigrements.

Elle s’activa donc à émincer les légumes et cuisiner un bon repas et, une fois le tout en train de mijoter, elle se décida à monter réveiller son partenaire. Elle entra dans sa chambre et alla tirer les rideaux. Elle ouvrit une fenêtre pour laisser entrer l’air frais et remplacer l’air saturé de relents d’alcool et de tabac et obtint un grognement alors qu’il se retournait pour échapper à la lumière.

- Allez debout, Ryo. Il est bientôt midi., l’encouragea-t-elle, pleine de bonne volonté.
- Laisse-moi dormir., grogna-t-il.
- Tu as assez dormi. Il est temps de te lever maintenant. Le repas est bientôt prêt.
- Je suis encore fatigué. Mon estomac ne supportera pas ta bouffe infâme.
- Couche-toi moins tard la prochaine fois. Et ton estomac se porterait certainement mieux si tu buvais moins de saké et de whisky !, rétorqua-t-elle, perdant patience.
- Je n’ai pas de leçon à recevoir de ta part., lui dit-il, levant un regard noir sur elle.
- Tu as raison. De toute façon, tu ne veux rien qui vienne de moi. Maintenant, lève-toi !
- Mégère !

Pour toute réponse, il reçut une massue sur la tête lancée en arrière par la jeune femme qui sortit de la chambre, essuyant une larme rageusement. Il grogna puis soupira et laissa retomber la tête sur le matelas, frottant ses yeux pour chasser la tension. Ce n’était pas les réveils qu’il voulait avec elle…

La journée, tout du moins ce qu’il en restait, se déroula dans la même atmosphère lourde et pesante. Le temps ayant viré à la pluie, Ryo s’était affalé dans le canapé et lisait ses revues de prédilection pendant que Kaori s’occupait comme elle le pouvait, tentant d’oublier la présence masculine. Le peu de conversations qu’ils avaient tournaient au vinaigre et, au bout de quelques heures, ils préférèrent se murer dans un silence chargé d’électricité.

Ce fut donc avec soulagement qu’ils entendirent frapper à la porte, le soir venu. Kaori se leva et alla ouvrir, laissant apparaître Kazue. Ryo se projeta alors dans les airs, les yeux en coeur, et fut intercepté par la massue de Kaori dont les yeux lançaient des éclairs. Cependant, ce fait fut vite relégué au deuxième plan lorsqu’ils virent le regard perdu de leur amie. Kaori la prit par le coude et la fit avancer, inquiète de sa pâleur. Les cernes sous ses yeux trahissaient son manque évident de sommeil. Elle la força à s’asseoir dans le canapé, craignant qu’elle ne s’effondra.

- Kazue, que se passe-t-il ?, l’interrogea la nettoyeuse.

Ryo se tenait debout devant elles, le regard sérieux. Elle releva les yeux vers lui puis se tourna vers Kaori.

- C’est Mick. Il n’est pas rentré depuis hier soir…

Laissez moi vos commentaires : Ici
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Dim 7 Mar - 20:27
Chapitre 2

Abasourdis, les City Hunter se regardèrent un instant avant que la nettoyeuse n’enlaça son amie pour la réconforter. Ryo alla se poster devant la fenêtre, pensif. Mick avait disparu… Que s’était-il passé ?

- Ca ne sert à rien de s’affoler pour le moment., finit-il par dire.
- Tant qu’on n’a pas plus d’éléments, on ne doit pas tirer des plans sur la comète.
- Mick n’a jamais été absent si longtemps sans prévenir., intervint Kazue qui maîtrisait tant bien que mal son angoisse.
- Je sais. Mais peux-tu me jurer en étant absolument sûre qu’il n’aurait pas pu fuir la maison une journée ?, lui demanda Ryo.
- Ryo !, s’offusqua Kaori, lui lançant un regard outré.
- Non, je ne peux pas., murmura Kazue, lançant un regard de coin à son amie qui ne s’en aperçut pas.

Elle n’était pas dupe et avait bien remarqué la réserve grandissante de Mick à son égard et les regards de moins en moins masqués qu’il lançait à Kaori. Elle savait son couple à un tournant mais, malgré ses défauts, elle ne pouvait pas croire qu’il fuirait plutôt que de rompre correctement avec elle. Mick n’était pas un lâche et était responsable malgré les apparences.

Ryo vit le coup d’oeil de la jeune femme mais ne le releva pas. Cela confirmait juste ce qu’il soupçonnait depuis un moment, que Mick se posait des questions et serait d’autant plus enclin à se rapprocher de Kaori… Avait-il voulu prendre du recul pour réfléchir à la situation ? Il en doutait car, malgré leurs désaccords, il l’aurait prévenu de son absence… Enfin, il l’espérait et, s’il ne s’était pas tourné vers lui, peut-être avait-il averti Umibozu…

- Kazue, je préférerai que tu viennes t’installer ici le temps qu’on comprenne de quoi il retourne. Mick est moins exposé que nous mais il reste une cible et donc toi également., l’informa le nettoyeur.

La jeune femme avait été sa cliente mais elle était maintenant une amie proche et il ne la laisserait pas seule et sans défense.

- Non, ça va aller, Ryo.
- Permets-moi d’insister. Tu es la compagne du nettoyeur numéro un des Etats-Unis.
- Ex-nettoyeur, Ryo., le corrigea amèrement la jeune femme.
- Mick n’a toujours pas digéré cela d’ailleurs.
- Peut-être mais sa tête apporterait encore du prestige à quiconque déciderait de se faire un nom dans le milieu., lui indiqua-t-il.
- Ryo a raison, Kazue. Tu ne peux pas rester seule. On va aller te chercher des affaires et lui laisser un mot. Comme cela, quand il rentrera, il saura où te trouver., l’encouragea Kaori, se levant et lui tendant la main.

La doctoresse mit sa main dans la sienne et la suivit, soulagée de ne pas se retrouver seule. Arrivées à la porte, Kaori la laissa passer et la suivit, se retournant pour croiser le regard de son partenaire. Elle ne lui cacha pas son anxiété mais il lut toute la confiance qu’elle plaçait en lui pour retrouver leur ami. Juste avant de refermer, elle masqua ses sentiments réels sous une lueur calme et posée. Il se sentit fier d’elle même s’il savait déjà qu’il pouvait compter sur elle pour se montrer forte.

Profitant de l’absence de Kazue, Ryo décrocha le téléphone et appela le Cat’s.

- Le Cat’s Eye, bonsoir !, claironna la voix joyeuse de Miki.
- Miki, passe-moi Umi, s’il te plaît., lui demanda-t-il, d’un ton ferme.
- Tout de suite, Ryo.

Le téléphone changea de main rapidement avec deux trois mots échangés entre les époux.

- Je t’écoute.
- Umi, Mick a disparu depuis hier soir. Tu as entendu quelque chose ?
- Indirectement. Jack Nichols est arrivé au Japon depuis quelques jours., répondit Umi.
- Nichols ? L’ancien partenaire de Mick ? Ca peut difficilement être une coïncidence…, déclara Ryo, le regard sérieux.
- Je pense aussi. Tu connais sa réputation, Ryo.
- Oui. Kazue vient s’installer à la maison.
- C’est une bonne chose. Si j’ai plus de renseignements, je te recontacte.
- Merci, Umi.

Il raccrocha et vit par la fenêtre les deux jeunes femmes revenir. Quelques minutes plus tard, elles pénétraient dans l’appartement.

- Kazue veut dormir dans ma chambre., l’informa Kaori.
- Ben pourquoi ?, fit Ryo, déçu.

Ca lui laissait beaucoup moins de possibilités de lui faire une visite nocturne.

- Pour cette raison justement, pervers., répondit Kaori, consternée.
- Quelle raison ?, rétorqua-t-il, innocemment.
- Ne fais pas l’idiot. Je sais à quoi tu penses, Ryo. Tu es tellement transparent…
- Ce n’est pas ce qu’on dit de moi, généralement…
- C’est vrai sauf sur ce sujet-là et tu oublies une chose…, dit-elle avec un petit sourire en coin.
- Ah oui laquelle ?
- Kazue a déjà eu affaire à toi et ton comportement dépravé.
- Et si ça ne te dissuade pas, Ryo, sache que j’ai emmené mes seringues avec moi., l’informa leur amie.

Il recula prudemment de quelques pas, agitant les mains devant lui en panique.

- C’est bon, j’ai compris. Pas de visite nocturne. Je vais sagement passer mes nuits à dormir.
- La belle affaire. Enfin un peu de repos., souffla Kaori.

Les deux amies partirent dans la chambre de la nettoyeuse où Kaori prépara le lit et Kazue rangea ses affaires.

- Tu verras, Kazue, on le retrouvera. Mick reviendra et tout rentrera dans l’ordre.
- Je l’espère, Kaori, mais je n’en suis pas si sûre., soupira-t-elle.

La nettoyeuse se tourna vers son amie et la regarda un instant. Elle nota la tristesse dans ses yeux et s’approcha d’elle.

- Que se passe-t-il ? Il y a un problème ? On peut en parler si tu veux.
- C’est juste que… Mick est distant depuis quelques temps. Je le sens s’éloigner et je ne sais pas quoi faire pour ne pas le perdre.
- Il t’aime tellement. J’ai du mal à croire qu’il puisse te quitter., tenta de la rassurer Kaori, posant une main sur la sienne.
- Il m’aime, oui. Mais je ne suis pas sûre d’être la seule…
- Tu crois qu’il a une maîtresse ? Il court beaucoup les filles dans la rue mais ce n’est pas sérieux. Il n’y a qu’à voir le regard qu’il pose sur toi quand vous êtes ensemble.
- Non, Mick ne me trompe pas… Enfin pas physiquement en tout cas.
- J’avoue que je ne te suis pas.

Kazue baissa les yeux un moment puis se tourna vers son amie, décidée à affronter la réalité même si c’était dur.

- Je pense qu’il est encore amoureux de toi et que les sentiments qu’il a pour toi sont en train de l’emporter sur ceux qu’il me porte., lui avoua-t-elle, les larmes aux yeux.

Kaori la regarda, mal à l’aise. Elle pensait que tout cela était derrière eux mais elle ne pouvait nier que, dernièrement, elle ressentait cet étrange sentiment vis-à-vis de son ami, celui qu’il jouait sur deux plans avec elle, se réfugiant derrière celui de l’amitié pour masquer autre chose.

- Je ne ferais jamais rien qui puisse te blesser. Mick est un ami pour moi et ça s’arrête là. Je te laisse t’installer tranquillement. Je t’appellerai quand le repas sera prêt si tu veux rester un peu ici seule., répondit Kaori avant de sortir.

Encore émue par ce que son amie lui avait révélé, elle monta sur le toit pour remettre de l’ordre dans ses idées. Elle contempla un long moment la nuit tokyoïte et, progressivement, son agitation fit place au calme.

- Où es-tu, Mick ? Reviens vite que l’on mette tout cela au clair., soupira-t-elle.

Elle sentit derrière elle la présence de Ryo. Silencieusement, il vint s’accouder au garde-corps près d’elle.

- Comment va Kazue ?, demanda-t-il, après un moment.
- Pas très bien. Elle se pose beaucoup de questions parce que ça n’allait déjà pas très fort entre eux avant sa disparition.
- Elle en avait marre de lui ?, tenta-t-il de plaisanter pour alléger l’ambiance.
- Non. C’est lui qui s’éloignait d’elle… apparemment à cause de moi., murmura Kaori, se sentant coupable.

Ryo serra les dents. Il ne voulait pas imaginer que Mick put de nouveau s’intéresser à Kaori, pas en ayant Kazue. Il s’en voulut de ne pas avoir imaginé son retour dans la course, certainement motivé par son propre comportement envers sa partenaire. Il avait certainement lui-même rouvert la porte à leur rivalité pour le coeur de Kaori.

- Je n’ai pourtant rien fait de particulier. Tu crois que je l’ai attiré ?, lui demanda-t-elle, levant vers lui un regard inquiet.

Elle avait besoin d’être rassurée. Il se sentit tressaillir sous son regard et dut lutter pour faire taire l’émoi qu’il provoquait en lui. Ca l’énerva de ne pas réussir à se maîtriser comme il le voulait en sa présence.

- Tu es trop naïve, Kaori. Tout ce qui intéresse Mick, c’est le sexe. Et à l’en croire, tu as encore des choses à apprendre de ce côté-là…, répondit-il sèchement.

Kaori réprima les larmes qu’elle sentit monter. Le dégoût qu’elle avait entendu dans sa voix était comme une gifle reçue en plein visage. Oui, elle était encore novice mais était-ce vraiment une tare de ne pas vouloir se donner à n’importe qui ? Elle prit sur elle pour ne pas laisser paraître sa douleur et changea de sujet.

- Je suppose que tu as appelé Umi. Que t’a-t-il appris ?, demanda-t-elle d’une voix plus ou moins maîtrisée.

Il lui fut gré de ce changement. Ils revenaient sur un terrain qu’il contrôlait mieux et ce serait préférable pour eux deux.

- L’ancien mentor de Mick est au Japon, Jack Nichols.
- Ce n’est certainement pas une coïncidence., dit-elle.

Il sourit à sa déduction. Elle avait gagné en jugement et elle aurait pu le lui balancer dans les dents, comme quoi elle n’était pas si naïve que cela, si elle avait été rancunière. Mais la rancune n’était pas un de ses défauts…

- Je ne pense pas non plus.
- Tu l’as connu ?
- Non. J’ai rencontré Mick peu après. Leurs chemins s’étaient séparés suite à un désaccord éthique., lui expliqua-t-il.
- Tu sais de quoi il retournait ?, lui demanda-t-elle, cherchant à comprendre.
- Nichols s’est mis au service d’un cartel qui voulait s’implanter aux Etats-Unis et qui employait des méthodes très sauvages pour réussir. Mick refusait de tuer des familles entières.
- Tu penses que ce Nichols est venu ici pour tuer Mick ?, s’inquiéta Kaori.

Elle sentit son coeur sombrer à cette éventualité. Elle ne voulait pas perdre quelqu’un qui lui était cher une nouvelle fois.

- C’est une possibilité.
- Tu en vois une autre ?, l’interrogea-t-elle, voyant son regard pensif errer sur la ville.
- Que le cartel ait décidé d’étendre ses activités au Japon.
- Que viendrait faire Mick dans l’histoire ?
- Peut-être rien ou peut-être que Nichols veut se débarrasser de lui ou alors l’embaucher. Je n’ai pas encore assez d’éléments pour savoir.
- Mais Mick ne voudra jamais adhérer et, s’il refuse la proposition…

Kaori fut incapable de finir sa phrase. Elle était depuis trop longtemps plongée dans ce milieu pour se voiler la face. Si Mick refusait de participer après avoir été mis au courant, il serait éliminé comme tout témoin gênant.

- Mick est un professionnel, Kaori. Il saura trouver le moyen de se sortir de cette situation et nous allons faire de notre mieux pour l’y aider., essaya-t-il de la rassurer.
- Essaie de ne pas alerter Kazue. Elle n’a pas besoin de cela en plus de son inquiétude., lui demanda-t-il.

C’était tout lui : il pouvait jouer les pervers insouciants à un moment et se montrer hyperprotecteur à un autre.

- Je pense qu’on devrait être honnête avec elle mais, pour le moment, je suivrai ta position., concéda-t-elle.
- Je vais aller préparer à manger.
- Je fume une cigarette et j’arrive.

Kaori acquiesça et s’éloigna de quelques pas avant de s’arrêter. Sentant la lassitude la gagner, incapable de lui faire face, elle tourna seulement la tête vers lui.

- Ryo, j’aimerais tellement qu’on arrive à tout le temps se parler comme on vient de le faire, sans cris, sans injures, sans faux-semblants. Tout serait tellement plus facile…

Elle ne lui laissa pas le temps de répondre et partit, regagnant l’abri de la maison. Le nettoyeur se tourna vers la ville et médita ses dernières paroles. Malgré le sérieux de la discussion, il était vrai que leur échange avait été harmonieux et s’était fait sans masque. Ils avaient parlé d’égal à égale comme les partenaires qu’ils savaient être professionnellement. Il savait qu’il ne tenait en grande partie qu’à lui que le même schéma s’appliqua dans leurs relations personnelles mais il n’arrivait à sauter le pas que lors d’évènements dramatiques. Il se sentait pitoyable…

Après avoir fumé sa cigarette et remis une chape de plomb sur ses pensées personnelles, Ryo descendit. Entendant des sanglots étouffés venir de la chambre de Kaori, il s’approcha silencieusement. Kazue pleurait. Mal à l’aise, il faillit s’esquiver mais, finalement, ne put se résoudre à la laisser seule. Il entra et alla s’asseoir à ses côtés, passant un bras autour de ses épaules.

- Calme-toi, on le retrouvera., lui chuchota-t-il.

Elle s’accrocha à son tee-shirt et ses sanglots redoublèrent. Il ne la lâcha pas pour autant et la laissa évacuer sa peine.

- Kazue, je te promets qu’on te le ramènera., lui dit-il quand elle se calma enfin.
- Je sais. J’ai confiance en toi, Ryo., répondit-elle, la voix étranglée.
- J’ai peur. J’ai tellement peur de le perdre quand il reviendra., lui avoua-t-elle.
- Pourquoi voudrais-tu le perdre ? Je lui botterai les fesses s’il fait l’idiot et, si vraiment il te laisse, tu m’auras moi et mon corps d’Apollon., plaisanta-t-il.

Elle s’écarta de lui et posa un regard sérieux sur lui. Elle mordit sa lèvre, fuyant son regard, puis revint sur lui.

- Ca m’arrangerait que tu donnes ton corps d’Apollon et ton coeur à Kaori, que tu acceptes enfin les sentiments qui vous unissent. C’est la seule chose qui remettrait Mick sur les rails, qu’elle ne soit plus disponible., lui expliqua-t-elle.

Ryo la lâcha et se leva, se postant face à la fenêtre, tendu. Il lui tournait le dos mais elle devinait facilement son visage fermé, sa mâchoire crispée. Elle sentait la force animale qui émanait de lui, quelque chose d’à la fois exaltant et effrayant. Elle ne pouvait nier la séduction qui venait de lui et elle aurait pu tomber sous son charme mais elle n’avait pas la patience et l’abnégation de Kaori pour déverrouiller tous les cadenas qui fermaient les chaînes qui entouraient le coeur de Ryo.

- Tu ne vas pas t’y mettre. J’ai déjà Miki sur le dos., grogna-t-il.
- A raison, Ryo. As-tu seulement idée des conséquences de tes choix ? Parce que ça ne se limite pas à faire du mal à Kaori. Nous sommes tous impactés. Nous essayons de ne pas nous immiscer dans votre relation mais ça nous fait mal de vous voir souffrir chacun de votre côté alors que vous pourriez être heureux à deux. Pour ma part, j’ai mal pour elle et j’ai mal pour moi parce que Mick pouvait passer des soirées à s’emporter contre toi et plaindre Kaori. Ces soirées, on ne les passait pas à parler de nous, de notre couple, et, quand il a enfin cessé d’en parler, il s’est muré dans un silence contemplatif qui ne m’a pas inquiétée au départ mais j’aurais dû parce que c’est à ce moment-là qu’il a commencé à s’éloigner de moi.

Elle attendit une réponse de sa part qui ne vint pas mais elle comprit en voyant son immobilité. Ses paroles l’avaient atteint et il devait y réfléchir. Ils restèrent un moment dans le silence, chacun perdu dans ses pensées. Ce fut Kaori qui le brisa en arrivant.

- Tout va bien ?, demanda-t-elle en voyant leurs postures respectives.
- Le dîner est prêt., les informa-t-elle, n’obtenant aucune réponse.

Toujours sans réponse, elle redescendit, perplexe. Kazue se leva et se dirigea vers la porte.

- Je suis désolé., dit soudain Ryo, d’une voix tendue.
- Pas autant que moi, Ryo. Le jour où tu accepteras que tu es un homme bien, les choses iront certainement mieux., lui dit-elle.
- Je ne suis pas un homme bien, Kazue.
- Tu te trompes, Ryo. Tu devrais te fier à ta partenaire sur ce point-là : elle sait très bien juger les personnes même si elle est trop prompte à donner sa confiance à ton goût.
- Kaori mérite mieux qu’un tueur.
- Tu as raison, elle mérite un homme qui l’aime et la respecte et, quand tu ne cherches pas à lutter contre toi-même, tu sais très bien le faire. C’est là où Mick a été meilleur que toi : il a abandonné le combat contre lui-même bien avant toi.
- C’est lui qui a abandonné le combat pour Kaori avant même de s’être réellement battu, Kazue. Sans cela, tu ne serais pas là et c’est peut-être elle qui pleurerait sa disparition., rétorqua-t-il, l’attaquant.

Cette conversation le mettait mal à l’aise. Il voulait en finir.

- Bien tenté, Ryo. Tu oublies une chose : c’est toi qu’elle aime, pas Mick. C’est pour cela qu’il n’a pas insisté. Combien de temps vas-tu encore continuer ainsi ? Réfléchis bien : de ta réponse, dépend le bonheur de quatre personnes.

Elle le planta là et descendit rejoindre son amie, sa rivale dans le coeur de celui qu’elle aimait. Malgré tout, elle n’arrivait pas à être en colère contre elle. Elle se sentait solidaire en tant que femme éconduite par l’homme aimé.

- Ca va, Kazue ?, demanda Kaori.
- Mick me manque. Je suis inquiète.
- Je comprends. On va le retrouver. Tu n’es pas seule pour affronter cette épreuve.
- Je sais. Tu es adorable, Kaori. Ca me fait du bien de vous avoir près de moi.

Les deux jeunes femmes s’enlacèrent brièvement avant de s’asseoir à table où Ryo les rejoignit.

Il avait remis son masque d’impassibilité, cachant les sentiments qu’avait fait naître sa conversation avec Kazue. Contrairement à Miki qui ne prenait que la défense de Kaori, la doctoresse lui avait fait appréhender les ramifications plus larges de ses décisions, ramifications auxquelles il n’avait jamais songé. Pour lui, sa position n’affectait que Kaori et lui, ce qui était déjà non négligeable. Il n’avait jamais envisagé que le couple de Mick et Kazue put également en pâtir, au point même de les faire rompre.

Le repas se passa dans le plus grand silence. L’appétit n’était pas vraiment au rendez-vous mais tous se forcèrent à manger. Les deux jeunes femmes débarrassèrent ensuite la table et firent la vaisselle avant de tenter de se distraire sans succès devant la télévision. Elles finirent par éteindre et allèrent se préparer pour se coucher.

- Je veux que tu portes cet émetteur pour sortir, Kazue. Tu n’iras pas seule à la clinique et on viendra t’y chercher., l’informa Ryo, la croisant dans le couloir.
- Bref, je n’ai plus un moment de solitude.
- Je suis navré : c’est pour ta sécurité., s’excusa-t-il.
- Je comprends. Je ne ferai pas de zèle., le rassura-t-elle.

Il acquiesça et la laissa. Passant devant la porte entrouverte de sa chambre, il croisa le regard de Kaori, un regard qu’il aurait aimé plus enjoué.

- Bonne nuit, Kaori.
- Bonne nuit, Ryo.

Il sut que, cette nuit-là, comme tant d’autres, il vivrait avec elle ce qu’il ne pouvait se permettre de vivre le jour. C’était sa consolation, ce qui lui permettait de tenir bon.

A leur insu, une ombre les observait d’une allée face à l’immeuble et attendit que toutes les lumières furent éteintes pour agir…
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Lun 8 Mar - 21:05
Chapitre 3

Le lendemain matin, les trois amis se retrouvèrent autour d’un petit-déjeuner. Kazue mangea du bout des lèvres et tout en elle reflétait sa tristesse. Kaori l’observa songeuse et la rejoignit lorsqu’elle remonta dans la chambre pour prendre un gilet.

- Kazue, je… j’ai une question à te poser.

Elle ne dit mot mais fit face à son amie, attendant.

- Tu es enceinte ?, l’interrogea la nettoyeuse.
- Oui. Comment as-tu su ?, demanda-t-elle en retour.
- Tu as été malade ce matin au réveil et j’ai remarqué que, depuis quelques jours, tu évites le café, tu es fatiguée et tu picores. Non pas que tu dévorais avant mais tu sembles manger du bout des lèvres.
- Ryo est au courant ?
- Non, je ne lui en ai pas parlé. Et Mick ?
- Je n’ai pas eu le temps de lui dire. Ca ne fait que deux jours que je suis sûre, avoua-t-elle.
- Combien de semaines ?
- Quatre. C’est tout frais et je n’ai aucune idée de la réaction de Mick. On n’en avait jamais parlé avant.

Kazue s’approcha d’elle, se triturant les mains.

- N’en parle à personne, Kaori. Je voudrais que ce soit moi qui le dise à Mick. Je voudrais qu’il soit le premier au courant… après toi, maintenant que tu as deviné.
- Désolée, je ne voulais pas être indiscrète.
- Ce n’est pas grave. Je sais que je peux compter sur ta discrétion. Il faut que j’y aille. Le Professeur va m’attendre.

Les deux jeunes femmes redescendirent et Ryo emmena Kazue à la clinique. Kaori resta seule à l’appartement et fit un peu de ménage. Kazue était enceinte et Mick était on ne sait où. Qu’allait-il encore arriver ? Jamais deux sans trois, disait-on. De quel côté ça allait arriver ? Miki et Umi, Ryo, le Professeur ? Elle poussa un long soupir et rangea l’aspirateur. Elle enfila sa veste, ses chaussures et sortit. Malgré les circonstances, elle devait aller au tableau. Elle prit sa route habituelle et profita des rayons du soleil qui lui firent un bien fou. Elle se détendit progressivement, oubliant momentanément son inquiétude.

Soudain, elle ressentit un profond malaise. Elle était suivie. Elle ne savait pas dire si elle était juste observée ou si on envisageait de l’enlever mais, après tout, elle s’en fichait. Elle devait les semer ou se mettre à l’abri. Elle accéléra le pas et entra dans la gare. L’air de rien, elle se dirigea vers le tableau, encore une fois vierge de tout message, et sembla le contempler attentivement mais elle cherchait un moyen de semer ses poursuivants. Nonchalamment, elle se dirigea vers les escalators, les emprunta, se faufilant entre les passants qui râlaient. Elle se tourna vers les quais du train, en traversa un jusqu’à l’autre bout et s’engouffra dans un passage, accélérant jusqu’à être à la limite de courir.

Elle les sentait toujours derrière elle. Son coeur battait à cent à l’heure malgré son calme apparent. Elle emprunta un nouvel escalator, se cachant devant un homme de haute stature, puis, ayant évalué ses options, elle tourna dans un passage sur sa droite. Elle marcha quelques mètres et s’engouffra dans une niche qui menait à un débarras de service. Elle s’y cacha, laissant la porte entrouverte. Quelques secondes plus tard, elle vit passer trois hommes en noir et reconnut leurs auras. Après avoir attendu une minute supplémentaire, elle sortit prudemment de son cagibi et prit le chemin en sens inverse.

- Te voilà, ma jolie., fit soudain une voix alors qu’on la prenait par le poignet.

Kaori fit face à l’homme et vit qu’il était seul. Ni une ni deux, elle frappa d’un grand coup de genou dans son entrejambe, le faisant se plier sous la douleur. Il ne la lâcha pas pour autant et elle dut frapper du plat de la main sur son poignet avant de le sentir libéré. Elle en profita pour lui asséner un coup de coude sur la tête et l’assommer. Elle n’attendit pas de savoir si les autres étaient revenus pour s’enfuir en courant. Elle rebroussa chemin et sortit de la gare. Le Cat’s étant plus prêt, elle s’y dirigea au pas de course, se retournant par moments pour voir s’ils étaient à ses trousses.

- Bonjour, Kaori !, fit Miki lorsqu’elle entra.
- Ca va ?, s’inquiéta-t-elle, la voyant jeter un coup d’oeil derrière elle.
- Oui, mieux maintenant. Ryo est déjà passé ?, s’enquit-elle, laissant la tension enfin redescendre.
- Non, je ne l’ai pas encore vu. Comment va Kazue ?
- Elle est inquiète. Cette disparition est si soudaine.
- Oui. C’est vrai.
- Umi n’est pas là ?
- Non, il est parti faire des courses. Il ne devrait pas tarder à revenir.

Miki lui servit une tasse de café et elles restèrent silencieuses, incapables de se lancer dans une conversation qui leur aurait semblé déplacée à ce moment-là. Ryo arriva un moment plus tard.

- Ma Miki chérie ! Viens dans mes bras !, cria-t-il, s’élançant dans les airs en caleçon.
- Tiens, embrasse ma massue, pervers immonde !, cria Kaori, fulminant.
- C’est pas vrai, Ryo ! Même dans des moments comme celui-ci, tu ne peux t’empêcher de faire le guignol !, s’énerva Miki.
- Que veux-tu ? Le monde continue de tourner même si Mick s’est tiré., dit-il, haussant les épaules.
- Quoi ? Tu as eu de nouveaux éléments ?, lui demanda sa partenaire, surprise.
- Non mais c’est une possibilité., lâcha-t-il.
- Tout comme le fait qu’il se soit fait enlever !, rétorqua-t-elle.

Ils s’affrontèrent du regard un moment.

- Sois réaliste, Kaori. C’est un homme pris entre deux femmes. Il est très probable qu’il se soit juste isolé pour réfléchir., déclara Ryo, le regard dur.

Kaori baissa les yeux face à l’évidente possibilité. Elle se sentit coupable sans vraiment comprendre ce qu’elle avait pu faire pour inciter son ami à penser qu’il avait une chance.

- Mick pris entre deux femmes ? C’est quoi cette histoire ?, s’étonna Miki.
- Il nous fait un retour de flammes sur Kaori., lui expliqua le nettoyeur.
- Ca, si tu arrêtais ton jeu du chat et de la souris, ça ne serait certainement pas arrivé !

Ryo envoya un regard noir à son amie qui ne cilla pas d’un pouce. Elle lui tendit une tasse de café et la tension redescendit. Umi ne tarda pas à revenir. Après avoir posé les sacs de course dans la cuisine, il prit place derrière le bar.

- Fini de jouer les bonnes, Tête de poulpe ?, se moqua Ryo.

Umi ne répondit pas mais lui asséna un coup de poing sur la tête.

- Quand tu auras fini de faire l’imbécile, on pourra peut-être parler sérieusement.
- Tu as des informations, Umi ?, lui demanda Kaori.
- Oui. J’ai vu mes indics juste avant de faire les courses. Mick a été vu discutant avec un homme ressemblant à la description de Nichols il y a deux jours au soir., commença le géant.
- Alors Nichols était le rendez-vous dont il m’a parlé…, constata la nettoyeuse.
- Donc il l’a volontairement rencontré…, laissa échapper Ryo, l’air sombre.
- Oui et il l’a suivi puisque mon indic les a vus partir ensemble et il n’était pas contraint…, compléta Umi.

Tous restèrent silencieux. Ils ne comprenaient pas pourquoi leur ami avait volontairement disparu sans aucune explication et surtout pour suivre un homme dont il n’approuvait pas les méthodes.

- Il doit y avoir une explication logique. Mick ne peut pas avoir retourné sa veste…, murmura Kaori, perplexe.
- Ne te leurre pas. Mick vendrait sa mère si c’était nécessaire., marmonna Ryo.
- Non ! Pas le Mick d’aujourd’hui ! Celui qui était venu te tuer peut-être, mais pas l’homme que nous connaissons et avons sauvé de la mort !, s’insurgea-t-elle.
- Et cet homme-là aurait lâchement laissé tomber sa compagne ?, lui demanda-t-il d’une voix dure.

Elle baissa le regard devant admettre la vérité.

- Non., souffla-t-elle.
- Alors, admets que nous ne savons pas tout de lui, qu’il nous cachait visiblement des choses ou qu’il n’avait pas fait totalement le deuil de son ancienne vie., lui dit-il sèchement.

La mort dans l’âme, elle acquiesça. C’était tellement dur de se dire qu’elle avait pu se tromper sur son compte…

- Kazue m’a donné les clefs de leur appartement et autorisé à aller fouiller pour voir si on trouverait des indices. On se retrouve à l’appartement., l’informa-t-il, se blindant contre son regard triste.
- Ryo, attends. Je viens avec toi.
- Quoi ? T’as peur que je fouille dans ses sous-vêtements ?, s’agaça-t-il.

De mauvaise foi, il ne voulait pas admettre, même mentalement, qu’elle put avoir raison.

- Je… Non ! J’ai été suivie en allant à la gare. Ils m’ont attrapée mais j’ai réussi à m’enfuir., lui apprit-elle.

Les trois autres la regardèrent, stupéfaits. Ryo était soulagé qu’elle n’ait pas été enlevée. Il se promit de revérifier tous les émetteurs qu’il avait posés dans ses affaires, voire même d’en rajouter quelques-uns par précaution.

- Tu te débrouilles de mieux en mieux, dis donc., répondit-il, fier d’elle, lui ébouriffant les cheveux.
- Merci., balbutia-t-elle, rougissante.
- Allez, partenaire. Allons fouiller les petites affaires de nos voisins.
- Ryo, tu me préviens si tu as du nouveau., lui dit Umi.
- Oui. Bonne journée.

Les City Hunter partirent, laissant le couple seul.

- Je n’aime pas tout cela, Nounours., soupira Miki.
- J’ai le sentiment que tout va partir de travers.
- Oui. C’est bizarre., acquiesça Umibozu, tellement songeur qu’il n’avait pas relevé le petit nom.

Dans la mini qui les ramenait chez eux, Ryo conduisait, l’oeil alerte.

- Ils étaient combien pour te suivre ?, demanda-t-il soudain.
- Quatre. Trois en avant et un qui restait un peu en arrière, enfin tout du moins quand il m’a attrapée., précisa-t-elle.
- Intelligent. Tu n’es donc pas tombée sur des amateurs. Je me demande bien de qui il peut s’agir. Tu as vu des signes distinctifs ?
- Non. Ils étaient comme tous ceux qu’on croise, costume et lunettes sombres. Pas d’insignes, ni d’écusson, pas de tatouage visible.
- Comment tu as fait ?
- Je les ai distancés et je me suis cachée dans un recoin comme une trouillarde…, murmura-t-elle, baissant les yeux.

Ils étaient arrivés à l’immeuble. Ryo gara la voiture et en sortit silencieusement. Lorsqu’il fut à sa hauteur, il releva son menton doucement.

- Tu es loin d’être une trouillarde. Seule contre trois, c’était la meilleure chose à faire. Peut-être pas ce que j’aurais fait, mais c’était beaucoup plus raisonnable., lui dit-il avec un petit sourire.

Surprise, elle se sentit rougir et son coeur battre un peu plus fort. Le regard tendre qu’il posa sur elle un instant devint vite impassible, ce qui l’a déçue énormément. Elle aimait ces moments trop rares de complicité amoureuse entre eux. Elle en avait besoin comme de l’air qu’elle respirait. Malgré tout, elle prit une nouvelle fois sur elle et le suivit jusqu’à l’immeuble de Mick et Kazue. Ils pénétrèrent dans l’appartement prudemment, Ryo en tête. Quand il fut sûr qu’il n’y avait personne et surtout aucun danger, il laissa Kaori y entrer à son tour. Elle observa la pièce et remarqua tout de suite une chose.

- La lettre qu’on avait laissée hier a été bougée et il y a un message pour Kazue., dit-elle en dépliant la feuille.
- Mick est passé. La porte n’a pas été forcée et il a pris des affaires., nota-t-il en jetant un œil dans la chambre où les portes de l’armoire étaient ouvertes.

Ryo s’approcha d’elle, se mettant dans son dos, et lut la lettre avec elle.

« Kazue, je suis désolé de te le dire ainsi mais je n’ai plus le coeur de continuer cette comédie que je joue depuis le début de notre relation. Tu n’as été qu’une nouvelle proie pour moi. Eloigne-toi de ce monde, éloigne-toi des quatre qui ne t’apporteront que la mort. Le Janus en moi ne veut plus jouer. Mick. »

Ryo prit la lettre des mains tremblantes de Kaori et la relut attentivement, tentant de rester objectif. Il s’y reprit à plusieurs reprises.

- Comment on va lui annoncer cela ?, murmura Kaori, se souvenant de ce que son amie lui avait confirmé le matin-même.
- On ne lui dit rien., décréta Ryo, sans même demander de qui elle parlait.
- Mais pourquoi ? Elle a le droit de savoir.
- Le message de Mick n’est pas à prendre au pied de la lettre., lui dit-il, s’asseyant dans le divan.

Il tenait la feuille entre ses mains, pensif. Kaori prit place à ses côtés, attendant qu’il lui expliqua. Malgré son air impassible, elle sentait la tension qui l’habitait.

- Janus était un code entre nous. C’est un dieu de la mythologie grecque qui avait deux faces.
- Donc sa lettre ne se signifie pas forcément ce qui est écrit. Mais qu’est-ce qui est réel, qu’est-ce qui est à réinterpréter et qu’est-ce qui est faux ?, dit-elle, réfléchissant en professionnelle, non plus en amie.
- Kazue n’a jamais été une proie pour lui. Ses proies étaient les femmes des hommes qu’il devait éliminer…, constata Ryo.
- Il lui dit de s’éloigner et ça, je pense que c’est réel. Il veut la mettre en sécurité, qu’il ne lui arrive rien., ajouta Kaori.
- Je suis d’accord avec toi mais je ne pense pas que la suite est à prendre telle quelle. Pour moi, cette partie-là, c’est pour nous prévenir que nous sommes tous les quatre visés.
- Je ne comprends pas, Ryo. Il disparaît, nous prévient qu’on est ciblés mais à quoi il joue ?
- Je pense qu’il nous protège comme Umi et moi le ferions.
- Mais pourquoi dire à Kazue qu’il la quitte ?

Ryo replia soigneusement la feuille et la rangea dans la poche de sa veste. Il réfléchissait et il devait avouer que cette partie du message restait un mystère pour lui. Est-ce qu’il voulait vraiment la quitter, profiter de ce moment pour rompre avec une justification suffisante et acceptable pour la jeune femme ? Est-ce que c’était juste un leurre pour les personnes avec qui il était maintenant ?

- Je ne sais pas, Kaori. Je ne sais pas quoi penser de cette partie et c’est pour cela qu’on ne lui dira rien. Si Mick veut vraiment la quitter, il le lui dira en face. Il assumera ses choix. Ca ne sert à rien de la blesser encore plus maintenant., dit-il.

Kaori le dévisagea un instant, se demandant s’il s’était aussi rendu compte de quelque chose concernant Kazue. Il soutint son regard puis se leva.

- Je pense que c’est déjà assez dur pour elle de se demander s’il va rentrer pour la retrouver ou la quitter pour tenter sa chance avec son amie., répondit-il d’un air sombre.
- Mick est mon ami et ça s’arrête là., se sentit-elle obligée de lui dire.
- Et il sait se montrer très amical…, railla-t-il, jaloux, repensant à tous ces gestes que l’américain se permettait et qu’il s’interdisait sauf peut-être à de très rares exceptions.
- Mick est démonstratif. Ca n’a jamais été quelque chose qui lui faisait peur.
- Contrairement à moi, c’est ce que tu veux dire, non ?, l’attaqua-t-il agressivement.

Kaori se leva à son tour et s’éloigna pour retrouver un peu la maîtrise de ses sens qui s’affolaient avec sa proximité.

- Je sais comment tu es, Ryo. Je sais ce que tu sais faire et ne pas faire. Je sais que tu es capable de courser n’importe quelle fille, de la peloter, de chercher tous les moyens possibles pour la mater ou la mettre dans un lit, n’importe quelle fille sauf moi. J’ai une idée de ce qui te retient me concernant et tu me fais bien trop d’honneur si je ne me trompe pas. Je suis une femme normale, tu sais, avec ses envies, ses désirs, ses peurs et ses espérances et je ne demande rien d’exceptionnel. Je sais me contenter de peu et je pensais que tu le savais depuis le temps…
- Peu, c’est déjà trop pour moi, Kaori. Je ne veux rien. Les filles qui passent dans ma vie ne font que ça, passer. Je prends du plaisir, leur en donne et ça s’arrête là. Tu es la seule que je respecte suffisamment pour ne pas te mettre dans mon lit juste pour quelques heures., dit-il, la mâchoire crispée.
- Au moins les choses changent. Tu admets que ce n’est pas parce que je ne te fais pas d’effet., murmura-t-elle, désabusée.
- Je n’ai rien admis. Les deux choses peuvent être concomitantes., ajouta-t-il, se sentant piégé.
- Toi, tu es con tout court. Tu pouvais au moins me laisser un peu d’amour propre., répondit-elle, serrant des poings.

Il ne serait pas dit qu’elle détruirait l’appartement de leurs amis à cause d’une de leurs sempiternelles disputes.

- Si tu as fini, on pourra rentrer pour que j’aille préparer à manger… à moins que tu ne veuilles aller fouiller dans les petites affaires de Kazue. Ce serait le moment après tout : elle n’est pas là et Mick non plus et, comme tu as pu le constater, je n’userai pas de ma massue ici., dit-elle, partant vers la cuisine.

Il serra les poings et partit vers la chambre pour vérifier ce qui manquait. Rien à part quelques vêtements et affaires de toilette. Ryo vérifia toutes les cachettes de Mick et trouva ses passeports et autres papiers. Il avait aussi emporté de l’argent liquide. Refermant toutes les trappes soigneusement, il retourna auprès de Kaori qui finissait de mettre de l’alimentaire dans un sac.

- Tu as trouvé quelque chose ?, lui demanda-t-elle, d’une voix froide.
- Il n’a pris que du basique : vêtements, hygiène et argent. Tu fais tes courses ?, ironisa-t-il.
- Non, je prends ce qui arrive à date. On l’a oublié hier. Kazue n’aime pas gâcher., répondit-elle d’un ton mordant.
- Allez, on rentre.

Ils sortirent et Ryo referma la porte, non sans avoir placé un discret récepteur non loin. Il saurait ainsi si quelqu’un revenait dans l’appartement. Ils rentrèrent chez eux et Kaori eut à peine posé le sac qu’elle portait qu’elle assomma Ryo d’une massue gigantesque.

- Si tu pensais y échapper…, gronda-t-elle, partant vers la cuisine.
- Préviens au moins avant., maugréa-t-il.

Cependant, quelque chose le dérangea : ce n’était pas le fait d’avoir été corrigé ou qu’elle eut attendu pour le faire… Non, ce qui le dérangeait, c’était le manque de signe avant-coureur. En général, quand elle allait le frapper, il ressentait sa rage et savait ce qui allait arriver. Il pouvait ainsi presque toujours l’éviter même s’il ne le faisait pas pour une raison obscure. Là, il n’avait rien ressenti comme si elle n’avait rien ressenti non plus. Devait-il s’en inquiéter ? Devait-il mettre cela sur le compte de son habileté à masquer ses émotions de mieux en mieux ? Il ne savait pas quoi en penser.

Il sortit de sa prison de bois, se remit les cervicales en place et se dirigea vers le téléphone pour informer Umi des nouvelles informations et lui donner sa position par rapport à Kazue, position que le géant partagea. Ils la protégeraient dans tous les domaines comme ils le pourraient. Cela fait, il s’affala dans le canapé et ressortit discrètement la missive qu’il planqua dans un de ses magazines. Il la lut et relut encore sous couvert de lecture pernicieuse, s’esclaffant en bavant quand Kaori entrait dans la pièce, reprenant un air sérieux quand elle ressortait. Il sentait ses regards furieux se poser sur lui mais n’en tenait pas compte. Il préférait mille fois qu’elle eut une mauvaise opinion de lui que de la voir s’inquiéter en lui montrant à quel point il jugeait la situation préoccupante.

Et il était en effet inquiet pour Mick, pour Kazue, pour les cafetiers mais surtout pour elle, pour celle qui faisait battre son coeur. Kazue ne prendrait pas de risque inutile. Ce n’était pas son monde et, si elle le connaissait, elle ne faisait que louvoyer à la frontière pour les soigner. Kaori en faisait pleinement partie mais c’était elle la moins bien armée du groupe, la moins expérimentée et il se savait en grande partie responsable. A force d’avoir voulu la tenir le plus éloignée possible, il l’avait rendue dépendante de lui et surtout atteignable. Alors il pouvait se targuer d’avoir préservé sa morale, en même temps que son honneur d’ailleurs, mais, si elle était blessée, pire si elle mourait, il pourrait aussi se sentir responsable… et à bien des niveaux… De plus, il savait pouvoir compter sur le potentiel comportement à risque de sa partenaire qui laissait son coeur un peu trop penser et la conduire dans des situations impossibles et surtout dangereuses, ce qui n’arrangeait pas les choses.

Il poussa un long soupir de lassitude. Devait-il revoir sa position la concernant ? Devait-il envisager sérieusement de l’entraîner et la laisser intégrer pleinement son monde ? S’il le faisait, il savait qu’inévitablement, il lui ouvrirait la porte de son coeur : l’ayant exposée au danger, il n’aurait plus de raison de la tenir à distance. C’était tentant et ce n’était pas la première fois qu’il l’envisageait. Il avait même décidé de le faire après son enlèvement par Kreutz mais il avait reculé au dernier moment, pris de scrupules, repensant à Maki et la confiance qu’il avait placée en lui, et tout était redevenu comme avant, la frustration en plus…

- Si tes lectures commencent enfin à t’ennuyer, je peux me faire un plaisir de les jeter., lui jeta Kaori d’un ton aigre, posant un plat à table.
- Ne prends pas tes rêves pour la réalité., répondit-il du tac au tac.
- Ca fait un moment que je ne rêve plus, Ryo… Viens manger pendant que c’est chaud et ne te casse même pas la tête à dire que c’est écoeurant. Je le sais déjà, alors épargne ta salive.

Elle s’assit et se concentra sur son assiette, se forçant à manger malgré la boule qui lui bloquait la trachée. Elle ne lui ferait pas le plaisir de lui montrer à quel point son comportement l’affectait.

Jetant négligemment la revue sur le fauteuil après avoir replié la feuille et l’avoir rangée dans sa poche, Ryo se leva, arborant un air dégoûté, et la rejoignit à table. Il se gava sans dire un mot puis quitta la table une fois repu, laissant sa partenaire seule. Elle le regarda partir sans mot dire, le coeur douloureusement serré et se demanda comment les choses avaient pu dégénérer à ce point en quelques mois, comment avaient-il pu passer d’une relation platonique mais romantique à cette espèce de guerre froide qui les séparait de plus en plus ? Combien de temps cela allait-il encore durer ? Elle ne le savait pas mais elle devait laisser cela au placard et pensait à la priorité du moment : Mick. Où était-il ? Que faisait-il ? Allait-il bien ?
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Mar 9 Mar - 21:20
Chapitre 4

Affalé dans son lit, Ryo fixait le plafond. Son isolement répondait à deux objectifs précis. Le premier était d’éviter Kaori pour ne pas se disputer avec elle une nouvelle fois et l’épargner un peu. Il eut un sourire amer : quelle bonté d’âme avec tout ce qu’il lui faisait subir juste pour éviter qu’elle n’approcha trop près de lui et n’attisa encore plus la flamme qui brûlait en lui…

Le deuxième était de pouvoir cogiter sur tous les éléments de l’enquête qui ressemblait pour le moment plus à un puzzle qu’à un tout bien ordonné. Il y avait tellement de zones d’ombre, tellement de choses qui leur échappaient que c’était compliqué de trouver la logique dans le comportement de Mick. Comme Kaori, il ne pouvait pas croire qu’il ait retourné sa veste bien qu’il se fit volontiers l’avocat du diable face à elle. C’était son rôle dans leur partenariat d’être celui qui l’aiderait à garder les pieds sur Terre. Elle tomberait de moins haut si vraiment leur ami les avait laissé tomber.

Avait-il suivi Nichols vraiment volontairement ou contraint et forcé parce qu’on le menaçait d’une manière ou d’une autre ? Il penchait pour la deuxième option. Peut-être Nichols voulait-il utiliser Kazue comme appât à abattre si Mick ne se mettait pas sous ses ordres ? C’était peut-être pourquoi il avait écrit la quitter noir sur blanc, ainsi il pouvait faire penser à Nichols qu’elle n’avait pas une si grande importance pour lui et donc pas réellement de poids pour le faire chanter.

Ryo espérait secrètement que c’était la seule raison. Ainsi, lorsqu’il rentrerait, Mick retrouverait Kazue et ils reprendraient leur vie à deux comme avant. Avec un peu de chance, cette expérience lui aurait remis les idées en place et enfin permis de comprendre qu’il était fait pour Kazue, pas pour Kaori, et lui n’aurait plus ainsi à craindre de la perdre pour les bras de son ami… Les petits gestes, les mots doux, les allusions, tout cela serait fini et Kaori n’aurait plus de raison d’être attirée par Mick. Comme elle le lui avait dit, elle était une femme normale et les femmes normales aimaient ce genre de choses. A n’affronter que son mépris, il serait normal qu’elle finit par se tourner vers lui, ou un autre d’ailleurs, et il la perdrait.

Il poussa un profond soupir. Il se perdait une nouvelle fois dans ses contemplations amoureuses. Il devait vraiment aimer se torturer l’esprit à ressasser toujours la même chose. Il savait pourtant où ça le mènerait : il devait faire un choix.

- Je ne peux pas choisir., murmura-t-il, posant le bras sur ses yeux.

Comment choisir de la laisser entrer et plonger dans un monde de ténèbres où la durée de sa vie serait drastiquement raccourcie ou la laisser partir pour faire ce qu’elle avait à faire, se marier et avoir des enfants, les aimer, les voir grandir et se marier à leur tour ? Kaori était faite pour la lumière et l’amour et il lui offrirait quoi ? De la laisser l’aimer et de la baiser tous les soirs. Il grimaça de dégoût. Il savait qu’il était malhonnête même envers lui-même. Il savait que le sexe avec elle n’aurait rien de sordide et de plat. Il savait que s’il goûtait un jour à sa peau, à la chaleur de ses bras, à la douceur de son intimité, il ne pourrait plus jamais s’en passer. Elle deviendrait sa drogue et, lorsqu’elle mourrait, il ne se relèverait pas. Alors, non, il ne pouvait pas choisir.

C’était elle qui ferait son choix : elle déciderait de partir ou de rester. C’était juste une question de temps avant qu’elle en eut assez et se décida à quitter les lieux. Kaori était une femme normale, elle se lasserait… sauf qu’elle l’aimait d’une telle force qu’elle ne partirait peut-être jamais et le ferait vivre avec la culpabilité de ses choix. Il n’avait jamais vu une femme aimer avec autant de ferveur et d’abnégation malgré tout ce qu’il lui avait fait. C’était ce qui rendait les choses si difficiles parce que son amour le réchauffait et le faisait se sentir vivant. Alors il voulait qu’elle parte mais il voulait aussi qu’elle reste et son coeur oscillait tel un métronome sans jamais s’arrêter entre les deux options. Même son inconscient semblait s’y mettre par moments quand il lui prenait de lui dire un mot gentil, d’avoir un geste ou regard tendre alors qu’il faisait tout pour la repousser ou alors quand il l’agressait, la dénigrait ou autre quand il avait décidé de la laisser approcher…

Il se rendit soudain compte d’où ses pensées l’avaient mené une nouvelle fois et il grogna. Il s’était encore une fois laissé emporter.

- J’en ai marre : je veux que tu sortes de ma tête, Kaori !, gronda-t-il.

Voyant que son isolement ne portait pas ses fruits, il changea de tactique. Il se releva et sortit de sa chambre. Kaori sortait de la buanderie avec un panier de linge vraisemblablement à repasser. Ils se figèrent un instant l’un face à l’autre, se dévisageant intensément, puis elle baissa les yeux et passa devant lui pour descendre les escaliers. Il l’intercepta et lui prit le panier des mains.

- Mais…
- Pour une fois que je suis dans un bon jour…, la coupa-t-il.

Elle lui lança un regard mi-figue mi-raisin. Si ça c’était un bon jour avec tout ce qu’elle s’était déjà prise dans la tête, à quoi devait-elle s’attendre les mauvais jours ? Autant profiter de l’instant présent, se dit-elle finalement, et elle esquissa un léger sourire. Gêné, il haussa légèrement les épaules et descendit les escaliers prestement. Il posa le panier sur la table à côté de la table à repasser puis se tourna vers elle.

- Je vais aller faire le tour de mes indics pour voir s’ils ont du nouveau et après j’irai chercher Kazue à la clinique. Tu restes ici.
- D’accord. De toute façon, j’ai de quoi faire., dit-elle en désignant le panier bien rempli.
- On pourrait peut-être aller faire un tour au Cat’s ce soir avec Kazue. Ca lui changerait les idées, non ?
- Je vais lui proposer. Par pitié, Kaori, ne fais rien de stupide., lui demanda-t-il, d’un ton excédé.

Bizarrement, il s’attendait à la voir partir à la recherche de Mick toute seule comme elle l’avait fait avec son amie quand ils s’étaient retrouvés il y a sept ans. Il se souvint avec amusement qu’elle s’était servie d’un pistolet jouet et qu’il lui avait sauvé la mise en tirant en même temps qu’elle. Elle avait été tellement déterminée à la sauver…

- C’est bon, je t’ai dit que je ne bougerai pas. Je vais faire le repassage puis préparer le repas de ce soir. Tu peux partir tranquille… en tous cas plus que moi…, grommela-t-elle, vexée.
- A tous les coups, tu vas en profiter pour tenter ta chance avec les filles que tu croiseras.

Il vit son regard blessé et il lui aurait suffi de quelques mots pour l’effacer mais, encore une fois, ils ne vinrent pas.

- Que veux-tu ? Je ne peux pas laisser les jolies filles de la ville sans les flatter un peu et surtout les honorer de ma présence…, se targua-t-il, un coucou faisant irruption.

Sans réfléchir, Kaori attrapa le fer à repasser, le lui colla dans la figure et le lâcha. Celui-ci tomba alors directement sur le membre dressé et Ryo hurla de douleur, se tenant l’entrejambe. Il se retrouva par terre, une marque rouge en triangle sur le visage, roulant de droite à gauche.

- J’espère que je ne l’ai pas abîmé…, fit Kaori en ramassant son fer et l’examinant, soulagée de constater qu’il n’avait rien.

Elle le brancha et se mit à l’ouvrage sans plus aucun regard pour son partenaire. Ce dernier se releva au bout d’un moment avec une démarche de cow-boy.

- Méchante Kaori ! Tu vas tuer les héritiers Saeba…, cracha-t-il, la larme à l’oeil.
- Ca tombe bien. Tu n’en veux. Tu n’arrêtes pas de dire que tu n’aimes pas les enfants., réussit-elle à lui répondre.

Elle avait la gorge serrée à l’idée saugrenue que, même si un jour ils se mettaient ensemble, ils n’auraient jamais d’enfants. Ca lui faisait mal au coeur même si elle l’avait accepté depuis longtemps. Elle eut une pensée furtive pour Kazue, lui enviant sa grossesse., et s’en voulut aussitôt d’être jalouse.

- Ce n’est pas une raison pour casser le jouet. J’ai une réputation, moi ! T’imagines s’il ne se tient plus droit et fier ?, s’écria-t-il, outré.
- Ca va, Ryo. Cesse de parler de ton pénis comme s’il s’agissait d’une personne !, s’emporta-t-elle.

A peine eut-elle prononcé ces paroles qu’elle se sentit rougir furieusement et plaqua une main sur sa bouche, gênée. Ryo la regardait éberlué puis se mit à rire bêtement, masquant lui aussi sa gêne en se moquant d’elle.

- Il faudra que tu cesses d’être aussi prude, Kaori. A seize ans, c’est mignon, à vingt-sept, c’est ridicule., lui asséna-t-il pour remettre de la distance entre eux.

Elle serra les dents mais ne dit rien ; son seul geste fut d’empoigner le fer à repasser et de projeter de la vapeur vers lui, ce qui le poussa à reculer. Il en profita pour s’en aller. La jeune femme regarda la porte se fermer et, sitôt fait, la colère quitta son regard pour laisser place à la tristesse.

- J’ai de plus en plus de mal à te suivre, Ryo. Pourquoi t’échines-tu autant à me faire sortir de mes gonds ? En quoi ça t’amuse de me faire du mal ? Je commence à en avoir assez de tout cela. Peut-être est-il temps que je cesse de me voiler la face et d’espérer quelque chose qui n’arrivera jamais ?

Elle soupira, frustrée, puis se tourna vers la radio qu’elle alluma, histoire de se changer les idées. Se laissant embarquer, elle oublia progressivement ses soucis et l’après-midi passa rapidement. Elle fut donc un peu surprise de voir arriver Kazue et Ryo alors qu’elle pensait qu’il était moins tard.

Ryo récupéra Kazue à l’heure prévue. Quand elle sortit de la clinique, il vit son visage changer d’expression. Elle laissa tomber le masque neutre de la professionnelle de santé pour celui triste et désespérée de la femme abandonnée.

- Tu as des nouvelles ?, lui demanda-t-elle sans ambages.
- Je sais juste qu’il est toujours vivant., lui répondit-il, voyant le soulagement s’inscrire sur son visage.
- C’est déjà ça., soupira-t-elle.
- Kazue, nous ne savons pas ce qui s’est passé. Je ne peux pas t’assurer qu’il n’est pas parti volontairement.
- Je sais mais, quoi qu’il arrive, je ne veux pas qu’il meure. Même s’il doit me quitter, même s’il doit partir avec Kaori…, murmura-t-elle, les larmes aux yeux.
- Ne dis pas de bêtise, Kazue., grogna-t-il, ne pouvant accepter l’idée d’un couple Mick-Kaori.
- Je suis réaliste, Ryo. Ca n’allait pas fort entre nous. Je n’ai pas la prétention de penser que cet éloignement va nous rapprocher., s’énerva-t-elle.

Ryo posa une main sur sa cuisse, sans aucune mauvaise intention, juste celle de l’apaiser. Elle posa la sienne dessus, soulagée de ne pas être seule pour affronter sa détresse.

- Calme-toi. Ce n’est pas en t’énervant que tu y verras plus clair., lui dit-il.
- Je sais mais j’ai un peu de mal à me contrôler depuis quelques jours., avoua-t-elle, pinçant son nez pour soulager la tension naissante.
- Kaori s’est dit que ça te ferait peut-être du bien d’aller faire un tour au Cat’s, ce soir., lui proposa-t-il.
- Pourquoi pas… J’aimerais juste prendre une douche avant.
- Je peux venir te frotter le dos ?, lui demanda-t-il, affichant un air lubrique.

Elle le regarda, un instant interdite, puis vit clair dans son jeu et se mit à rire, oubliant momentanément son angoisse. Quand elle se calma un moment plus tard, elle lui adressa un regard de reconnaissance.

- Merci Ryo. Merci de rester toi même dans les moments difficiles. Je ne sais pas ce que je ferais sans toi.
- Et encore, tu n’as pas goûté au meilleur de ma personne., glissa-t-il d’un ton suggestif.
- Tu sais, j’ai failli te proposer plusieurs fois d’aller boire un café ensemble avant que je connaisse Mick…, lui dit-elle, soudain.

Dans la tête de Ryo, le café se transforma visuellement en love hotel, Kazue se pâmant dans ses bras. La bave se mit à couler au coin de sa bouche.

- Un café, Ryo !, le reprit-elle, le surprenant.
- Pourquoi ne l’as-tu pas fait ?, lui demanda-t-il recouvrant son sérieux immédiatement.
- Kaori… Rien ne semble pouvoir se mettre entre vous, rien ni personne. Les sentiments qui vous unissent, même si tu nies que ce soit de l’amour, sont si forts que c’était comme si une barrière vous entourait. Seulement par moment, les barrières se referment autour de vous et vous vous entrechoquez sans pouvoir vous toucher.
- Surtout moi, tu veux dire…, laissa-t-il échapper.
- Elle aussi. Elle est enferrée dans sa timidité et la crainte de te perdre. Elle se plie en quatre pour te plaire et qu’un jour, tu admettes enfin ce qui vous lie.
- Même quand elle me lance un coup de massue sur la tête ?, se moqua-t-il, dubitatif.
- Ris-en si tu veux. Elle a peur de te perdre… probablement autant que tu as peur de la perdre.
- Je…

Elle leva la main, lui intimant le silence, et tourna la tête vers l’extérieur de la voiture, observant la ville.

- N’essaie pas de nier si tu n’en es pas convaincu, Ryo. Je vais peut-être perdre mon compagnon à cause de toi, alors, s’il te plaît, ne me fais pas l’affront d’être malhonnête avec moi par dessus tout. Et, si ça peut te rassurer, je ne parlerai pas de cela à Kaori. Ce n’est pas mon rôle., finit-elle avant de poser le menton sur sa main.

Ils finirent la route en silence, chacun perdu dans leurs pensées, et ce fut ainsi que Kaori les vit entrer.

- Je vais prendre une douche et après, si vous le souhaitez, on peut aller au Cat’s comme tu l’as proposé., fit Kazue, se tournant vers Kaori.
- Comme tu veux.
- Ca nous fera certainement du bien de voir les autres., admit la doctoresse.

Elle laissa les deux nettoyeurs seuls pour aller se doucher. Dès qu’elle eut refermé la porte de la salle de bains, Kaori se tourna vers son partenaire.

- Qu’as-tu appris de tes informateurs ?
- Mick a été vu avec Nichols à divers endroits de la ville, un peu comme s’ils faisaient du tourisme.
- Ils repèrent les lieux., supposa la nettoyeuse.
- Oui, je pense aussi.
- Alors il aurait vraiment changé son fusil d’épaule ?, dit-elle, déconcertée.
- Tu sais, au départ, il faut savoir appâter le chaland. Peut-être qu’il joue le jeu pour mieux noyer le poisson., répondit-il.

Il n’aimait pas la voir déstabilisée même si bien souvent c’était par sa faute. Elle lui lança un regard perplexe, lui faisant bien comprendre qu’il y a peu, le matin même pour être exact, il l’avait préparée au pire. Il haussa les épaules et monta sur le toit fumer une cigarette. Quand il redescendit, Kazue passait sa veste et ils partirent tous trois au Cat’s.

A peine arrivés, Miki se précipita sur son amie et la prit dans ses bras, l’assurant d’un soutien indéfectible. Kazue la remercia, prenant sur elle pour rester calme et forte comme Mick aurait certainement apprécié. Ils se mirent à discuter, tentant de garder la conversation légère, au moins du côté des filles, pendant qu’Umi et Ryo parlait à voix basse de ce qu’ils avaient appris chacun de leur côté.

Soudain, quatre d’entre eux se tendirent sentant des auras négatives autour du café. Alors qu’Umi, Ryo et Miki sortirent une arme, Kaori attrapa Kazue et la plaqua par terre, se positionnant sur elle pour faire rempart avec son corps. Les vitres explosèrent sous l’impact des balles de mitraillettes, des éclats de bois volaient quand les balles s’enfonçaient dans le mobilier, des éclats de verre étaient projetés partout comme une myriade de petites étoiles scintillantes retombant pour laisser des éclaboussures rouges sur les peaux dénudées.

Les deux jeunes femmes entendirent les détonations provenant des armes de leurs amies et Kaori sentait Kazue sursauter à chacune. Elle était concentrée sur la sécurité de son amie et aurait aimé pouvoir mieux la protéger mais elles étaient à un endroit d’où elles ne pouvaient bouger sans être à découvert. Donc elles restèrent là, Kaori allongée sur elle, les mains posées autour de sa tête pour protéger le visage de son amie.

Furieux mais surtout effrayé, Ryo ripostait aux tirs en gardant un œil sur les filles au sol. Il avait vu l’attitude de Kaori, se jetant sur son amie au détriment de sa propre sécurité. Elles étaient à un carrefour des trajectoires, ce qui faisait qu’elles étaient touchées par un maximum de débris. Il n’en fallait plus pour qu’un projectile plus gros fit de vrais dégâts.

- Umi, sors l’artillerie lourde., cria-t-il.

Le géant sourit de toutes ses dents et sortit un bazooka. Il ne se fit pas prier pour arroser les endroits d’où provenaient les tirs et cela porta rapidement ses fruits. Les assaillants prirent la fuite et un silence irréel se fit, ne laissant que la poussière et les débris qui retombaient au sol emplir l’air. Kaori se releva, légèrement vacillante, et aida Kazue à en faire de même.

- Ca va ?, murmura-t-elle, la voyant livide.

La doctoresse secoua la tête et se mit à pleurer. La nettoyeuse s’agenouilla près d’elle et la prit dans ses bras, la sentant s’agripper à elle comme si elle était sa bouée. Kazue pleura ainsi pendant dix bonnes minutes, ne s’apercevant même pas de l’arrivée de Saeko, alertée par un message sur sa radio. Profitant de son inattention, Umi et Ryo résumèrent les dernières informations à l’inspectrice concernant la disparition de Mick et toutes les spéculations qu’ils avaient faites. Elle leur affirma qu’elle leur fournirait les informations qui lui seraient remontées. La nouvelle ne la laissait pas de marbre. Elle avait appris à apprécier Mick, tout comme elle l’avait fait avec Umi, et sa disparition, et les circonstances qui l’entouraient, l’inquiétait.

Quand elle dut partir, les deux hommes regagnèrent l’intérieur du café et retrouvèrent Miki soignant Kaori qui avait été blessée dans le dos par un éclat de verre.

- Ca va, ce n’est pas profond. Ce ne sera que l’affaire de quelques jours., rassura-t-elle Ryo, voyant son froncement de sourcils.
- Merci, Miki. Où est Kazue ?
- Je lui ai donné un somnifère. Elle dort dans l’arrière-salle.

La barmaid s’éloigna et alla chercher un balai. Kaori se leva pour aller aider son amie mais fut arrêtée par Ryo.

- C’était totalement inconscient ce que tu as fait. Pourquoi as-tu voulu jouer les héroïnes ?, gronda-t-il, la mâchoire crispée.
- Je n’ai pas voulu jouer les héroïnes. J’ai protégé mon amie comme je le pouvais., répondit-elle, redressant le menton.
- En mettant ton corps en rempart ? Autant mettre une cible marquée « tirez-moi dessus ! », s’énerva-t-il.
- Tu voulais que je fasse quoi ? Que je la laisse pour me jeter au dessus du bar ?

Il détourna le regard parce qu’effectivement elle avait choisi la bonne solution mais il ne supportait pas l’idée qu’elle aurait pu mourir.

- Ca aurait peut-être été mieux en effet ! Ou sortir une arme aussi.
- Quelle arme, Ryo ? Celle que tu as déréglée ? Celle avec laquelle tu n’as jamais voulu m’apprendre à tirer ?, rétorqua-t-elle, fâchée.
- Tu aurais peut-être préféré que je courre à travers la fenêtre avec une massue ? Ca aurait peut-être été plus à ton goût ?

Bon sang, elle avait fait ce qu’elle avait pu et elle était persuadée d’avoir pris la meilleure décision et, s’il n’avait pas été aussi obnubilé par son inquiétude, il aurait admis qu’elle avait eu le bon réflexe.

- Avec une massue ? Quelle idée ! Tu as toujours des grenades sur toi. Elles étaient où aujourd’hui ?, ironisa-t-il.
- Je… je n’ai pas pensé à les sortir. Je voulais juste protéger Kazue., admit-elle, baissant les yeux.

Elle avait failli. Elle n’avait encore une fois pas été à la hauteur. Elle était vraiment la pire partenaire qu’il pouvait avoir…

- Quand vas-tu commencer à réfléchir avec ta tête, Kaori ?, se mit-il en colère, tout en se sachant injuste avec elle.
- Vas-y ! Dis-le ! Tu en meurs d’envie ! Dis-le que je ne suis pas une bonne partenaire, qu’il vaudrait mieux que je m’en aille ! Dis-le moi. Aie au moins le courage de me le dire en face contrairement à tout le reste !, hurla-t-elle, faisant se retourner Umi et Miki.
- Tu as raison. J’ai eu des partenaires bien meilleurs que toi. Tu n’es vraiment bonne à rien., constata-t-il, posant sur elle un regard consterné.

Il vit ses yeux briller de larmes et se retint de lui dire qu’il n’en était rien, qu’il avait juste eu tellement peur qu’il n’arrivait pas à régner sur sa colère, colère qui n’était pas dirigée contre elle mais contre lui, contre leurs assaillants, mais que c’était tellement plus facile de s’en prendre à elle. Il vit au ralenti sa main se lever et venir se plaquer contre sa joue violemment sans même bouger. Cette gifle n’était qu’une faible punition pour tout ce qu’il lui faisait vivre.

- Je te déteste, Ryo ! Je te déteste !, hurla-t-elle, en larmes.

Il la vit enfin se retourner et partir en courant dans la nuit qui tombait, incapable de bouger et de la suivre. Il n’avait jamais pensé entendre ces mots-là sortir de sa bouche un jour. Il avait toujours pensé qu’elle lui pardonnerait tout mais il s’était apparemment trompé…

- Inconscient, tu la laisses vraiment partir seule !, tonna Umi, jetant son tablier sur le comptoir.
- Reste avec Miki et Kazue, Umi. J’y vais., murmura Ryo d’une voix blanche.

Ses jambes étaient lourdes et il avait l’impression de devoir produire un effort énorme pour se déplacer mais il avança quand même. Son cerveau tournait dans le vide, les pensées passaient et s’envolaient aussitôt. « Je te déteste », lui avait-elle dit. C’était impensable. Kaori le détestait, il ne pouvait y croire…

Il passa toute la nuit à la chercher, fouillant tous les recoins, interrogeant tous ceux qu’il croisait mais ne la trouva nul part. Il se sentait sur le point de vomir quand il arriva en vue du Cat’s et dut faire un effort suprême pour reprendre son masque neutre. Quand il parut à la porte, trois visages anxieux se tournèrent vers lui et il ne put que secouer la tête, le coeur lourd.

Laissez moi vos commentaires : Ici
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Mer 10 Mar - 20:30
Chapitre 5

Après être repassés par l’appartement où ils se douchèrent et se changèrent, Ryo emmena Kazue à la clinique. Un silence lourd pesait dans l’habitacle qu’aucun des deux ne tenta de briser. Ils avaient tous les deux perdus leur moitié même s’il n’aurait jamais avoué que c’était ce qu’il ressentait. Kaori lui manquait et il se demandait où elle était. Il avait peur de ne plus la revoir, de ne plus pouvoir la serrer dans ses bras ou entendre le son de sa voix. Il ressentait un vide profond en lui. C’était une sensation inédite qu’il avait bien du mal à maîtriser.

Lorsqu’il s’arrêta devant la clinique, Kazue resta un moment sans bouger, le regard perdu dans le vide, puis se tourna vers lui.

- Si tu la retrouves, ne déconne pas. J’ai besoin que vous soyez forts tous les deux…, murmura-t-elle.
- Tu es sûre que tu vas pouvoir travailler. Le Professeur comprendrait…
- Ca m’occupe l’esprit et, si je dois m’effondrer, il saura s’occuper de moi malgré ses travers…, le rassura-t-elle.
- Très bien. Appelle-moi quand même s’il faut venir te rechercher plus tôt.

Elle descendit de voiture et ferma doucement la porte. Ryo la regarda pénétrer dans l’enceinte de la clinique puis redémarra, reprenant le chemin de l’immeuble. Pris d’un doute, il passa par le cimetière pour la troisième fois depuis hier soir. Il arpenta les allées, scrutant les visages qu’il croisait. Il arriva devant la stèle recherchée et s’immobilisa. Il n’y avait pas de trace de passage mais à quoi devait-il s’attendre ? Un bouquet de fleurs ? Une bougie ? Où aurait-elle trouvé cela en pleine nuit ? Un mot disant « si tu me cherches, je suis passée par ici », pensa-t-il en souriant amèrement. Pourquoi l’aurait-elle ménagé après ce qu’il lui avait fait ?

- Je suis un con, Maki. Je ne sais pas ce que tu as vu en moi de bien pour elle mais je ne fais que la blesser. Aide-moi à la retrouver., soupira-t-il.

Il tapota sur la stèle doucement comme il lui aurait tapé sur l’épaule puis s’en alla. Il se gara dans le sous-sol de l’immeuble et resta un moment dans la voiture, se demandant par où continuer ses recherches. Se sentant pour une fois démuni, il sortit de la voiture et remonta à l’appartement.

Kaori le connaissait trop bien. Elle avait les moyens de se cacher de lui si elle le voulait et nul doute qu’elle le voulait après ce qu’il lui avait dit la veille. Il rentra dans l’appartement, posa sa veste dans la penderie à côté de celle de Kaori, enleva ses chaussures qu’il rangea à côté de celles de Kaori puis se dirigea vers la cuisine. Un café lui ferait du bien. Il se versa une tasse du breuvage fumant et le porta à ses lèvres.

Soudain, ses yeux s’écarquillèrent de stupéfaction. Il jeta un regard vers le café frais et chaud, café qu’il n’avait pas fait ce matin, ni Kazue. Il posa la tasse calmement et retourna à la penderie pour trouver la veste et les chaussures qu’elle portait hier soir et il entendit enfin le son de la douche qui coulait. Elle était rentrée… Il sentit son coeur bondir de joie et le soulagement se répandre en lui. Il grimpa les escaliers quatre à quatre et ouvrit les portes menant à la salle de bains sans ménagement et surtout sans réfléchir.

Surprise, Kaori se retourna dans la douche et, après deux secondes de stupéfaction, attrapa une serviette qu’elle mit devant elle pour se protéger. Les deux secondes avaient été cependant amplement suffisantes à Ryo pour apercevoir le corps de sa partenaire et éveiller ses pulsions, un magnifique coucou faisant son apparition avant qu’il eut pu le réprimer.

- Sors d’ici !, cria-t-elle, rouge de gêne et de colère.
- Kaori…
- Dehors !, dit-elle en lui envoyant une massue sur la tête.

Ryo valsa dehors et atterrit le nez dans le mur, entendant la porte reclaquer violemment.

- Bon, apparemment tu vas bien., marmonna-t-il.

Dans la salle de bains, Kaori se glissa de nouveau sous la douche pour se rincer, réprimant les tremblements qui l’avaient prise. Elle croisa les bras autour d’elle, cachant sa poitrine dénudée même s’il n’était plus là. Elle revit son regard, ce regard qui l’avait détaillée en un instant et qui avait brillé d’une lueur particulière. Elle avait remarqué son excitation et, bien que flattée, elle se sentait aussi profondément en colère parce que ce n’était pas la première réaction qu’elle attendait de lui après la veille au soir.

Rincée, elle sortit de la douche et attrapa une serviette qu’elle enroula autour d’elle, appréciant la sensation de chaleur après sa nuit passée dehors à déambuler dans les rues et à méditer devant la tombe de son frère. Elle essuya le miroir et s’observa, les deux mains en appui sur le lavabo. Elle était blessée, profondément même. Elle le voyait à la lueur de ses yeux. Elle n’avait jamais pensé qu’ils en arriveraient un tel point.

« Je te déteste », les mots lui revinrent en mémoire et elle frissonna. Ce n’était pas des paroles en l’air. Lorsqu’elle les avait prononcées, elle les pensait réellement. Etait-ce le cumul de la situation et de ces mois de descente aux enfers ou cette dispute qui avait vraiment été plus forte que les autres, elle n’aurait su le dire mais, pendant un laps de temps suffisamment conséquent, elle l’avait détesté. Dès lors, sortir de son emprise, partir de là, loin de lui, avait été une nécessité absolue malgré le danger. Elle avait besoin de réfléchir, de prendre du recul, de sortir de cette prison dont les murs se refermaient sur elle. Elle s’était sentie oppressée…

Il lui avait fallu plus de deux heures avant de réussir à respirer normalement, à faire passer la boule d’angoisse qui lui enserrait la gorge, à faire évacuer la chape de plomb qui pesait sur son crâne et ses pensées. « Je te déteste », pour quoi exactement ? Son amour refoulé ? Les rebuffades à répétition ? De ne pas s’intéresser à elle ? De courir après les autres ? De ne pas la remarquer ? De ne pas essayer de la monter à son niveau ? Elle ne savait même pas. Il y avait beaucoup de choses qu’elle n’aimait pas chez lui mais elle n’en était jamais arrivé là… Elle n’avait jamais eu le sentiment de le détester.

Elle croisa son regard dans le miroir. Elle y lisait beaucoup d’incertitudes. Pour elle qui n’avait déjà pas énormément confiance en elle, ce n’était pas une bonne nouvelle. Avant, elle avançait au moins sur quelques faits établis : il l’aimait même s’il ne voulait pas lui dire, il en était venu à la considérer comme sa partenaire et il lui faisait confiance. Mais depuis quelques mois, tout s’était effrité et, hier soir, il avait tout balayé du revers de la main, la laissant suspendue dans le vide sans pont sous ses pieds, sans corde à laquelle se raccrocher. Elle se mordit la lèvre, cherchant à maîtriser l’angoisse qui la prenait.

Se détournant de l’image consternante qu’elle se renvoyait, elle sortit de la salle de bains et se dirigea vers sa chambre, apercevant en passant son cher partenaire avachi dans le canapé avec une de ses lectures favorites. Elle réprima un soupir d’agacement et alla s’habiller. La première chose qu’elle vit en ouvrant son armoire fut sa valise. Elle ne put en détacher les yeux pendant quelques secondes en se demandant : et si… Se secouant, elle attrapa un jean, un pull et des sous-vêtements et s’habilla avant de se coiffer puis, prenant son courage à deux mains, elle descendit et se dirigea sans un mot à la cuisine où le café qu’elle avait préparé était prêt.

Ryo la regarda passer et ne sut quoi faire. Devait-il la suivre ou lui laisser un peu le champ libre ? Devait-il s’excuser platement ou jouer l’autruche comme il savait si bien le faire ? Devait-il lui demander des comptes sur ses tribulations nocturnes ou attendre qu’elle vint vers lui pour lui en parler ? Car il mourrait d’envie de savoir où elle avait été, ce qu’elle avait fait, qui elle avait pu rencontrer… Ce dernier point lui fit froncer les sourcils et il serra les poings, nerveux. Si ça se trouvait, elle avait rencontré quelqu’un et s’était jetée à sa tête, juste pour oublier ce qu’il lui avait dit… C’était impensable pour lui mais pas inimaginable.

Dans la cuisine, Kaori prit le temps de boire son café. Elle savait qu’elle aurait des explications à lui donner et n’était pas impatiente d’affronter son courroux. Il lui redirait encore une fois qu’elle avait été inconsciente et imprudente, qu’elle ne savait pas réfléchir froidement ni prendre sur elle quand la situation l’imposait… Elle soupira. Après tout, elle aussi pouvait lui reprocher de ne pas être venu la chercher… La situation devenait vraiment ingérable entre eux. Malgré le peu d’envie, elle posa sa tasse et alla le retrouver dans le salon, prenant place à l’autre bout du divan, les mains posés sur ses genoux.

- Tu as déposé Kazue à la clinique ?, commença-t-elle.
- Oui.
- Comment va-t-elle ?
- Elle était inquiète à cause de toi., lui répondit-il sur un air de reproche.

Kaori détourna le regard, peinée d’avoir infligé cela à son amie. Ryo la regarda et sentit un pincement au coeur. Il revécut la peur qui l’avait assailli toute la nuit et sentit la colère revenir.

- Tu te rends compte du danger dans lequel tu t’es mise ?, dit-il d’une voix qu’il aurait voulue plus posée.
- Je sais mais je n’en pouvais plus., murmura-t-elle, triturant ses doigts.
- Cesse de jouer les martyrs, Kaori. La vie est dure et tu le sais !, la morigéna-t-il.
- Je ne joue pas les martyrs, Ryo ! Comment veux-tu que j’oublie que la vie est dure ? Tu me le montres assez souvent ! J’ai déjà vécu assez de drames pour le savoir !, répondit-elle en se levant, furieuse.
- Je n’ai pas besoin que tu me rappelles que je suis nulle, bonne à rien ou un boulet ! Tous tes gestes, toutes tes paroles parlent pour toi ! Tu ne m’aimes pas en tant que femme, tu ne m’apprécies pas en tant que partenaire de travail, tu me dénigres en tant que ménagère ! La seule chose que je sais bien faire, c’est de te corriger à coups de massue : c’est le seul domaine dans lequel j’excelle, semble-t-il, mais tu me diras en quoi ça nous est utile ? A rien, sauf à nous faire du mal !, explosa-t-elle.
- Arrête alors ! Je ne t’ai jamais demandé d’intervenir dans ma vie sentimentale !, lui reprocha-t-il, se levant à son tour.

Elle lui fit face, les poings serrés. Elle avait un tant soit peu espéré qu’il nierait certains points, qu’il tenterait de la convaincre qu’elle valait un peu mieux que ce qu’il lui jetait à la figure. Elle pensait que ce temps qu’ils avaient passé loin l’un de l’autre lui aurait fait voir qu’elle lui manquait ou qu’elle comptait pour lui mais, apparemment, elle s’était leurrée. Elle avait eu le temps de se calmer et de revenir à des sentiments plus raisonnables mais ce n’était pas son cas à lui ou alors, il avait enfin dévoilé sa pensée profonde… Ce ne pouvait être que cela…

- Tu as raison., murmura-t-elle soudain, baissant les yeux.
- Je pensais que j’avais un peu d’importance à tes yeux, que je comptais un peu mais je me suis trompée., admit-elle, la voix tremblante.

Ryo la regarda, sentant son coeur se serrer. Pourquoi n’arrivait-il pas à garder la tête froide dès que les choses devenaient sérieuses ? Kaori n’était pas un élément du décor, une quantité négligeable. C’était la femme qui faisait battre son coeur et elle méritait beaucoup plus d’égards. Mais il n’arrivait pas à se contrôler quand elle était là. La seule chose qu’il voulait, c’était la prendre dans ses bras et lui faire l’amour mais il ne pouvait pas alors il la tenait à distance du mieux qu’il pouvait… enfin de la pire façon aurait été plus juste.

- Kaori…, l’appela-t-il.
- Non, tais-toi. Si j’avais compté pour toi, tu m’aurais rejointe cette nuit. Tu ne m’aurais pas laissée seule, surtout avec ce qui se trame autour de nous., affirma-t-elle.
- J’ai passé la nuit à te chercher. J’ai fait toutes les rues de Shinjuku, je suis allé au cimetière deux fois et encore une fois ce matin en revenant de la clinique… Alors ne me dis pas que je ne t’ai pas cherchée !, s’offusqua-t-il.
- Tu m’as cherchée toute la nuit ?, s’étonna-t-elle.

Il acquiesça et vit son regard incrédule qui tourna vite à l’orage. Elle se sentait bafouée. Il avait l’affront de lui mentir sans honte, sans tressaillir, alors qu’elle était devant lui et qu’ils savaient tous les deux que c’était faux.

- Comment tu peux oser me mentir si effrontément ? Pourquoi ne pas avouer tout de suite que tu as passé la nuit dehors, à te saouler dans un bar ou à draguer des bunnies ?, se mit-elle à crier.
- Parce que tu sais très bien, tout comme moi, que ta recherche n’a pas duré tout ce temps !
- Ah oui vraiment ? Comment tu peux savoir cela ? Tu as des dons de divination ?, rétorqua-t-il durement, s’approchant d’elle.
- Non, je n’en ai pas besoin ! Tu n’es qu’un menteur, Ryo. Tu ne m’as jamais cherchée. Tu peux le faire croire aux autres mais tu ne m’as pas cherchée…, déclara-t-elle, sûre d’elle, soutenant son regard.

Il sentit la fureur s’emparer de lui. Il ne pouvait pas admettre qu’elle le crut capable de la laisser livrée à elle-même sans remuer ciel et terre. Il ne pouvait pas la laisser le traiter de menteur alors qu’il avait eu peur pour elle et qu’il avait passé la nuit dehors à la chercher anxieusement, ne voulant pas que leur dernière conversation fut une dispute. Sa main claqua froidement sur sa joue et il en fut le premier stupéfait : il n’avait pas pour habitude de frapper une femme mais ça avait été plus fort que lui.

Kaori le regarda incrédule, se tenant la joue. Elle sentit les larmes couler le long de sa joue.

- Je ne suis pas un menteur., gronda-t-il, les dents serrées.
- Ah non ? Alors comment expliques-tu que tu ne m’aies pas retrouvée avec tous les émetteurs que j’ai sur moi ?, répondit-elle, retrouvant son aplomb.

Elle avait dépassé tous ses seuils de tolérance. C’était comme si elle ne sentait plus rien, ni douleur, ni tristesse, ni colère. Il ne restait que la réalité froide et éclairée d’une lueur blafarde.

- J’avais ma veste, mes chaussures et mon collier. Trois émetteurs sur moi, Ryo. Tu vas trouver quoi comme excuse ? Une panne simultanée des trois émetteurs ?, lui asséna-t-elle, le regard dur.

Il fit un pas en arrière comme si elle l’avait frappé à son tour et se sentit blêmir. Il avait commis une faute impardonnable, une erreur de débutant, la chose qu’il refusait de voir arriver et celle qu’il craignait le plus en sa présence : il avait complètement perdu son sang froid.

- Je… Je n’ai pas pensé à utiliser tes émetteurs., admit-il, la voix blanche.
- J’ai couru toute la nuit, sans utiliser la voiture.
- Tu n’as pas pensé à…

Kaori ne pouvait y croire et elle prenait conscience de l’importance que cette révélation avait pour eux. Ils en étaient arrivés à un point où elle n’était plus une faiblesse pour lui mais une véritable faille. Ils mettaient leur vie en danger en continuant ainsi. Sa nervosité grandissant, elle ne put réprimer le fou-rire qui la prit. Il n’y transparaissait aucune joie, aucune hilarité, juste un profond désespoir.

- Calme-toi, s’il te plaît., murmura Ryo, pris au dépourvu.
- Je… Je ne peux pas. Tu te rends compte de ce qu’on devient ? Je vais te tuer, Ryo. Tu me pousses tellement à bout que je fais n’importe quoi. Tu es tellement à bout que tu fais n’importe quoi.
- Tout est de ma faute en somme., remarqua-t-il d’un ton acerbe.
- Tu es le seul à ne pas vouloir affronter la réalité ! Je ne suis peut-être pas parfaite mais je n’ai jamais fait que de te suivre et d’être là pour toi.
- C’est plutôt moi qui suis là pour toi à tout le temps te sauver les miches, il me semble., l’attaqua-t-il.

Il se sentait acculé et il ne voulait pas laisser la situation lui échapper. Il se savait encore une fois de mauvaise foi mais il était nerveux et aussi fatigué de cette nuit de recherche…

- Oh oui, le grand Ryo a sauvé la pauvre et fragile Kaori des méchants qui voulaient lui faire du mal je ne sais combien de fois ! Mais peut-être que si le grand Ryo faisait vraiment le nécessaire pour l’entraîner, la pauvre et fragile Kaori saurait mieux se débrouiller avec les méchants ! Peut-être que si tu daignais me consacrer un peu plus de temps en tant que partenaire et non pas comme femme de ménage, tu aurais un peu moins de choses à porter sur les épaules !, lui dit-elle.
- Tu parles d’une femme de ménage ! Tu ne sais même pas cuisiner !, lui lança-t-il.
- Celle-là, tu me l’as déjà servie à de nombreuses reprises., ironisa-t-elle.
- Je suis même étonné de ne pas encore avoir reçu un coup de massue pour couper court à la conversation…, remarqua-t-il, une lueur de défi dans le regard.

A vrai dire, il espérait qu’il ferait mouche et qu’elle dégainerait. Ensuite, elle s’en irait furieuse, ils resteraient éloignés l’un de l’autre pour la journée et les choses rentreraient dans l’ordre d’elles-mêmes… Les esprits s’apaiseraient, ils remettraient un couvercle sur le tout et finie la dispute.

- Je ne me sens pas obligée de céder à tous mes instincts primaires quand j’ai une conversation sérieuse., lui rétorqua-t-elle, lui coulant un regard noir.
- Dis tout de suite que je suis un gamin.
- Tu es impossible ! Ca ne nous mènera à rien de continuer ainsi. Je vais aller au tableau et on reprendra cette conversation plus tard., finit-elle par abdiquer.

Elle se dirigea vers la penderie et enfila sa veste et ses chaussures. Elle le vit du coin de l’oeil faire de même et la suivre par la porte.

- Que fais-tu ?, demanda-t-elle, les dents serrées alors qu’ils descendaient.
- Je ne te laisse pas seule. Tu as oublié hier ?, lui dit-il, ouvrant la porte qui donnait sur la rue.
- Non, je n’ai pas oublié et surtout pas que j’ai réussi à me sortir de là sans toi…, répondit-elle.
- Tu n’auras pas toujours cette chance., décréta-t-il.

Elle s’arrêta et il lui fit face.

- Tu n’en as toujours pas assez ? Il faut encore que tu me rappelles que je ne suis pas à la hauteur ?
- Je ne vois pas de quoi tu parles…, mentit-il, haussant les épaules.
- Si j’ai réussi à m’échapper hier, c’était uniquement un coup de chance alors ? Ce n’est pas parce que j’ai passé du temps avec toi et fait fonctionner mon petit cerveau de moineau pour trouver une solution ? Ce n’est pas grâce à l’entraînement que Miki, Umi et Mick ont bien voulu me dispenser, contrairement à toi, et que j’ai su mettre en pratique ? Non, pour Mossieur Ryo, je n’ai toujours pas été à la hauteur.
- Arrête de monter sur tes grands chevaux. Tu nous en fais tout un mélodrame. Tu…

Il n’eut pas le temps de finir sa phrase qu’il finit écrasé sous une massue un million de tonnes.

- Je n’avais vraiment pas envie d’en finir comme cela…, murmura-t-elle, les larmes aux yeux.
- Je te montrerai ce que je vaux un jour. J’aurais juste aimé que ce soit grâce à toi que j’y arrive… Je vais à la gare et je reviens. Je ferai peut-être un tour par le parc pour faire redescendre la température avant., l’informa-t-elle.
- Et cette conversation est loin d’être finie, Ryo, même si ce sera peut-être la dernière que nous aurons !

Elle n’attendit pas de réponse de sa part et s’en alla. Elle marcha d’un pas déterminé jusqu’à la gare, ne s’arrêtant que pour mieux observer le bâtiment avant de s’y engouffrer. Parvenue au tableau, elle vit afficher un code XYZ. Se sentant soudain très lasse, elle posa une main à côté pour se tenir, les yeux rivés sur les trois lettres. Elle aussi avait envie de lancer un XYZ à qui voudrait l’entendre et l’aider à sortir de cette impasse dans laquelle ils étaient. Mais elle savait que personne ne pouvait le faire.

Elle ne voulait pas en parler à Miki qui ne faisait que s’énerver sur Ryo et la pousser à lui sortir le grand jeu pour le faire sortir de sa réserve. Elle savait que ce n’était pas la façon dont il fallait l’aborder. Eriko l’avait déjà aidée en lui permettant de passer une soirée de rêve avec lui. Depuis, elle lui avait conseillé de le rendre jaloux mais Kaori n’aimait pas la duplicité : elle ne voulait pas jouer avec les sentiments de deux hommes. Elle avait même tenté d’être indifférente comme l’était Saeko mais elle n’y arrivait pas, ce n’était pas son tempérament. Elle l’aimait beaucoup trop pour pouvoir cacher ses sentiments.

Le seul avec qui elle arrivait encore à parler calmement de Ryo, c’était Mick. Il lui offrait une oreille attentive et bienveillante et ses conseils lui semblaient judicieux, faits de patience et de beaucoup de dévouement. Il la rassurait sur ses capacités et ses qualités, riait de ses défauts, la faisant rougir légèrement de honte, lui dispensait des petits gestes affectueux dont elle manquait cruellement. Parfois il la draguait ouvertement, lui jouant le rôle de séducteur, ce qui la détendait… jusqu’à ces dernières semaines quand un sentiment sous-jacent était venu s’ajouter à ce mélange : il commençait à prendre le jeu au sérieux. Ce n’avait été qu’une intuition mais Kazue le lui avait confirmé. Elle n’avait pas voulu tout cela : elle aimait Ryo, même si c’était âpre et sans retour et sans espoir. Mick était un ami…

- Où es-tu, Mick ? Tu me manques tellement., murmura-t-elle en essuyant les larmes qui perlaient à ses yeux.

Soudain, une main saisit la craie du tableau et traça son prénom en dessous du XYZ. Kaori releva les yeux et sentit une présence familière derrière elle.

- Heureux de savoir que j’ai encore une place dans ton coeur, ma belle., souffla une voix chaude à son oreille.

Elle tressaillit à la sensation qui la prit. Les yeux écarquillés, elle se retourna lentement et fit face à son ami. Il lui souriait, un regard intense posé sur elle. Elle n’arrivait pas à croire qu’il était là devant elle. Pourquoi ? Pourquoi ici ? Pourquoi maintenant ? Elle porta une main à son visage pour s’assurer qu’il était réel et étouffa un sanglot quand elle sentit la chaleur irradier sur sa paume. Elle se jeta à son cou, soulagée.

- Tu es vivant !, balbutia-t-elle.
- Oui, plus que jamais, ma Kaori., répondit-il, refermant son étreinte sur elle.
- Mais où étais-tu ? Que faisais-tu ? Que…
- Chut…, lui intima-t-il, remontant les mains le long de son corps pour entourer son visage.
- C’est toi qui m’a suivie toute la nuit, n’est-ce pas ? Et ce matin aussi ?, lui demanda-t-elle.

Il l’observa attentivement puis lui sourit tendrement. Ses dons s’étaient bien affinés avec le temps. Il caressa doucement ses pommettes, lui faisant signe que oui.

- Tout va bien, ma douce. Les choses vont rentrer dans l’ordre., la rassura-t-il.

Kaori sentit soudain la faiblesse s’emparer de son corps et un voile noir lui tomber dessus. Elle s’effondra dans les bras de son ami qui relâcha les points de pression qu’il avait usés pour la rendre inconsciente. Certains badauds s’arrêtèrent, s’inquiétant de son malaise, mais l’américain enlaça son amie, déposant un léger baiser sur ses lèvres.

- Tout va bien. C’est l’émotion des retrouvailles., dit-il, un grand sourire aux lèvres, le regard pétillant.

Il se tourna vers le tableau où il effaça le message puis, la prenant dans ses bras, il finit par l’emmener à l’extérieur de la gare où l’attendait une voiture. Il déposa son précieux fardeau sur la banquette arrière et l’enroula dans une couverture spéciale qui bloquerait le signal des émetteurs dont il la savait affublée avant de lui retirer ses chaussures et de les enfermer dans une boite en plomb. Ainsi assuré de ne pas être suivi, il donna le signal du départ au chauffeur qui s’engouffra calmement dans la circulation tokyoïte…

Ils passèrent devant l’immeuble de briques rouges et Mick leva un regard froid vers le sommet où il vit Ryo fumant une cigarette, l’air sombre.

- C’est à mon tour de prendre soin d’elle, l’ami., murmura-t-il.
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Jeu 11 Mar - 20:44
Chapitre 6

- Même si ce sera peut-être la dernière que nous aurons !

La phrase tourna en boucle dans la tête de Ryo pendant un long moment après qu’elle fut hors de vue. Elle allait partir. Il avait réussi à la pousser à bout et elle allait partir… Leur dernière conversation pour se dire quoi ? Va-t-en, fais ta vie ? Reste avec moi ? Non… même encore maintenant au bord du précipice, il n’arrivait pas à franchir le pas. Pourtant, il aimait Kaori comme il n’avait jamais aimé aucune autre femme. Elle avait transformé sa vie, lui apportant de la gaieté, de la chaleur et de la légèreté, et c’était justement au nom de tout cela qu’il refusait de la laisser rentrer encore plus dans son monde… même s’il était conscient de la faire souffrir en le faisant.

Après l’avoir vu disparaître au coin de la rue et s’être extirpé de la massue, il était rentré et avait été vidé quelques chargeurs dans la salle de tir mais il étouffait entre les quatre murs et le bruit des balles, même atténué par les deux cartouches dans les oreilles. Ce qu’il faisait lui rappelait trop ce qu’il était, un homme qui n’était pas fait pour elle. Un homme normal irait marcher, maugréer, taper de la balle, il n’irait pas tirer des balles… Alors il avait tout rangé et était monté sur le toit fumer une cigarette puis une deuxième.

Il regarda les voitures passer sans réellement les voir, jeta un œil vers l’appartement de ses amis puis vers la rue d’où elle devrait arriver. Il ne savait pas s’il voulait la voir revenir vite ou non. Il appréhendait la conversation qu’ils devaient terminer et quelque chose lui disait que rien n’y ferait : il n’y échapperait pas. Kaori ne le laisserait pas se défiler… et elle aurait raison. Leur relation s’était trop détériorée pour pouvoir continuer ainsi. Ils se mettaient en danger mutuellement. Ils devaient rectifier le tir ou arrêter les frais avant qu’il ne soit trop tard.

Ryo poussa un long soupir et redescendit à l’appartement, s’arrêtant devant la chambre de sa partenaire. Il poussa la porte et pénétra, se faisant l’effet d’un voleur. Pour une fois, il ne voulait pas fouiller sa lingerie mais juste réfléchir en bonne compagnie. Il s’assit sur le bord de son lit et attrapa le cadre-photo. Il sourit en voyant le sourire exalté de sa partenaire et l’air navré de Maki que démentait le petit sourire en coin dont il avait le secret, signe de la profonde tendresse qu’il éprouvait pour sa jeune soeur.

- C’est moi qui aurais dû partir, pas toi. Elle a besoin de toi, de quelqu’un sur qui s’appuyer, pas d’un type incapable de voir plus loin que sa propre personne., murmura-t-il.
- Je ne la mérite pas, Maki. Je l’aime comme un fou mais je ne la mérite pas.

Il reposa le cadre sur la chevet et redescendit, fermant soigneusement la porte. Il regarda la pendule du salon et vit qu’une heure seulement s’était écoulée. Pourtant, il avait l’impression que ça faisait une éternité qu’elle était partie. Il se décida alors à sortir et aller voir ses indics pour voir si d’autres informations étaient remontées pendant la nuit. Il avait l’intuition que tout se passerait très vite et qu’il devrait rester sur la brèche. Ses pas le menèrent dans Shinjuku et il retrouva Kenny, un de ses plus anciens et plus fidèles informateurs.

- Tu as du nouveau pour moi ?, lui demanda-t-il discrètement.
- Il y a du recrutement en cours dans les bas-fonds. Il paraît que ça bouge pas mal dans les quartiers industriels en friche du nord.
- Vraiment ? Du genre ?
- Le nouveau recherche des dealers qui veulent s’associer et des tueurs. Fais gaffe, Ryo.
- Je fais toujours attention, Kenny. Merci pour les infos., fit le nettoyeur, se tournant pour poursuivre son chemin.
- Ton pote a refait surface. Tu dois être content…, lança l’indic.

Ryo se retourna brusquement et revint vers lui.

- Tu as vu Mick ?
- Pas toi ? Pourtant, il a rencontré Kaori. Il l’a même emmenée parce qu’elle a fait un malaise à la gare. Il te l’a ramenée, non ?, lui apprit-il.
- On a dû se croiser., mentit Ryo, gardant un calme apparent.
- Je te laisse.

Au pas de course, il gagna la gare, à deux pas de là, pour voir s’il y avait des indices quelconques ou un message mais ne trouva rien. Il regagna l’appartement, toujours vide de toute présence, puis alla vérifier l’appartement de Mick, vide également. Regagnant sa voiture, il traça jusqu’au Cat’s et entra en trombe dans la salle.

- Kaori est ici ?, demanda-t-il sans préambule.

Miki et Umi le regardèrent surpris.

- Elle est rentrée hier soir ?, l’interrogea la barmaid.
- Ce matin et elle est partie à la gare après. Est-ce qu’elle est ici ?, répéta-t-il, rongeant son frein.
- Non. On t’aurait prévenu sinon., répondit-elle, inquiète.

Sans demander, Ryo prit le téléphone et appela la clinique mais Kazue lui confirma que Kaori n’était pas là non plus. Sans plus d’explication, il ressortit et se dirigea côté passager dans la mini, sortant le dispositif de repérage. Il tripota différents boutons, chercha, réessaya puis finit par tout ranger en claquant du poing sur le tableau de bord de rage et d’impuissance. L’air sombre, il retourna dans le café et prit place au comptoir.

- Tu vas enfin nous expliquer ce qu’il se passe !, s’énerva Miki.
- Mick a enlevé Kaori., répondit-il d’une voix blanche.
- Les émetteurs…
- Il a dû bloquer leur signal. Je n’arrive pas à la localiser.

Il posa la tête entre ses mains, ne comprenant pas ce qu’il se passait. Tout semblait lui échapper.

- Mick tient à Kaori. Alors pourquoi ?, fit Miki, incrédule.

Baissant la garde, Ryo leva un regard empli d’incompréhension vers elle. Il ne savait pas quoi lui répondre.

Laissant échapper un léger gémissement, Kaori ouvrit les yeux et observa les lieux. Elle était allongée sur un lit dans ce qui ressemblait à une chambre d’hôtel un peu défraîchie. Elle se remémora les derniers évènements et tourna la tête, sentant sa présence. Mick était assis dans un fauteuil non loin, les jambes croisées, un regard serein posé sur elle.

- Bonjour, ma belle., l’accueillit-il.
- Reste allongée pour le moment., lui demanda-t-il, la voyant prête à se relever.
- Je sais que tu dois avoir beaucoup de questions à me poser mais ça attendra. Pour le moment, tu vas suivre mes consignes à la lettre et en vitesse. On est d’accord ?, lui ordonna-t-il, d’un ton qui n’admettrait aucun refus.
- Tu vas te déshabiller sous la couverture. Entièrement. Vêtements, sous-vêtements, bijoux, tout.
- Mick ?, fit-elle d’une toute petite voix.
- Tu laisses tout sous la couverture bien au fond et tu pourras enfiler les vêtements que j’ai préparés pour toi sur cette chaise., lui expliqua-t-il, désignant une chaise à deux mètres du lit.

Kaori le regarda stupéfaite. Elle ne pouvait imaginer que son ami lui demandait de se dévêtir ni la raison pour laquelle elle devrait le faire. Que se passait-il ?

- La couverture bloque le signal des émetteurs que tu portes., lui expliqua-t-il, voyant son regard.
- Pourquoi Mick ?, l’interrogea-t-elle.
- Exécution, Kaori ! Je n’ai pas de temps à perdre., fit-il en élevant le ton.
- Et n’imagine même pas sortir une massue., la prévint-il, lui montrant la crosse de son pistolet.

Elle cligna des yeux, sortant de sa léthargie. Elle retira donc ses vêtements mais fut incapable de sortir de son abri.

- Tu ne veux pas me passer les vêtements, s’il te plaît ?, lui demanda-t-elle.
- Non. Je veux être sûr que tu n’as plus rien sur toi. Ne t’inquiète pas, je ne te sauterai pas dessus…, la rassura-t-il.
- Pas encore…, murmura-t-il.

Elle lui adressa un regard nerveux et sortit de la couverture, nue. Elle cacha sa poitrine et son intimité du mieux qu’elle put avec ses bras et ses mains mais Mick se leva, la détaillant du regard, et repoussa ses modestes barrages pour dégager la vue.

- Ne fais pas ça., bredouilla-t-elle, humiliée.
- Tu es encore plus belle que je ne l’imaginais, ma chérie., lui avoua-t-il, caressant tendrement l’ovale de son visage.
- Habille-toi.

Il se retourna et alla à la fenêtre, lui tournant le dos. Kaori enfila la tenue préparée, se sentant relativement mal à l’aise dans la robe très ajustée qu’il lui avait choisie.

- Tu m’expliques ce que je fais ici maintenant, Mick., lui demanda-t-elle assez sèchement.

Il se retourna et elle vit l’éclair de plaisir dans ses yeux.

- Elle te va à ravir comme je le pensais. Tu es très séduisante, ma chérie.
- Arrête avec tes ma chérie et ma douce et ma Kaori !, s’énerva-t-elle.
- Qu’est-ce que je fais ici ?, répéta-t-elle.
- Tout dépend de toi., répondit-il.

Elle l’observa nerveusement. Elle ne savait pas quoi penser de son attitude. Ses paroles contrastaient avec ce qu’elle ressentait au plus profond d’elle-même. C’était comme s’il jouait un rôle mais, en même temps, son regard, d’habitude plus amical, semblait tout autre… Elle était perdue.

- J’ai vu ce qui s’est passé hier et ce matin, Kaori. Tu dois admettre qu’avec lui, c’est fini., commença-t-il.
- Non…, objecta-t-elle, la gorge serrée.
- C’est un idiot qui ne sait pas t’aimer comme il devrait. Mais tout cela peut se finir maintenant, Kaori. Je t’aime et je suis là pour toi. C’est à toi de choisir quel sera ton chemin. Deviens ma partenaire personnelle et professionnelle., lui proposa-t-il.
- Tu es mon ami… Tu as Kazue., lui répondit-elle.
- Kazue n’est pas la femme de ma vie. Je me suis bien amusé avec elle mais c’est toi que j’attendais et le moment est venu. Je ne veux plus de ton amitié, Kaori. Je te veux toi toute entière., lui dit-il, plongeant son regard dans le sien.
- Et si je refuse ?

Il arbora un air froid et s’approcha d’elle jusqu’à être à deux centimètres de son visage. Malgré son anxiété, elle ne flancha pas et soutint son regard.

- Tu vis avec moi ou tu meurs avec lui., répondit-il, sans ciller.
- Tu ne ferais jamais cela., murmura-t-elle.
- En es-tu si sûre ? C’est mon travail après tout.
- Alors pourquoi ne l’as-tu pas fait avant ?, le défia-t-elle.
- Avant, tu l’aimais de manière absolue. Aujourd’hui, j’ai une chance. Dis-moi que c’est faux, Kaori. Dis-moi que, dans ton coeur, tu l’aimes toujours de manière inconditionnelle, que tu n’envisages pas de tout arrêter.
- Je l’aime., balbutia-t-elle, baissant le regard.

Elle l’aimait toujours malgré les difficultés. C’était une chose dont elle était sûre même si c’était complètement irrationnel avec la façon dont il la traitait. Mick vit une larme rouler le long de sa joue et posa la main sur son visage pour le relever.

- Mais tu ne peux plus continuer ainsi, n’est-ce pas ?

Elle secoua négativement la tête. Il la prit doucement dans ses bras et elle tenta de se dégager. Elle ne voulait plus être équivoque avec lui. Elle n’attendait que son amitié. Il resserra son étreinte sur elle, empêchant tout mouvement de sa part.

- Reste. Je ne veux rien d’autre de toi pour le moment. Je suis là pour toi, Kaori., lui dit-il.
- Je ne peux pas te laisser faire et gâcher tout ce qui a été construit depuis des mois., répondit-elle, tentant à nouveau de s’écarter en vain.
- Tu as surtout besoin de réfléchir., déclara-t-il d’un ton posé.

Il la lâcha mais prit sa main, la forçant à le suivre. Ils sortirent alors de la chambre et il l’emmena à travers les couloirs, montant deux étages avant de toquer à la porte d’un bureau. Il pénétra sans attendre et ils firent face à un homme d’une cinquantaine d’années qui leva sur eux un regard qui fit frissonner la jeune femme. Un moment, ils restèrent tous trois immobiles et silencieux puis l’homme se leva et les approcha.

- Jack, je te présente Kaori. Kaori, c’est Jack., les présenta Mick.
- C’est la partenaire de Saeba ?, lui demanda celui que Kaori présuma être Jack Nichols.
- Oui.
- Tu as réussi à la rallier à ton point de vue ?, poursuivit l’homme.

Mick jeta un regard perçant à son amie puis se tourna de nouveau vers son homologue.

- Non mais ce n’est qu’une question de temps.
- Elle sait ce qu’elle risque ?
- Elle sait que c’est votre camp ou la mort., rétorqua Kaori, relevant la tête de défi.

Elle n’aimait pas cet homme. Il ne lui inspirait que dégoût. Tout était froid en lui. Elle ne comprenait pas comment Mick pouvait s’entendre avec un homme comme lui, comment il pouvait leur avoir tourné le dos.

- Je n’ai pas pour habitude de trahir les miens., ajouta-t-elle, lançant un regard vers son ami.
- Ce n’est pas une question d’habitude. C’est une question d’adaptation, Kaori., répondit Nichols.
- Il faut savoir où sont ses intérêts. Vous avez le choix entre mourir dans l’ombre d’un homme qui ne vous aime pas ou vivre dans la lumière d’un homme qui vous adore…
- Jack… gronda Mick.
- Vu l’énergie que tu as mis à me convaincre que la dénommée Kazue n’était qu’une amusette et qu’elle était la femme de ta vie, je ne fais qu’établir un fait, Mick…, répliqua l’homme, désignant la nettoyeuse.
- Je peux d’ailleurs très bien comprendre ce que tu trouves à cette jeune femme qui ne semble pas manquer de piquant., ajouta-t-il, caressant le visage de Kaori.

Celle-ci repoussa sèchement la main, lui lançant un regard empli de mépris. Nichols se mit à rire, amusé, puis lui saisit le menton brusquement, le serrant à lui faire mal.

- Apprends à rester à ta place, ma jolie. Il se pourrait que toi et moi fassions plus ample connaissance si je dois te mater., lui dit-il d’une voix dure.

Kaori sentit un grand froid l’envahir. Sa vie devenait un enfer. Tout partait de travers… Elle lisait dans le regard de cet homme toute la violence dont il était capable et priait pour que Ryo la retrouve et vite. Ils entendirent tous deux le déclic d’un chien et tournèrent la tête vers Mick qui avait sorti son arme et l’avait dirigée vers son ancien partenaire.

- Si tu la touches, je te tue., le prévint-il froidement, dardant un regard bleu métallique sur lui.

Les deux hommes s’affrontèrent du regard un instant puis Mick se mit à rire quand Jack lâcha Kaori.

- Je t’ai eu, mon vieux. Tu verrais ta tête., plaisanta-t-il.
- La prochaine fois, je t’en colle une, Mick. Quant à vous, il vous reste vingt-quatre heures pour décider si vous voulez vivre ou mourir., fit Nichols, un regard noir posé sur la jeune femme.
- J’ai à faire. Reviens me voir dans deux heures, Mick., lui ordonna-t-il.

Sans un mot, ce dernier entraîna Kaori hors de la pièce et la ramena dans la chambre. Sur le chemin, ils croisèrent plusieurs hommes qui saluèrent l’américain et détaillèrent d’un œil intéressé la nettoyeuse qui ne se sentait pas du tout rassurée. La porte de la chambre refermée, elle se retourna vers son ami et le gifla violemment.

- Comment oses-tu dire que tu t’es bien amusé avec Kazue ?, hurla-t-elle.
- Comment peux-tu la traiter de manière aussi ignoble ? Elle t’aime à la folie, elle a tout donné pour toi !

Mick posa un regard dur sur elle et s’approcha.

- J’ai abandonné le combat pour ton coeur parce qu’il semblait prêt à s’engager. Ca fait des mois maintenant. J’ai eu le temps d’aller en enfer et d’en revenir et rien n’a changé. J’ai passé le temps avec elle mais, maintenant, je ne veux plus prétendre. Je t’aime, Kaori. Je t’ai toujours aimée et, même si je dois te mettre en danger en t’attachant à moi, je ne ferai pas la même erreur que lui. Je préfère vivre et t’aimer peu longtemps que te tenir éloignée de moi en nous rendant tous deux malheureux jusqu’à nos vieux jours. Tu comprends ?, lui dit-il.

Il posa une main sur sa joue et posa un regard qu’elle connaissait bien sur elle. C’était le regard qu’il avait quand ils parlaient de Ryo. Essayait-il de lui passer un message ? Est-ce que ce message le concernait lui ou Ryo ? Que devait-elle comprendre ? Elle sentit une larme rouler sur sa joue et il l’essuya du pouce.

- Tu es fatiguée, ma douce. Ce n’est pas étonnant vue la nuit blanche que tu as passée., remarqua-t-il.
- Pourquoi tu m’as suivie, Mick ?, lui demanda-t-elle.
- Te protéger. Je prends soin de toi, ma belle.
- Mais la fusillade au café, c’était vous aussi, non ?, le contra-t-elle.
- Ah ça oui. Le métier est parfois contraignant, tu le sais bien…, soupira-t-il.
- Tu aurais pu tuer ta femme…, constata-t-elle, amère, en pensant à Kazue et leur bébé.
- Pourquoi t’es-tu exposée autant aussi ? Tu devrais penser un peu plus à toi., lui reprocha-t-il.

Kaori repoussa doucement sa main et s’écarta de lui, croisant les bras autour d’elle. Elle avait froid. Elle ne savait plus quoi penser. Tout cela était trop frais : sa dispute avec Ryo, ses retrouvailles avec Mick, son enlèvement car elle ne pouvait nier qu’il l’avait enlevée. Elle avait besoin de recul pour faire le point. Elle sentit un tissu être posé sur ses épaules : Mick l’avait recouverte d’un gilet.

- Tu devrais vraiment te reposer, ma Kaori., lui conseilla-t-il doucement, les mains toujours posées sur elle.
- Laisse-moi rentrer…, murmura-t-elle.
- Je ne peux pas et je ne veux pas. Tu as le marché entre tes mains, Kaori. Meurs avec lui ou vis avec moi., lui répéta-t-il.
- Comment peux-tu me demander de te livrer l’homme que j’aime ? Parce que je suppose que c’est ce que vous attendez de moi : que je l’amène ici…
- Oui. Tu le feras que tu le veuilles ou non. Sa fin est signée. La seule chose que tu peux changer, c’est la fin de ton histoire., lui dit-il, approchant son visage contre le sien.

Kaori s’écarta de lui et lui fit face, les poings serrés de colère.

- Ryo a bien des défauts mais il ne jouerait pas ma vie pour t’attraper, ni celle de Kazue. Comment peux-tu déclarer que tu m’aimes et me demander de faire quelque chose qui me tuera au propre comme au figuré ? Ce n’est pas de l’amour ça, Mick ! C’est de l’égoïsme., lui asséna-t-elle.
- Prends-le comme tu veux. Je t’aime, Kaori, et je te veux près de moi mais, si je ne peux pas t’avoir, alors tu mourras., rétorqua-t-il, le regard dur.

Sous le choc, elle recula d’un pas. Elle était de plus en plus perdue. Mick s’aperçut de son désarroi et se reprit. Il passa une main nerveuse dans ses cheveux et s’approcha de nouveau d’elle.

- Ecoute, tu es trop nerveuse. Repose-toi un peu. Je ferme la porte à clef, ainsi tu ne risqueras rien…
- A la maison non plus, je ne risque rien…, pipa-t-elle, lui lançant un regard noir.
- Considère ce lieu comme ta nouvelle maison. Considère-moi comme ta nouvelle maison, Kaori., répondit-il, patiemment.
- Tu ne m’offres pas un foyer, Mick, mais une prison.

Contre toute attente, il sourit, amusé.

- Pour commencer… Il ne tient qu’à toi de changer la donne, ma belle. Tu pourrais obtenir beaucoup en sacrifiant peu : l’amour, le plaisir, un mari, des enfants…, lui fit-il miroiter.
- Si sacrifier l’amour de sa vie volontairement représente si peu pour toi, je ne veux pas de tout cela. Je pensais que tu me connaissais mieux que cela., répondit-elle en relevant le menton de défi.
- Ton entêtement, ta fierté, ton sens de l’honneur… Ce sont toutes ces petites choses qui me font craquer chez toi., lui avoua-t-il.
- Ca et ton corps de déesse., ajouta-t-il d’un ton chaud.

Malgré sa colère, elle ne put s’empêcher de rougir. Satisfait de l’avoir quelque peu ébranlée, il l’attrapa par le poignet et l’attira à lui fermement.

- Je trouverai le moyen de te faire changer d’avis., lui dit-il tendrement.
- Repose-toi un peu, ma douce. Réfléchis bien à ce que je t’ai dit.

Il la regarda intensément puis déposa un baiser sur son front avant de la pousser vers le lit. Il la laissa s’allonger et ramena la couverture sur elle. Furieuse, elle se tourna sur le côté, niant sa présence. Il ne se mit pas en colère et sourit tendrement. C’était la Kaori qu’il connaissait et aimait. Il laissa un doigt descendre le long de sa joue puis sortit de la chambre.

Kaori entendit la porte se refermer et poussa un long soupir tremblant. Elle avait les nerfs à fleur de peau et ne rêvait que d’une chose : retrouver Ryo et sa présence rassurante. Elle ne put s’empêcher de se demander s’il la chercherait après la discussion qu’ils avaient eue. Pensait-il qu’elle s’était enfuie pour ne pas l’affronter ? S’inquiétait-il pour elle ? Savait-il seulement qu’elle avait été enlevée ? Elle réprima les larmes qui lui montaient aux yeux. Elle repensa à tout ce qu’ils avaient vécu ensemble et une seule conclusion s’imposa à elle : il la chercherait.

Laissez moi vos commentaires : Ici
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Ven 12 Mar - 19:42
Chapitre 7

- Je ne vais pas attendre de savoir ce qui passe par la tête de Mick pour essayer de la retrouver., affirma soudain Ryo.
- Que vas-tu faire ?, lui demanda Miki.

Le nettoyeur resta silencieux un instant, réfléchissant à la vitesse de l’éclair. Il regarda tour à tour Umi et sa femme.

- Umi, j’ai besoin que tu actives tes indics pour avoir des infos en plus de ce que je vais remonter des miens. Miki, j’ai besoin que tu veilles sur Kazue. Je pense que vous serez plus en sécurité à la clinique.
- Je veux chercher Kaori avec vous., s’offusqua l’ex-mercenaire.
- Miki, je ne suis pas encore sûr que Kazue soit rayée des listes de cibles potentielles. La clinique est normalement sûre mais ni le Professeur ni elle ne pourront se défendre si elle venait à être attaquée. J’ai besoin de toi là-bas., lui expliqua-t-il patiemment, plongeant un regard confiant dans le sien.
- D’accord. Je dis quoi à Kazue ? Je ne vais pas lui dire que Mick a enlevé Kaori tout de même ?
- Non. Dis-lui… dis-lui qu’on est en planque.

Miki acquiesça et se dépêcha d’aller fermer la boutique. Ryo décrocha le téléphone et laissa un message à son inspectrice préférée, lui intimant de le rejoindre dix minutes après à leur lieu de rendez-vous habituel. Il n’avait pas de temps à perdre à l’attendre.

- Je vais voir Saeko. Combien de temps te faut-il pour tes indics ?
- Deux heures., répondit le géant.
- On se retrouve ici si ça te va., lui proposa le nettoyeur.

Umi acquiesça et Ryo s’éloigna.

- On la retrouvera, Ryo., affirma Umi soudain.

Ryo s’arrêta la main sur la poignet.

- Je l’espère, Umi. J’espère qu’on les retrouvera tous les deux et que les explications de Mick seront suffisantes pour que je ne lui colle pas une balle dans la tête, ami ou pas., gronda-t-il.

Il n’attendit pas de réponse de son ami et sortit du café. Dix minutes plus tard, il retrouvait Saeko dans le parc à leur endroit habituel. Lorsqu’elle arriva, l’inspectrice se posta face à lui, les bras croisés et l’air très irrité.

- Je suis venue mais je ne suis pas à ta disposition, Ryo., lui fit-elle d’un ton pincé.
- Mick a enlevé Kaori., lui apprit-il d’un ton neutre.

Surprise, elle décroisa les bras et le dévisagea sérieusement. Elle l’observa un moment, notant les quelques petits signes qui montraient que l’affaire le touchait plus qu’il n’y paraissait.

- Quand ?
- Il y a environ une heure à la gare. J’ai besoin que tu traces le véhicule qui l’a emmenée et aussi des informations que tu as sur Nichols et le réseau qu’il monte. Apparemment il crèche dans les quartiers industriels du nord.
- C’est tout ?, demanda-t-elle, légèrement agacée par le ton qu’il employait.
- Oui. Le tout pour dans deux heures, ce sera nickel.
- Tu n’as rien oublié, Ryo ?
- Attends… ah oui, s’il te plaît, Saeko., fit-il, lui envoyant un sourire ironique.

Elle réprima un léger sourire d’amusement et lui lança un regard consterné.

- Tu as de la chance que ce soit pour Kaori, sinon je t’enverrai paître., lui déclara-t-elle.
- Qu’est-ce que j’y gagne ? Une réduction de mes dettes ?
- Ah non ! C’est pour Kaori : tu négocies un paiement en nature avec elle., répondit-il d’un ton outré.
- Je pense que je saurai m’arranger avec elle pour que ça vaille le coup., répliqua-t-elle en lui faisant un clin d’oeil.

Ryo fronça les sourcils en se demandant ce qu’elle pourrait bien manigancer… Elle ne lui laissa pas le temps de lui poser la question et s’en alla, se déhanchant sensuellement. Il se leva et repensa à leur négociation qui n’en avait pas été une. Si elle avait insisté, il aurait ôté un certain nombre de coups de sa liste, voire la totalité. Kaori en valait la peine même si les vieux réflexes avaient la vie dure.

Il se demanda comment elle allait, si elle était maltraitée, si elle était toujours en colère contre lui. Il s’interrogea de nouveau sur les motivations de son ami. Son coeur lui disait de lui faire confiance, que Mick ne pouvait pas les trahir ainsi et renier tout ce qu’ils avaient vécu. Son expérience, en revanche, lui rappelait que même de fidèles amis s’étaient retournés contre lui, que son propre père l’avait drogué et avait tenté de le tuer, alors Mick pouvait très bien avoir changé de camp… Après tout, lui aussi était venu pour l’exécuter et nul doute qu’il l’aurait fait si Kaori avait cédé.

Quel était son rôle dans cette drôle de pièce ? Etait-elle un simple appât ou Mick ayant changé de camp tenterait-il de la faire sienne ? Il se sentit soudain en rage à l’idée qu’il pourrait toucher à son ange de miséricorde, profaner son corps et l’amener là où il n’avait jamais su se résoudre à l’emmener autrement que dans ses rêves bien qu’il en mourut d’envie… Mick s’était incliné une fois mais il l’avait fait parce que Kaori avait tenu bon, parce qu’elle était amoureuse de lui à un tel point que son attachement semblait inébranlable. Etait-ce encore le cas aujourd’hui ? Face à son indifférence et son mépris, allait-elle encore résister à la séduction de leur ami s’il y mettait du sien ? Ryo voulait y croire mais il n’en était plus si sûr. Elle aussi avait ses limites et il devait les avoir allègrement franchies ces derniers temps…

Voyant son premier indic non loin, il se recomposa un masque neutre et passa plus d’une heure à harceler et pressurer la plus petite information de chacun de ceux qu’il croisa. Il en profita pour faire passer le message qu’il ne craignait ni Nichols ni Mick et était prêt à les affronter en personne si ces rats s’en sentaient le courage. Plus d’un leva un sourcil interrogateur à ces mots mais aucun ne pipa mot et bientôt le message courait dans toute la ville.

- Saeba montre les crocs., fit Nichols à Mick un peu plus tard, jaugeant son associé du regard.
- Je t’avais dit qu’il ne se laisserait pas faire facilement. C’est un homme dangereux., répondit l’américain.
- Il se donne surtout de grands airs.
- Ne le sous-estime pas, Jack.
- Tu en es où avec la fille ?

Mick s’assit nonchalamment dans un fauteuil lui faisant face et croisa les jambes. Il arborait un petit sourire satisfait assorti d’un regard prédateur.

- Ce soir, elle sera définitivement acquise à ma cause. Elle me mangera dans la main., lui assura-t-il.
- Tu as l’air bien sûr de toi… Elle est pourtant très accrochée à Saeba d’après nos informations., répliqua Nichols, les sourcils froncés.
- Tu oublies une chose : je la connais. Je sais sur quel bouton appuyer pour l’ébranler et, actuellement, il n’en faudra pas plus pour qu’elle devienne raisonnable., affirma Mick, sûr de lui.
- D’ailleurs, fais en sorte qu’on ne soit pas dérangés cette nuit. Le plan est en route, ma présence ne vous sera pas utile. J’ai quelques mois à rattraper., ajouta-t-il avec une lueur déterminée dans le regard.
- Ce n’est qu’une femme, Mick. Tu te laisses un peu trop emporter à mon goût., constata son interlocuteur, l’air pincé.
- Ce n’est pas n’importe quelle femme, Jack. Si nous l’avons de notre côté, ce sera un formidable atout : toutes les personnes dont tu pourrais avoir besoin l’apprécient. Elle est l’âme de Shinjuku. Elle t’ouvrira beaucoup de portes et tu auras l’appui de tout le réseau d’informateurs de Saeba. Elle mérite qu’on lui accorde ce temps dans notre schéma. Bon, il faut que je me prépare : ça fait longtemps que je n’ai pas défloré une jolie femme…, fit Mick en se levant, l’air satisfait.
- Non…, sourit Nichols, visiblement intéressé.
- Saeba n’y a pas touché ?
- Non, cet idiot l’a placée sur un piédestal. Ca m’arrange : quand elles sont innocentes, elles mélangent plus facilement plaisir et amour.

Ils se mirent à rire tous deux puis Mick ressortit du bureau, esquissant une grimace de dégoût une fois la porte fermée. Il rejoignit la chambre de Kaori et s’y glissa silencieusement. Elle dormait encore. Son air soucieux le chagrina quelque peu… Il se déchaussa et s’allongea à ses côtés, la regardant dormir.

Tirée du sommeil par le mouvement du matelas, Kaori ouvrit difficilement les yeux et croisa le regard de son ami. Surprise, elle recula et elle ne dut qu’à la célérité de l’américain de ne pas se retrouver à terre. Il l’attrapa par la taille et l’attira sur lui, sentant toutes ses formes pressées contre lui. Il laissa une main descendre jusqu’à ses fesses mais elle se repoussa brusquement.

- Lâche-moi., gronda-t-elle.

Elle se releva et s’éloigna de lui, serrant le gilet autour d’elle pour mieux se protéger. Mick ne se releva pas mais l’observa sérieusement.

- Tu as réfléchi ?, lui demanda-t-il.
- A quoi ? Savoir si je trahis ma famille pour en avoir une autre ?, répondit-elle, un regard dur posé sur lui.
- C’est ta vision des choses. Moi, je t’offre juste d’être enfin heureuse, d’avoir enfin tout ce que toute femme mérite de connaître : l’amour, le plaisir, le respect., dit-il en s’asseyant.
- Toute femme sauf Kazue alors., rétorqua-t-elle.

Elle le vit imperceptiblement raidir les épaules mais il lui tournait le dos et elle ne put voir l’expression de son visage jusqu’à ce qu’il se tourna vers elle, impassible.

- Elle trouvera un homme qui l’appréciera tout comme tu as enfin trouvé l’homme qui saura t’apprécier.
- Elle t’aime., objecta-t-elle.
- Et je sais que tu l’aimes lui mais tu apprendras à m’aimer. J’ai tellement de choses à t’offrir, Kaori., lui dit-il, s’approchant d’elle.
- Je ne peux pas, Mick. Ca ne marche pas comme ça. Tu es mon ami., lui répondit-elle, reculant jusqu’à se retrouver bloquée par le mur.
- Laisse-moi au moins une chance de te prouver que tu as tort.

Il était à sa hauteur et avait posé les mains de chaque côté de son visage. Elle le regardait avec ses grands yeux qui le faisaient fondre à chaque fois, yeux qui reflétaient sa peur et son incompréhension.

- Je ne veux pas te perdre., murmura-t-elle.
- Moi non plus Kaori., répondit-il approchant son visage du sien.
- Tu es mon ami.
- Je ne veux plus l’être.

Elle s’échappa de son emprise alors qu’il allait l’embrasser mais il la rattrapa par le poignet, l’attirant à lui. Il la plaqua contre le mur et posa ses lèvres sur les siennes, se pressant contre elle pour limiter ses mouvements. Il sentait les larmes rouler le long de ses joues mais n’en tint pas compte. Il ne pouvait pas.

Kaori essaya de se dégager de son emprise mais, n’y arrivant pas, elle se statufia. Elle ne voulait provoquer aucune réaction de son côté. Elle sentait ses lèvres meurtrir les siennes, sa langue pointant régulièrement pour envahir sa bouche, mais elle résista. Quand il finit par s’écarter de sa bouche, elle le regarda, blessée.

- Comment peux-tu faire cela ?, murmura-t-elle.
- Par amour, ma Kaori., répondit-il sans aucun remords apparent.

Il caressa l’ovale de son visage, passant une mèche derrière son oreille. Il la regardait intensément comme s’il tentait de sonder son âme et elle en était mal à l’aise.

- Tu ne t’es jamais demandée ce que ça aurait donné entre nous ?, l’interrogea-t-il.
- Jamais. Tu es mon ami.
- Cesse de me le rabâcher, Kaori. Moi, je me suis toujours demandé ce que ça ferait de t’embrasser. Il s’est toujours arrangé pour me faire obstacle.

Il approcha de nouveau son visage du sien et posa les lèvres sur les siennes. Elle se blinda contre tout ce qu’elle ressentait et se concentra sur Ryo. Il avait empêché Mick de l’approcher… Elle ne s’en était même pas rendue compte. Il l’avait donc protégée d’autres prétendants, la gardant pour lui… Elle aurait peut-être dû être fâchée mais elle se sentait flattée. Il s’écarta de nouveau d’elle.

- Tu ne me faciliteras pas la tâche., constata-t-il.
- Non. Je ne serais pas celle qui fera voler en éclats tout ce qui a été construit., répondit-elle, déterminée.
- Kaori, tu seras à moi d’ici ce soir. Les choses seront plus faciles si c’est volontaire., la prévint-il.

Elle leva la main pour le gifler mais il l’arrêta, serrant son poignet.

- Il est fini le temps où je me laissais corriger.
- Tu veux me violer, Mick. Tu te rends compte de ce que tu fais ?, lui demanda-t-elle d’une voix blanche.
- Je ne te violerai pas. Tu te donneras à moi.
- Pourquoi je le ferai ?
- Parce que tu es la seule à savoir qui je suis., lui dit-il, plongeant son regard dans le sien et portant la main de la nettoyeuse contre son coeur.

Elle leva le regard vers lui, surprise, et il le soutint, très sérieusement.

A des kilomètres de là, Ryo et Umibozu rassemblaient les informations qu’ils avaient réunies en très peu de temps. Ils tentaient d’établir un schéma de l’organisation de Nichols, organisation qui se mettait rapidement en place, l’américain ne donnant pas dans le détail : toute personne qui refusait de le suivre était éliminée, purement et simplement. Ils avaient donc tout intérêt à le retrouver rapidement non seulement pour leurs deux amis mais également pour éviter que la ville ne devint un cimetière à ciel ouvert.

Saeko arriva en cours d’après-midi avec les bandes de vidéo-surveillance au café. Ils prirent place tous trois devant les écrans et visionnèrent les films attentivement.

- Là ! C’est Mick avec Kaori dans les bras., indiqua Ryo.
- Vu la direction, la bande suivante c’est celle-ci., fit Saeko, chargeant une autre vidéo.

Ils regardèrent le film à la recherche de la voiture et la suivirent un moment.

- Ils sont passés sous mon nez…, murmura Ryo, blême.
- J’étais sur le toit à cette heure-là. Elle est passée sous mon nez et je ne l’ai même pas sentie…

Il se leva, les nerfs à vif. Il l’avait abandonnée. Il avait failli et elle était maintenant entre les mains d’un fou. Il avait besoin de sortir toute cette colère et se dirigea machinalement vers le comptoir mais la main d’Umi l’arrêta.

- Non. Ca ne servira à rien de tout casser., lui dit-il.
- Utilise ton énergie à autre chose. La sauver par exemple.
- Tu as raison, Umi., admit-il.
- On reprend le visionnage., proposa Saeko.

Ils passèrent plus de deux heures à remonter le parcours du véhicule mais le perdirent aux abords du quartier industriel, là où s’arrêtait la vidéo-surveillance urbaine pour laisser place à la vidéo-surveillance de la zone, depuis longtemps en berne, le quartier étant en friche. Ils avaient restreint le périmètre mais ce n’était pas suffisant pour tenter d’intervenir. Ils devaient au moins connaître le bâtiment concerné.

- Le soir tombe. On n’obtiendra plus rien. Je vais aller faire le tour des cabarets pour glaner d’autres informations. On se retrouve demain matin à la première heure ici, Umi ?
- Ca marche.
- Je passerai aussi pour plus d’informations à vous donner ou à recueillir pour orienter les recherches.
- Faites attention.

Ryo et Saeko sortirent du café et marchèrent quelques mètres ensemble jusqu’à la voiture de l’inspectrice.

- Ryo, ça va te faire ouvrir les yeux cette histoire ?, lui demanda-t-elle soudain.

Il la dévisagea un instant puis laissa un léger sourire fendre son visage, sourire sans gaieté toutefois.

- Je ne sais pas. Il y a beaucoup de choses en jeu…, répondit-il avant de se raidir.

Il attrapa l’inspectrice et la jeta à terre alors que des tirs de mitraillette jaillissait d’une voiture garée qui démarra en trombe.

- Ca va, Saeko ?
- Oui, oui. C’est la voiture qui a pris., répondit-elle d’une voix égale.
- Il vaut mieux cela que ta carrosserie., dit-il sur le ton de la plaisanterie.

Elle lui décocha un léger coup de coude par pur formalisme et appela le central.

- Tire-toi avant que mes collègues arrivent. Je ne voudrais pas perdre ma réputation de célibataire., lui enjoignit-elle.

Il s’esclaffa légèrement et la laissa. Il savait qu’Umi veillait non loin même s’il ne s’était pas manifesté. Il s’enfonça dans la nuit en direction du Kabuki.

- Arrête ça, je t’ai dit., tonna une nouvelle fois Kaori, excédée.
- Je n’arrêterai pas.

Ils jouaient au chat et à la souris depuis des heures maintenant. Elle fuyait, il lui sautait dessus, lui volant des baisers auxquels elle ne répondait pas. Elle s’était réfugiée dans tous les recoins de la pièce, tentant de le raisonner, mais il ne voulait rien entendre et la suivait inlassablement. Il avait fait tomber la veste et retroussé ses manches. A présent, il ouvrait les premiers boutons de sa chemise. Elle devait avouer qu’elle avait chaud à ainsi le fuir mais, pour rien au monde, elle n’aurait retiré son gilet. Elle luttait pour ne pas se laisser attendrir parce que Mick était bel homme et qu’elle le trouvait séduisant, surtout qu’il n’avait pas encore une seule fois arboré sa tête de pervers. Elle pensait à Ryo, en faisant son mantra pour tenir et continuer de lutter.

- Je te l’ai dit : ce soir, il n’y a plus de toi et moi, il y aura nous. Je t’en ferai prendre conscience que tu le veuilles ou non, ma chérie. Ca serait certainement plus plaisant volontairement, Kaori.
- Je ne veux pas, Mick !, objecta-t-elle, le coeur battant à tout rompre.
- Tant pis. Tu comprendras dans la douleur comme lorsque tu enfanteras de notre premier enfant., dit-il, haussant les épaules.
- Dans tes rêves !, gronda-t-elle.
- Dans mes rêves, tu es beaucoup plus docile… mais j’aime ton côté passionné, ma Kaori.

Il s’approcha d’elle et elle s’esquiva une nouvelle fois. Ayant cerné son comportement, il réussit à l’attraper et la jeta sur le lit sans ménagement.

- Assez joué. Passons aux choses sérieuses., fit-il, un regard déterminé et empli de désir posé sur elle.
- Non, Mick, ne fais pas ça., le supplia-t-elle.
- Je n’ai pas le choix si je te veux à mes côtés.

Il grimpa sur le matelas en faisant valser sa chemise dans les airs et se pencha sur elle. Elle se débattit mais il bloqua toutes ses attaques et l’immobilisa. Elle sentait son désir contre elle. Elle n’arrivait pas à croire à ce qui allait arriver, d’autant moins que Mick était concerné. Elle le vit se déshabiller prestement d’une main et sentit bientôt ses doigts s’affairer sur ses vêtements. Elle eut beau essayer de l’en empêcher, il parvint tout de même à la dévêtir et elle se retrouva nue contre lui.

- Ne fais pas ça. Je t’en prie., le supplia-t-elle une nouvelle fois.
- Tu verras, ma chérie. Quand tu auras testé, tu ne pourras plus t’en passer.

Elle sentit les larmes sortir au même moment où il posa ses lèvres sur sa gorge. Elle tenta de nouveau de sortir de son emprise mais chaque mouvement qu’elle faisait semblait l’exciter davantage. Elle s’immobilisa alors totalement. Elle tenta d’occulter l’effet de ses caresses et baisers sur son corps mais Mick savait se montrer tendre et patient. Il la connaissait si bien. Honteuse, elle se sentit réagir. Ca revenait à cela de dissocier le sexe des sentiments : avoir un corps qui disait oui quand le coeur disait non ? Elle se sentit coupable vis-à-vis de Ryo. C’était lui qu’elle aimait, à lui qu’elle voulait donner son corps. Ca avait toujours été ainsi.

- Laisse-toi aller, ma douce. Tu n’as pas à avoir honte. Tu as un corps fait pour l’amour.
- Pas avec toi, Mick. Pas avec mon ami.

Son regard se fit plus dur et elle sentit ses doigts sur son intimité. Paniquée, elle se cabra dans tous les sens pour échapper mais ne fit que lui offrir plus de latitude. Elle sentit soudain une puissante vague déferler et lui couper le souffle.

- Ton premier orgasme, ma chérie., se targua-t-il.

Kaori se mit à pleurer, humiliée, vidée. Ca ne pouvait pas être réel.

- Prête pour la suite ?, lui demanda-t-il.
- Non, ça suffit., hoqueta-t-elle.

Il sécha ses larmes tendrement et se pencha à son oreille pour lui murmurer quelques mots. Elle écarquilla les yeux sous le coup de la surprise puis croisa son regard. Il se glissa entre ses cuisses et elle poussa un hurlement de douleur accompagné de larmes. Il la serra contre lui alors que quelques gouttes de sang venaient tâcher le drap.
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Sam 13 Mar - 20:13
Chapitre 8

Lorsqu’il arriva au Cat’s le lendemain matin, rien ne laissait voir que Ryo avait passé une nuit blanche. Jusqu’à trois heures du matin, il avait fait la tournée des cabarets, réussissant à glaner quelques informations utiles, puis il était rentré dans l’optique de grappiller quelques heures de sommeil, ce qui n’aurait pas été du luxe vu qu’il n’avait pas dormi depuis soixante-douze heures. Il s’était donc mis au lit et avait patiemment attendu Morphée mais elle n’avait pas daigné se présenter. Il avait en revanche bien eu le temps de ressasser tout ce qui s’était passé avec Kaori non seulement les deux derniers jours mais encore plus en amont, depuis le mariage de Umi et Miki.

Il avait vraiment agi comme le dernier des crétins. Il avait foutu en l’air sept années de collaboration par peur de la perdre alors qu’elle était en danger avant même d’être sa partenaire. Certes, accepter d’en faire sa compagne renforcerait le capital-risque mais pas proportionnellement à ce qu’ils y gagneraient tous deux. Il devait quand même admettre que cesser de lutter contre ce qu’il ressentait le soulagerait d’une grande partie de ses soucis, que sa vie gagnerait certainement en douceur, ne serait-ce que par la disparition des massues et autres engins de torture, sans compter sur la tendresse que sa partenaire ne manquerait de lui prodiguer s’il la laissait faire. Ce dernier point restait néanmoins sensible. Il craignait de ne plus savoir se montrer dur quand cela serait nécessaire, qu’elle le ramollit d’une certaine façon… Saurait-il lutter contre cela ? Peut-être…

Il se tourna dans son lit, cherchant le sommeil. Il s’imagina les nuits avec elle, la passion d’avant-sommeil, le confort de ses bras pour dormir, la sensation de ne plus être seul enfin… Finies les nuits de beuverie et de drague infructueuse, finies les filles d’un soir, fini de faire le guignol dans la rue… Saurait-il s’y tenir ? Aurait-il la force de lutter contre ses démons pour ne se consacrer qu’à une seule femme ? Il pouvait le faire et il pouvait compter sur elle pour l’aider dans les moments de doute. Kaori savait l’aimer sans l’oppresser. La pression, il se l’était mis tout seul. La dernière question était : était-ils capables de remonter la pente ? Pouvait-elle lui donner une dernière chance ? Il se mit à l’espérer.

Ce fut donc d’humeur un peu plus légère qu’il se leva et se prépara avant de partir rejoindre ses amis. Il retrouva Umi et Saeko, arrivée quelques minutes plus tôt.

- Des nouvelles de Miki et Kazue ?, demanda-t-il d’abord.
- Elles vont bien étant données les circonstances. Kazue est inquiète mais elle tient le coup., répondit Umi.
- Bien. J’ai réussi à resserrer le périmètre dans la zone industrielle. Ils se trouvent dans l’une de ces zones., dit-il en indiquant trois endroits sur une carte de Tokyo.
- Ils ne seront pas là., fit Saeko, pointant l’une des zones.
- Il y a depuis une semaine des manœuvres coordonnées des forces de police, de l’armée et des pompiers. Ce serait inconscient de leur part.
- Ca ne nous laisse que deux zones alors., constata Umi.
- C’est encore trop. Le temps qu’on arrive et repère les lieux, ils fileront. On doit arriver en sachant où ils sont.

Tous trois réfléchirent un moment puis Saeko releva les yeux.

- Je peux essayer d’avoir accès aux vidéos prises par les hélicoptères qui participent aux manoeuvres. Elles sont principalement ciblées sur la zone écartée mais le champ ne s’arrête pas à cela. Les deux autres zones sont assez proches pour pouvoir peut-être en tirer quelque chose., pensa-t-elle.
- Essaye. On est coincés jusque là alors que Nichols étend son réseau., fit Ryo, pensant à Kaori qui était entre leurs mains.

Saeko partit sans tarder, laissant les deux hommes seuls. Ils attendirent plus de deux heures avant de la voir revenir avec les bandes en question qu’elle les laissa visionner. Une heure plus tard, ils avaient repéré les lieux, obtenu les plans de l’inspectrice et se préparèrent à intervenir.

Kaori se réveilla péniblement, une douleur insoutenable lui vrillant le crâne. Elle voulut se lever mais un bras pesait sur sa taille. Elle se rendit alors compte qu’un corps d’homme nu, et en forme, reposait contre son dos et tout lui revint en mémoire. Elle réprima les larmes qui lui montèrent aux yeux et se demanda comment sortir de là, de cet enfer. Elle ne pouvait que se fier à Mick pour sa sécurité immédiate et sur Ryo pour la sortir de là.

Elle avait eu le temps de voir qu’elle se situait bien trop haut pour pouvoir sortir par la fenêtre, que les issues et bouches d’aération avaient été scellées et il ne restait pour sortir que la porte qui était fermée par une clef que Mick détenait. Même si elle réussissait à sortir de la chambre, il lui faudrait descendre une dizaine d’étages et réussir à sortir de là sans être vue. Elle ne connaissait pas la configuration de l’immeuble ni celui de la zone. La seule chose qu’elle avait vue, c’était que l’entrée principale était complètement à découvert et qu’il y avait beaucoup d’hommes bien armés qui tournaient dans les locaux. Elle savait choisir ses batailles et celle-ci n’était pas une de celles qu’elle pouvait réussir seule. Il lui faudrait donc patienter.

Elle souleva doucement le bras de Mick mais il le resserra sur elle, laissant sa main à nouveau voguer sur son corps en marmonnant. Gênée, elle plaqua sa main sur la sienne sur son ventre, l’empêchant de bouger. Elle repensa à la nuit passée et ne put s’empêcher de rougir. Malgré toutes ses résistances, malgré son amour pour Ryo, il avait su allumer la flamme du désir en elle à plusieurs reprises. Elle avait le sentiment d’avoir trahi son partenaire, l’homme qu’elle aimait. Elle se sentait sale et mal à l’aise dans ce corps qui ne semblait plus lui appartenir. Elle avait toujours pensé que le sexe et l’amour étaient liés et elle tombait donc de haut à s’apercevoir que son corps pouvait se passer de sentiments pour ressentir du plaisir.

Soudain, des lèvres se posèrent sur son épaule et remontèrent vers son cou. Elle se sentit frémir, ne souhaitant pas revivre tout cela, ne pas perdre de nouveau tout contrôle sur son corps.

- Arrête, s’il te plaît. Tu as eu ce que tu voulais…, murmura-t-elle.
- J’en veux plus, Kaori., répondit-il.
- Donne-moi du temps., l’implora-t-elle.
- Très bien., abdiqua-t-il.

Il la fit tout de même se retourner et déposa un baiser sur ses lèvres.

- Je ne te laisserai pas fuir comme il le fait.
- Où veux-tu que j’aille ?, répondit-elle, réprimant un accès de colère.

Elle dégagea son bras brusquement et sortit du lit, emportant le drap avec elle.

- Ne t’avise pas d’entrer dans la salle de bains pendant que j’y suis. Tu ne couperas pas à la massue, flingue ou pas flingue., le prévint-elle, lui lançant un regard noir.

La porte fermée, il se laissa retomber dans le lit et passa une main dans ses cheveux. Il entendit l’eau de la douche se mettre en route et ne put qu’imaginer la jeune femme se glisser sous l’eau.

Kaori laissa l’eau chaude délasser ses muscles un moment avant de se demander si la salle de bains n’était pas truffée de caméras comme la chambre. Elle se sentit blêmir en réalisant que toute la nuit dernière avait été filmée et pria pour que Ryo ne tomba jamais dessus. Elle aurait déjà bien du mal à le regarder en face quand ils se retrouveraient. Si elle devait lire dans ses yeux la désapprobation en plus de supporter sa honte, elle ne s’en remettrait peut-être pas. Elle accéléra donc le mouvement et sortit rapidement, s’entourant d’une serviette avant de sortir de la pièce.

- Il y a d’autres vêtements dans l’armoire si tu veux., lui apprit Mick avant de prendre la place et de refermer la porte.

Elle ouvrit le meuble et observa les tenues en grimaçant : tout ce qu’elle n’aimait pas ou plutôt qui ne lui allait pas. Elle sortit une mini-jupe noire assortie d’un haut de la même couleur et s’habilla.

- Tu es très sexy., entendit-elle soudain derrière elle.

Mick l’observait d’un œil où brillait le désir et elle ne put s’empêcher de faire un pas en arrière.

- Je ne vais pas te sauter dessus. Je n’en ai pas besoin., rétorqua-t-il d’une voix suffisante.
- Ne crois pas que je te sauterai dans les bras non plus., répondit-elle.
- Tu t’habitueras à moi. Allez, viens. Allons voir Jack pour lui dire que tu es parvenue à de meilleurs sentiments.
- Je ne te donnerai pas Ryo., lui affirma-t-elle.
- Ne t’inquiète pas pour cela. Je n’ai pas besoin que tu sois active pour le faire venir.

Ils rejoignirent Nichols qui était au téléphone avec un interlocuteur hispanophone. Quand il raccrocha, il se tourna vers eux et posa un regard intéressé sur Kaori.

- Je dois dire que Mick avait raison. Vous êtes une jeune femme aussi ravissante habillée que déshabillée., commença-t-il.

Kaori sentit la bile lui brûler la trachée. Il les avait épiés comme un sale voyeur. Elle sentit la main de Mick serrer la sienne, lui intimant de rester calme, et ne répondit pas.

- Alors avez-vous fait votre choix ?, lui demanda-t-il.
- Je… Je veux vivre…, balbutia-t-elle, les mots lui faisant un mal atroce.
- Bien. Je me doute que ce n’est pas de gaieté de coeur donc, tant que vous ne nous aurez pas prouvé votre loyauté, vous resterez enfermée et sous la responsabilité de Mick. Si vous vous enfuyez, je vous tuerais tous les deux., lui affirma-t-il, le regard froid.
- Je n’ai pas besoin de vous pour le moment. Ramène-la à sa chambre., ordonna-t-il ensuite.

Ils ressortirent et firent le chemin inverse dans un silence lourd. A peine la porte refermée, Kaori s’assit sur le bord du lit, contemplant les traces de sang sur le drap avant de tirer la couverture.

- Ce que tu me fais, Mick, c’est innommable…, lui dit-elle, le regard rivé au sol.

Il serra les dents.

- Lui et moi nous ressemblons, tu sais. Je suis prêt à tout pour celle que j’aime., répondit-il.
- Même à lui faire mal ?, répondit-elle, la voix étranglée.
- Kaori…

Il se tut et quitta la chambre. Kaori se mit face à la fenêtre et put voir au loin Shinjuku. Son quartier lui manquait et elle se demandait si elle le reverrait, si elle aurait encore l’occasion de le parcourir aux côtés de l’homme qu’elle aimait. Elle était tendue. Elle aurait aimé pouvoir s’apaiser à son contact, juste sentir sa présence autour d’elle, peut-être l’aurait-il prise dans ses bras pour une fois… Elle en avait tellement besoin…

- Tu me manques, Ryo., murmura-t-elle.

Tous ces mois, tous leurs problèmes lui semblèrent soudain futiles. Elle avait pensé qu’ils auraient une dernière conversation mais une dernière avant quoi ? Partir ? Evoluer ? Elle n’avait pas su à l’époque. Elle sourit amèrement à cette pensée, ce n’était qu’hier matin après tout… Elle savait à présent qu’elle ne pourrait pas partir. Il comptait trop pour elle et, quelle que fut la nature de leur problème, ils réussiraient à le résoudre. Elle avait confiance en eux pour cela.

Soudain, Mick pénétra, l’air sombre, dans la pièce accompagné de deux gardes. Kaori se sentit blêmir et recula contre le mur comme pour fuir.

- Viens, on doit partir. La planque est compromise. Il va arriver., lui apprit-il.
- Ryo ?, répondit-elle, d’une voix pleine d’espoir.
- Oui. Allez, viens. Ne m’oblige pas à user de la force., dit-il, attrapant son bras et la tirant pour la faire sortir de la chambre.

Il la confia aux deux gardes et revint dans la pièce, un instant, l’inspectant et regardant une dernière fois dans les armoires, avant de les rejoindre et de prendre en charge sa compagne.

Ryo et Umi arrivaient dans la zone industrielle quand le signal des émetteurs de Kaori revint subitement. Surpris, Umi sortit le récepteur et vit qu’il leur indiquait le lieu où ils se rendaient.

- Tu y comprends quelque chose ?, lui demanda le géant.
- Non. Soit on nous donne un coup de pouce, soit on nous emmène dans un piège., répondit Ryo, les dents serrés.
- De toute façon, nous n’avons pas le choix. Nous devons y aller.

Umi acquiesça seulement et, cinq minutes après, ils se garaient dans un endroit à l’abri. Ils approchèrent du bâtiment à couvert.

- Tu sens comme moi ?
- Oui, c’est vide., répondit le mercenaire.
- On arrive trop tard., maugréa Ryo, serrant sa crosse à s’en blanchir les phalanges.
- Il faut qu’on essaie de rentrer pour trouver des indices., lui dit Umibozu.
- Soyons prudents. Ils ont peut-être piégé les lieux.

Les deux hommes grimpèrent les étages avec précaution. Ils trouvèrent des planques d’armes, des salles qui avaient visiblement servi pour des exécutions et la chambre où Kaori était retenue.

- Le signal vient de là., fit Umi en ouvrant une armoire.

Ryo jeta un œil et vit le collier de Kaori posé sur une étagère à côté d’une boîte en plomb où il retrouva ses autres affaires. Il les rassembla et les mit en vrac dans un sac trouvé là. Ils firent le tour de la pièce attentivement. Umi retira les draps à la recherche de message caché.

- Ryo., l’appela-t-il d’une voix sombre, sentant l’odeur de sang séché.

Le nettoyeur s’approcha et sentit ses jambes vaciller à la vue des tâches de sang situées en plein milieu du lit. Il sentit une culpabilité sans nom le prendre en imaginant l’épreuve qu’elle avait dû vivre car il ne faisait aucun doute pour lui qu’il s’agissait du sang de Kaori et des circonstances dans lesquelles il était arrivé là.

- Celui qui lui a fait ça a intérêt à être mort avant que je l’attrape…, gronda-t-il.
- Je l’ai abandonnée, Umi. Je devais la protéger. Je l’ai abandonnée., ajouta-t-il, soudain abattu.
- Reprends-toi, Ryo. Ne laisse pas tes sentiments prendre le dessus pour le moment., lui conseilla son ami.
- Tu l’abandonneras si tu ne fais pas le nécessaire pour la retrouver.

Ryo ne répondit pas et retira les draps à la fois pour soustraire une preuve à la police et pour confier le drap pour analyse au Professeur. Ils continuèrent et fouillèrent les deux étages suivants finissant par atteindre le bureau de Nichols. Tout avait été vidé. Il ne restait rien. Le nettoyeur approcha du bureau, furieux. Ils avaient été à cinq minutes de la retrouver, de leur mettre la main dessus…

Il frappa du poing sur le plateau, faisant tressauter les stylos et autres bouts de papier encore présents. Il remarqua alors les clichés où figurait Kaori. Il les prit en même temps que le papier posé dessus où un message l’attendait : « Elle a résisté mais le plaisir des sens a été le plus fort... ». Il écrasa le papier dans le creux de sa main et, d’une main fébrile, observa les photos. Kaori y était embrassée par Mick, de force semblait-il, sur une autre, allongée, dénudée sous le corps nu de son ami, se débattant, sur une troisième les yeux voilés, les pommettes rosies, dans une expression qu’il avait trop vue sur le visage de ses conquêtes d’un soir, sur une quatrième, endormie, nue, enlacée par l’américain.

- Ryo ?, l’interpela Umi, sentant sa tension.
- On m’a laissé un petit souvenir du passage de ma partenaire ici., répondit-il, les dents serrés.
- Ils l’ont battue ?
- Mick lui a fait découvrir les joies du sexe et apparemment elle y a pris goût., rétorqua-t-il, amer.

Il ne pouvait imaginer la voir dormir dans les bras de l’homme qui l’aurait agressée. Il ne pouvait croire qu’elle aurait pris du plaisir avec ce même homme. Il ne pouvait simplement pas croire qu’elle avait pris du plaisir avec un autre homme que lui. Il avait toujours pensé qu’il serait là pour empêcher d’autres hommes de lui tourner autour. Il était furieux et il ne savait plus dire si c’était contre lui ou contre elle ou même contre Mick. Il rangea les photos dans sa poche intérieure et ressortit de là.

- Je voudrais repasser par la chambre une dernière fois avant d’appeler Saeko., l’informa Ryo, sombrement.
- Je t’attends dehors., fit Umi quand ils arrivèrent devant la pièce.

Le nettoyeur ne dit rien et entra dans la pièce. Il avança et s’arrêta faisant face au lit qui avait accueilli les relations intimes de la femme qu’il aimait et de l’homme qu’il avait considéré comme son meilleur ami. Pris d’une rage incontrôlable, il prit une chaise et la balança violemment contre une armoire. Il saccagea toute la pièce, laissant sa fureur déferler. Quand il eut fini, il se laissa tomber assis sur le lit, seul épargné par sa rage, la tête dans les mains, les yeux fermés. Il reprit lentement le contrôle de lui-même et rouvrit les yeux, prêt à partir. Il avisa alors l’un des briquets de Mick à terre et le ramassa. Cela faisait longtemps qu’il ne l’avait pas vu. La dernière fois, il lui avait dit qu’il était en panne mais qu’il le gardait comme une relique du passé… encore une, sourit amèrement Ryo. Il le mit avec les photos et ressortit de la pièce.

- Tu as trouvé quelque chose ?, demanda Umi.
- Le calme., répondit Ryo.

Il passa devant son ami qui fronça les sourcils : il n’aimait pas ce qu’il ressentait. Cette aura-là faisait partie du passé pour lui et il ne pensait pas la revoir un jour : l’ange de la mort. Qui allait être sa cible ? La seule qu’il écartait était Kaori. Ryo n’était pas capable de tirer sur une femme mais Umi n’était pas sûr que son sort serait plus enviable si elle était dans sa ligne de mire. Elle serait peut-être en vie mais il pouvait la détruire moralement. Il se sentait le devoir de la protéger, le cas échéant. Il veillerait au grain. Résolu, il emboîta le pas de son ami et ils regagnèrent la mini d’où ils appelèrent Saeko pour lui donner le lieu précis et lui dire qu’il pouvait être investi par les forces de police.

Ils se dirigèrent vers la clinique du Professeur et y furent accueillis par Miki qui patientait dans le jardin.

- Falcon !, cria-t-elle en le voyant arriver.

Elle se jeta à son cou, rassurée de le revoir en un morceau. Umi se mit à fumer au travers de son crâne rouge, embarrassé. Ryo les regarda mais ne ressentit rien au travers des barrières qu’il avait à nouveau dressées.

- Je vous laisse. Je vais voir le vieillard., dit-il d’un ton neutre.
- Attends. Vous avez du nouveau pour Mick et Kaori ?, demanda Miki, inquiète.
- Explique-lui, Umi., fit le nettoyeur, blasé.

Ryo partit en direction du bâtiment et entendit de loin un « quoi ? » interloqué de Miki. Pas besoin de demander ce que son mari venait de lui apprendre. Il entendit des pas s’approcher et soupira d’ennui par avance. Miki le rattrapa et le força à s’arrêter.

- Tu ne peux pas croire qu’elle ait volontairement accepté cela.
- Je ne crois rien, Miki. Je ne fais que constater., répondit-il d’une voix neutre.
- Elle t’aime. Elle n’aurait jamais voulu cela., réitéra-t-elle.
- Regarde par toi-même., dit-il, lui tendant les photos.

Miki les prit d’une main tremblante et les regarda en fronçant les sourcils. Elle les lui rendit, les larmes aux yeux.

- Tu penses ce que tu veux, Ryo. J’ai confiance en Kaori.
- Tu ne sais pas ce qui lui passe dans la tête., rétorqua-t-il d’une voix dure.
- En tous cas, elle ne mérite pas que tu la juges sur des photos sans avoir sa version des faits., lui opposa l’ex-mercenaire.
- Elle a toujours été là pour toi, Ryo. Elle n’a jamais perdu confiance en toi malgré tout ce que tu lui as fait vivre. Elle mérite que tu sois là pour elle.
- Je la retrouverai et la ramènerai. Pour le reste…

Il ne termina pas sa phrase et les planta sans plus un mot pour entrer dans le bâtiment. Il trouva le Professeur dans son bureau. Il ne tourna pas autour du pot et lui confia le drap pour analyse, lui demandant sa discrétion. Il n’ajouta rien et repartit, souhaitant se retrouver seul.

Il croisa Kazue dans les couloirs. Il sentit son coeur se serrer à sa pâleur et aux cernes sous ses jolis yeux d’habitude pétillant de vie et de joie.

- Tu as des nouvelles ?, lui demanda-t-elle, la voix pleine d’espoir.
- On a retrouvé leur planque mais ils venaient de la quitter. Je peux juste te dire que Mick est vivant.
- Et Kaori est avec lui ?, s’enquit-elle d’une petite voix.
- Oui.
- Pourquoi Ryo ?

Il détourna les yeux, ne supportant le désarroi et la douleur de son regard.

- Je ne sais pas., murmura-t-il.
- Laisse-moi rentrer avec toi ce soir, Ryo. Je ne veux pas dormir ici. J’ai… J’ai besoin d’être avec toi., l’implora-t-elle.

Il hésita un moment puis acquiesça. Kazue alla chercher ses affaires et le rejoignit quelques minutes plus tard. Ils croisèrent Umi et Miki qui les regardèrent surpris. Le mercenaire interpela son ami qui fit marche arrière.

- Ne fais pas de connerie, Ryo., lui conseilla-t-il.
- Ne t’inquiète pas, Umi. Je ne suis pas à une près., ironisa-t-il, le laissant de nouveau.

Ils rentrèrent à l’appartement, silencieusement.

- Tu n’as pas mangé depuis quand ?, lui demanda Kazue.
- Je ne sais plus. Hier peut-être…, répondit-il.
- Je vais nous préparer quelque chose. Ca nous fera du bien.

Elle le laissa pour aller en cuisine et, une demi-heure après, ils étaient attablés, mangeant en silence, chacun perdu dans leurs pensées. Après le repas, Ryo monta fumer une cigarette pendant qu’elle faisait la vaisselle. Il laissa son regard errer sur la ville cherchant l’apaisement. Où était-elle ? Etait-elle à nouveau dans ses bras, expérimentant les plaisirs de la chair ? La faisait-il vibrer comme il était sûr qu’elle en était capable ? Le transportait-elle dans un monde merveilleux où il perdrait la tête ? Il sentit la jalousie le mordre.

- Mick a enlevé Kaori ?, entendit-il soudain derrière lui.

Il disciplina ses traits pour ne pas se trahir face à Kazue.

- Pourquoi dis-tu cela ?, l’interrogea-t-il innocemment.
- J’ai entendu Miki en parler avec le Professeur., avoua-t-elle.
- Pourquoi l’a-t-il fait d’après toi ?
- Je ne sais pas., mentit-il, préférant éviter de la blesser tant qu’il n’était pas sûr.
- Tu… Tu veux bien me prendre un peu dans tes bras ? J’ai froid là., lui dit-elle, posant une main sur son coeur.

Il l’enveloppa amicalement et elle se blottit contre lui. Il sentit soudain sa tension retomber et elle se mit à pleurer. Il la serra un peu plus, triste pour elle et furieux de la douleur qu’elle allait bientôt affronter. Mick avait plongé la femme qui l’aimait dans une attente infernale, il les avait trahis tous les deux. Et Kaori… Il ne savait pas encore à quel point elle avait fauté mais le seul fait de savoir qu’elle avait pris du plaisir dans ses bras le mettait dans une colère noire. Il se concentra néanmoins sur le moment présent et la jeune femme qu’il tenait entre ses bras. Il chassa ses idées sombres et attendit qu’elle se calma.

- Merci, Ryo. Merci d’être là., murmura-t-elle lorsqu’elle se calma enfin.
- Je t’en prie. J’ai enfin une bonne excuse pour te tenir dans mes bras sans risquer une seringue ou une massue., plaisanta-t-il, tentant d’alléger l’ambiance.

Il l’entendit rire légèrement et baissa les yeux vers elle lorsqu’elle s’écarta de lui.

- Tu es un homme bien, Ryo., lui dit-elle.

Ils s’observèrent un moment et, comme hypnotisés, leurs lèvres se trouvèrent.
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Dim 14 Mar - 20:19
Chapitre 9

Leurs lèvres toujours scellées, Kazue passa les bras autour du cou de Ryo, approfondissant leur baiser par la même occasion. Doucement, il la souleva dans ses bras et l’emmena dans sa chambre.

Alors que le soleil se levait, Kaori se réveilla dans les bras de Mick. La journée précédente avait été agitée dans les rangs de Nichols et elle avait assisté à la remise en place de leur base d’opération. Nichols avait besoin de Mick et, n’ayant aucune pièce disponible pour l’enfermer, ils l’avaient gardée à leurs côtés, menottée à un radiateur dans une position des plus inconfortables. Cependant, elle oublia vite la douleur de son épaule et de son poignet et se concentra sur les éléments qu’elle voyait. Examinant chaque information, elle se rendit compte de l’ampleur du plan de Nichols. Il comptait inonder le Japon de son poison en peu de semaines mais le Japon n’était qu’une étape, la plate-forme de départ de son expansion vers toute l’Asie.

Lorsqu’ils mirent en place un nouveau tableau, y épinglant différents portraits, elle se demanda qui étaient toutes ces personnes jusqu’à voir son portrait, celui de Ryo et de tous leurs amis. Ryo, Miki et Umi étaient entourés en rouge, elle marquée d’un point d’interrogation.

- Ce n’est pas la peine de remettre ta tête sur le tableau. Je la vois déjà assez dans la journée., plaisanta Nichols.
- D’accord. Et elle ?, demanda Mick, lui montrant le portrait de Kazue.

Nichols se tourna vers Kaori, l’observant attentivement, puis revint sur Mick.

- Tu m’as convaincu. Ce n’est plus la peine de l’afficher. Je serais clément : tu lui as déjà brisé le coeur, je lui laisse la vie sauve., affirma le chef.
- La mort serait peut-être plus douce que le chagrin…, répondit Mick d’une voix posée.
- Justement., rétorqua Nichols, le regard froid.

D’abord soulagée de savoir Kazue sortie de la liste des cibles, Kaori se sentit frémir : cet homme était un monstre. Et à quoi jouer Mick ? Voulait-il le convaincre de supprimer Kazue ? Comment pouvait-il oser y penser ? Comme s’il avait senti son inquiétude, Mick la regarda et approcha d’elle. S’agenouillant près d’elle, il se pencha sur elle et posa ses lèvres sur les siennes.

- Tu te souviens de l’autre nuit, ma Kaori ?, murmura-t-il contre elles.
- Kazue…
- Oublie-la., lui répondit-il.

Il la fixa du regard et, sans un son, articula : « elle est sauve ». La voyant soulagée, il prit à nouveau ses lèvres plus sauvagement, la déstabilisant de nouveau. S’écartant d’elle, il caressa sa bouche pulpeuse, une lueur de culpabilité dans les yeux. Il glissa les mains sous son haut et caressa sa poitrine, se faisant plus pressant par moments.

- Mick, non…, l’implora-t-elle, rougissant de honte à son corps qui réagissait encore malgré elle.
- Angel ! Tu batifoleras plus tard., le rabroua Nichols.

Le nettoyeur se releva après un dernier regard à sa compagne et retourna aider son associé. Ils avaient terminé leur tâche assez tard le soir et s’étaient couchés. Mick n’avait rien tenté sur elle et elle en était soulagée car ils dormaient dans la même pièce qu’une dizaine d’autres hommes. Elle en avait déjà assez de supporter leur regard. Elle se réveilla donc dans les bras de celui qu’elle avait longtemps considéré comme un ami et il la suivit de peu. Les commodités étant sommaires dans ce hangar, elle put juste se rafraîchir au lavabo des toilettes sous l’oeil vigilant de Mick.

- Je ne vais pas me sauver, tu sais…, lui dit-elle.
- Je sais de quoi tu es capable, Kaori. Un homme averti en vaut deux., répondit-il.
- Je n’ai jamais menti.
- Jusqu’à présent. De quoi serais-tu capable par amour ?, s’enquit-il.

Elle croisa son regard dans le miroir et le soutint.

- De beaucoup de choses, même de supporter ce que tu me fais. Je ne t’ai pas encore abandonné., lui affirma-t-elle.
- Je ne le mérite pourtant pas., murmura-t-il.

Elle se tourna vers lui et s’approcha, posant une main sur sa joue.

- Je suis sûre qu’il y a beaucoup plus à voir que ce que tu me montres.

Il l’attrapa soudain par la taille et la plaqua contre le mur.

- Suis-moi., murmura-t-il, l’embrassant à pleine bouche et poussant son bras derrière son cou.

Kaori commença par se débattre puis entendit la porte s’ouvrir et s’immobilisa, le laissant faire.

- Le chef veut tous nous voir illico presto., les informa un soldat, coulant un regard appréciateur sur la silhouette de la jeune femme.
- On arrive., répondit Mick.
- Ils étaient où ?, demanda Nichols, énervé, à leur arrivée.
- En train de se bécoter dans les toilettes., répondit le soldat.
- Il faut bien garder l’attention de la demoiselle., plaisanta Mick.

Kaori réprima l’envie de lui balancer une massue sur la tête et sentit la pression de sa main sur la sienne, signe qu’il était conscient de sa colère.

- Je suis volontaire aussi si tu as besoin d’aide., lança un autre soldat.

Mick dégaina son arme et le pointa vers le gars.

- N’y pense même pas., asséna-t-il froidement.

Sa cible tressaillit face au regard froid du nettoyeur et recula d’un pas. Voyant l’homme battre en retraite, il rangea son arme et passa un bras autour de la taille de Kaori.

- Ca suffit maintenant ! On a un problème plus important. L’immeuble dans lequel on était aurait dû sauter au passage de Saeba. Aujourd’hui, il est encore debout et les flics ont eu le temps de le fouiller. Ils n’auront rien sur nos plans futurs mais ils ont suffisamment d’éléments pour nous relier à un certain nombre de meurtres. Je ne supporte aucun écart !, fit Nichols d’un ton froid.

Il claqua des doigts. Mick plaqua Kaori tête contre lui alors qu’une dizaine d’hommes furent propulsés en avant avant d’être sommairement exécutés. Elle réprima un hurlement d’horreur alors qu’il la serrait un peu plus fort. Quand il la relâcha enfin, elle observa les corps gisant au sol dans leur sang, livide.

- Si vous l’aviez oublié, voici ce qui arrive à ceux qui échouent., les informa le chef.

Les cadavres furent évacués et les hommes s’éparpillèrent dans un silence pesant. Nichols s’approcha d’eux, avisant la pâleur de sa captive.

- Cela vaut pour tous., ajouta-t-il, un regard froid posé sur elle.
- Tu auras la carotte avec Mick mais le bâton avec moi, ma belle. Autant t’y habituer tout de suite. Compris ?

Les larmes aux yeux, Kaori acquiesça.

- Mick, j’ai besoin de toi. Tu dois diriger la prochaine attaque.
- Elimination de Saeba et du couple.
- Quoi ? Non, Mick, ne fais pas cela !, objecta Kaori, s’agrippant à lui.
- La ferme ! Reste à ta place !, lui ordonna-t-il durement.
- Non ! Tu ne peux pas tuer tous nos amis !
- Reste à ta place, Kaori !

Elle recula d’un pas et leva la main pour le gifler de rage mais il fut plus prompt et arrêta son geste avant de la gifler à son tour. Elle tomba par terre sous la violence du geste et se tint la joue.

- Quelle heure ?, demanda Mick, comme s’il n’avait pas été interrompu.
- Seize heures. Ca te laisse du temps pour mettre en place tes équipes. J’ai chargé Tonio de l’attaque du commissariat central à la même heure. Tu n’as pas le droit à l’erreur, Angel. Ta copine sera ma garantie., le prévint Nichols.
- Je n’en aurais pas besoin., lui affirma-t-il.

Nichols les laissa, satisfait. Mick tendit une main à la nettoyeuse pour l’aider à se relever mais elle l’ignora et se redressa seule, sa joue rougie par le coup.

- Je préfère mourir que de savoir que tu les auras tués., lui dit-elle.
- Jusqu’où comptes-tu aller, Mick ?
- Je fais ce que j’estime nécessaire., répondit-il, les dents serrés.
- Pas ça, Mick…, l’implora-t-elle.

Il l’empoigna par le bras et l’attira à lui brusquement.

- Tu es à moi maintenant. N’oublie pas ce que je t’ai dit, Kaori., lui dit-il posant sa main sur son coeur.

Elle le regarda droit dans les yeux mais devait avouer qu’elle n’avait aucune idée de la façon dont les choses tourneraient ni sur quel pied danser. Elle ne pouvait qu’attendre et espérer.

Lorsqu’il se réveilla, Ryo trouva Kazue allongée contre lui. D’abord surpris, il se remémora la soirée de la veille et passa une main sur son visage. Qu’est-ce qui lui avait pris ? Pourquoi l’avait-il embrassée ? Il était en colère, certes, mais il n’avait pas pour habitude de se défouler sur ses amies. Mais Kazue était la femme de Mick et Mick lui avait pris Kaori… Peut-être ne lui en avait-il pas fallu plus pour se laisser aller… Il s’en voulut par égard pour la femme qu’il tenait dans ses bras et qui souffrait déjà assez. Il sentit la main posée sur son torse nu bouger et regarda son amie se réveiller.

- Bonjour Ryo., murmura Kazue.
- Bonjour, ma belle. Bien dormi ?
- Oui.

Elle croisa son regard et détourna les yeux.

- Pour hier soir, je suis désolée. Je ne sais pas pourquoi je t’ai embrassé. C’était stupide., lui expliqua-t-elle.
- J’aurais dû t’en empêcher. Je suis aussi fautif. Laissons ça de côté.
- Ryo, je ne veux pas que ça compromette notre amitié.
- On s’est juste embrassés, Kazue, et on a dormi ensemble mais il ne s’est rien passé., la rassura-t-il.
- Tu ne m’en veux pas alors ?, l’interrogea-t-elle.
- Non. Et toi ?

Elle fit signe que non. Soulagés, ils se levèrent et se préparèrent pour la journée.

- Ca a l’air d’aller un peu mieux., remarqua Ryo alors qu’ils roulaient vers la clinique.
- Oui. Cette nuit, j’ai bien dormi et ça m’a permis de prendre un peu de recul., admit-elle.
- Tu veux en parler ?
- J’ai admis l’idée qu’il puisse me quitter mais je voudrais juste une occasion de lui dire tout ce que j’ai à lui dire. Je ne le supplierai pas de rester parce que j’ai aussi ma fierté mais je ne lui cacherai rien., dit-elle, baissant le regard.
- Je te promets de faire le maximum pour que tu puisses le revoir au moins une fois., lui affirma Ryo, posant une main sur sa cuisse.
- Merci.

Ils arrivèrent à la clinique et Kazue descendit de voiture. Levant les yeux, Ryo vit le Professeur lui faire signe à travers la fenêtre et il sortit à son tour, le rejoignant dans son bureau.

- J’ai analysé le drap moi-même. Le sang est bien celui de Kaori.

Ryo sentit de nouveau la colère le prendre. Il pensait avoir réussi à occulter ce sentiment mais apparemment rien n’y faisait.

- Autre chose ?

Le Professeur détourna le regard, gêné, puis, prenant une profonde inspiration :

- Il y a du liquide séminal dont j’ai identifié le donneur comme étant Mick. Mais Ryo…
- Non, c’est bon. J’en ai assez entendu. Pas besoin de me dire ce que je sais déjà., le coupa-t-il d’une voix dure.
- Il l’a peut-être forcée au départ mais apparemment les choses ont évolué.
- Tu dois leur faire confiance.
- A qui ? Celui qui se prétendait mon ami et a enlevé ma partenaire ?
- Fais confiance à Kaori alors.
- Non. J’aurais dû me souvenir de mes expériences passées. Je ne peux me fier à personne., affirma-t-il avant de sortir.

Le vieil homme le regarda partir, stupéfait. Il regarda les résultats de ses analyses et se dit qu’en l’état actuel, Ryo n’écouterait même pas la partie manquante. Il attendrait un peu avant de retenter de lui dire.

Le nettoyeur reprit la mini et rejoignit Umi au Cat’s après avoir fait le tour de ses indics. Devant le café, il sortit une cigarette et un briquet pour l’allumer mais celui-ci refusa de s’allumer. Enervé, Ryo vit que c’était celui de Mick qu’il avait trouvé la veille. Dégoûté, il rangea sa cigarette et rentra dans le café.

- Des nouvelles, Umi ?, lui demanda-t-il sombrement.
- Bonjour à toi aussi., répondit posément le géant.

Le nettoyeur lui adressa un regard noir.

- Bonjour. Alors du neuf ?
- Non. J’ai fait le tour de mes indics après le départ de Miki pour la clinique mais on ne sait pas où se situe la nouvelle planque de Nichols.
- Pareil de mon côté. C’est frustrant. On est passé si près de l’avoir…
- Oui. Dommage qu’il ait été averti. Tu sais comment retrouver une taupe dans les forces de l’ordre, toi ?, lui demanda Umi.

Ryo le regarda comme si une deuxième tête lui avait poussé. Pourquoi n’y avait-il pas pensé plus tôt ? Etait-il à ce point aveuglé par sa rage qu’il en perdait tout sens logique ? Ca en devenait risible… non pitoyable en fait.

- Je vais me renseigner auprès de Saeko pour savoir qui a été mis dans la boucle.

Il partit sans attendre et envoya le signal une fois arrivé dans le parc. Un quart d’heure plus tard, l’inspectrice arrivait, le regard sombre.

- Notre homme est un boucher., lui annonça-t-elle.
- Je ne te dis même pas combien de traces d’ADN différents nous avons retrouvées dans l’immeuble et nous avons repêché dix corps dans la baie ce matin, fraîchement exécutés.
- Comment avez-vous fait le lien ?
- Les empreintes. Elles étaient présentes sur le réseau d’explosif qui avait été mis en place dans l’immeuble et qui n’a pas sauté. Quelqu’un avait saboté le récepteur. Pas de signal, pas d’explosion.
- Logique. Saeko, Nichols a une taupe chez toi.
- C’est ce que je me suis dit aussi après hier. Je fais mon enquête.
- Reste sur tes gardes.

Elle acquiesça et, sans un mot de plus, s’en alla. Il l’imita peu après, empruntant les ruelles sombres de Shinjuku qui correspondaient assez bien à son humeur.

- Eh Ryo !, l’interpela un de ses indics.
- Salut Sam. Comment ça va, vieille branche ?
- Un peu de respect, le jeunot ! Il y a une rumeur qui circule depuis ce matin. Il paraît que le commissariat va être la cible d’une attaque de grande envergure aujourd’hui.
- Tu es sûr ?
- Affirmatif, Ryo.
- Ok. Fais passer le mot de surveiller les alentours dès maintenant et qu’on me remonte la position du moindre guetteur inconnu de nos rangs. Je vais me préparer. Je te retrouve dans une heure, Sam.
- Je t’attendrai, Ryo. Dis, tu as des nouvelles de Kaori ?
- Non., répondit le nettoyeur, le visage sombre.
- Ramène-la nous après cela. Son sourire nous manque., lui demanda le vieil homme.

Ryo ne dit rien et s’en alla. Il ne voulait pas s’appesantir sur le sujet. Il regagna en vitesse le Cat’s où il avertit Umi puis Saeko de l’information qu’il avait eue. L’inspectrice l’informa en retour avoir trouvé la taupe chez eux et l’avoir d’ores et déjà écartée discrètement, ce qui les soulagea.

- Prochain objectif, arrêter l’attaque du commissariat., résuma Ryo.
- Et après Ryo ?
- On va sauver Kaori et Mick.
- Mick ?, s’étonna le géant.
- J’ai promis à Kazue qu’elle pourrait avoir une dernière conversation avec lui., lui avoua le nettoyeur.

Et après… Il aviserait.

- A quoi tu joues avec Kazue, Ryo ?
- Je ne joue pas. Je la protège. Et si tu t’inquiètes de savoir si j’ai couché avec elle cette nuit, ne le sois pas. Je la respecte trop pour cela., répondit-il très sérieusement.
- Et Kaori ?
- Quoi Kaori ?, demanda-t-il brusquement.
- Que feras-tu quand elle rentrera ?

Ryo se contint de tout envoyer valser sous l’accès de colère qui le prit. Il enfonça les mains dans ses poches et sentit le briquet de l’amerloque glisser entre ses doigts.

- Tu ne m’as pas bien entendu, Umi. J’ai dit que je la sauverais, pas qu’elle rentrerait.
- Mais…, objecta Umi, surpris.
- Le sujet est clos, Falcon !

Comme pour ponctuer son point de vue, il jeta le briquet contre le mur, briquet qui se fracassa comme il aurait aimé voir son propriétaire le faire.
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Lun 15 Mar - 20:57
Chapitre 10

Consterné, Umibozu alla ramasser les morceaux du briquet éparpillés sur le sol du café.

- C’est bon ? Tu as évacué ta colère ?, lui demanda-t-il.

Ryo ne répondit pas et serra les poings. Non, il n’avait pas évacué sa colère : il avait envie de boxer Mick pour ce qu’il avait fait à Kaori. Il avait même envie de le tuer pour cela mais il attendrait au moins que Kazue ait eu le temps de lui parler. Peut-être que, d’ici là, ses explications calmeraient ses envies de meurtre…

- Il va falloir que tu te maîtrises avant de faire une connerie supplémentaire, Ryo. Tu ne peux pas continuer ainsi., lui dit son ami.

Il se releva, tenant un morceau du briquet entre les doigts, fronçant les sourcils. Il s’approcha du nettoyeur et le lui tendit. Ryo ouvrit machinalement la main pour recueillir l’objet.

- Je pense que ce n’est pas une pièce normale d’un briquet.

Le nettoyeur examina la petite puce et fronça les sourcils.

- Non, c’est une puce réceptrice. Mick en utilise., murmura-t-il.
- Tu as le matériel adéquat ?
- Non, mais j’ai encore les clefs de leur appartement. Je sais où il le range.
- Alors, qu’est-ce que tu attends ?, lui demanda Umibozu.

Ryo lui jeta un regard incertain puis s’en alla, revenant une demi-heure plus tard avec le récepteur adéquat. Il inséra la puce et aussitôt un point apparu sur l’écran, point situé dans une partie reculée du port.

- Tu crois que c’est un piège ?, interrogea Ryo.
- Et toi ?
- Umi, je ne brille pas par ma lucidité dernièrement., admit-il enfin.
- Je ne crois pas. Si c’était un piège, il l’aurait rendu plus visible. Ce serait certainement passé par la rue.
- Tu penses que tout cela n’était que mascarade ?
- Je me demande. Seul Mick pourrait nous éclairer à ce sujet.
- Donc on y va ?
- Oui. Mais d’abord, tu t’assures que le commissariat est entre de bonnes mains.

Les deux hommes descendirent à l’armurerie d’Umibozu pour se fournir en armes puis repartirent chacun de leur côté, le géant pour repérer les lieux sur le port, Ryo voir ses indics pour aider Saeko.

- Alors Sam, des nouvelles ?, demanda le nettoyeur retrouvant son informateur.
- On a repéré trois guetteurs aux angles des rues entourant le commissariat. Des gars à nous se sont positionnés non loin pour les surveiller.
- Merci, Sam. Je vais faire le nécessaire.

Ryo sortit de là et se dirigea vers le parc. Quelques minutes plus tard, Saeko le rejoignit.

- Tu ne peux plus te passer de moi, on dirait.
- Là, c’est toi qui vas me remercier. Le commissariat va être attaqué. On a déjà repéré trois guetteurs. Je te les donne et je te laisse gérer la suite.
- Tu ne restes pas ?, s’étonna-t-elle.
- Non, j’ai une autre bataille à mener. Peut-être celle où Nichols est éliminé ou alors celle où je disparaîtrai.
- Ryo ?
- Mick m’a filé un récepteur. On a localisé un entrepôt sur le port. Je ne sais pas si c’est un coup de pouce ou un piège mais je n’ai pas d’autre choix que d’y aller. Viens, profitons de la foule du midi pour que je te livre ces trois lascars.

Ils sortirent du parc et repérèrent les trois guetteurs. Saeko repartit au commissariat, l’air de rien, et, quelques minutes plus tard, les trois hommes étaient discrètement ramenés dans l’enceinte du bâtiment et un plan de défense mis en place dans le quartier. Ryo était déjà loin et retrouva Umibozu dans le port peu après.

- Qu’est-ce qu’on a ?
- Ils sont nombreux. Une centaine d’hommes, je pense. A priori, ils prévoient une attaque de grande envergure voire deux même. Ca manœuvre sec., répondit Umi.
- Tu les as vus ?, demanda Ryo, la mâchoire crispée.
- J’ai vu Mick.

Ils virent d’ailleurs l’intéressé ressortir et donner des instructions à un groupe d’hommes. Se retournant, il sembla même regarder dans leur direction avant de rentrer à nouveau dans le bâtiment.

Assise dans un coin de ce qui était devenu la salle de commandement, Kaori observait Nichols opérer. Il était froid et autoritaire. Il lui faisait penser à Ryo au départ de leur collaboration. Croisant son regard, elle tressaillit et réévalua son jugement : non, ils n’avaient rien en commun. Ryo avait toujours eu une chaleur au fond du regard, ce que n’avait pas Nichols. Elle resserra les bras autour de ses jambes comme pour se protéger. Mick arriva, l’air déterminé, et la força à se lever.

- Tu viens avec moi. J’ai besoin de soulager la tension avant de partir au combat., lui dit-il.
- Mick., gronda Nichols.
- Quoi ? C’est pas bon de partir tendu, tu le sais bien. J’en ai pour dix minutes. Le reste roule., rétorqua Angel, énervé.
- Grouille-toi., abdiqua-t-il.

Kaori le suivit, pâle de rage.

- Ne crois pas que je te laisserai faire., grogna-t-elle.
- Ne t’inquiète pas., lui murmura-t-il, entrant dans la salle de repos.

Il n’y avait personne et il referma la porte derrière lui.

- Allonge-toi sur le lit.
- Mick…
- Fais ce que je te dis, bon sang, Kaori ! On n’a pas beaucoup de temps devant nous., fit-il en enlevant sa chemise.

Elle recula et se retrouva adossée au mur.

- Comme tu veux…

Il avança et la plaqua au mur, approchant son visage du sien.

- Ryo et Umi sont là. Les choses risquent d’aller très vite. Alors, tiens-toi prête., dit-il glissant les mains sous son chemisier.

Elle tressaillit en sentant le froid du métal dans son dos. Il inséra une arme dans la ceinture de sa jupe.

- Mick…
- On va être à quatre contre cent, ma belle. Si tu veux sortir de là vivante, il va falloir que tu vises juste. Tu peux le faire.
- Tu les as prévenus ?, lui demanda-t-elle, se demandant comment il avait pu réussir.
- J’ai laissé une bouteille à la mer. Apparemment, ils l’ont trouvée. Reste à savoir s’ils auront compris le message. Sinon on va se retrouver à deux contre deux contre cent. Embrasse-moi., lui dit-il soudain, sentant une présence dans le couloir.

Il l’attrapa par les fesses et la souleva, positionnant ses cuisses sur ses hanches. Elle le sentit se mouvoir entre ses jambes, simulant l’acte sexuel, alors que la porte s’ouvrait. Kaori se cacha dans son cou, rouge de honte.

- On peut se joindre à vous ?, plaisantèrent deux hommes.
- Dégagez de là si vous ne voulez pas devenir eunuques., grogna Mick, tournant à peine la tête.

Les hommes cessèrent de rire et ressortirent. Il la relâcha et elle détourna le regard, incapable de le regarder en face alors que leur corps à corps ne l’avait pas laissé de marbre.

- Désolé mais je ne peux pas nier que tu me fais de l’effet., s’excusa-t-il.
- Quand passe-t-on à l’attaque ?, demanda-t-elle, changeant de sujet.
- Je ne sais pas. Tout dépendra d’eux. En attendant, il va falloir continuer à simuler.
- D’accord., murmura-t-elle.

Elle commençait enfin à retrouver l’homme qu’elle avait connu, ce qui la rassurait un peu. D’un autre côté, tant de choses s’étaient passées qu’elle ne savait pas comment tout cela se terminerait.

- Il faut qu’on y retourne., fit Mick.
- Attends, tu n’es pas assez crédible même si tu n’as passé que dix minutes à batifoler dans mes bras., l’arrêta-t-il.

Il l’attrapa par la taille et l’embrassa sauvagement. Elle plaqua ses deux mains contre son torse pour le repousser mais il la tenait fortement. Il la relâcha enfin et elle lui lança un regard empli de colère.

- Rassure-toi, ça sera certainement notre dernier baiser., murmura-t-il, lui ébouriffant les cheveux.
- Même si j’aurais aimé d’autres circonstances, je les garderai tous en mémoire, Kaori., lui avoua-t-il, fixant ses lèvres gonflées.

Il remit sa chemise et ils ressortirent de la pièce, se réajustant. Passant derrière elle, il tira un peu plus sur son chemisier pour cacher l’arme qu’elle portait. Arrivant à proximité de la salle de commandement, Mick arrêta Kaori. Il lui fit signe de se taire et écouta la conversation en cours.

- Les hommes qu’on avait mis en planque autour du commissariat ont été arrêtés et on a repéré Saeba et Falcon non loin.
- On a été trahis d’après toi, Tonio ?, demanda Nichols.
- Je pense.
- Qui ?
- Tu sais très bien. Tu n’aurais jamais dû lui faire à nouveau confiance., répondit Tonio.
- Très bien. Va les chercher, lui et la fille.

Mick attrapa la main de Kaori et rebroussa chemin le plus discrètement possible. Il entra dans la pièce où les armes et explosifs étaient stockés et attrapa un sac planqué derrière des caisses ainsi que deux mitraillettes.

- On donne le signal et on sort d’ici, ma belle., l’informa-t-il, lui tendant une des deux armes.
- D’accord.

Mick arma une bombe et régla le minuteur sur une minute puis ils sortirent, se dirigeant vers la sortie. Le temps écoulé, l’engin explosa, détruisant le stock d’armes et provoquant une plus grosse explosion qui troua le toit de l’entrepôt, laissant passer la fumée.

Au loin, Ryo et Umibozu entendirent l’explosion et ne se posèrent pas de question. C’était leur meilleure ouverture. Ils quittèrent leur position et avancèrent, neutralisant les hommes qui avaient été envoyés pour les éliminer. Ils avancèrent prudemment et forcèrent leurs ennemis à ne venir que par un chemin dûment tracé à coups de bazooka par le géant.

Mick dirigea Kaori du côté opposé de la position de leurs amis, plaçant des engins explosifs sous les camions. Il espérait bien ainsi obliger leurs ennemis à se diviser et ainsi leur faciliter la tâche. Quand un grand nombre serait éliminé, ils n’auraient plus qu’à resserrer l’étau, l’entrepôt étant pris entre la mer et une colline. Il positionna Kaori à un endroit relativement protégé pour elle et prit place à ses côtés.

- Tu vises sur la gauche, je prends la droite. Ne te pose pas de question et tire, Kaori. Veille car Ryo et Umi arriveront d’en face., lui ordonna-t-il.
- Pourquoi ne les rejoint-on pas ?, lui demanda-t-elle, souhaitant plus que tout retrouver son partenaire.
- On divise les forces.

Elle accepta sa réponse et, malgré sa répugnance à utiliser une telle arme, elle fit feu, suivie par son ami. Protégés par leur position, ils immobilisèrent de nombreux hommes, surtout après qu’il eut créé la panique en faisant exploser les bombes sous les véhicules.

Soudain, Mick n’entendit plus le son de la mitraillette de son amie et se tourna vers elle. Il masqua sa surprise derrière un air impassible : Kaori était à genoux, une arme sur la tête, arme pointée par Tonio, Nichols se trouvant juste derrière lui pointant une arme dans sa direction.

- Désolée, Mick, je ne les ai pas sentis arriver.

Elle avait été concentrée sur la zone, sur le fait de ne pas tirer sur Ryo et Umi, et n’avait pas fait attention au reste.

- Reste calme, tu sortiras de là., la rassura-t-il.
- Tu me parais bien confiant, Mick. Allez, lâche ton arme., lui enjoignit Jack.

L’américain s’exécuta et lança sa mitraillette par dessus le mur qui les protégeait.

Ryo et Umibozu débouchèrent soudain de l’autre côté de l’entrepôt. Ils neutralisèrent les derniers hommes qu’ils rencontrèrent et avancèrent à découvert. Soudain, un reflet lumineux attira leur attention avant d’entendre un objet en métal tomber au sol. Remontant la source, ils virent Nichols accompagné d’un autre homme tenant quelqu’un en joue, probablement Kaori, faisant face à Mick. Malgré la distance, Ryo tira et toucha le deuxième homme à l’épaule.

Lorsque Tonio lâcha un hurlement de douleur en même temps que son arme, surprenant Nichols quelques secondes, Kaori attrapa l’arme dans sa ceinture et la lança à Mick qui mit en joue son ex-ami.

- Viens là, ma belle., l’encouragea Mick.

Kaori se leva et se plaça derrière lui.

- C’est fini, Jack. Rends-toi. Tu n’arriveras pas à mettre un pied au Japon ni en Asie.
- Tu ne m’as pas habitué à jouer les rats, Mick. D’habitude, tu joues franc-jeu., ironisa Nichols.
- Je sais mais tu ne m’as pas laissé le choix. J’ai fait ce qu’il fallait pour protéger la femme que j’aime., l’informa Mick.
- Donc elle n’est pas cette femme-là., répondit Jack, désignant Kaori.
- Je n’ai rien dit de tel., le contra Mick.
- Trêve de bavardage. Pose ton arme.
- Jamais.

Nichols releva son arme et tira en même temps que Mick puis il partit se réfugier derrière un ventilateur. Le nettoyeur attrapa Kaori par la taille et l’entraîna à sa suite. Tonio s’effondra, mort. La balle de Mick que Jack avait évitée l’avait touché en plein thorax.

D’en bas, Ryo et Umi virent la scène. Il ne put s’empêcher d’être fier du réflexe de sa partenaire quand elle envoya son arme à son ami mais aussi un peu jaloux de leur complicité apparente. Il sentit son sang se glacer d’effroi quand les deux hommes se tirèrent dessus, le temps semblant s’éterniser avant que le premier mouvement ne fut enclenché. Quand la fusillade reprit juste après, ils partirent en courant vers le bâtiment pour monter sur le toit les rejoindre. Ils réussiraient peut-être à prendre Nichols à revers.

Sur le toit, Mick dégagea le chargeur de son emplacement et vérifia le nombre de balles. Il ne lui en restait plus que trois. Il soupira en fouillant ses poches puis le sac, ne trouvant pas d’autres chargeurs, uniquement des explosifs. Il posa la tête contre le tubage derrière lui, réfléchissant, puis se tourna vers Kaori. Sa décision était prise.

- Kaori, je suis désolé pour ce que je t’ai fait. Je n’avais pas le choix. Dis à Kazue que je suis désolé du mal que je lui ai fait également., commença-t-il.
- Mick, non. Ne dis pas ça. Ca sonne trop comme un adieu., murmura Kaori, livide.
- C’en est un. Je n’ai plus que trois balles et je dois arrêter Nichols à tout prix. Je ne peux pas t’emmener avec moi dans la mort. Je t’aime, Kaori. Je ne peux pas laisser quelque chose t’arriver., lui avoua-t-il, l’attirant à lui.

Il l’enlaça, profitant une dernière fois de sa chaleur, de son odeur, avant de la laisser s’écarter un peu, caressant ses lèvres avec envie.

- Tu te trompes, Mick. Ce n’est pas moi la femme de ta vie. Je ne doute pas que tu m’aimes mais pas comme tu aimes Kazue. C’est son prénom que tu appelais en dormant, pas le mien. Tu as tout fait pour la sauver…
- Elle n’est pas de notre monde., objecta-t-il.
- Peut-être mais elle t’aime et tu l’aimes, ça se voit.
- Tu n’imagines pas les sentiments que j’ai pour toi.
- Je le sais, Mick. Mais ne confonds pas réalité et rêve. Tu idéalises ce que pourrait être notre relation. Kazue, c’est du réel et, parfois dans le réel, on doute, c’est moins beau. Mick, si tu m’avais aimée comme tu l’aimes elle, tu n’aurais jamais fait ce que tu as fait. Tu ne m’aurais pas embarquée dans cette galère, ni fait vivre tout cela.
- Ne nie pas mes sentiments.
- Je ne les nie pas. Seulement je veux que tu réalises où est ta place et elle est auprès de Kazue.

Il l’observa un moment avant de baisser les yeux.

- Et nous ?
- Je suppose que nous pourrons de nouveau être amis un jour mais j’aurais besoin de temps pour digérer tout ça., murmura-t-elle.
- Mais pour cela, il faut que tu vives.
- D’accord.
- Tu dors, Angel ? Ou tu t’envoies en l’air ?, ironisa Nichols.

Ryo arriva sur le toit et entra en rage en entendant ses paroles. Il visa et la balle se planta au ras du nez du chef. Celui-ci se retourna blême et visa Ryo qui le désarma sans attendre.

- Tu vas gentiment te lever, les mains en l’air., lui intima-t-il d’une voix dure.

Nichols s’exécuta, le visage fermé.

- Vous pouvez sortir ! La situation est sous contrôle.

Mick et Kaori sortirent de leur cachette et approchèrent de leurs amis. La jeune femme, soulagée, se jeta dans les bras de son partenaire. Elle se sentait enfin en sécurité, protégée. Tout allait rentrer dans l’ordre.

- Ce n’est pas le moment, Kaori !, fit Ryo, la repoussant froidement.
- Euh oui, pardon., bredouilla-t-elle, déçue.
- Alors Saeba, ça te fait quoi de savoir que ta partenaire s’est faite baiser par ton pote ?, ricana Nichols.
- C’était sa première fois, tu sais. La pauvre, elle a douillé. J’ai vu ses larmes, entendu son cri de douleur mais les gémissements qui ont suivi… hmmm, crois-moi, elle n’avait plus mal ensuite., poursuivit-il.

Le coeur de Ryo devint froid. Il leva son arme et tira avant que quiconque ait pu réagir. Nichols s’effondra, une balle en pleine tête. Mick, Umi et Kaori le regardèrent stupéfaits. L’américain s’approcha de son ami.

- Ryo, il faut que je t’explique…

Il n’eut pas le temps de finir qu’il reçut un poing dans la figure, suivi d’un autre dans le ventre. Il reçut encore deux coups avant d’arriver à en parer un. Le japonais frappait et frappait sans discontinuer, seule la rage perçant dans ses gestes et les grognements qu’il laissait échapper par moments. Il n’entendait plus les suppliques de sa partenaire, lui demandant d’arrêter, ni les appels d’Umibozu. Sa seule réalité, sa seule volonté, c’était de faire expier à cet homme qui s’était prétendu son ami le fait d’avoir couché avec la femme qu’il aimait. Mick parvint à le repousser au bout d’une dizaine de minutes et les deux hommes s’observèrent un long moment. Le regard froid, sans aucun état d’âme, Ryo sortit son magnum et le pointa sur Mick.

- Tu n’aurais jamais dû lui faire ça., dit-il d’une voix froide.
- Non !, hurla Kaori, se plaçant devant lui, les bras en croix.
- Ne fais pas ça, Ryo ! Ca n’a pas été aussi loin que tu le crois., lui dit-elle.
- Bouge de là, Kaori. Je ne veux pas te tuer., répondit-il d’une voix sombre.

Elle le regarda sans faire un mouvement, le coeur battant la chamade. Où était l’homme qu’elle connaissait ? Celui qu’elle avait en face d’elle ne montrait aucun signe d’humanité. Que s’était-il passé ?

- Je t’en supplie, Ryo. Ne le tue pas. Si tu ne le fais pas au nom de votre amitié, fais-le pour moi., le supplia-t-elle.
- Ca ne suffit plus, Kaori., répliqua-t-il froidement, posant un regard glacial sur elle.

Elle sentit un poignard lui traverser le coeur mais prit sur elle pour empêcher Ryo de commettre un acte fou. Umi ne fut pas surpris, ayant déjà vu la noirceur des sentiments qui agitaient son ami. Il pensait juste que la présence de la jeune femme calmerait les choses mais, apparemment, même elle ne l’atteignait plus. Quant à Mick, il se sentit coupable d’avoir entraîné ses amis dans un tel marasme et, quelle que fut la sanction que Ryo lui infligerait, il ne lui en tiendrait pas rigueur.

- Si tu ne le fais pas pour moi, fais-le pour Kazue alors., lui demanda-t-elle d’une voix blanche.

Laissez moi vos commentaires : Ici
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Mar 16 Mar - 19:21
Chapitre 11

Ryo et Kaori s’affrontèrent un long moment du regard. Elle avait mal de ce combat qu’ils menaient semblait-il l’un contre l’autre. Pour elle, cela correspondait plus que probablement à la fin de leur partenariat. D’habitude, ils se seraient enguirlandés et il aurait fini par céder, juste parce qu’elle le lui aurait demandé. Mais là, les mots qu’il avait eus étaient comme un arrêt de mort qu’on signait : ça ne lui suffisait plus. Il ne lui restait plus que la carte Kazue pour empêcher Ryo de commettre l’irréparable, Kazue qui attendait un enfant de Mick, Kazue qui attendait de savoir si elle retrouverait l’homme qu’elle aimait. Cela suffirait-il à ramener Ryo à la raison même s’il n’était pas au courant de sa grossesse ? Sauf si elle lui en avait parlé entre temps peut-être…

Le nettoyeur regarda sa partenaire s’interposer pour sauver l’homme qui avait abusé d’elle, au moins au début, enfin c’était ce qu’il avait pensé jusqu’à présent… Cela ne fit que lever les derniers doutes qu’il avait : elle n’était plus à lui, elle s’était donnée à Mick. C’était la seule conclusion logique à son comportement. Il sentit une rage froide l’envahir à cette idée. Néanmoins, elle venait de lui rappeler quelque chose d’important. Il rangea son magnum dans son holster au grand soulagement de tous.

- Tu as raison. J’ai fait une promesse à Kazue et je ne la romprais pas., répondit-il froidement.
- Je vais à la clinique. On se retrouve là-bas., leur dit-il, tournant les talons.
- Attends, Ryo. Je viens avec toi., cria Kaori, s’élançant à sa suite.

Il s’immobilisa et se retourna, dardant un regard froid sur elle.

- Je ne te veux pas à mes côtés. Je préfère rester seul.

Elle recula sous le coup de la gifle verbale qu’elle venait de recevoir. Un grand froid l’envahit et elle sentit une larme couler le long de sa joue. Elle sentit une main se poser sur son épaule et leva le regard sur Umi qui se tenait à ses côtés.

- Laisse-lui un peu de temps. Après les explications, ça ira certainement mieux., lui conseilla-t-il.
- Je ne suis pas sûre, Umi., murmura-t-elle, la voix étranglée.
- Je suis désolé, Kaori., s’excusa Mick, les ayant rejoints.
- Je ne sais pas si vous pourrez me pardonner un jour mais je n’ai pas pu faire autrement.
- Tu nous expliqueras tout cela à la clinique. Sache juste que nous n’avons rien dit à Kazue du mot où tu la quittais. On a essayé de lui cacher que tu avais enlevé Kaori mais elle l’a su., lui apprit le mercenaire.
- Merci de l’avoir protégée.

Umibozu acquiesça et s’en alla, les deux autres lui emboîtant le pas. Ils firent le trajet jusqu’à la clinique en silence et retrouvèrent dans une salle à l’écart Miki, Kazue et Ryo. Kaori remarqua de suite la main de Ryo sur l’épaule de la jeune femme et l’air protecteur qu’il affichait. Elle nota aussi le regard noir qu’il lui lança à leur arrivée et sentit son coeur se serrer. Elle baissa le regard, tentant de reprendre le contrôle de ses émotions, et se laissa guider par Umi vers un fauteuil. Il prit place à ses côtés, Mick de l’autre. Les trois autres membres du groupe leur firent face, Ryo tenant la main de Kazue en soutien. Elle se demanda soudain à quel point ils avaient pu se rapprocher. Kazue avait-elle cédé aux avances de Ryo ? Elle avait du mal à le croire mais, depuis cinq jours maintenant, tout semblait hors de contrôle, alors pourquoi pas ?

Les six membres se regardèrent en chien de faïence un bon moment. Aucun n’osait briser le silence qui s’installait, appréhendant les explications qui arriveraient qui pouvaient à la fois soulager les peurs ou faire voler en éclat les derniers espoirs. Finalement, ce fut Umibozu qui se lança.

- Si tu nous expliquais comment cela a commencé, Mick., lui proposa-t-il.
- D’accord., soupira-t-il.

L’américain jeta un regard circulaire, percevant les regards interrogateurs, curieux ou effrayés de chacun, puis fixa la table, retraçant les évènements, se demandant ce qu’il aurait pu faire autrement.

- On ne va pas y passer la nuit !, cracha Ryo, d’un ton aigre.
- Ryo, donne-lui du temps. Ca n’est facile pour personne., intervint Miki.
- Non, il a raison. Ca ne sert à rien de ressasser. Nichols m’a contacté il y a quatre jours après qu’on se soit séparé au Cat’s…
- Cinq jours., corrigea le nettoyeur japonais.
- Ca me paraît une éternité…, soupira l’américain.
- Quand on s’est séparés, j’ai été accosté par un homme qui m’a transmis un message venant d’un vieil ami : c’était Nichols qui me fixait rendez-vous au parc dans l’après-midi. Je m’y suis rendu…
- Nous nous sommes rencontrés et tu m’as laissée à la supérette, c’est ça ?, demanda Kaori.

Mick la regarda et lui adressa un léger sourire : cela avait été son dernier moment d’insouciance avant que tout ne bascula. Son attitude ne passa pas inaperçue et agaça d’autant plus Ryo.

- Oui. Je me suis donc rendu au rendez-vous et j’ai retrouvé Nichols.
- Tu as senti que tu étais suivi ?, lui demanda Ryo.
- Oui. Depuis qu’on m’avait remis le mot mais je l’ai sciemment ignoré.
- Pourquoi tu ne nous as pas prévenus ?, insista-t-il.
- Je n’en voyais pas l’utilité.
- Arrête, Ryo. Laisse-le parler., intervint Kaori.
- C’est ça. Prends sa défense., gronda-t-il.

Il lança un regard noir à sa partenaire qui ne put s’empêcher de baisser les yeux, malheureuse.

- Ca suffit ! Reprends, Mick., les interrompit Umibozu.
- Au départ, la conversation était bon enfant. On a repassé le passé comme deux copains puis il a abordé le sujet sérieux : il voulait que je devienne son associé sur le territoire japonais. Il voulait étendre son réseau ici avant de partir vers toute l’Asie. Il avait besoin de mes connaissances du terrain et de mes compétences de nettoyeur. Il m’a clairement dit que je devrais vous supprimer tous les quatre car vous le gêneriez. Il savait que vous ne vous rallieriez pas à son action. Quand il m’a tout exposé, il m’a montré des photos de Kazue prises le matin même. Il m’a dit que, si je n’acceptais pas, je mourrai et elle aussi dans d’atroces souffrances., leur expliqua-t-il, se souvenant des hommes qui l’avaient entouré, armes à la main.

Kazue réprima un sanglot et Mick releva les yeux vers elle et son visage livide.

- Je sais que j’ai dû te faire du mal en disparaissant de la sorte mais je ne pouvais pas le laisser te tuer.
- Je… je comprends…, murmura-t-elle, les larmes coulant sur ses joues.
- Pourquoi avoir enlevé Kaori, Mick ?, demanda Miki.
- Pour détourner les soupçons restant et trouver du soutien. Nichols n’avait pas encore éliminé Kazue de sa liste de personnes à abattre. Je devais donc lui faire comprendre qu’elle ne représentait rien pour moi et quoi de mieux qu’une autre femme ? Surtout qu’il m’avait pris en photo embrassant Kaori sur la joue au supermarché.

Mick se leva et se mit à arpenter nerveusement la pièce.

- Je vous ai suivis, Kaori et toi pendant deux jours. L’attaque du Cat’s, c’était moi. J’en suis désolé, Umi, Miki.
- La belle affaire d’être désolé ! Tu aurais pu tuer Kazue et Kaori !, vociféra Ryo.
- Je sais. Mais je devais prouver ma loyauté. J’ai laissé mon aura à découvert afin de vous laisser le temps de vous préparer mais je ne pouvais faire mieux.
- Ca n’explique toujours pas l’enlèvement de Kaori., reprit Miki.

Mick plongea son regard dans celui de Kaori qui le soutint un instant avant de le détourner.

- J’ai persuadé Nichols que j’étais amoureux d’elle. Je l’ai persuadé qu’elle serait un précieux atout pour attirer Ryo dans un piège et qu’elle pourrait même nous aider à utiliser son réseau par la suite si j’arrivais à la convaincre de m’aimer.
- Tu lui donnes bien trop de pouvoir…, ironisa le nettoyeur.

Kaori leva un regard surpris et blessé sur son partenaire. Elle réprima les larmes qui menaçaient de tomber de ses yeux noisette et sentit la main d’Umibozu sur son genou en soutien.

- Tu es un crétin, Ryo…, murmura Mick, jetant un regard désolé à son ami.
- Répète un peu., cria Ryo en se levant, les poings serrés.
- Tu es un crétin ! Parce que si je l’ai enlevée, c’était aussi en comptant sur le fait que tu viendrais chercher la femme que tu aimes, que tu remuerais ciel et terre pour elle !, hurla l’américain.

Kaori osa un regard empli d’espoir vers son partenaire. Qu’allait-il répondre à cela ?

- Moi chercher un garçon manqué ? Quelqu’un qui n’est pas digne d’être ma partenaire ? Tu rigoles ou quoi ?

Ce fut plus qu’elle ne put en supporter : elle se leva et s’enfuit de la pièce, pleurant à chaudes larmes. Umi se leva et attrapa Ryo par le col.

- Toi, tu viens avec moi et tu fermes ta grande gueule., lui enjoignit-il.
- Je n’ai pas d’ordre…
- Tu fermes ta gueule, j’ai dit ! Compris ? Ou je te bâillonne., insista-t-il.

Ils sortirent tous deux de la pièce suivie de Miki qui préféra laisser le couple seul. La porte refermée, Mick observa un instant Kazue, restée assise pensive à sa place. Le coeur lourd, il vint s’asseoir à ses côtés, n’osant la toucher.

- Comment tu vas ?
- Ca va mieux. J’étais inquiète pour toi., lui avoua-t-elle.
- Moi aussi. Tu es enceinte, Kazue ?, lui demanda-t-il.

Elle leva un regard surpris vers lui et il se fit triste.

- C’est Kaori qui te l’a dit ? Elle m’avait pourtant promis…
- Elle le sait ?

Kazue acquiesça.

- Elle ne m’en a pas parlé.
- Alors comment ?
- Je te connais. J’ai bien noté que certaines choses n’étaient pas arrivées ce mois-ci, que tu fuyais le café comme la peste et que tu n’étais pas bien en te levant. Tout cela en plus de ta sublime poitrine qui a pris du volume pour mon plus grand plaisir…, lui expliqua-t-il, charmeur.

Elle ne put s’empêcher de rougir et elle était heureuse qu’il eut remarqué tous ces changements chez elle, signe qu’il la regardait encore.

- J’ai été distant ces derniers temps et j’en suis désolé. Je me posais beaucoup de questions., s’excusa-t-il.
- Kaori…, murmura-t-elle.
- Oui. Je ne veux pas te mentir. Je ne savais plus où j’en étais. Disons que cette histoire aura au moins eu un point positif : j’ai vu où était ma place. J’ai su quelle était la femme avec qui je voulais finir ma vie et c’est toi., lui affirma-t-il sans aucun doute.

Kazue le fixa un moment comme surprise et se jeta dans ses bras en pleurant. Il la serra contre lui, ne souhaitant plus la laisser partir mais il devait tout lui dire.

- Kazue, j’ai fait des choses très moches pour te protéger : j’ai blessé Kaori physiquement et moralement. Je… Je l’ai touchée et embrassée de manière très intime.
- Tu l’as violée ?, s’inquiéta-t-elle.
- Non mais… je… je l’ai forcée à avoir du plaisir avec mes mains et mes lèvres. Pour moi, c’est pareil…

Elle le regarda, ne sachant qu’en penser. En tant que compagne, elle voulait le pardonner parce qu’il l’avait fait pour elle, mais, en tant que femme, elle était horrifiée et blessée.

- Je… Je ne sais pas quoi te dire, Mick., avoua-t-elle.
- C’est toi qui décideras de ce que nous deviendrons. J’accepterai ta décision. Je voudrais juste pouvoir connaître notre enfant et te soutenir quand tu en auras besoin.
- D’accord. Donnons-nous un peu de temps., accepta-t-elle.

Ils se turent et attendirent, assis l’un près de l’autre, main dans la main, contact dont ils avaient tous deux besoin.

A l’extérieur, Umi lâcha sans ménagement Ryo et lança une arme à Miki.

- S’il bouge, tire-lui dessus. Sa bêtise ne mérite pas mieux., lui ordonna-t-il.
- Tu me laisses avec une belle femme. Tu peux être sûr que tu me retrouveras près d’elle, voire très près d’elle., fit-il remarquer narquoisement.
- Miki sait se défendre. Vu le mal que tu fais à Kaori, je pense qu’elle se fera un plaisir de te le montrer si nécessaire., l’avertit-il.

Ryo tourna la tête vers la jeune femme et rencontra son regard glacial.

- Je suppose qu’il ne sert à rien de te proposer d’aller t’excuser auprès de ta partenaire., lui demanda-t-il.

La seule réponse du nettoyeur fut de sortir une cigarette, l’allumer et rejeter la fumée avec dédain. Umibozu haussa les épaules et alla voir Kaori. Il se posta derrière elle alors qu’elle regardait l’étang, tentant de reprendre le dessus sur ses tourments, les bras serrés autour d’elle.

- Ne le laisse pas t’atteindre, Kaori. Cette histoire nous a tous beaucoup ébranlés., lui conseilla-t-il.
- Ce n’est pas que cette histoire, Umi. C’était déjà latent depuis quelques temps., répondit-elle d’une voix monocorde.
- Il est blessé…
- Moi aussi. Ce n’était pas une promenade de santé…, se fâcha-t-elle.
- Je sais., dit-il, posant une main sur son épaule.
- Les photos l’ont bouleversé.
- Les photos ?, se retourna Kaori, livide.
- Oui, des photos de Mick et toi, nus, à différents moments…, bredouilla le géant, virant au rouge.

Elle posa une main sur sa bouche, réprimant les sanglots qui montaient. Umi l’attira à lui et, pour l’une des très rares fois dans sa vie, étreignit une jeune femme autre que sa femme pour lui apporter du réconfort. Kaori pleura dans ses bras toute la détresse et la honte qu’elle ressentait.

- A ce train-là, elle pourra aussi tester le Professeur et je testerai la marchandise à mon tour. Elle aura expérimenté tous les hommes de la bande., ironisa Ryo, voyant sa partenaire dans les bras de son ami.
- Tu es abject, Ryo., cracha Miki.
- C’est ton droit d’être en colère mais attends au moins d’avoir tous les faits de l’histoire avant de donner ta sentence.
- On verra bien. Va les chercher. J’en ai marre., lui demanda-t-il.

S’il avait été honnête, il aurait admis qu’il voulait la tenir dans ses bras, être celui qui était là pour elle mais tout cela l’aurait mené à avouer qu’il l’aimait, qu’il avait eu peur pour elle et qu’il était jaloux de ce que Mick avait eu et pas lui… C’était cette même jalousie qui attisait sa colère à voir son américain d’ex-ami si proche d’elle malgré ce qu’il lui avait fait vivre, cette même jalousie qui avait poussé Umibozu à aller la consoler et non lui, cette même jalousie qui mettait en place un rouage infernal qui ne faisait que l’alimenter et l’empêcher de sortir de ce marasme total. Il tourna le dos à la scène en attendant que Miki revint et ils rentrèrent à quatre dans la clinique, retrouvant peu après Mick et Kazue, assis l’un à côté de l’autre, main dans la main.

Un signe de tête de Miki prévint Mick de ne surtout pas bouger. Elle avait vu dans quel état était Ryo et ne voulait pas mettre plus d’huile sur le feu. Ils reprirent tous place, Umibozu plaçant Kaori entre lui et Miki pour la protéger.

- Tu nous as expliqué pourquoi tu as enlevé Kaori. Que s’est-il passé ensuite ?, relança Umi.
- J’ai dû faire en sorte que Kaori accepte le marché qu’on lui proposait qui était de rester vivante à mes côtés… en bref, de faire croire à Nichols qu’elle avait cédé et accepté de se mettre en couple avec moi.
- Comment tu t’y es pris ?, s’inquiéta Miki, jetant un regard vers Kaori.
- Peu importe la manière, ça a marché., coupa la nettoyeuse, d’une voix blanche.
- Moi, je serais curieux de savoir comment., persifla son partenaire, dardant un regard accusateur sur elle.
- Ryo, ça suffit !, tonna Umi.

Le nettoyeur se recala dans son siège, signe qu’il battait en retraite.

- Le lendemain, vous avez retrouvé la planque et on a fui peu avant que vous arriviez. J’ai défait les émetteurs de leur cachette pour que vous arriviez jusqu’à la chambre à la fois pour retrouver les affaires de Kaori et le briquet dans lequel j’avais laissé une puce réceptrice que j’ai activée l’après-midi même.
- Tu avais mis un émetteur sur moi ?, s’étonna Kaori.
- Oui, dans ton soutien-gorge, c’est pour cela que je t’ai… enfin tu vois dans la salle de commandement…, murmura Mick, détournant le regard.
- On a l’impression que tu n’étais pas au courant de grand-chose, partenaire…, marmonna Ryo, une lueur malveillante dans le regard.
- Elle n’était au courant de rien, Ryo. Je l’ai toujours traitée comme si j’étais passé de l’autre côté pour que ses réactions restent naturelles. Elle s’est battue bec et ongles contre moi, pour nous tous. J’ai essayé de lui passer des messages mais nous n’avons pas la même complicité qu’elle et toi. Peu sont passés., la défendit Mick.
- Tu as eu beaucoup plus d’elle que moi et, dans certains corps à corps, elle n’avait pas l’air d’être en train de se battre., ironisa le nettoyeur.
- C’est ça ton problème, Ryo ? Je l’ai tenue nue dans mes bras et pas toi. A qui la faute ?, répondit Mick.
- Arrêtez !, hurla Kaori, à bout de nerf.
- Ca suffit. Je vous en prie., murmura-t-elle, épuisée.

Elle regarda les deux hommes qui se lançaient des regards emplis de rage. Mick baissa les yeux, se sentant coupable de s’être laissé emporter et du chaos qu’il avait mis dans leur vie. Ryo détourna le regard pour ne pas avoir à supporter celui de sa partenaire où brillait une détresse sans fond.

- Je pense qu’on a tous compris et que la fin de l’histoire est connue. Vous êtes arrivés, on s’est tous battus et Nichols est éliminé. L’attaque du commissariat a été évitée et des vies innocentes épargnées. Maintenant, nous devons reprendre le cours de nos vies, réparer ce qui peut l’être., poursuivit-elle, les regardant tous.
- Et surtout, nous avons besoin de dormir afin d’éviter toute décision hâtive et fâcheuse., conclut-elle.

Umi se leva, suivi de Miki.

- Kaori a raison. Nous avons tous besoin de prendre du recul. Le café rouvrira demain., les informa-t-il, signe que leur présence serait la bienvenue après une bonne nuit de sommeil.
- Tu veux rentrer avec nous, Kaori ?, lui proposa Miki, soucieuse.

La nettoyeuse regarda son partenaire qui était en observation intense de ses chaussures.

- Non. La vie doit reprendre son cours. Je rentre chez moi., affirma-t-elle, faisant preuve d’une résolution qu’elle était loin de ressentir.
- D’accord. La porte est ouverte si tu as besoin., lui concéda-t-elle.
- Merci, Miki.
- Si on rentrait Mick ?, proposa Kazue à son tour, nerveuse.
- Tu veux vraiment ?
- Oui. On prendra le temps de résoudre nos problèmes. Je vais chercher mes affaires. Tu me retrouves devant ?
- Dans cinq minutes., répondit-il.

Elle acquiesça et sortit à son tour.

- Tu lui as avoué que tu as couché avec son amie ?, demanda Ryo de but en blanc.
- Je lui ai dit ce que j’avais fait à Kaori, que je l’avais touchée et forcée à avoir du plaisir., répondit Mick sans fléchir.
- Tu appelles ça forcée ?, fit Ryo, sortant une des photos de sa poche.
- Tu es un professionnel en la matière, Ryo. Je ne t’apprendrai rien de ce qu’on peut obtenir d’un corps même si la tête dit non.

Le nettoyeur détourna les yeux. Il aurait voulu nier mais il ne put pas.

- Et le sang et le sperme sur les draps alors ?, attaqua-t-il de nouveau.
- Pour le sperme, je ne te ferai pas de dessin. J’avais une femme magnifique et nue dans les bras. Je ne suis qu’un homme. Pour le sang, c’est le sien., dit-il, pointant vers Kaori.
- Je lui ai fait une légère incision à l’intérieur de la cuisse pour simuler la douleur et le saignement d’un premier rapport., expliqua-t-il, jetant un regard coupable à son amie.
- Tu vas me faire croire que tu ne lui as rien fait ?, tenta une dernière fois Ryo, ébranlé malgré tout dans ses convictions.
- Si j’en reste à mes convictions intimes, elle est toujours intacte. Je ne lui ai rien fait à part lui avoir demandé de me faire confiance comme à toi au moment crucial., répondit-il.

Kaori regarda Ryo tout au long de l’échange : il tentait de se raccrocher à ce qu’il avait cru et elle avait mal de penser qu’il avait imaginé qu’elle accepta ainsi de se livrer à un autre homme que lui. Lorsque Mick se tourna vers elle, elle tenta de se montrer le plus digne possible.

- J’espère que tu trouveras en toi la force de me pardonner un jour. Si je peux faire quelque chose pour t’aider, dis-le moi., s’excusa-t-il sincèrement.
- Je suis contente de t’avoir retrouvé mais j’aurai besoin de temps, Mick.
- Très bien. Si tu veux que je me tienne hors de ton chemin, dis-le. Ca me fera mal mais je comprendrai.

Elle ne put qu’acquiescer, la gorge serrée, et le regarda partir. Quand la porte se referma, elle la regarda un long moment puis se tourna vers la dernière personne restant. Ryo n’avait pas bougé et fixait un point imaginaire. Sentant le regard posé sur lui, il releva la tête et fit face à sa partenaire…
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Mer 17 Mar - 20:23
Chapitre 12

- On rentre., lâcha soudain Ryo.

Kaori le fixa un instant sans comprendre puis le sentit passer à ses cotés et le suivit machinalement. Elle sentait la fatigue la gagner et, bien qu’elle aurait aimé avoir une conversation avec lui, elle avait besoin de se reposer avant. Alors autant rentrer, dormir un peu et reprendre tout cela à tête reposée. Il marchait d’un pas vif et elle avait du mal à le suivre mais elle put le rattraper quand le Professeur l’intercepta dans le couloir.

- Ryo, tu tombes bien. J’ai quelque chose à te dire concernant les résultats sur le drap…
- Je crois que ça n’a plus d’importance puisque les deux protagonistes m’ont donné leur version des faits, que tout n’avait été que simulation., répondit-il d’une voix distante.

Le vieil homme regarda Kaori qui baissa les yeux puis il opina du chef silencieusement.

- Bon, s’ils t’ont tout dit, ça ne vaut en effet plus la peine…, admit-il.

Il était soulagé de savoir qu’il n’y avait pas eu de rapprochement plus intime entre Kaori et Mick, ce que lui avait confirmé l’absence de sécrétions vaginales, et que Ryo était au courant. Les choses rentreraient certainement dans l’ordre. Le nettoyeur tourna les talons sans un mot supplémentaire et reprit le chemin vers la sortie, suivi par sa partenaire.

- J’en connais une qui va devoir redoubler de patience dans les heures à venir…, soupira le médecin avant de regagner son bureau.

Les deux nettoyeurs montèrent en voiture et Ryo prit le chemin de Shinjuku.

- Il faudra qu’on parle, Ryo., murmura Kaori après un long moment passé en silence.
- J’ai assez parlé pour aujourd’hui., répondit-il, le visage fermé.
- Très bien. Alors on parlera demain mais je ne te laisserai pas noyer le poisson une nouvelle fois.

Il lâcha un soupir d’agacement. Il voulait juste avoir le temps de digérer toute cette histoire, de maîtriser les émotions qui l’agitaient. Il aurait nettement préféré qu’elle passa la nuit au Cat’s et se retrouver seul pour réfléchir et affronter ses démons mais il avait encore une fois fallu qu’elle se montra forte et courageuse alors qu’elle avait certainement besoin de calme pour se remettre aussi. Il pouvait voir la façon dont elle triturait ses doigts, dont elle gardait les yeux obstinément baissés sur ses genoux. Ce n’était pas elle.

Il se gara dans le sous-sol de l’immeuble et ils montèrent les étages silencieusement. Kaori le regarda ouvrir la porte et s’engouffrer dans l’appartement sans un regard pour elle, comme si elle n’existait même pas. Elle sentit la colère l’envahir et pénétra au pas de charge à son tour, claquant la porte fermer. Surpris par le bruit, Ryo se retourna et la toisa d’un regard noir.

- Pourquoi tu t’en prends à la porte ? Elle ne t’a rien fait., s’énerva-t-il.
- C’est la porte ou ta tête !, répondit-elle.
- Que se passe-t-il, Ryo ? Qu’est-ce que je t’ai fait ?
- Il ne se passe rien et tu n’as rien fait comme d’habitude… Tu es une sainte, Kaori, et tout le monde te donne le bon Dieu sans confession !, railla-t-il.
- Arrête de me prendre pour une idiote ! Je vois bien que tu es en colère ! Parle-moi, Ryo ! Sois franc pour une fois et parle-moi !, cria-t-elle, sur les nerfs.
- Je n’en ai pas envie !

Il lui tourna le dos et se dirigea vers le bar, sortant une bouteille de whisky. Il ne prit même pas la peine de sortir un verre et but directement au goulot.

- Tu préfères noyer tes soucis dans l’alcool ? Très bien. Je vais prendre une douche et me coucher mais je te jure qu’on s’expliquera d’ici quelques heures., lui promit-elle d’une voix tendue.

Il lui lança un regard peu amène et elle s’en alla. Elle se déshabilla, retirant les vêtements que Mick lui avait achetés. Elle examina au passage le soutien-gorge pour en trouver la puce et la retirer, tout en ressassant les dernières heures. Cette journée avait été stressante. Elle avait du mal à réaliser que la situation s’était retournée aussi vite qu’elle s’était mise en place. Elle était de retour chez elle, en sécurité. Elle pouvait enfin relâcher la pression et sentit l’angoisse monter. Elle lutta contre les larmes jusqu’au moment où elle se glissa sous le jet d’eau chaude. Elle pleura un long moment, laissant le stress s’évacuer et laisser place uniquement à la fatigue.

En bas, le nettoyeur avala une énième rasade de whisky, se laissant griser par l’alcool. Il entendait la douche couler et se sentit rassuré de savoir qu’elle était rentrée, qu’elle était enfin en sécurité. Le soulagement qu’il ressentit le surprit par son intensité. C’était comme si toute la tension n’avait été dirigée que vers elle… Depuis quand occupait-elle une place si importante dans sa vie ? Depuis quand sa vie ne tournait-elle qu’autour d’elle ?

La douche durait et il se demandait bien ce qu’elle pouvait faire aussi longtemps sous l’eau. Il se mit à imaginer son corps nu sur lequel glisser des filets d’eau, ses mains le parcourant doucement, le savonnant allègrement, lui donnant cette odeur qui était la sienne, légèrement sucrée et fraîche… Expérimentait-elle l’effet des caresses que Mick lui avait prodiguées ? Tentait-elle d’atteindre de nouveau mais seule le nirvana atteint sous ses mains à lui ? A ces pensées, il se sentit fulminer. Il l’avait touchée et possédée… Mick lui disait qu’il la pensait encore vierge mais il n’en était pas si sûr. Kaori n’avait certes connu personne depuis qu’elle était arrivée chez lui mais elle avait vingt ans à l’époque et la majorité des filles avait déjà connu le loup à cet âge. Alors, ils pouvaient bien avoir monté cette histoire de toute pièce pour calmer sa colère mais ils ne pourraient jamais le prouver.

Il se rendit soudain compte qu’il était à la porte de la salle de bains. Cela faisait des années qu’il se tenait loin d’elle pour ne pas la toucher ni la salir et elle lui avait fait croire qu’elle l’aimait. Il y avait cru malgré son insistance à la dénigrer. Il s’était laissé berner comme un bleu, il s’était réchauffé à ce sentiment et, aujourd’hui, c’était la douche froide. Il ne lui avait au final pas fallu longtemps pour céder à un autre, leur ami qui plus était, et, ensuite, ils lui avaient menti effrontément. Ils devaient être sûrs qu’il s’en tiendrait à son comportement habituel, se tenir loin d’elle, ainsi, ils ne seraient pas pris…

Il entra dans une colère froide et appuya sur la poignée de la porte avant d’entrer. Il trouva les vêtements de sa partenaire, ceux que Mick lui avait obligeamment offerts pour en faire sa maîtresse, toucha les sous-vêtements en dentelle noire, trop sexy pour elle, et se déshabilla avant d’entrer dans la salle d’eau discrètement. Il observa un moment Kaori qui se rinçait sous le jet d’eau, son corps sur lequel glissait le savon et sentit le désir enflammer ses sens. Sans plus attendre, il la rejoignit sous l’eau, la saisissant par les hanches.

La nettoyeuse poussa un cri de surprise en se sentant attrapée et se retourna, le coeur battant. Croisant un torse nu, elle releva les yeux pour sombrer dans le regard nuit de son partenaire et fut comme happée par son intensité.

- Ryo, mais qu’est-ce…, commença-t-elle.

Elle ne put cependant finir sa phrase qui mourut lorsque les lèvres de son partenaire se posèrent sur les siennes. D’abord dures, elles se firent vite plus douces et Kaori se laissa emporter par le flot de sensations qu’il éveilla en elle. Elle ne tarda pas à répondre timidement à ses baisers, laissant ses mains glisser derrière son cou. Quand son corps se plaqua contre celui de Ryo, en épousant tous les reliefs, elle ne put cependant s’empêcher de s’écarter, le regardant les yeux écarquillés. Elle admira son corps nu et ne sut réprimer le rougissement qui la prit en voyant son mokkori fièrement dressé. Elle recula, impressionnée, et se retrouva plaquée contre la paroi de la douche.

- Tu as peur de moi ?, lui murmura-t-il d’une voix langoureuse.

Il laissa errer ses doigts sur sa peau, lui donnant la chair de poule.

- Je… non… enfin…, bredouilla-t-elle, intimidée.
- Tu me fais confiance ?
- Oui., souffla-t-elle.
- Tu m’aimes ?, lui demanda-t-il.

Il savait qu’il jouait cruellement avec ses sentiments mais il ne pouvait s’en empêcher. Il voulait réaffirmer son ascendant sur elle, ascendant que Mick lui avait volé. Il regarda la flamme se rallumer dans ses yeux et la trouva belle et extrêmement désirable et, aujourd’hui, il céderait enfin à ce désir longtemps refoulé.

- Oui… Plus que tout au monde., répondit-elle avec ferveur.

Il lui sourit et fondit de nouveau sur ses lèvres. Il était fier de savoir qu’il avait repris sa place. Il profiterait des charmes de sa belle ce soir et cette nuit et, demain, la renverrait dans ses pénates. Elle souffrirait comme il avait souffert de sa trahison. Enfin demain ou plus tard, en fonction du temps que ça lui prendrait à se lasser d’elle… Il fit taire la petite voix au fond de lui, lui soufflant de revenir sur sa décision, de ne pas faire une telle erreur.

Il laissa ses mains errer sur son corps en appréciant chaque courbe, chaque creux. Il entendait ses gémissements contre sa bouche, puis libres quand il partit en exploration du bout des lèvres et de la langue. Il la sentit trembler contre lui quand ses doigts allumèrent chaque zone sensible de son corps de femme, retenir son souffle avant de se cambrer contre lui quand la vague de plaisir déferla en elle. Il la regarda, satisfait de l’effet qu’il lui avait fait, et se retint de lui demander si c’était mieux qu’avec lui. A coup sûr, elle l’aurait réduit en miettes et il n’aurait pas pu assouvir son désir comme il l’entendait. Et il était loin d’en avoir fini avec elle…

- Ca va ?, murmura-t-il, mordillant la peau fine de sa nuque.
- Oui., répondit-elle d’une voix légèrement troublée.

Elle ne savait plus où elle était. Le plaisir qu’elle avait ressenti était intense et l’avait littéralement balayée. S’il ne l’avait pas tenue, elle se serait effondrée, ses jambes ne la portant plus. Elle sentait la langueur envahir son corps, d’autant plus qu’il continuait à la caresser, à l’embrasser, à la cajoler. Elle n’avait pas imaginé que Ryo put être un amant aussi doux et attentionné. Elle l’avait rêvé mais elle avait pensé que, dans la réalité et connaissant sa réputation, il serait beaucoup plus impatient. Il lui donnait confiance pour envisager l’étape suivante. Il saurait faire attention.

Elle s’enhardit et posa les mains sur lui, derrière sa nuque. Elle l’attira et sentit ses lèvres sur les siennes, exigeantes. Elle lui donna accès à sa bouche et sentit bientôt sa langue venir taquiner la sienne, lui répondant de manière plus affirmée. Elle l’entendit grogner contre elle quand elle osa enfin se coller contre lui, leurs intimités se frôlant. Elle se sentit électrisée par ce contact.

- Ryo…, gémit-elle doucement.

Il glissa de nouveau ses mains sur son corps et, en quelques minutes de caresses plus ou moins appuyées, l’envoya une nouvelle fois planer, la serrant contre lui, sentant son corps trembler. Il attendait le moment où elle l’implorerait de venir en elle. Il avait beau brûler de la posséder, il voulait l’entendre le supplier. Il était sûr d’en retirer autant de plaisir qu’en la faisant sienne. Sans un mot, il ferma le robinet et, toujours en l’embrassant, ne lui laissant aucune minute de répit sensoriel, ils sortirent de la douche. Il lui prit des mains la serviette qu’elle venait d’attraper et la lança dans un coin.

- Tu verras, c’est bien mieux quand on est humide., lui dit-il d’une voix chaude.

Pour lui prouver ses dires, il la souleva et l’assit sur le bord du lavabo. Ainsi en équilibre, elle était obligée de se raccrocher à lui pour ne pas tomber. Il la tenait fermement par la taille et la fit doucement basculer en arrière, laissant sa bouche errer sur sa poitrine. Il la sentit haleter et intensifia la caresse : elle était proche de céder.

Kaori perdait rapidement la tête entre ses bras. Tout était soudain et elle ne savait plus où elle en était. Elle n’aurait peut-être pas dû céder si facilement alors qu’ils n’avaient pas encore parlé de ce qui s’était passé mais elle ne s’était jamais sentie aussi bien et, après les jours difficiles qu’ils venaient de vivre, ce moment de douceur et de passion mêlées était des plus appréciables. Elle ne voulait pas arrêter. Elle n’avait pas peur de la suite : elle se savait entre de bonnes mains, dans des bras de confiance pour passer cette étape dans sa vie de femme. Peut-être que cela marquerait enfin le tournant de leur relation mais elle ne se laisserait pas emporter sur ce sujet. Elle prendrait ce qui viendrait. Elle sentit de nouveau le désir grandir en elle.

- Ryo…, l’appela-t-elle.
- Oui, ma belle ?, fit-il innocemment.

Il vit ses pupilles légèrement dilatées, ses joues rosies, son souffle court. Il ne faudrait pas grand-chose pour la faire basculer. Il laissa ses doigts glisser sur elle à un point très sensible et l’observa haleter sous les sensations qui la prenaient.

- Arrête. Je… Je te veux., souffla-t-elle.
- Tu es sûre de toi ? Je ne voudrais pas abuser de la situation., mentit-il.
- Oui.

Il la ramena vers lui et prit ses lèvres, tout en la soulevant dans ses bras. Les cuisses nouées autour de son bassin, Kaori sentait le mokkori de son partenaire frôler son intimité, envoyant mille décharges dans son corps. Elle perdait complètement pied.

Quand il pénétra dans sa chambre, Ryo posa la jeune femme sur son lit et la regarda, nue et offerte un long moment. Il ne la rejoignit que lorsqu’elle l’appela. Même si elle lui avait enfin demandé d’être à lui, il voulait reprendre le contrôle dans leur relation et il avait donc décidé de donner le tempo : il voulait la voir languir comme il l’avait fait. Cette petite voix revint mais il la chassa, sentant son instinct de prédateur reprendre possession de lui et sa proie n’était autre que sa partenaire.

Kaori vit le regard du nettoyeur s’assombrir et l’associa au désir qu’elle provoquait chez lui. Elle en tira une certaine satisfaction et se redressa sur le lit pour aller le chercher : elle ne voulait plus attendre. Elle s’approcha de lui et glissa les bras autour de son cou, cherchant ses lèvres. Il la laissa un instant guider leur échange, restant passif, puis reprit le dessus et l’embrassa sauvagement, la laissant pantelante. Ce faisant, il l’avait allongée sur le lit et s’employait à refaire grimper le désir en elle. Elle prenait confiance dans leurs échanges et le caressait de plus en plus, laissant ses mains errer sur son corps. La réaction était inédite pour Ryo et il en fut quelque peu ébranlé. Jamais une femme n’avait réussi à mettre autant de douceur dans les gestes inspirés par la passion. Il se demanda soudain si Mick avait ressenti la même chose et la colère le reprit.

Il enlaça soudain leurs doigts et ramena leurs mains de chaque côté de sa tête, s’allongeant sur elle, le regard sérieux. Il sentit la légère hésitation, son corps se raidissant imperceptiblement, et se baissa pour prendre ses lèvres dans un baiser très doux qu’il laissa s’enflammer. Quand il sentit l’abandon de son corps, il se glissa brusquement en elle et s’immobilisa, réalisant ce qu’il venait de faire et ce que ça signifiait. Il venait de voler l’innocence de la femme qu’il aimait, il lui avait pris quelque chose de précieux par pur esprit de vengeance parce qu’il n’avait pas voulu croire ce qu’elle lui avait dit. Il réalisa soudain à quel point sa jalousie lui avait fait perdre la tête, à quel point tous ses doutes et toutes ses peurs l’avaient amené à ce point de non-retour. La culpabilité le prit et il n’osait plus faire le moindre geste.

- Kaori…, gémit-il, coupablement.

Les yeux fermés, Kaori vivait les sensations du moment. Il était en elle, il l’avait enfin faite sienne, elle lui appartenait. Le meilleur dans tout cela, c’était qu’elle n’avait presque pas eu mal et elle était touchée par sa prévenance à ne pas vouloir accélérer les choses et lui laisser le temps de s’adapter en ne bougeant pas. Elle aimait cet homme à en mourir… C’était à son tour de lui montrer qu’elle était prête et elle bougea doucement le bassin au moment où il murmura son prénom. Toute à ces sensations exquises, elle mit quelques secondes à ouvrir les yeux, quelques secondes où il se mit à bouger doucement en elle. Elle ouvrit donc les yeux et pensait trouver un regard chaud et aimant, pas un regard empli de culpabilité.

Ne supportant pas l’amour qu’il lisait dans son regard, lui qui l’avait vilement manipulée, Ryo plongea le visage dans son cou. Il aurait peut-être dû se retirer mais ne s’en sentait pas la force. Il s’employa donc à être le plus tendre des amants malgré tout ce qu’il avait fait jusque là. Il l’aima du mieux qu’il put, sentant son corps se mouvoir sous le sien, leurs mouvements se coordonnant. Il évita son regard le plus possible, y lisant progressivement la douloureuse réalisation de ce qu’il venait de lui faire. Leurs corps atteignirent bientôt l’apogée physique alors que leurs coeurs sombrèrent.

Incapable de se séparer d’elle, se doutant de la suite des évènements, Ryo resta un long moment allongé sur elle, la serrant dans ses bras. Il sentait les larmes lui brûler les yeux mais elles ne voulaient pas sortir. Sous lui, Kaori semblait de marbre, les bras le long de son corps, le visage tourné vers la fenêtre. La seule chose qui attestait encore de son état vivant était sa respiration régulière qui soulevait sa poitrine sous lui.

Pas un son ne vint perturber le silence pesant qui avait envahi la pièce. Aucun mouvement ne fut esquissé pendant un très long moment. Tous deux prenaient la mesure de ce qui venait de se passer et de ce qui allait se passer car cet évènement ne pourrait rester un fait anodin de leur partenariat. Ils en étaient tous deux conscients.

- Sors de moi, Ryo., murmura-t-elle soudain.

Il ne voulait pas. Il ne voulait pas bouger de là et passer au moment suivant. Il voulait rester là et revivre ce qu’il avait vécu et qui aurait pu être encore plus beau s’il ne s’était pas laissé aveugler. Il ne voulait pas mais il roula tout de même sur le dos, s’allongeant à ses côtés.

Kaori se sentait vidée, épuisée autant physiquement que moralement. Elle avait la sensation d’avoir définitivement touché le fond. La situation ne pouvait être pire. Elle se sentait salie, trahie, violée. Il l’avait amenée à se donner à lui sous des gestes fallacieux. En quarante-huit heures, elle avait été abusée par deux amis proches et elle ne savait pas comment elle se relèverait de tout cela et surtout d’avoir été trahie par l’homme qu’elle aimait. Telle une machine, elle se releva et s’assit sur le bord du lit.

- Ca devait être l’un des plus beaux jours de ma vie, Ryo., dit-elle d’une voix étranglée.
- Kaori…
- Tais-toi. Tu en as fait l’un des pires., lui apprit-elle.
- C’est comme si tu m’avais violée. J’aurais pu encore comprendre que tu aies agi sous le coup de la colère…

Elle se leva, ressentant le besoin de s’éloigner de lui. Elle attrapa une de ses chemises propres dans l’armoire, sûre que celle-là ne porterait pas son odeur, et la revêtit.

- J’étais en colère, Kaori. Toi et moi, ça ne semblait plus rouler et il y avait Mick, toujours plus proche…
- Merde, Ryo ! A qui la faute ? Tu sais que c’est toi que j’aimais. Tu sais que je n’attendais qu’un geste de ta part et que je ne pouvais pas être celle qui ferait le premier pas parce que tu serais parti en courant. Je t’ai tendu toutes les perches possibles depuis des années, depuis des mois et tu n’en as attrapé aucune ! Malgré tout, j’étais encore là ! Malgré tout, il suffisait d’un seul mot, d’un seul regard, d’un seul geste de ta part pour que je revive et replonge tête baissée dans cette histoire ! Je ne te demandais que de m’aimer en retour, rien de plus., s’insurgea-t-elle, le regard noir.

Il tourna un regard tourmenté vers elle mais elle était trop en colère pour se laisser émouvoir. Il la perdait. Toutes ces années à tourner autour du pot, à la savoir ferrée au bout de sa ligne, lui donnant du lest avant de la rapprocher, jouant ce jeu du chat et de la souris, avaient abouti à cela : la détruire, les détruire. Il avait eu peur de la laisser entrer dans sa vie par peur de souffrir mais ce qu’il ressentait à ce moment-là était exactement ce qu’il cherchait à éviter. Il avait mal, très mal et elle aussi, exclusivement par sa faute.

Prenant enfin son courage à deux mains, il se leva et lui fit face. Il avança d’un pas mais s’immobilisa en la voyant reculer.

- J’aurais pu te pardonner beaucoup de choses, Ryo, mais tu as brisé la seule chose qui faisait notre essence : la confiance., affirma-t-elle d’une voix dure.
- Ne dis pas ça., murmura-t-il.
- Ose me dire que tu n’as pas abusé de ma confiance pour m’amener dans ton lit ?, le défia-t-elle, relevant le menton.

Il soutint un instant son regard mais se tut et le détourna.

- Nous as-tu seulement cru quand Mick t’a dit qu’il n’avait pas été intime à ce point avec moi ?, insista-t-elle, ayant besoin d’en avoir le coeur net.
- Non., admit-il.

Elle réprima le sanglot qui monta et le toisa durement.

- Je pense qu’on est arrivés à la fin de notre histoire, Ryo. La confiance entre nous est brisée et, sans cela, nous ne pouvons plus fonctionner.
- Kaori, non., objecta-t-il, perdu.
- Je ne peux plus. J’avais besoin de toi pour remonter la pente après ce qui m’était arrivé. Je pensais que tu serais là pour moi mais tu n’en es pas capable. C’est fini. Je m’en vais.
- Non !, cria-t-il.
- Je ne veux pas que tu partes ! Reste ! Kaori, s’il te plaît, reste !, l’implora-t-il, la saisissant par les bras.

Elle le regarda, les yeux brillant de larmes retenues.

- Ces mots-là, je les ai attendus. En d’autres circonstances, ça aurait suffi. Mais aujourd’hui, ça ne me suffit plus, Ryo., murmura-t-elle, posant une main sur sa joue.
- Laisse-moi partir maintenant. Reste ici et laisse-moi partir., lui demanda-t-elle doucement.

Ils s’observèrent un long moment, chacun profondément blessé, puis il la lâcha et elle sortit, fermant doucement la porte derrière elle.

La nettoyeuse se dirigea vers sa chambre. Gardant la chemise, elle enfila un jean et sortit un sac de son armoire où elle entassa pêle-mêle quelques affaires, le cadre-photo et la bague de son frère. Elle ressortit de là et passa dans la salle de bains récupérer ses affaires de toilette. En passant, elle ramassa les vêtements qu’elle portait en rentrant et les jeta à la poubelle. Quand elle ressortit, elle s’arrêta un instant dans le couloir, mémorisant l’appartement qui l’avait accueillie pendant sept longues années avec ses peines et ses espoirs.

- Je serai chez Eriko mais je te serai gré de ne pas venir m’y trouver. Je reviendrai chercher mes affaires restantes plus tard., annonça-t-elle à Ryo qu’elle avait senti non loin d’elle.

Il ne dit rien et la regarda partir. Quand elle referma la porte derrière elle, il lui sembla voir son monde s’assombrir : il avait perdu son ange.
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Jeu 18 Mar - 21:28
Chapitre 13

- Je viens te chercher ce soir, vers dix-huit heures, c’est cela ?, demanda Mick à sa compagne.
- Oui. Je t’attendrai. Ne fais pas de bêtise en mon absence., le réprimanda-t-elle, l’oeil sévère.
- Tu peux compter sur moi, darling.

Kazue se pencha et embrassa son compagnon avant de sortir de la voiture. Elle avait réappris à lui faire confiance et ne doutait plus de ses sentiments pour elle. Le seul point noir restait les actes qu’il avait accomplis sur leur amie et qu’elle n’arrivait pas à accepter. Malgré cela, ils avaient repris une vie de couple à peu près normale sauf qu’elle lui avait bien fait comprendre qu’elle n’accepterait plus aucun écart de sa part.

Mick regarda sa femme s’éloigner et attendait déjà avec impatience de la retrouver le soir-même. Il se remémora les jours qui avaient suivi son retour chez eux. Elle l’avait laissé revenir mais il avait squatté le canapé pendant plus d’une semaine, le temps qu’avaient duré les explications entre eux sur son comportement avant et pendant sa disparition, le temps de lever toutes les incertitudes que la jeune femme pouvait encore avoir. Elle avait fini par tout lui pardonner et ne lui avait imposé qu’une condition : arrêter les beuveries et séances de drague. La seule chose qu’elle n’avait pas excusé, c’était son comportement envers Kaori car elle seule pouvait le faire.

L’américain aurait aimé pouvoir voir son amie mais, depuis la fin de cette histoire avec Nichols, personne ne l’avait revue. Elle était rentrée avec Ryo et était repartie le jour même. Le nettoyeur n’avait rien voulu leur dire sauf qu’elle était chez Eriko et qu’il ne fallait pas la chercher, qu’elle avait besoin de temps. A sa connaissance, son vœu avait été respecté même si Umi avait dû raisonner Miki plus d’une fois. Levant les yeux de nouveau vers la clinique avant de repartir, il vit justement Kaori quitter le bâtiment et ne put s’empêcher de sortir de la voiture : après tout, il respectait les consignes puisqu’il ne l’avait pas cherchée…

- Kaori., l’appela-t-il.
- Mick… qu’est-ce que tu fais là ?, demanda-t-elle inquiète.
- J’ai accompagnée Kazue. Sa voiture est tombée en panne. Tu… tu vas bien ?

Elle eut un léger sourire cynique et il nota la perte de poids et les cernes sous ses yeux, sentant la culpabilité revenir. Il fit un pas vers elle mais la vit reculer tout en tendant une main devant elle, ordre silencieux de se tenir à distance.

- Je vais à merveille. Ma vie est partie complètement en vrille mais c’est génial., lâcha-t-elle, amère, ses yeux s’emplissant de larmes.
- Kaori… Viens, on va parler., lui proposa-t-il, soucieux.
- Je n’ai pas envie de parler, Mick, encore moins avec toi. Tu as foutu ma vie en l’air alors fiche-moi la paix !, cria-t-elle.
- Que se passe-t-il ici ?, intervint le Professeur, les sourcils froncés.
- Je voulais juste lui dire deux mots., se défendit l’américain.
- A priori, ce n’est pas le moment, Mick. Laisse-la tranquille., objecta le vieil homme.
- Très bien. Kaori, tu penses qu’un jour, on arrivera à se parler de nouveau ?, l’interrogea-t-il douloureusement.

Elle leva un regard bouleversé sur lui, les larmes s’échappant librement.

- Je ne sais pas. J’ai besoin de temps. Tu diras au revoir à Kazue de ma part. J’accompagne Eriko en voyage quelques temps., déclara-t-elle avant de tourner les talons, le regard froid.

Elle rejoignit sa voiture et s’en alla.

- Elle est malade, Doc ?
- Non. Je devais vérifier sa blessure au dos., justifia le vieil homme, regardant la jeune femme partir, soucieux.
- Rentre chez toi, Mick, et, si tu la recroises, laisse-la tranquille. Elle reviendra quand elle le pourra.

L’américain acquiesça à contre-coeur et s’en alla, le coeur lourd.

Kaori essuya rageusement les larmes qui roulaient sur ses joues en conduisant. Elle ne voulait pas partir comme une voleuse et se dirigeait vers le Cat’s pour dire au revoir à Umibozu et Miki. Elle appréhendait cette visite après trois semaines de silence radio mais elle ne voulait pas fuir. Ils ne méritaient pas cela. Ils s’étaient montrés présents pour elle lors de la grande confrontation et elle leur devait au moins de leur dire en face qu’elle s’en allait. La seule chose qu’elle espérait, c’était de ne croiser ni Mick ni Ryo dans le café. Elle s’arrêta devant la devanture et sortit du véhicule, frottant ses mains moites sur son jean. Prenant son courage à deux mains, elle avança et pénétra dans le commerce.

- Bonjour., dit-elle simplement après quelques pas.
- Kaori !, s’écria Miki, folle de joie.

Elle contourna le comptoir et se jeta dans les bras de son amie qui resta un moment immobile avant de la serrer à son tour.

- J’étais folle d’inquiétude. Pourquoi tu n’es pas venue ici ? Pourquoi tu es partie ? Quelle tête, ma chérie ! On dirait que tu n’as pas dormi depuis des lustres…
- Miki, laisse-la respirer., intervint Umi.

Kaori laissa échapper un ricanement amer. Ca faisait des jours qu’elle ne dormait plus correctement. Elle finissait par s’effondrer de sommeil vers trois quatre heures du matin, se réveillant en même temps qu’Eriko vers sept heures. Elle était épuisée physiquement et moralement. La proposition de son amie de jouer le mannequin et son assistante pour elle pendant ses tournées européenne et américaine était tombée à pic. C’était cinq mois d’éloignement forcé du Japon, de Ryo et de tous ses problèmes, cinq mois à penser à autre chose et prendre du recul.

- Ca fait des semaines que je ne dors pas en effet., répondit-elle.
- Viens t’asseoir. Je te sers un café.
- Une tisane, s’il te plaît. Vu mon état de stress, le café m’est déconseillé., lui demanda-t-elle.
- D’accord.

Miki lui prépara une boisson chaude tout en lui lançant des regards curieux.

- Pourquoi tu n’es pas venue ici, Kaori ? Je t’avoue que ça m’a fait mal., osa-t-elle lui dire.
- Je ne pouvais pas. Miki, ce n’était pas contre vous parce que je ne vous remercierai jamais assez de votre intervention pendant l’explication qui a eu lieu. Sans Umi pour les contrôler, ça aurait tourné au vinaigre.
- De rien. Dans une famille, on se serre les coudes., marmonna le géant.
- Oui, c’est ce qui devrait être., soupira la nettoyeuse.
- Je ne comprends pas, Kaori., insista Miki.
- Ryo et moi nous sommes disputés violemment. J’ai mis fin à notre partenariat. Et si je ne suis pas venue ici, c’est parce que j’avais besoin de ne pas le voir, ce qui ne serait pas possible ici. Vous n’avez pas à choisir un camp.
- C’est définitif ?, s’inquiéta la barmaid.

Kaori regarda sa tasse, affrontant d’un autre la question qu’elle ne cessait de se poser. Elle était en colère à un niveau qu’elle n’avait jamais expérimenté. Elle se sentait trahie et salie. Mais malgré tout, elle ne pouvait nier qu’il lui manquait, qu’elle rêvait de retrouver ses bras. Ca la mettait encore plus en colère. Elle haïssait cet état de dépendance dans lequel il l’avait plongée. De plus, elle ne se voyait pas retourner auprès de Ryo et lui demander de reprendre leur partenariat : elle ne savait pas si elle serait capable de lui faire confiance à nouveau.

- Je pense. Je n’ai plus confiance en lui., avoua-t-elle.
- Mais que s’est-il passé ?
- Je ne veux pas en parler., répondit-elle, les dents serrées.

A quoi s’était-elle attendue ? Qu’il ait osé avouer son méfait ? Qu’il avait abusé des sentiments qu’elle éprouvait pour lui pour se venger d’un acte inexistant ? Qu’il ne lui avait tout simplement pas fait confiance ? Non, ça aurait été trop beau. Il s’était tu, n’avait pas affronté le regard et le jugement de leurs amis.

- Kaori…
- Je ne veux pas en parler, Miki., réitéra-t-elle, frappant violemment du poing sur le comptoir.

Miki recula d’un pas face au regard noir de son amie. Elle n’y avait jamais eu droit, n’avait jamais vu Kaori aussi furieuse.

- Très bien., murmura-t-elle.

Le silence s’installa un moment entre les trois personnes puis, après avoir avalé une gorgée du liquide chaud, Kaori releva la tête et regarda ses deux amis.

- Si je suis venue ici aujourd’hui, c’est pour une raison précise. Je pars avec Eriko pour quelques mois en Europe et en Amérique. Je voulais vous dire au revoir avant de m’en aller., les informa-t-elle.
- Mais… pourquoi ?, fit Miki qui avait de plus en plus de mal à la comprendre.

Kaori n’était pas du genre à abandonner. Si elle partait et s’éloignait de Ryo, quel avenir leur était réservé ? Si elle s’en allait, c’était que leur dispute avait été suffisamment importante pour les briser. Elle ne voulait pas perdre son amie. Pouvait-elle la laisser s’en aller sans tenter de la raisonner ?

- J’ai besoin de prendre du recul. Eriko avait besoin de quelqu’un. Je l’accompagne., répondit la nettoyeuse simplement.
- Mais tu ne peux pas laisser Ryo seul…, objecta Miki.
- Ryo n’a pas besoin de moi. Ca fait des années qu’il me le répète et je l’ai enfin entendu. J’ai une vie à vivre., asséna-t-elle durement.
- Mais…
- Miki ! Fais un bon voyage, Kaori. Prends soin de toi et reviens nous voir quand tu le pourras., lui souhaita Umibozu.
- Merci, Umi., répondit Kaori.

Elle sentit à nouveau les larmes lui monter aux yeux : elle sentait la compréhension dans le regard que posait son ami sur elle. Avait-il compris ? Avait-il ressenti son mal-être profond ? Elle ne savait pas mais elle sentait qu’il ne la jugeait pas et respectait son choix. Elle appuya sur le coin de ses yeux pour bloquer l’éruption lacrymale et se concentra sur sa tasse pour reprendre le dessus. Ca devenait de plus en plus difficile.

- Tu pars quand ?, finit par demander Miki, la voix étranglée.
- Demain matin.
- Je ne comprends pas, Kaori, mais j’espère qu’un jour, tu sauras nous expliquer. Téléphone de temps à autre pour donner de tes nouvelles., l’implora-t-elle.

Miki fit le tour du comptoir et serra de nouveau son amie dans ses bras.

- Laisse-moi un peu de temps mais je le ferai., lui promit-elle.
- Il faut que j’y aille., murmura Kaori.

Miki la lâcha et Kaori s’approcha de son ami. Il ne dit pas un mot mais, pour la deuxième fois, la prit dans ses bras. Les larmes aux yeux, la nettoyeuse sortit du café et reprit sa voiture. Sa dernière étape était la plus difficile et elle sentit ses doigts trembler quand elle coupa le moteur. Elle sentit sa gorge se serrer quand elle regarda l’immeuble de briques rouges devant elle. Elle se força à avancer et eut du mal à introduire la clef dans la serrure de la porte d’entrée. Le trajet jusqu’au cinquième étage lui parut interminable et elle se sentit oppressée quand elle fit face à la porte de l’appartement. Elle repensa à tout ce qu’ils avaient vécu, à toutes les disputes qu’ils avaient pu avoir, les fou-rires, les gestes et mots tendres… Elle frappa à la porte et, n’ayant pas de réponse, ouvrit avec sa clef.

Elle réprima un haut-le-coeur en entrant. L’appartement empestait l’odeur de tabac froid, le sol était jonché de cartons de pizza et autres plats à emporter ainsi que de cannettes et bouteilles vides. Elle enjamba prudemment le tout et alla ouvrir une fenêtre pour faire entrer de l’air frais dans la pièce. Il s’était complètement laissé aller. Elle qui avait passé sept ans de sa vie à tenir l’endroit propre et en ordre devait affronter trois semaines de célibat de son partenaire. Qu’avait-il pu faire d’autre en son absence ?

Elle leva un regard blessé vers sa chambre : avait-il emmené une fille dans son lit, là où ils avaient… Sans même y réfléchir, elle grimpa les escaliers et pénétra dans la chambre de Ryo. Son premier geste fut également d’ouvrir une fenêtre tellement l’air était saturé d’une odeur infecte. Quand elle tira la couette, elle se dit qu’elle était masochiste de vouloir voir les traces de ses méfaits. Tout ce qu’elle trouva fut quelques traces de sang sur le drap et elle se rappela qu’il s’agissait des mêmes draps que le jour où ils avaient fait l’amour. Ecoeurée, en rage, elle les retira et alla les mettre dans la machine, la mettant en route. Elle ne savait pas s’il les avait gardés pour se complaire dans sa vengeance ou pour s’en accabler mais elle s’en fichait : elle ne voulait pas savoir qu’il dormirait encore une fois dans son sang.

Satisfaite, elle se rendit dans sa chambre et prit une valise dans laquelle elle empila les affaires dont elle aurait besoin pour son voyage : vêtements confortables, vieux pyjamas, livres… Elle alla dans la salle de bains compléter sa trousse de toilettes. Elle sentit un vertige la prendre en voyant la douche et s’appuya au meuble de salle de bains. Elle revit défiler devant ses yeux les images de ce qu’ils avaient fait et sentit la nausée la prendre. Elle ne put se retenir et vomit dans le lavabo, sentant les larmes lui piquer les yeux. Au bout de quelques minutes, la vague se calma et elle se rinça la bouche. Quand elle se redressa, elle affronta l’image de son fantôme dans le miroir. Elle était livide et les cernes sous yeux assombris par la détresse étaient d’autant plus apparentes. Elle ne se reconnaissait plus. Elle ressortit rapidement de là et rangea sa trousse de toilettes dans sa valise.

Quand elle fut sûre de n’avoir rien oublié, elle referma son bagage et le descendit dans le séjour. Elle défit les clefs de l’appartement et de l’immeuble de son trousseau et les posa sur le meuble de l’entrée, évacuant la tristesse qui s’emparait d’elle. Curieuse, elle se rendit dans la cuisine, fronçant le nez de mécontentement en voyant la vaisselle s’amonceler dans l’évier. Elle ouvrit les placards et le frigo et ne fut pas surprise de les trouver vides si elle exceptait les cannettes de bière mises au frais. Elle se sentit un instant coupable mais la colère reprit le dessus : il était assez grand pour se débrouiller. Il l’avait assez rabaissée et bassinée qu’il était capable de vivre sans elle. Il ne lui restait qu’à lui prouver ce dont il était capable.

Elle entendit soudain la porte d’entrée s’ouvrir et ressentit son aura. Ryo était rentré. L’heure était venue. Elle inspira profondément et relâcha doucement son souffle avant de retourner dans la pièce à vivre. Il se tenait immobile et observait la valise posée au milieu du séjour.

- Elle ne va pas te sauter dessus si c’est ce que tu redoutes., ironisa-t-elle.

Il leva le regard vers elle et la dévisagea intensément. Elle était là, de retour à l’appartement, mais la présence de sa valise attestait que le retour était éphémère. Il détailla sa silhouette, les traits de son visage et son coeur se serra : il l’avait ravagée. Soudain, il réalisa qu’il ne lui avait pas répondu et il plongea dans son regard.

- Non. Ce que je redoute, c’est ce que ça signifie., répondit-il franchement.

Kaori fut surprise : il ne l’avait pas habituée à se dévoiler ainsi. Toutefois, elle reprit vite la maîtrise de ses traits.

- Ca signifie que je m’en vais.

Ryo se retint de s’approcher d’elle pour l’enlacer. Il ne s’en sentait pas le droit après le mal qu’il lui avait fait.

- Tu as pris ta décision alors…, murmura-t-il, défait.

Jusque là, elle avait pensé que, s’il se montrait triste à l’idée de son départ, elle en ressentirait une joie perverse mais ce ne fut pas le cas : son coeur se serra et elle dut faire un effort pour ne pas pleurer une nouvelle fois.

- Non, pas encore. Je pars avec Eriko pour quelques mois.
- Où vas-tu ?, lui demanda-t-il.
- En Europe et en Amérique. Elle avait besoin d’un mannequin.
- Donc tu reviendras., se prit-il à espérer.
- A Tokyo, oui., minora-t-elle ses espérances.

Ryo la regarda. Il sentait la tension qui l’entourait, la blessure et la colère qui suintaient par tous les pores de sa peau. Il repensa à toutes ces soirées qu’il avait passées depuis trois semaines à ressasser ses actes, la culpabilité qu’il éprouvait, le manque qu’il ressentait.

- Si je pouvais revenir en arrière…
- Tu ne le peux pas !, lâcha-t-elle durement.
- Kaori, je suis désolé., fit-il, tristement.

Elle le regarda durement, la fureur flambant dans ses yeux. Il ne l’avait jamais vue ainsi et c’était troublant pour lui. D’habitude, elle lui pardonnait tout mais, là, il avait vraiment été trop loin et s’en était rendu compte beaucoup trop tard. Sa colère était amplement justifiée. Elle soutint son regard coupable et ne lâcha pas l’affaire comme elle l’aurait fait avant.

- C’est trop facile, Ryo. Ne pense pas que je vais pouvoir excuser ni pardonner ce que tu m’as fait. J’avais confiance en toi. Tu étais celui sur qui je me reposais les yeux fermés, celui pour qui j’ai tout supporté. Tu étais ma famille, Ryo. Mon coeur battait pour toi, mon âme hurlait avec toi quand tu souffrais…

Elle s’arrêta et inspira profondément pour bloquer les sanglots qui montaient.

- Tu m’as sauvé la vie d’innombrables fois et je t’en serais gré éternellement. Mais, pour une fois, j’avais juste besoin que tu me retournes la confiance que j’avais placée en toi sur un plan qui n’était pas professionnel, j’avais besoin que tu crois la femme et non la partenaire et tu n’en as pas été capable. J’avais besoin que tu sois le roc sur lequel je m’appuierais pour remonter la pente après ce que j’avais vécu avec Mick et toi… toi, tu m’as bafouée dans mon honneur, dans la confiance que j’avais en toi, dans les sentiments que j’éprouvais pour toi… Alors oui, tu peux être désolé mais je m’en fous.
- Je… Je sais que j’ai été le pire des connards, Kaori., répondit-il faiblement.
- C’est peu dire…, ricana-t-elle cyniquement.
- Je ne sais pas quoi dire ou faire pour que tu me pardonnes., admit-il.

Elle le regarda un moment, oscillant entre l’envie de pleurer ou de le frapper, puis passa une main sur son visage, tentant d’en chasser la tension.

- Je ne sais pas si j’ai envie de te pardonner. Je ne sais pas si j’en serais capable., avoua-t-elle, soudain très fatiguée.
- C’est pour cela que tu pars ? Pour faire le point ?, l’interrogea-t-il, réfrénant ses espoirs.

Si elle lui répondait oui, c’était qu’il avait encore une chance. Il l’espérait parce que, même s’il n’avait pas encore fini son introspection, il travaillait à chasser ses vieux démons et tenter de pouvoir avancer avec elle… mais, pour cela, il fallait qu’elle veuille encore de lui.

- J’ai besoin de dormir, de retrouver une routine et l’envie de vivre. Peut-être qu’après cela, je serais capable de prendre du recul sur la situation et de réviser ton cas., lui expliqua-t-elle.
- Si j’arrive à le faire, je pourrais peut-être avancer à nouveau. Mais toi, tu as aussi du travail à faire parce que, si mon départ signifie retour à la case célibataire endurci, alors ça ne sert à rien que nous nous efforcions de voir comment nous en sortir., dit-elle, jetant un regard sur l’appartement en désordre.

Ryo sentit le malaise l’envahir : il n’avait pas prêté attention à l’état de l’appartement et personne n’y avait mis les pieds depuis qu’elle était partie. Il s’était laissé aller, remettant toujours au lendemain le ménage et les différentes corvées. Il espérait toujours rentrer et trouver l’appartement en ordre, remis en état par la femme qu’il aimait et qui serait revenue pour de bon pour recoller les morceaux. Il savait que c’était utopique mais la logique et lui faisaient deux depuis quelques temps. Il devait absolument retrouver le chemin de la raison rapidement ou il ne survivrait pas jusqu’à son retour.

- Combien de temps pars-tu ?, s’enquit-il.
- Cinq mois.
- Très bien. Alors si tu as réussi à avancer quand tu reviendras et quand tu seras prête, passe. Je veux te montrer que les choses entre nous peuvent être différentes., lui proposa-t-il.

Elle releva le menton de défi et lui lança un regard dédaigneux.

- Tu es bien présomptueux pour penser que cela suffira à me faire revenir. Il y a beaucoup de choses qui ont été brisées entre nous, Ryo.
- Je sais et je ne te forcerai pas la main. J’aimerais juste que tu me laisses une dernière chance., lui demanda-t-il.
- J’ai l’impression de t’avoir déjà donné énormément, Ryo…

Elle baissa les yeux et serra les bras autour d’elle.

- Tu m’as volé ma première fois et maintenant…

Elle ne put empêcher le sanglot d’éclater dans sa voix et il s’approcha d’elle, la regardant un instant, avant de l’attirer dans ses bras. Elle se débattit un instant puis se laissa aller.

- Quoi maintenant, Kaori ? Tu es en colère, tu m’en veux et tu te sens violée, c’est cela ?, tenta-t-il de comprendre.
- Oui., souffla-t-elle.
- Je ne sais pas quoi faire pour expier ma faute…, avoua-t-il.
- Commence peut-être par assumer auprès de nos amis., murmura-t-elle.

N’étant pas sûr d’avoir bien compris, il la relâcha et baissa le regard vers elle. Kaori s’écarta de lui et s’approcha de sa valise dont elle tira la poignée.

- Tu t’en vas déjà ?
- Oui. Je n’ai plus grand-chose à te dire., admit-elle.

Elle se dirigea vers la porte et sentit sa présence derrière elle. Il plaqua la main sur le panneau de bois, l’empêchant de l’ouvrir.

- Promets-moi de revenir. Promets-moi qu’on se reverra., lui demanda-t-il d’une voix sourde.
- Dis-moi que tout n’est pas définitivement brisé entre nous. Je t’en supplie, Kaori.

Emue par la détresse dans sa voix, Kaori se retourna et le fixa, les larmes aux yeux. Elle posa la main sur sa joue et la caressa du pouce.

- Il reste encore un lien entre nous, Ryo. Il est suffisamment cher à mes yeux pour que je ne jette pas les sept dernières années à la poubelle définitivement.

Il sentit le soulagement l’envahir. Ce n’était pas encore l’heure des adieux définitifs. Il avait encore une chance de la retrouver.

- Merci, Kaori., souffla-t-il, lâchant la porte.

Elle se tourna et l’ouvrit, la main tremblante. Elle s’arrêta après avoir passé le seuil et lui jeta un dernier regard.

- Je suis enceinte, Ryo., lui apprit-elle avant de refermer la porte sans attendre sa réponse.

Laissez moi vos commentaires : Ici
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Sam 20 Mar - 20:05
Chapitre 14

Cela faisait maintenant deux mois que Kaori était partie. Deux très longs mois pendant lesquels Ryo n’avait eu aucune nouvelle, tout comme le reste de la bande d’ailleurs. Il se demandait comment elle allait, si sa grossesse se passait bien, si elle ne souffrait pas de nausées ou de la fatigue. Par moments, il sentait la panique le gagner en se demandant si elle n’y avait pas mis un terme parce qu’avec le recul, elle ne voulait pas garder un enfant conçu dans ces conditions. Il avait décidément tout gâché… Mais aussitôt il se reprenait : Kaori lui aurait dit, d’une manière ou d’une autre, elle le lui aurait dit. Elle ne lui cacherait pas une chose aussi importante même si elle lui en voulait. Il la connaissait suffisamment pour le savoir. Alors il se laissait de nouveau aller à penser à elle.

Après la claque de leur dernière conversation où elle lui avait pointé sa négligence, il avait progressivement repris le dessus. Le jour même, il l’avait passé dans le canapé à réfléchir et assimiler les deux nouvelles qu’elle venait de lui apprendre : elle partait et elle était enceinte. Elle allait avoir son enfant, leur enfant. Ils s’aimaient et il n’avait jamais su trouver le moyen de laisser cette relation éclore mais ils avaient créé cette vie. Il savait que maintenant, s’il voulait vraiment la voir revenir, il n’avait plus d’autre choix que d’accepter de la laisser entrer pleinement dans sa vie. Il ne pouvait plus laisser ses peurs guider ses choix, d’autant plus avec un bébé dans la partie.

Il n’avait jamais rêvé d’être père. Ses rêves les plus fous consistaient à tenir la femme de sa vie entre ses bras, ce qui serait déjà énorme pour le nettoyeur qu’il était. Alors un bébé, et de la femme qu’il aimait comme un fou, et fou il l’avait été, c’était plus que le jackpot du loto. C’était complètement inespéré. Quand il avait enfin réalisé tout ce que ça impliquait, il n’avait pas souhaité fuir ou ne jamais la revoir : il avait juste pensé qu’il ne tiendrait pas cinq mois sans savoir.

Il s’était réveillé le matin suivant dans le canapé, frigorifié parce qu’il n’avait pas fermé la fenêtre qu’elle avait ouverte la veille. Il avait regardé son appartement dégoûté et était monté prendre une douche. Habillé, il était sorti faire les courses qui n’avaient pas consisté cette fois à n’acheter que de l’alcool mais des vraies denrées alimentaires, du café et des sacs poubelles à profusion. Il avait relégué les bières au fond du frigo puis, armé d’un sac, il avait ramassé tous les déchets qui traînaient dans le séjour, grimaçant en découvrant les auréoles sur le tapis et les coussins du canapé. Elle aurait encore été là, elle l’aurait étripé. Il fut tenté de les retourner pour ne plus les voir mais se résolut à trouver un moyen de les effacer, y arrivant à force de produit détergent et d’huile de coude. Ce n’était pas encore parfait mais c’était déjà mieux…

Au bout de quelques jours, l’appartement avait retrouvé son lustre et une odeur fraîche et propre. Ne lui manquait que l’odeur sucrée et le chantonnement de Kaori. Ryo se sentait comme apaisé par ce retour à la normale comme si nettoyer son refuge l’avait aidé à reprendre un peu le contrôle de sa vie. Il se rendit compte qu’en près d’une semaine, il n’avait pas dragué ni bu une goutte d’alcool et il ne s’en portait pas plus mal. Il montait parfois fumer une cigarette sur le toit et son regard s’égarait souvent sur l’horizon, pensant à elle.

Quand il eut terminé cette phase de réappropriation, il retrouva une certaine routine : passer au tableau le matin, puis rendre visite à Miki et Umi, histoire de bavarder un peu et de voir s’ils avaient des nouvelles, faire le tour des indics et de Shinjuku, puis retour à l’appartement. Il ressortait le soir mais ne s’abîmer plus la santé dans les bars et cabarets. Il y passait, buvait un verre, laissait les filles l’approcher mais sans leur sauter dessus, prenait les informations dont on lui faisait part et repartait, se couchant à des heures beaucoup plus raisonnables… sauf quand il cédait à la nostalgie et passait dans la chambre de Kaori où il pouvait rester très longtemps.

Donc cela faisait deux mois maintenant qu’elle était partie et il avait rendez-vous au Cat’s avec une jeune et jolie cliente à en juger le son de sa voix une heure plus tard. Il était donc arrivé en avance pour tuer le temps.

- Bonjour, tout le monde., fit-il en entrant dans le café.
- Bonjour Ryo., répondit Miki posément.

Le nettoyeur sentait que son amie mourrait d’envie de lui poser des questions et qu’elle se retenait depuis de longues semaines maintenant. Umi à son habitude essuyait de la vaisselle et restait désespérément neutre.

- Vas-y, je t’écoute., s’entendit-il dire.

Il en fut lui-même le premier surpris. Se sentait-il soudain capable d’assumer ce qu’il avait fait ? Etait-il prêt à endosser la responsabilité du départ de leur amie ? Il fallait le croire même s’il ne s’en était pas rendu compte.

- Kaori m’a dit que vous vous étiez disputés violemment, qu’elle n’avait plus confiance en toi…, commença Miki.
- Que s’est-il passé, Ryo ? Pourquoi ma meilleure amie est partie et ne donne pas de nouvelles ?

Voilà qui répondait à une de ses interrogations : Kaori n’avait pas non plus appelé Miki et ça l’attrista qu’elle se fut ainsi coupée de tous.

- Tu te souviens de l’affaire Nichols ?
- Comment pourrais-je oublier ? Depuis rien n’a plus été pareil…, soupira-t-elle.
- Ca avait déjà changé avant, Miki, mais cette affaire a servi de révélateur…

Ryo regarda sa tasse de café sombrement, réfléchissant non pas à se dédouaner mais à expliquer le plus clairement ce qui s’était passé.

- Kaori et moi nous aurions dû nous rapprocher après votre mariage mais je n’ai pas pu assumer ce que je lui avais dit. Mes peurs étaient encore trop vives. On a commencé à s’éloigner. J’ai recommencé mes frasques, je l’ai traitée toujours plus mal et je l’ai brisée petit à petit.
- Je n’arrive pas à te comprendre, Ryo., soupira Miki.
- Moi non plus si ça peut te rassurer., dit-il, tentant d’alléger l’atmosphère.
- Dans le même temps, elle s’est rapprochée de Mick et lui montrait des signes de regrets. Il a peut-être vu une ouverture et ses sentiments ont refait surface. Plus je la blessais, plus elle se rapprochait de lui, plus j’étais odieux et ainsi de suite. Je suis responsable de ce qui s’est passé.
- Tu ne peux pas savoir comment Mick aurait agi s’il avait été moins proche de Kaori., intervint Umibozu.
- Ca n’aurait peut-être rien changé : il voulait sauver Kazue.

Le nettoyeur regarda son ami et acquiesça. C’était en effet possible.

- Le jour où tout s’est arrêté, ils m’ont avoué qu’ils n’avaient pas été jusqu’au bout, que la simulation s’était arrêtée aux attouchements en surface., avoua Ryo.
- C’est une bonne nouvelle., déclara Miki, soulagée.
- Je ne les ai pas crus. Je n’ai pas fait confiance à ma partenaire., lâcha le nettoyeur, la culpabilité irradiant sa voix.

Umibozu posa la tasse qu’il tenait et le torchon. Il avait un très mauvais pressentiment.

- Qu’est-ce que tu as fait, Ryo ?, lui demanda-t-il d’une voix calme.
- J’ai… J’ai couché avec Kaori… par vengeance., admit-il.
- Oh mon dieu., souffla Miki.
- Tu l’as forcée à…
- Non., fit Ryo.

Il baissa le regard, honteux.

- J’ai fait pire : je lui ai laissé croire que c’était réel. Je lui ai fait avouer ses sentiments, m’assurer de sa confiance et j’ai couché avec elle. Il a fallu que j’en arrive là pour me rendre compte à quel point on s’était perdus, à quel point je m’étais perdu., finit-il.
- Ce que tu lui as fait, c’est… c’est… c’est ignoble !, fulmina Miki, très fâchée.

Il sentit un poing enserrer son tee-shirt et le soulever et affronta la colère d’Umibozu.

- Tu as osé lui faire du mal… Après tout ce qu’elle a fait pour toi, après tout ce qu’elle avait enduré, il a fallu que ton ego surdimensionné lui inflige ton besoin de domination, de mâle alpha. Je te conseille de ne plus l’approcher si c’est pour encore une fois la faire souffrir., gronda-t-il.
- Je veux la retrouver, Umi. J’ai enfin réalisé à quel point elle était importante pour moi. Je veux la retrouver et m’excuser, faire ce qu’il faut pour qu’elle accepte de revenir.
- Si tu la blesses encore, tu en répondras par les armes, Ryo., le prévint-il.

Le nettoyeur acquiesça. Il n’avait jamais vu son ami aussi fâché. C’était rassurant de savoir qu’un autre que lui tenait aussi à Kaori.

- Je ne veux plus lui faire de mal. Je veux qu’on forme une famille tous les trois.
- Elle est enceinte et tu veux les garder près de toi ?, lui demanda Umibozu.
- Oui, jusqu’au bout., souffla Ryo.

Le mercenaire le reposa au sol, lui permettant de mieux respirer.

- Enfin une sage parole. Alors tâche de te comporter comme tel dès à présent qu’on ait des choses à lui dire pour la faire réfléchir quand elle appellera., lui conseilla-t-il.
- Tu as…, lui demandèrent en même temps Miki et Ryo.
- Elle appellera., répondit-il simplement, reprenant son torchon et un verre.

Il se mit à l’essuyer : pour sa part, la conversation était terminée. Il aurait pu frapper Ryo pour son acte odieux mais le nettoyeur semblait avoir déjà pas mal cogité sur la chose et ressentir une culpabilité profonde. C’était déjà un grand pas que d’avoir osé leur avouer sa faute et affronter leur regard. Il n’avait après tout pas pour habitude de s’arrêter pour regarder en arrière et essayer de corriger ses erreurs. Alors, il ferait preuve d’un peu de mansuétude surtout si cela pouvait enfin apporter le bonheur à leur amie. Si toutefois, elle trouvait en elle la force de pardonner, ce dont il n’aurait pas juré, se souvenant de la profondeur de sa colère et de son désespoir.

La clochette tinta et une jolie jeune femme brune entra dans le café.

- Bonjour, je voudrais commander un cocktail XYZ, s’il vous plaît., demanda-t-elle, jetant un regard inquiet vers le colosse dressé derrière le comptoir.
- Bonjour, Ryo Saeba, c’est avec moi que vous avez rendez-vous., se présenta-t-il sérieusement.

Ils prirent place à une table et l’entrevue se passa correctement sous l’oeil vigilant des deux tenanciers. Le nettoyeur n’eut aucun geste ni mot déplacés mais ils tiquèrent quand il invita sa cliente à venir dormir chez lui. Lui tenant la porte, il la laissa sortir et se tourna vers ses amis, leur faisant un clin d’oeil et un petit sourire mystérieux.

Le lendemain, ils revinrent au café et le nettoyeur leur confia sa cliente une petite heure, le temps d’aller à la pêche aux informations sur le fiancé de la jeune femme qui avait brusquement disparu. Dès qu’il fut sorti, Miki se tourna vers la jeune femme, inquiète.

- Il ne vous a pas trop ennuyé la nuit dernière ?
- Non, pourquoi ?, demanda-t-elle sans comprendre.
- Euh pour rien… Pas de sensation étrange alors que vous vous douchiez ?
- N… Non., répondit-elle un peu plus déboussolée.
- Il n’a même pas essayé de vous tripoter ou de vous sauter dessus ?, s’enquit l’ex-mercenaire.
- Non. Monsieur Saeba s’est comporté en parfait gentleman. Il m’a proposé son lit et a pris le canapé, il fait la cuisine et refuse que je l’aide pour les tâches ménagères. Je ne serais pas déjà fiancée, je me laisserais bien tenter…, avoua-t-elle, rougissant.

C’était le monde à l’envers, pensa Miki, et cette cliente ne fut que la première d’une longue liste.

- Dis, Nounours, tu penses que Kaori s’est transformée en dépravée ? Parce que nos deux pervers sont devenus des hommes sortables après tout…, s’interrogea-t-elle soudain, son amie lui manquant.
- Kaori restera Kaori. Elle n’a jamais fait semblant., répondit-il, gêné.

Miki le regarda un moment puis comprit ce qu’il voulait lui dire. Elle acquiesça, posant un moment les yeux sur le téléphone, puis soupira.

Un mois plus tard, Ryo revenait de la gare lorsqu’il entra dans le café. Le pied posé sur le seuil, il dévisagea l’homme qui lui fit face tenant par la taille une jeune femme ravissante.

- Bonjour Ryo., fit Kazue, l’embrassant sur la joue.
- Bonjour, ma belle. Comment tu vas ?, demanda-t-il, fixant un instant son ventre qui s’était arrondi.
- Bien merci. Et toi ?
- Ca va., répondit-il.

Il sentait la tension dans le café et la comprenait : c’était la première fois que Mick et lui se retrouvaient après le dénouement de l’affaire Nichols.

- Mick., fit-il, reconnaissant enfin sa présence.
- Ryo. Viens Kazue, on s’en va., dit-il, détournant le regard.
- Mais on vient juste d’arriver., objecta-t-elle.
- On est des hommes civilisés, Mick, non ?
- Oui., répondit celui-ci, dérouté mais soulagé.

Tous trois prirent place autour du comptoir et Miki leur servit une tasse de café.

- Tu as des nouvelles ?, demanda l’américain, gardant le regard baissé sur sa tasse.
- Non., répondit le japonais.

Le silence s’installa, pesant, jusqu’à ce Miki le brisa.

- Alors cette grossesse, Kazue ?, s’enquit-elle.
- Tu sais, passé le premier trimestre, c’est un plaisir.
- Tu ressens quoi ?, continua Miki, jetant un rapide coup d’oeil vers Ryo.
- Pas grand-chose pour le moment. Ca fait comme des bulles. C’est étrange. J’ai hâte de le sentir bouger. Mick lui parle souvent mais moi, je n’y arrive pas.
- Kazue…, grogna l’américain.
- Quoi ? T’es trop mignon quand tu le fais., susurra-t-elle.

Ryo regarda la conversation prendre un ton léger. Il se demanda comment il aurait été si Kaori avait été là. Serait-il prévenant et gaga ou se tiendrait-il éloigné de cette petite chose ? Il ne savait pas. Il l’aimait déjà mais il n’avait aucune idée du père qu’il serait, s’il serait capable de se montrer tendre et compréhensif et non froid et autoritaire. Il avait été nul avec Kaori, serait-il capable d’encourager leur enfant à avoir confiance en lui ? Un rire résonna dans la pièce et il releva la tête : Miki et Kazue avaient un large sourire aux lèvres. C’était bon de sentir la légèreté revenir et il se tourna vers le siège à côté du sien, le trouvant vide. Il toucha l’assise doucement et laissa échapper un soupir imperceptible. Il devait encore attendre deux mois avant de la revoir.

Lorsqu’il rentra ce soir-là, le téléphone sonnait. Il eut beau se dépêcher, il ne put décrocher avant l’arrêt de la sonnerie. Machinalement, il appuya sur le bouton du répondeur et s’en alla vers la cuisine quand la voix qu’il entendit le fit s’immobiliser.

- Je te préviens, Ryo Saeba, si tu comptes m’ignorer, prépare-toi parce que j’appellerai toutes les demies heures jusqu’à ce que je t’ai de vive voix et même en pleine nuit !

Il sourit un instant amusé : il n’y avait que les sœurs Tachiki pour ne pas avoir peur de lui et Sayuri avait une petite chose dont Kaori manquait, la confiance en elle. Il regarda l’horloge et prit un magazine le temps de patienter. Même s’il savait qu’il allait passer un sale quart d’heure, il ne tenterait pas d’échapper à cet appel : ce serait la première fois en trois mois qu’il aurait de ses nouvelles.

- Bonsoir, Sayuri., l’accueillit-il immédiatement.
- Bonsoir Ryo ! Je te préviens que tu as intérêt à avoir d’excellentes raisons pour que je ne débarque pas à Tokyo te faire la peau !, le prévint-elle.
- Comment as-tu pu lui faire une chose pareille, Ryo ? C’est ignoble, immonde, répugnant. Elle… elle…
- Elle ne méritait pas cela., finit-il pour elle.

Il entendit Sayuri pousser un long soupir au bout du fil.

- Pourquoi Ryo ?
- Parce que je suis un con doublé d’un idiot. J’étais fou de jalousie et incapable de voir plus loin que le bout de mon nez. J’étais complètement irrationnel comme on peut le devenir quand on est blessé par la personne qu’on aime. J’ai brisé ta sœur au lieur de l’aimer comme j’aurais dû le faire., avoua-t-il.

Il entendit un sanglot en fond sonore et son coeur se serra.

- Comment elle va ?, demanda-t-il doucement.
- Pas très bien à mon idée mais Eriko me dit qu’elle remonte la pente, que ça a été pire.
- Je peux lui parler ?

Il entendit le mouvement d’air d’un combiné qu’on baissait et imagina très bien la conversation quasi muette entre les deux femmes.

- Elle… elle dort., mentit Sayuri, jetant un regard à sa sœur qui pleurait, adossée au mur à deux mètres d’elle.
- D’accord. Comment se passe sa grossesse ?
- Plutôt bien si on omet les nausées matinales et le manque de sommeil., l’informa-t-elle.
- Ca se voit ?
- Non, pas encore. Elle a de trop bons abdominaux., plaisanta la journaliste.
- C’est vrai qu’elle est très sportive. Dis-lui qu’elle me manque et rappelle-lui qu’elle m’a fait une promesse. Je veux la voir dans deux mois. Je veux être là pour la fin de sa grossesse et le restant de sa vie., lui demanda Ryo.
- Je lui dirai. Bonsoir Ryo., souffla Sayuri en raccrochant.

Elle se leva et enlaça sa cadette. Kaori laissa éclater son chagrin, chose qu’elle n’avait pas encore réussi à faire en présence d’Eriko. Elle n’avait jusque-là tenu que sur la colère et la rancoeur. Les défilés lui avaient occupé l’esprit, les soirées qui les suivaient lui avaient apporté leur lot de distraction et d’hommes l’entourant, le regard empli de convoitise. Elle aurait pu à plusieurs reprises faire comme certaines de ses collègues repartir au bras d’un monsieur très riche, s’envoyer en l’air pour la nuit puis passer à un autre mais elle n’arrivait pas à oublier ses deux yeux gris nuit qui la hantaient. Aucun homme ne pourrait le remplacer et, même si elle n’était pas prête à lui pardonner, elle n’était pas non plus prête à laisser entrer quelqu’un d’autre dans sa vie, encore moins dans son lit.

Il n’y avait donc que depuis qu’elle était arrivée à New York deux jours plus tôt qu’elle avait laissé la carapace se fendre. Devant sa sœur, elle n’avait pas pu jouer la femme forte et rancunière. Elle n’était plus que l’amoureuse malmenée et blessée qui voulait autant qu’elle en voulait à l’homme qu’elle aimait. Sayuri lui avait laissé le temps de venir vers elle et la première journée, la future maman l’avait passée à dormir, épuisée. La journaliste avait posé la journée suivante et elles étaient restées à deux. Elle avait écouté sa sœur calmement malgré l’envie de trucider un certain nettoyeur de sa connaissance, à vrai dire deux même, et ce n’est qu’à la fin de son récit quand Kaori s’était enfin calmée, qu’elle avait décroché le téléphone pour appeler Ryo et lui dire sa façon de penser.

Quand le son de la voix de Ryo résonna dans la pièce, Kaori sentit sa colère flamber mais également son coeur battre plus vite. C’était un résumé de l’ambivalence de ses sentiments. Elle l’aimait comme elle lui en voulait. Quand il avait admis ses erreurs, quand il avait expliqué son comportement, elle avait craqué et les premières larmes étaient tombées. Il était devenu fou parce qu’il l’aimait… Comment pouvait-on faire quelque chose d’aussi ignoble par amour ? D’abord Mick qui s’en prenait à elle pour sauver Kazue, puis Ryo qui l’avait marquée au fer rouge parce qu’il avait été fou de jalousie, parce qu’il l’aimait.

Pouvait-elle leur pardonner ? Elle fut étonnée car oui, elle pouvait le faire mais elle aurait besoin de temps. Le problème, c’était de réinstaurer une relation de confiance, une relation saine qui exclurait toute possibilité que l’expérience arriva de nouveau. C’était la partie la plus difficile, surtout avec Ryo, et elle ne savait pas si elle aurait la force de le faire. En tous cas, elle ne s’en sentait pas capable ce jour-là. Elle était encore trop fragile…

Sayuri berça sa sœur encore un long moment avant de la sentir se calmer. Voyant son visage livide, elle la força à s’allonger et à se reposer un moment.

- Tu dois te ménager, Kaori. Tu vas avoir un bébé. Il faut que tu penses à lui d’abord.
- Je sais. Je peux rester ici quelques jours ?
- Autant de temps que tu voudras. Si tu ne veux pas repartir au Japon, tu peux emménager ici et on s’occupera à deux de cet enfant., lui proposa-t-elle.
- Je… Non, il a besoin d’un père. Je veux que ce bébé puisse connaître son père même si on ne peut pas vivre ensemble.
- Très bien. Mais sache que ma porte sera toujours ouverte.
- Merci. Merci d’être là pour moi.
- J’aurais peut-être dû insister pour que tu viennes vivre avec moi quand je suis partie du Japon. Tu aurais peut-être été plus heureuse., regretta Sayuri.

Kaori posa une main sur celle de sa sœur. Elle imagina un moment ce qu’aurait pu être sa vie, plus simple, moins risquée, plus normale en somme…

- Non, c’était le mieux à faire. A part ces quelques mois où tout est parti en vrille, j’étais bien. Ryo s’est bien occupé de moi…, admit la rouquine.
- Il s’est bien occupé de toi ou tu t’es bien occupée de lui ?, rétorqua sa sœur malicieuse.
- C’est réciproque même si ce n’est pas évident…, soupira Kaori.

Elle le pensait réellement et cela ouvrit une brèche supplémentaire dans sa colère, brèche que les deux mois qui suivirent occupés par les défilés, quelques appels au Cat’s et la présence de sa sœur virent s’agrandir. Ce fut donc une jeune femme dont les plaies commençaient à cicatriser qui débarqua à l’aéroport de Tokyo Narita et posa un regard plus serein sur sa ville.

- On est rentré à la maison., murmura-t-elle, posant une main sur son ventre arrondi.
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Dim 21 Mar - 21:34
Chapitre 15

Ryo regarda par la fenêtre et observa les flocons danser dans le ciel. Tout semblait si paisible dehors. Il avait presque envie de rire à l’ironie mordante de la vie. C’était la deuxième période préférée de l’année pour elle après la floraison des cerisiers. Et cette année, rien ne serait pareil. Il tourna le visage et fixa son visage endormi un moment avant de tourner de nouveau son attention vers la rue où la neige créait un tapis blanc.

Elle était de retour au Japon, enfin, après cinq longs mois d’absence. Elle n’avait prévenu personne du jour de son arrivée parce que la date avait été retardée à plusieurs reprises, Eriko étant sollicitée par des personnes qui l’avaient découverte et c’était une chance inespérée pour elle, des opportunités qu’elle ne pouvait ignorer comme le lui avait souligné Kaori. Elles avaient finalement pu rentrer. Le vol s’était bien passé. Elles avaient atterri sans encombres malgré les conditions climatiques et avaient récupéré rapidement leurs bagages, se dirigeant vers la file de taxis pour regagner le centre-ville de Tokyo plus confortablement.

Il entendit Kaori s’agiter et alla s’asseoir à ses côtés, caressant doucement son visage.

- Chut, calme-toi, Sugar., murmura-t-il.

Elle cessa de bouger, gémit un peu et se tut. Ryo sentit son coeur se serrer. Il n’imaginait même pas l’épreuve par laquelle elle allait passer. Il souffrait déjà alors elle…

Il revint quelques heures en arrière au moment où le téléphone avait sonné et il avait entendu la voix d’Eriko. Il avait d’abord été heureux de l’entendre parce que cela signifiait que Kaori était rentrée mais quand il avait noté la panique et entendu les sanglots refoulés.

- Rejoins-moi à l’hôpital, Ryo. Vite, c’est Kaori…, lui avait-elle simplement dit.

Son sang n’avait fait qu’un tour. Il avait dévalé l’escalier et sauté dans la mini. La porte du garage était à peine assez ouverte pour le laisser passer et il entendit le son de l’antenne qui s’était accrochée au dernier panneau. La radio s’était allumée et il avait entendu les nouvelles : il y avait eu une alerte à la bombe à l’aéroport et un mouvement de foule s’était produit. En cette période de l’année particulièrement chargée, on déplorait des dizaines de blessés dont certains graves. Il ne lui en fallut pas plus pour faire le lien avec Kaori.

Il se gara dans la première place qu’il trouva sur le parking de l’hôpital et courut jusqu’aux urgences. Eriko l’attendait près de la porte en larmes. Elle se jeta dans ses bras dès qu’elle le vit et il la serra contre lui un instant.

- Que s’est-il passé ?
- On a été prises dans un mouvement de foule à l’aéroport. Kaori a été bousculée et est tombée dans les escaliers. Je n’ai rien pu faire, Ryo., pleura la styliste.
- Ce n’est pas de ta faute, Eriko. Où est-elle ?
- Là-bas mais ils ne veulent pas me laisser entrer., lui indiqua-t-elle.

Il s’était approché du box et une infirmière lui avait barré le passage, un regard sévère posé sur lui.

- Si vous êtes de la presse, il faut vous rendre dans l’amphithéâtre., lui apprit-elle sèchement.
- Non, je cherche ma femme. Elle est enceinte., mentit-il sans scrupule.
- Son nom ?
- Kaori Makimura., répondit-il.
- Venez avec moi.

Il la suivit dans un box un peu plus isolé et retrouva Kaori. Il marqua un temps d’arrêt à l’entrée, surpris par son état, puis disciplina ses traits. Elle avait besoin de sa force, de son courage. Arrivé près d’elle, il prit un tabouret et s’assit. Il attrapa sa main, sans trop serrer, se doutant qu’elle était blessée sous le bandage. Elle ouvrit les yeux à son contact, enfin autant qu’elle put car son œil droit était sérieusement amoché.

- Ryo…, murmura-t-elle.
- Je suis là. Comment tu te sens ?, lui demanda-t-il.
- J’ai mal partout., avoua-t-elle.
- Le bébé ?, l’interrogea-t-elle, proche de la panique.
- Chut, reste calme. Je viens d’arriver, je n’ai vu personne. Repose-toi.
- Tu restes ?, lui demanda-t-elle, les larmes au bord des yeux.
- Oui. Allez, reste calme.

Elle acquiesça en se mordant la lèvre et ils attendirent en silence, main dans la main, une larme frayant son chemin par moments. Finalement, au bout de deux heures, un médecin arriva suivi par une infirmière qui lui récapitulait le dossier de la patiente.

- Mademoiselle Makimura, je suis le Docteur Miguri. Alors, nous avons une chute dans l’escalier. Une petite maladresse, Mademoiselle ?, plaisanta-t-il.
- Docteur !, s’offusqua l’infirmière.
- Elle a été victime du mouvement de foule de l’aéroport., répondit Ryo, d’une voix dure.
- Comment va-t-elle ? Et le bébé ?, enchaîna-t-il.
- Nous avons de multiples fractures et hématomes. Pour le bébé en revanche, nous ne pouvons pas grand-chose.

Ryo sentit la main de Kaori serrer la sienne à la broyer. Il régna sur la colère qui le prenait.

- Soyez plus clair, Docteur. Que voulez-vous dire : que le bébé va mourir ou qu’il faut attendre pour en savoir plus ?
- Après une telle chute, l’enfant n’a que peu de chance de survivre. A mon avis, il ne passera pas la nuit., les informa-t-il, d’une voix égale.

Kaori posa une main sur sa bouche, réprimant un cri de douleur. Il vit les larmes rouler sur ses joues, son regard empli de désespoir, son souffle saccadé et ne put se contenir d’avantage.

- Sortez d’ici et ne revenez pas. Faites venir un vrai médecin ici. Un médecin qui prend soin de ses patients !

Le médecin tourna les talons, vexé, et sortit de la pièce. Seule l’infirmière resta et les regarda contrite. Elle s’approcha de Kaori et posa un regard prévenant sur elle.

- Je suis désolée. C’est un remplaçant. Je vais vous installer sous monitoring, Mademoiselle. Je vais vous donner un relaxant pour que vous vous détendiez un peu. On ne peut pas laisser le stress aggraver la situation. D’accord ?
- Merci., fit Ryo alors que Kaori acquiesçait.

Une demi-heure plus tard, elle s’était endormie et le monitoring laissait entendre en bruit de fond les battements de coeur du bébé. L’infirmière repassa peu après pour faire une prise de sang.

- C’est vrai ce qu’il a dit : notre bébé ne passera pas la nuit ?, lui demanda-t-il, inquiet.

Elle le regarda, désolée, et Ryo sentit son coeur se serrer.

- Elle est tombée sur toute la hauteur des escaliers de l’aéroport. Regardez-la. Elle a pris coup sur coup. Après une telle chute, il est rare que le bébé survive ou qu’il n’y ait pas de séquelles au niveau de l’utérus ou de la poche des eaux.
- Un obstétricien va venir la voir ?
- Dès que possible. Un mauvais concours de circonstances fait qu’il y a aussi eu deux carambolages juste avant et un afflux de naissances aujourd’hui. Tous sont pris., s’excusa-t-elle.
- Est-ce que je pourrais faire venir un ami médecin pour qu’il l’examine ?, demanda Ryo.

Elle hésita puis regarda la jeune femme endormie.

- Oui. Ce sera peut-être plus prudent., admit-elle.

Ryo hésita mais finit par laisser Kaori seule quelques minutes. Il rejoignit le hall d’entrée d’où il appela leur vieil ami qui lui promit d’arriver aussi vite que possible. Se retournant pour repartir auprès d’elle, il vit Eriko prostrée dans un coin et s’approcha d’elle. Elle leva un regard perdu sur lui, regard noyé de larmes.

- Tu devrais rentrer chez toi, Eriko.
- Comment va Kaori ? Le bébé ?

Il lança un regard vers son box, la rejoignant en pensée, puis se concentra de nouveau sur leur amie.

- Elle est blessée avec des fractures et de belles ecchymoses. Pour le bébé, le pronostic est très réservé., lui apprit-il, sa voix se cassant.

Il se détourna d’elle pour qu’elle ne vit pas la détresse qu’il ressentait mais elle le força à lui faire face.

- Tu voulais les garder près de toi, n’est-ce pas ?, lui demanda-t-elle.
- Oui., souffla-t-il.
- Je veux trouver le moyen de regagner son coeur., ajouta-t-il.

Elle l’attira à elle et le prit dans ses bras, souhaitant le réconforter comme il l’avait fait.

- Ca ira, Ryo. Je ne peux pas croire qu’elle puisse perdre son enfant. Après tout ce qu’elle a vécu, ce serait terriblement injuste., tenta-t-elle de le rassurer.

Il l’espéra. Il ne voulait pas affronter cette épreuve et encore moins qu’elle dut y faire face. Elle avait besoin de sérénité dorénavant.

- Rentre, Eriko.
- Non, je veux rester., affirma-t-elle.
- Comme tu veux. J’ai demandé à un de nos amis médecin de venir. Ici, ils sont débordés.
- D’accord.
- J’y retourne.
- Embrasse-la pour moi.

Il acquiesça et repartit. Quand il arriva, il vit une infirmière brancher une perfusion à son bras.

- C’est pour quoi ?, s’inquiéta-t-il.
- Pour déclencher les contractions et permettre un accouchement plus rapide., lui répondit-elle.
- Pourquoi ? Il y a un problème avec ma femme ou le bébé ?, fit Ryo, blême.
- Monsieur, le bébé est mort mais il va falloir le faire sortir malgré tout normalement., lui dit-elle d’une voix qu’elle voulait conciliante.
- Vous croyez qu’il est mort ? Et ça alors ?, s’exclama-t-il, tournant le volume plus haut, laissant entendre les battements de coeur du bébé.

L’infirmière blêmit et arrêta la perfusion.

- Je… Je ne comprends pas. Le médecin…
- Miguri, c’est cela ? C’est un imbécile, un assassin ! Qu’il n’approche plus de ma famille !, ordonna Ryo, furieux.
- Bien… Je… je suis désolée…, s’excusa-t-elle avant de tourner les talons et partir en courant.

Tentant de reprendre le contrôle sur ses nerfs, Ryo se tourna vers la fenêtre et regarda le ciel nuageux qui s’obscurcissait. Il se calqua sur les battements de coeur réguliers du bébé pour évacuer son angoisse. Une fois calmé, il reprit place près du lit et descendit le drap qui la recouvrait, dévoilant son corps paré de couleurs rouge à violette. Son ventre n’était épargné qu’à peu d’endroits et il comprit mieux l’ampleur des dégâts. Il posa doucement une main sur l’arrondi et le caressa doucement. Un mouvement sous sa paume le surprit et il ressentit une violente émotion à sentir son enfant se mouvoir pour la première fois.

- Sois fort. Bats-toi et reste avec nous. Nous avons besoin de toi. Je… je t’aime et j’ai envie de te connaître. Alors reste là., murmura-t-il d’une voix étranglée.

Il sentit un nouveau mouvement sous sa main et espéra que c’était un signe. Deux coups frappés à la porte attirèrent son attention et il alla ouvrir après l’avoir recouverte. Ryo fut soulagée de voir le Professeur à la porte et le fit entrer. Le vieil homme posa un regard de professionnel sur la jeune femme puis se tourna vers son protégé.

- Que lui est-il arrivé ?
- Elle a été prise dans un mouvement de foule à l’aéroport. Elle a dévalé tout un escalier., répondit Ryo.
- Elle en est à six mois de grossesse. La chute peut avoir de sérieuses répercussions sur elle et sur le bébé. On va commencer par le début. On va d’abord examiner Kaori pour éviter d’aggraver une blessure en la bougeant. Le monitoring est bon pour le moment. C’est déjà une bonne chose., dit le médecin.

Il baissa la couverture jusqu’au pied de la jeune femme et l’ausculta de manière très scrupuleuse. Il observa les radios qui avaient déjà été prises, palpa toutes les zones doucement, écouta son coeur, sa respiration.

- Kaori a le poignet droit cassé, une entorse au gauche. Elle a une commotion cérébrale. Les deux jambes sont esquintées mais sans fracture ni entorse et a priori elle n’a pas de côte fêlée, ce qui est déjà un bon point. Ce qui m’inquiète, ce sont les ecchymoses à l’abdomen.
- Explique-moi., lui demanda Ryo qui tentait d’assimiler tout ce qu’il lui disait.
- Les ecchymoses sont les traces de coups qu’elle a reçus. Elle en a une dizaine. Le bébé est dans une poche de liquide, ce qui en général fait tampon mais, selon la violence, il peut être blessé. S’il ne l’est pas, il faut qu’on s’assure que la poche des eaux est intacte pour éviter tout risque de contamination. Il faut aussi examiner l’utérus pour voir s’il n’y a pas de déchirure ou autres lésions. Il faut qu’on élimine tout risque et, s’il le faut, qu’on accouche Kaori prématurément si sa vie ou celle du bébé sont en danger.
- Mais elle n’est qu’à six mois…, murmura Ryo, inquiet.
- Je sais mais c’est une possibilité. Je vais voir si je peux avoir un échographe à prêter. Recouvre-la un peu en attendant.

Le nettoyeur remonta la couverture sur ses jambes puis caressa la joue de la jeune femme. Doucement, il vit ses yeux s’ouvrir. Elle semblait égarée et il ne la brusqua pas, lui laissant le temps de revenir à la réalité. Le Professeur revint à ce moment-là, traînant une machine à sa suite.

- Professeur…, murmura la nettoyeuse.
- Oui, Kaori. Ryo m’a demandé de venir m’occuper de vous deux. Tu veux bien ?
- Oui., souffla-t-elle.
- Bien. Rendors-toi si tu es fatiguée. Je ne bougerai pas de là., la rassura-t-il.

Encore sous l’effet du médicament, rassurée par la main de Ryo dans la sienne, elle ferma les yeux et s’endormit à nouveau.

- C’est mieux ainsi., déclara le vieil homme.
- Quoiqu’on apprenne, on aura le temps de se préparer pour le lui dire.

Le nettoyeur ne dit rien mais son humeur s’assombrit. Le praticien passa une demi-heure à observer le bébé ainsi que les organes de sa patiente. L’enfant bougeait et cela émut son père au plus profond de lui-même. Il ne pouvait pas croire en voyant ces images que cette petite vie pourrait s’arrêter dans les heures à venir, qu’ils perdraient leur enfant, leur dernier lien. Qu’adviendrait-il si le bébé mourrait ? Kaori lui accorderait-elle la possibilité de la convaincre de rester pour mener une vie à deux ? Se remettrait-elle de cet affreux coup du sort ? Il secoua la tête pour se sortir ces idées de la tête.

- Le bébé ne semble pas avoir été touché et c’est en soi un petit miracle vu l’étendue des contusions abdominales., annonça finalement le médecin.
- C’est vrai ?, demanda Ryo soulagé.
- Oui. La poche des eaux est intacte et l’utérus n’est pas abîmé non plus. Ce qui m’inquiète, c’est le décollement placentaire. Pour le moment, les flux mère-enfant sont suffisants mais il faut les surveiller régulièrement. Il faudrait aussi lui donner un traitement pour éviter un risque de travail prématuré mais je vois dans le dossier que ça n’a pas été fait.
- Pour le médecin, le bébé est déjà mort. Il voulait provoquer le travail., annonça Ryo d’une voix sombre.
- L’idiot… Il lui faut une injection de corticoïdes pour faire maturer les poumons du bébé plus vite, juste au cas où on devrait l’accoucher, et une pour les risques liés au rhésus.
- On pourrait l’emmener à la clinique d’après toi ? Je serais plus serein à la savoir entre des mains compétentes.

Le médecin observa sa patiente, pesant le pour et le contre, puis se tourna vers Ryo.

- Laissons passer la nuit. Si aucun fait notable ne s’est passé, nous évaluerons les possibilités., lui proposa-t-il.

Ce n’était pas la réponse que Ryo voulait entendre mais il n’était pas médecin. Si le Professeur voulait attendre, ils le feraient.

- Je vais essayer d’avoir ce qu’il faut pour elle et me rendre utile si nécessaire.
- Doc, ça veut dire que le bébé va survivre ?, l’interrogea Ryo.
- Je ne veux pas te décevoir, Babyface. Votre enfant a des chances de s’en sortir d’après ce que j’ai vu. Mais pratiquer un examen intra-utero laisse toujours une place au doute. Je ne pourrais me montrer optimiste que d’ici soixante-douze heure environ. En général, après ce délai, plus aucun trouble lié à l’accident n’apparaît. En attendant, il faudra faire preuve de patience., lui conseilla-t-il.
- Merci de ta franchise.

Le médecin hocha la tête et ressortit de la pièce pour revenir dix minutes plus tard avec les médicaments dont il avait besoin. Il fit les injections et installa les perfusions puis les laissa de nouveau seuls. Ryo se posta face à la fenêtre et regarda la neige tomber un long moment, adressant une longue prière à qui voudrait l’entendre. Il demanda à Maki de se battre pour que son neveu ou sa nièce ne le rejoignit pas trop vite. Il n’était pas prêt à le laisser partir, ne le serait jamais d’ailleurs…

Au bout de plusieurs heures, il entendit Kaori s’agiter et alla s’asseoir à ses côtés, caressant doucement son visage.

- Chut, calme-toi, Sugar., murmura-t-il.

Elle cessa de bouger, gémit un peu et se tut. Tenant toujours sa main, il s’abîma dans la contemplation des flocons de neige, tentant de ne pas s’appesantir sur la situation. Doucement, il prit sa main et la posa sur son ventre. Le bébé apprécierait certainement ce contact. Elle écarta instinctivement les doigts et il posa les siens au dessus. Il attendit un moment de sentir le mouvement mais finalement ce ne fut pas celui qu’il espérait. Kaori se réveilla, visiblement mal à l’aise.

- Doucement, Kaori.
- J’ai mal, Ryo., gémit-elle.
- Où ?
- Mon ventre.

Il se sentit pâlir. Au même moment, une alarme se mit à sonner sur le monitoring. Le coeur du bébé ralentissait. Paniqué, il alla à la porte et l’ouvrit à la volée. Alerté, le Professeur arrivait déjà en courant suivi d’une infirmière. Il repoussa les draps et vit le matelas mouillé par le liquide amniotique rougi par le sang.

- Docteur, elle est en travail. Le bébé…
- Je sais., la coupa-t-il, voyant le tracé du monitoring.

Le coeur du bébé ne battait déjà plus. Il n’avait que peu de temps pour agir.

- On l’emmène pour une césarienne. Vous avez une personne de disponible ?, demanda le médecin.
- Je vais voir., répondit l’infirmière qui partit en courant.
- Professeur…, gémit Kaori, pleurant.
- On va faire tout ce qu’on peut. Sois courageuse., lui demanda-t-il.

Une minute après, le brancard disparaissait suivi par le vieil homme et Ryo. Une demi-heure après, tout était fini. Kaori encore endormie, Ryo se tenait assis, non loin d’elle avec leur enfant dans les bras, les larmes roulant sur ses joues. Il avait pensé devoir attendre soixante-douze très longues heures pour savoir que leur bébé allait bien. Finalement, cela n’avait pas été nécessaire mais pour quelle conclusion… Leur petite fille était morte née. La réanimation n’avait pas réussi à la ramener à la vie. Il venait de perdre une partie de lui-même et il n’avait que peu de temps pour accepter ce fait et trouver la force en lui de rester debout pour elle. Il caressa l’ovale de ce si petit visage et porta les lèvres sur son front.

- Je t’aime du plus profond de mon coeur. Tu feras toujours partie de moi., murmura-t-il.

Il entendit Kaori se réveiller et alla s’asseoir près d’elle. Il vit une ombre derrière la porte et savait que le Professeur était non loin, veillant sur eux. Il vit ses yeux noisette s’ouvrir, le brouillard se dissiper et la réalisation se faire. Elle baissa les yeux et croisa le petit trésor blotti contre son torse. Les larmes tombèrent d’elles-mêmes.

- Tu me la donnes ?, murmura-t-elle.

Il la posa dans ses bras et s’installa à ses côtés, passant un bras autour de ses épaules. Il avait besoin d’elle autant qu’elle de lui. Il la regarda accomplir les mêmes gestes que lui, caresser son visage, écarter le drap et compter les doigts de ses mains et de ses pieds, la toucher, lui murmurer des mots d’amour. Elle se baissa sur leur fille et l’embrassa longuement.

- Je t’aime à tout jamais. Adieu mon ange.
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Lun 22 Mar - 20:25
Chapitre 16

Après une heure passée avec leur enfant, le Professeur vint retrouver Ryo et Kaori. Il réussit à les convaincre de lui confier leur fille pour qu’il put l’examiner. Il voulait pouvoir répondre à leurs questions de manière claire et précise le moment venu, se doutant que comprendre ce qui était arrivé à Eirin, prénom qu’ils lui avaient donné, leur permettrait de soulager un peu leur angoisse et leur culpabilité.

Ils restèrent un moment silencieux, toujours enlacés, jusqu’à ce que Kaori s’endormit. Se souvenant qu’Eriko n’avait pas voulu rentrer, Ryo décida d’aller la voir. Il voulait également prévenir Sayuri et toute la bande et gérer la veillée funèbre. Ils descendit donc dans la salle d’attente des urgences après avoir prévenu une infirmière. Il trouva d’abord les téléphones et composa le numéro de la journaliste. Il attendit qu’elle décrocha, passant une main sur son visage pour chasser la fatigue. Jetant un œil vers l’extérieur, il vit que la neige avait cessé de tomber et qu’un beau soleil d’hiver nimbait les arbres nus d’une froide lumière.

- Allô ?
- Sayuri, c’est Ryo.
- Que se passe-t-il ?, demanda Sayuri, la voix tendue, après quelques secondes de silence.
- Kaori a eu un accident à l’aéroport. Elle… le bébé est mort., lui apprit-il.

Il entendit le sanglot étouffé qu’elle laissa échapper.

- Je… Je prends le premier avion. Je serai là demain.
- D’accord.
- Comment va Kaori ?
- Elle est dévastée. C’est… C’est dur., souffla-t-il.
- Courage. Je te laisse. Je dois me dépêcher.
- A demain, Sayuri.

Il raccrocha et se tourna vers le hall, trouvant rapidement Eriko, endormie dans un coin. Il approcha d’elle, prenant place à ses côtés, et l’appela doucement. Elle se réveilla au bout de quelques secondes, légèrement désorientée. Elle observa ses traits, angoissée.

- Alors ?, l’interrogea-t-elle.
- Le bébé n’a pas survécu., dit-il simplement.
- C’est pas vrai…, souffla-t-elle.
- Mais que s’est-il passé ?
- Je ne sais pas. Son coeur battait, elle dormait. Elle s’est réveillée, se plaignant d’avoir mal au ventre. Quelques secondes après, les battements de coeur ont ralenti jusqu’à s’arrêter. Elle a perdu les eaux. Ils lui ont fait une césarienne en urgences mais ça n’a pas été suffisant pour sauver notre fille., lui résuma-t-il, sentant la peine revenir.
- Une fille…
- Eirin, c’est le prénom qu’on lui a donné. Elle était parfaite, Eriko. Elle était si belle., soupira-t-il, sentant les larmes revenir.

Il ne put rien faire pour les empêcher de tomber et la styliste passa un bras autour de ses épaules pour le soutenir. Elle ne l’avait jamais vu ainsi et, si elle avait douté qu’il n’aimait pas cet enfant, elle en aurait été pour ses frais.

- Je peux prévenir les autres si tu veux., lui proposa-t-elle, malgré les larmes qui s’amoncelaient dans ses yeux.
- Préviens Miki. Pour ce qui est de Mick et Kazue, je ne sais pas si elle voudra les voir. Dis-leur à tous de ne pas venir ici. Je ne pense pas qu’on restera encore longtemps.
- Très bien.
- Rentre chez toi, Eriko. Tu as besoin de te reposer aussi. Je retourne auprès de Kaori.

Elle acquiesça et il la quitta, retournant auprès de sa partenaire. Quand il entra, le Professeur était assis dans un coin, veillant le sommeil de la jeune femme.

- Où est le bébé ?, demanda Ryo.
- A la morgue. Je me suis arrangé avec un de mes amis pour la veillée funèbre. Il la transportera dans une heure et vous pourrez la rejoindre cette après-midi.
- Kaori doit rester hospitalisée ?
- Après sa césarienne, oui pendant quelques jours. J’ai demandé une autorisation de sortie sous décharge. Vous aurez l’après-midi avec la petite et, ce soir, elle dormira à la clinique.
- Merci.
- Comment tu vas, Ryo ?, s’inquiéta le vieil homme.

Le nettoyeur se massa le cou pour en chasser la tension.

- Je ne sais pas. J’ai mal d’avoir perdu cette enfant que je n’ai presque pas connue. Je suis heureux de savoir Kaori de retour. J’espère qu’on trouvera le moyen d’avancer mais je ne sais pas si elle m’en laissera l’opportunité maintenant qu’il n’y a plus rien pour nous lier. Je l’ai brisée, doc, je lui ai fait du mal comme jamais et, sans le bébé, je pense qu’elle serait déjà loin.
- Si je peux te donner un conseil, Ryo : si tu veux la garder, en faire ta femme, fais tout ce qui est en ton pouvoir, sinon, laisse-la partir, vous vous faites du mal. C’est déjà allé beaucoup trop loin une fois, il ne faut pas que ça recommence.
- Je la veux à mes côtés comme elle aurait dû l’être depuis longtemps. Je me battrai pour cela sauf si elle est vraiment décidée à partir., admit-il.
- Bien. Alors bonne chance. Si tu veux, rentre chez toi une heure ou deux le temps de te doucher et changer. Ca te ferait du bien de prendre l’air.
- Je ne veux pas la laisser seule.
- Je reste ici jusqu’à ce qu’elle sorte. Je vous laisserai avec votre enfant le temps d’aller faire un tour à la clinique.

Ryo tergiversa un moment puis céda et rentra chez lui, se douchant rapidement, changeant de vêtement. Il se fit un café mais fut incapable d’avaler quoi que ce soit d’autre. Il s’arrêta devant la pièce qui faisait face à sa chambre, pièce voisine à la chambre de Kaori dans laquelle avaient longtemps été entassés des cartons de toute sorte. Il regarda, le coeur serré, le lit de bébé qu’il avait monté, la table à langer et l’armoire. Ca avait été l’un de ses derniers projets, quelque chose qui devait montrer à la jeune femme qu’il voulait faire partie intégrante de leur vie. Il n’en avait parlé à personne, ne voulant pas risquer de voir l’information fuiter. Il attrapa le doudou qu’il avait acheté impulsivement et l’emporta avec lui, refermant doucement la porte. Il avait le temps d’aviser de ce qu’il ferait de tout cela plus tard. Il passa par la chambre de Kaori et prit quelques vêtements de rechange et ce qu’il trouva en affaires de toilette. Il s’arrêta dans une supérette sur le chemin qui le menait à l’hôpital pour compléter.

Lorsqu’il arriva dans sa chambre, elle s’était réveillée. Le Professeur l’auscultait, vérifiait la cicatrice de la césarienne et donna son feu vert pour la sortie. Elle lui lança un regard perdu et il s’approcha d’elle, prenant place à ses côtés.

- Où est Eirin ?, demanda-t-elle.
- Un de mes amis l’a emmenée pour la veillée. Vous allez la rejoindre bientôt., lui apprit le médecin.
- Je l’ai auscultée ainsi que le placenta et le cordon. Je peux vous expliquer ce qui est arrivé si vous en avez besoin.

Les deux parents se regardèrent et acquiescèrent.

- Le cordon a été fragilisé pendant la chute. Il y avait certainement une anomalie et un anévrisme s’est formé qui a éclaté. Le bébé n’était plus alimenté. Il n’avait rien et, si on l’avait repéré plus tôt, on aurait pu le mettre au monde. Mais c’est le problème des anévrismes : c’est très soudain et on a rarement le temps d’intervenir., leur expliqua-t-il, désolé.
- Merci Professeur., murmura Kaori, la voix étranglée.
- De rien, Kaori. Tu pourras te préparer à sortir.
- Je t’ai ramené des vêtements propres et de quoi te laver, si tu veux., proposa Ryo.

Il entendit son ami se racler la gorge et se tourna vers lui. Le Professeur regarda avec insistance les mains de la jeune femme et Ryo comprit alors le dilemme. Elle ne pouvait pas se débrouiller seule. Kaori détourna les yeux par pudeur, les joues légèrement rouges.

- Je vais faire les papiers., annonça le vieil homme, s’en allant.
- Si tu veux, je peux… enfin, je veux dire, je peux t’aider., bafouilla le nettoyeur.
- Je crois que je n’ai pas trop le choix., murmura-t-elle.

Nerveux, il alla au lavabo mouiller le gant et le savonner et revint vers elle. Il le passa délicatement sur son visage et dans son cou. Les doigts fébriles, il défit les cordons qui tenaient sa blouse et descendit le tissu, s’arrêtant à la limite de sa poitrine.

- Tu les as déjà vus… marmonna-t-elle, gênée.

La pudeur soudaine du nettoyeur la mettait très mal à l’aise. Il avait l’habitude de déshabiller les femmes et l’avait déjà vue nue alors il n’y avait pas de quoi faire tant d’histoires…

- Je sais mais ce n’est pas pareil…
- Pourquoi ? Parce que j’ai des ecchymoses et que c’est moins excitant ? Parce que ma poitrine est trop pleine ou que j’ai donné naissance à notre fille ?, demanda-t-elle agressivement.
- Parce que je t’aime et que la dernière fois, je t’ai blessée., répondit-il, la culpabilité perçant dans sa voix.

Elle se sentit touchée par son aveu et, le cumul du stress aidant, elle se mit à pleurer. Cette dernière fois, ils avaient aussi conçu un bébé qu’ils venaient de perdre… C’était dur et elle ne savait plus où elle en était. Il remonta la blouse sur elle et la prit dans ses bras, la berçant doucement.

- Je me sens vide, Ryo, vide et inutile. J’ai l’impression d’être morte avec elle. Elle était ce qui me permettait de tenir. Comment je vais faire sans elle ?, pleura-t-elle.
- Un jour à la fois, Kaori. Prends le temps. Tu es épuisée et sous le choc. Je serai là pour toi si tu le veux. Je voudrais vraiment qu’on puisse faire le deuil d’Eirin à deux, que tu puisses te reposer sur moi tant que tu en auras besoin.
- Combien de temps, Ryo ? Combien de temps seras-tu capable de rester avec moi avant que tu ne repartes à nouveau, que tu me blesses à nouveau ? Je ne le supporterai plus.
- Je ne veux plus m’enfuir, je ne veux plus te blesser. Je suis prêt à rester pour le restant de mes jours.

Elle s’écarta légèrement de lui pour le regarder droit dans les yeux et lut sa sincérité. Malgré tout, elle ne put y croire : c’était bien connu, chat échaudé craint l’eau froide.

- Je n’arrive pas à te croire. Je ne sais même pas si j’ai envie d’y croire. Je ne sais pas si j’ai encore envie de faire l’effort. Pour moi, Eirin était la dernière chose qui nous liait et j’étais prête à beaucoup de choses pour elle mais…

Elle se mordit la lèvre pour réprimer les sanglots qui menaçaient de revenir.

- Mais elle n’est plus là. Nous n’avons plus d’obligation l’un envers l’autre, je le sais. Mais, je ne veux pas te perdre., admit Ryo.
- Tu m’as déjà perdue., murmura-t-elle.

Ryo prit son menton entre ses doigts et l’obligea à lui faire face. Son regard était empreint de douceur et de tendresse pour elle.

- Sans aucune prétention de ma part, je n’en suis pas si sûr mais je te laisserai du temps. Tu vas devoir passer quelques jours à la clinique mais après, je voudrais que tu reviennes à la maison.
- A la maison ? Quelle maison Ryo ? C’est ton appartement, pas le mien., répondit-elle amère.
- J’en ai été l’occupante provisoire, la femme de ménage, ce que tu voudras, mais ce n’est pas chez moi. C’est chez toi., renchérit-elle.
- C’est là où tu as tort. Je n’ai eu un chez moi qu’à partir du jour où tu y as emménagé. Tu en as fait une maison. Avant, j’avais juste quatre murs et un toit. C’était froid, sale, un endroit juste bon pour dormir et prendre une douche. Ce n’était pas un endroit où je me plaisais à rentrer.
- Mais je suis arrivée et j’ai tenu l’endroit en ordre, propre. Tu avais quelqu’un pour te faire à manger même si ce n’était pas bon, faire tes lessives et repasser ton linge. Dommage que je n’étais pas assez bonne à ton goût, sinon tu aurais aussi pu soulager tes pulsions sexuelles…, railla-t-elle, ses yeux lançant des éclairs.

Ryo était nerveux et il se leva. La tentation était grande d’aller dans son sens et fuir tout cela. C’était une conversation plus qu’éprouvante pour lui mais elle méritait qu’il dépassa ses limites. S’il abandonnait maintenant, il la perdrait définitivement et cela, il ne le pouvait pas.

- Tu n’y es pas, Kaori. Ta présence seule a suffi à faire de cet endroit une maison. Tu as apporté de la chaleur et des rires dans ma vie. C’est comme si tu avais fait entrer la lumière dans l’appartement. On pourrait même déménager dans un igloo, dans une yourte au fin fond de la Mongolie. Tant que tu serais là, je me sentirais à la maison.

Kaori leva les yeux et croisa son regard : le voile se déchirait sur des années de solitude. Ca lui faisait simultanément du mal et du bien qu’il lui avoua cela.

- Pourquoi tu fuyais alors ? Pourquoi tu te comportais comme si tu t’en fichais ?
- Parce que… parce que je ne pouvais pas te laisser approcher., avoua-t-il.

Elle le regarda les yeux écarquillés, incapable de dissimuler ses émotions. Incompréhension, soulagement, colère et désillusion bataillaient ferme.

- Je ne comprends pas, Ryo. Tu veux dire que tout ce temps, tu m’as menti ?
- Oui.
- Et aujourd’hui, tu me dis que tu veux de moi ?
- Oui.
- Pourquoi je devrais te croire ?, lui demanda-t-elle.

Il détourna le regard, touché plus qu’il n’aurait voulu l’admettre. Il fallait croire qu’inconsciemment, il avait espéré que lui dire de belles phrases suffirait…

- Pourquoi je devrais prendre pour argent comptant ce que tu me dis aujourd’hui alors que tu n’as cessé de me mentir ? Y a-t-il au moins un jour où tu as été honnête avec moi ?

Oui, pensa-t-il, même si elle ne se souvenait pas de certains.

- Il y en a eu comme le jour où tu as été enlevée par Kreutz. Je n’ai pas menti sur mes sentiments pour toi. Seulement je n’ai pas su aller au-delà., avoua-t-il.
- Je… Je ne sais pas, Ryo. Tu ne peux pas juste me demander de rentrer et espérer que tout va s’arranger parce que tu m’avoues avoir menti pendant des années. C’est… c’est trop facile., soupira-t-elle.
- Je sais. Promets-moi juste d’y réfléchir. Si tu ne le fais pas pour nous, fais-le juste pour toi. Ca te donnera le temps de reprendre le dessus, de décider ce que tu veux faire de ta vie. Je ne t’obligerai pas à rester. Je respecterai tes choix.

Elle sonda son regard un moment puis acquiesça. Elle n’avait après tout nul part où aller, à part squatter chez des amis, et elle avait des habitudes à l’appartement.

- Je vais y réfléchir. Tu m’aides à m’habiller, s’il te plaît ?

Il sortit les vêtements et sous-vêtements et l’aida prudemment à cause de sa cicatrice et des ses deux mains blessées. Les débuts furent plus que gênants lorsqu’il fallut parer au problème de suite de couches et ce fut un Ryo rouge tomate qui mit en place une serviette hygiénique sur la culotte qu’il enfila ensuite à sa partenaire qui aurait pu en rire si elle n’avait pas été elle aussi rouge de honte. Lorsqu’il retira la blouse d’hôpital pour l’aider à passer son soutien-gorge, il ne put s’empêcher de s’émouvoir à la vue de ce corps meurtri mais dont il se souvenait de la douceur et de la façon dont il s’imbriquait parfaitement au sien.

- J’aurais dû t’acheter un poncho., plaisanta-t-il en sortant un gilet, à enfiler au dessus d’un chemisier.
- Oui. On peut juste le poser sur mes épaules et tu attacheras le premier bouton uniquement.

Délicatement, communiquant simplement, il réussit à l’habiller sans trop de souci et, lorsque le Professeur arriva avec un fauteuil roulant, il finissait de lui brosser les dents. Il jeta un regard malicieux aux deux.

- Il a été sage ?, demanda-t-il, désignant Ryo du menton.
- Oui. Je peux sortir ?, l’interrogea-t-elle, anxieuse, son regard se voilant de tristesse.

Elle voulait retrouver sa fille, pouvoir la voir encore le temps qu’elle serait là, la tenir dans ses bras et mémoriser ses traits. Ryo la comprenait et avait la même envie qu’elle mais il y avait un point à régler car la veillée funèbre aurait lieu le soir même. Il s’assit à ses côtés et prit sa main bandée délicatement.

- Kaori, Eriko a prévenu Miki de ce qui est arrivé et, moi, j’ai eu ta sœur qui arrive cette après-midi. Tu acceptes leur présence à tous à nos côtés ?, lui demanda-t-il.
- Oui, bien évidemment.
- Et celle de Mick et Kazue ?, ajouta-t-il avec beaucoup d’hésitation.

Il sentit ses doigts se crisper sur les siens. Il devait lui poser la question : c’était à elle de choisir. Elle baissa les yeux et réfléchit un instant. Elle tenait encore Mick pour responsable de tout cela et n’avait pas encore réussi à passer l’éponge. Elle n’était pas sûre de pouvoir supporter sa présence alors qu’elle venait de perdre son bébé et encore moins celle de Kazue avec son ventre rond et leur enfant bien en vie.

- Je ne préférerais pas., murmura-t-elle.
- C’est peut-être monstrueux de ma part mais je n’ai pas envie de les voir., avoua-t-elle.
- Kaori, je ne t’en veux pas., la rassura-t-il.
- Allez, viens, on s’en va d’ici., dit-il, la soulevant du lit pour la poser dans le fauteuil.

Ils quittèrent l’hôpital et rapidement se retrouvèrent aux pompes funèbres qui s’occupaient de leur bébé. Eirin avait été habillée et enroulée dans une couverture. Ils furent installés dans une salle qui donnait sur une terrasse et, malgré le froid hivernal, ils restèrent un long moment dehors à trois dans le plus grand des silences. Dans le courant de l’après-midi, Miki et Umibozu arrivèrent, bientôt suivis d’Eriko toujours aussi pâle. Un peu plus tard, ce fut Sayuri qui se présenta en compagnie du Professeur qui avait été la chercher à l’aéroport.

- Nous sommes au complet., souffla Ryo peu après, regardant Kaori.
- Mick et Kazue…, commença Miki étonnée.
- Je ne les ai pas appelés., répondit-il, coupant court.

Une main posée sur son épaule par son mari avertit la jeune femme de ne pas poser plus de questions.

- Je vais prévenir les employés qu’on peut procéder., proposa le nettoyeur, le coeur lourd.
- Attends encore un peu, s’il te plaît., murmura Kaori, dont les larmes couraient librement sur ses joues.

Elle caressait sans discontinuer le visage du bébé, n’arrivant pas à la laisser. Elle avait le terrible sentiment de l’abandonner alors qu’elle savait qu’il n’en était rien, qu’Eirin n’était déjà plus.

- Dis-lui au revoir, Kaori., lui conseilla-t-il.
- Je n’y arrive pas., hoqueta-t-elle.
- Tu es forte, ma chérie. Eirin ne sera pas seule là-haut. Je suis sûre que ton frère s’en occupe déjà., tenta de l’encourager Sayuri malgré sa gorge serrée.

Ryo lui lança un regard reconnaissant. Même s’il paraissait détaché, il n’en menait pas large et se montrait juste fort pour elle.

- Souviens-toi, Kao : elle est là avec Hide., enchaîna Ryo, posant une main sur son coeur.

Kaori lui lança un regard torturé puis déposa un baiser sur le front de sa fille qu’elle tendit ensuite à Ryo.

- Ne me la redonne pas : je ne serais plus capable de la lâcher., avoua-t-elle.

Elle regarda tous leurs amis et sa sœur dire au revoir au bébé puis vit Ryo partir. Instantanément, ils l’entourèrent, les deux mains d’Umi sur ses épaules l’empêchant de bouger. Elle aurait certainement sauté de son siège sinon.

Ryo prit quelques minutes seul pour dire au revoir à sa fille également puis la confia au personnel. La cérémonie rituelle fut rapide et le cercueil d’Eirin fut bientôt transporté dans une autre pièce. Deux heures plus tard, les employés revinrent et tendirent respectueusement au père une urne contenant les cendres de leur enfant. Bientôt, tous quittèrent les lieux et regagnèrent leurs domiciles ou la clinique.

- Est-ce qu’elle risque de croiser Kazue ?, demanda Ryo, inquiet.

Ils venaient de quitter le chevet de Kaori qui s’était endormie, aidée par un sédatif, et se trouvaient dans le couloir.

- Normalement non. Elle ne travaille plus depuis hier et son prochain rendez-vous est prévu dans deux semaines. Kaori sera sortie d’ici là. Je ne la garderai pas plus de deux ou trois jours. Elle rentre chez toi après ?
- Je ne sais pas. Je lui ai proposé mais je ne suis pas sûr qu’elle acceptera.
- Sois patient. Elle est épuisée moralement et physiquement et les jours qui viennent risquent d’être durs car elle subira les contre-coups de l’accouchement sans le bébé qui va avec.
- C’est-à-dire ?
- Montée de lait, perte de sang, fatigue et chute des hormones…, le prévint le médecin.

Ryo soupira de dépit. Il espérait vraiment que les choses allaient enfin tourner en leur faveur…

- Va te reposer, Ryo. Essaye de manger aussi. Elle remontera la pente, elle est forte.
- J’espère Doc.

Il le laissa et regagna son appartement où l’attendait Sayuri. Il tenait dans ses mains l’urne funéraire, cette urne qui resterait chez eux quarante-neuf jours avant d’être mise dans la stèle des Makimura comme l’avait souhaité Kaori. Il chercha du regard où la poser.

- Mets-la là., lui indiqua Sayuri, dégageant un endroit sur une étagère.
- Tu as raison, elle sera à l’abri., dit-il, calculant que l’emplacement était dans un angle mort.
- Comment tu vas, Ryo ?, lui demanda la journaliste avec sollicitude.
- J’ai perdu ma fille et certainement la femme que j’aime. Comment veux-tu que j’aille ?, répondit-il cyniquement.
- Bats-toi pour elle, Ryo. Eirin est morte et c’est triste mais vous êtes vivants et, même si tes intentions étaient mauvaises quand elle a été conçue, c’est bien parce qu’il existait des sentiments plus profonds, non ?
- Oui et tu le sais bien.
- Ces sentiments sont toujours là ?, l’interrogea-t-elle, lui touchant le coeur.
- Oui.
- Alors, il faut qu’elle le sache et il faut que tu lui redonnes confiance parce que Kaori ne peut pas vivre sans toi et ce ne sont pas seulement les deux derniers mois qui me l’ont appris. Cela fait quatre ans que je le sens à travers nos discussions et nos lettres. Elle est toi comme tu es elle et il est temps que vous soyez un tout. Si la mort d’Eirin doit avoir servi à quelque chose, ce doit être à cela.

Ryo regarda la jeune femme et lut toute l’assurance qu’elle avait en ses paroles. Elle aurait pu lui en vouloir pour ce qui arrivait à sa sœur mais elle l’encourageait au contraire à persévérer. Il était de plus lui-même persuadé que s’il ne tentait pas sa chance avec Kaori, il faillirait à sa fille, à sa mémoire. Un ange était passé dans sa vie qui lui avait fait réaliser que les miracles existaient même issus du plus profond des ténèbres. Elle était en eux et, s’ils n’essayaient pas, elle mourrait définitivement. Il sentit le doudou au fond de sa poche. Le sortant, il se leva et le posa à côté d’elle.
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Mer 24 Mar - 2:19
Chapitre 17

- Laisse-moi rentrer avec toi., implora Kaori à sa sœur.

Deux semaines étaient passées depuis le décès d’Eirin et la jeune femme devait affronter un nouveau départ : celui de Sayuri qui devait rentrer en urgence à New York.

- Non, Kaori. Tu dois rester ici. Tu as entendu le Professeur : tu ne peux pas prendre l’avion pour le moment. Et je ne peux même pas imaginer que tu n’assistes pas à la mise en terre de ta fille., lui répondit la journaliste, l’air sévère.
- A quoi ça sert que j’y assiste ? Ca ne la fera pas revenir., soupira Kaori, réprimant les larmes d’angoisse qui montaient.
- Je ne veux pas rester seule, Sayuri. J’ai besoin de toi, s’il te plaît.
- Kaori, je voudrais bien rester mais je ne peux pas. Tu n’es pas seule, ma chérie. Il y a Ryo., dit-elle, lui caressant le visage.
- Je… Je ne veux pas rester avec lui., murmura la rouquine.

Sayuri prit sa sœur dans ses bras, jetant un œil vers l’étage du haut d’où Ryo les contemplait, attristé. Il faisait tout son possible pour elle mais rien n’y faisait : elle restait hermétique. Elle restait enfermée dans sa chambre ou prostrée dans le canapé avec le doudou d’Eirin dans les mains pendant des heures. Elle refusait de le laisser approcher et seule Sayuri pouvait désormais l’aider à se laver, s’habiller, se nourrir. La dernière fois qu’il avait essayé, la journaliste étant partie visiter une amie, elle avait balayé le bol de sa main plâtrée et s’était enfuie.

Dès qu’ils étaient à deux dans une pièce, l’ambiance était intolérable et la jeune femme refusait de parler pour crever l’abcès. C’était le monde à l’envers : le nettoyeur se montrait des plus patients même si c’était contre nature pour lui et elle fuyait la conversation. Sayuri se retrouvait prise entre deux feux : celui de soutenir sa sœur et celui de la faire avancer et donc de la bousculer. Ce fut ainsi qu’en discutant avec lui, elle parvint à cette seule solution : partir et les laisser seuls. Ils devaient régler leurs problèmes, Kaori devait affronter Ryo pour pouvoir sortir la tête de l’eau et, tant qu’elle serait là, elle se servirait d’elle comme bouclier pour ne pas avoir à le faire. Donc elle avait prétexté une urgence professionnelle et pris son billet retour. L’heure du départ avait sonné et un taxi l’attendait au pied de l’immeuble.

Dès qu’elle le lui avait annoncé, Kaori avait tenté de trouver refuge chez Miki ou Eriko mais elles avaient déjà été briefées. Au café, la deuxième chambre était en rénovation suite à une grosse fuite d’eau et Eriko préparait ses nouveaux défilés et n’avait malheureusement aucune disponibilité pour s’occuper de la jeune femme encore dépendante. Cela avait été dur de les convaincre toutes les deux du bien-fondé de la demande mais elles avaient fini par accepter.

- Je dois y aller, Kaori. Je vais rater mon avion sinon., déclara Sayuri, s’écartant de sa sœur.
- Non…, gémit la rouquine.
- Tu es forte et courageuse. Tu n’as jamais fui les problèmes, Kaori. Je veux revoir la jeune femme pleine de vie que je connais., lui dit-elle.
- Je… je ne sais pas si je pourrais à nouveau vivre comme avant.
- Tu le peux. Il suffit de le vouloir. Je m’en vais maintenant.

Sayuri embrassa sa sœur et sortit, la laissant seule. Ryo descendit peu après et approcha de sa partenaire.

- Comment tu vas ?, demanda-t-il avec sollicitude.

Elle le regarda, furieuse, et le planta sans un mot. Il soupira et partit en cuisine préparer le repas. Ca devenait dur de la laisser le traiter de la sorte sans répliquer, de la ménager quand elle ne le faisait pas. D’un autre côté, il devait avouer que c’était la façon dont il l’avait traitée pendant des années, il pouvait donc patienter encore un moment. Quand le repas fut prêt, il alla frapper à sa porte.

- Le repas est prêt. Tu viens manger ?
- Je n’ai pas faim !
- Kaori…
- Fiche-moi la paix !

Il soupira et la laissa. L’après-midi porterait certainement conseil... ou pas puisqu’elle refusa de manger le soir également. Il se demandait combien de temps elle tiendrait ainsi mais patienta : elle devrait bien manger le lendemain. Il passa une partie de la soirée sur le toit à fumer et observer les environs. Noël était passé et avait été un moment très douloureux. Malgré l’insistance de Sayuri et de Ryo, Kaori avait refusé de mettre un sapin et de décorer l’appartement. Comme elle venait tout juste de rentrer de la clinique, ils n’avaient pas voulu la contrarier. Nouvel An passa également inaperçu pour eux, la guerre de tranchée battant alors son plein.

La nuit fut à l’image des précédentes sauf qu’il dut remplacer Sayuri : elle se réveilla en pleurs à plusieurs reprises et, contrairement aux journées, elle se laissa aller dans ses bras. Epuisée, elle s’accrochait à lui et finissait par s’endormir à nouveau. Aussi lorsque, le matin, elle refusa de nouveau de manger, il poussa un long soupir, tout comme le midi et le soir. Il la savait têtue mais là, ça devenait insupportable. Comme elle ne voulut pas non plus de son aide pour le reste, elle ne se lava pas et ne se changea pas. Elle portait donc encore ses vêtements de la veille… Il pensa sincèrement qu’elle reviendrait à la raison le lendemain.

Donc quand elle refusa encore une fois de s’alimenter puis de se laver le jour qui suivit, il vit rouge et frappa du plat de la main sur la table.

- Ca suffit maintenant ! Tu vas arrêter de faire ta mauvaise tête et tu vas accepter mon aide. Que tu le veuilles ou non, tu dépends de moi, Kaori.
- Je ne veux pas. Je peux me débrouiller !, répondit-elle furieuse.
- Tu peux te débrouiller ? Très bien, vas-y, montre-moi. Montre-moi que tu peux manger seule !, lui enjoignit-il, poussant son petit-déjeuner vers elle.

Elle attrapa les baguettes du bout des doigts, attrapa un peu de riz et fit tout tomber, les deux bâtons lui échappant. Elle serra les dents et réessaya pour le même résultat. Après plusieurs tentatives, elle envoya valser le bol qui s’éclata contre le mur. Ryo lui jeta un regard dur.

- Ca va mieux ? Tu vas faire quoi ? Eclater toute la vaisselle tant que tu ne pourras pas manger seule ?, lui demanda-t-il.

Elle détourna le regard, refusant d’entrer dans son jeu.

- Sinon, je peux te proposer de tout mettre dans une gamelle et te laisser manger comme un chien. Tu n’aurais pas à dépendre de moi ainsi.
- Comment oses-tu ?, gronda-t-elle.

Vexée, elle se leva et s’en alla.

- Tu comptes te laver aujourd’hui ? Ou tu vas rester dans ta sueur et ta crasse une journée supplémentaire ?
- Je suis très bien ainsi., répondit-elle d’une voix aigre.
- Si mon odeur t’indispose, tu n’as qu’à pas approcher. Ca me fera des vacances.

Elle monta les escaliers sans un regard en arrière pour aller se réfugier dans sa chambre. Ryo serra les poings puis décida de prendre le taureau par les cornes. Il la rattrapa sur le palier et, l’empoignant par le bras, l’emmena de force dans la salle de bains.

- Lâche-moi !, hurla-t-elle.
- Non, tu vas prendre une douche.
- Ma cicatrice…
- Les fils sont tombés. On va faire attention à ton plâtre et je referai le bandage pour ton entorse après. Soit tu coopères, soit tu subis. C’est toi qui vois., lui dit-il.

Il attendit une minute sa décision mais face à son silence et ses sourcils froncés, il la prit pour elle. Il approcha et la déshabilla tant bien que mal, devant lutter contre elle. Elle finit par se retrouver nue devant lui.

- Qu’est-ce que tu fais ?, lui demanda-t-elle, paniquée.
- Je me déshabille, je n’ai pas pour habitude de me doucher avec mes vêtements., répondit-il stoïque.
- Mais… Mais… non !, protesta-t-elle, rougissant.

Il mit la douche en route et, quand elle fut suffisamment chaude, il obligea la jeune femme à grimper dedans et se mit derrière elle, évitant un maximum de la toucher. Le but n’était pas de l’effaroucher.

- Maintenant, tu as le choix : soit je te savonne, soit tu fais ce que tu peux et je t’aiderai pour les zones inaccessibles.

Elle continua à lui tourner le dos et il vit ses épaules s’affaisser en signe de reddition.

- Tu peux me donner du gel douche, s’il te plaît ?, murmura-t-elle.

Il ne dit rien et fit couler un peu de produit au dessus de son épaule. Elle fit glisser le gel douche de sa main gauche et se savonna comme elle put.

- Tu veux que je frotte ton dos et ton bras gauche ?
- Oui… s’il te plaît.

Il s’exécuta, tentant de ne pas penser à la douceur de sa peau et aux souvenirs qui remontaient.

- Je te lave les cheveux ?

Elle acquiesça et il attrapa le shampooing. Il prit son temps et massa longuement la chevelure de la jeune femme. Il se lava ensuite rapidement et sortit de la douche, lui laissant le temps de profiter un peu. Cela lui permit aussi de faire redescendre la tension. La proximité de son corps nu ne l’avait pas laissé insensible, loin de là. Il se dépêcha de se sécher et de s’habiller, revenant avec une large serviette pour l’aider lorsqu’elle sortirait. Il la vit fermer l’eau d’une pression du coude et se tourner vers lui. Elle se mit à rougir en notant son regard empli de désir et se précipita dans la serviette. Il l’en entoura, prenant un peu plus de temps que nécessaire pour la refermer sur elle avant de la lâcher.

- Je vais devoir te sécher.
- D’accord., murmura-t-elle.

Il prit une autre serviette et essuya toutes les parties apparentes de son corps. La plupart des bleus n’était plus qu’un mauvais souvenir, les autres laissaient encore une trace jaune qui s’estompait tous les jours un peu plus. Arriva le moment fatidique où il fallut sécher la partie cachée par la serviette et ils se regardèrent un moment, gênés. Doucement il tira sur le tissu et dévoila ce corps qu’il avait eu tant de plaisir à tenir dans ses bras même si, au moment des faits, ce n’était pas ce qu’il avait le plus réalisé. Il passa doucement avec la serviette sur sa poitrine gonflée, la voyant grimacer légèrement.

- C’est douloureux ?
- C’est tendu. C’est la montée de lait. C’est comme si ma poitrine allait exploser., répondit-elle, une larme s’échappant.

C’était dur de voir cette poitrine prête à allaiter sans avoir d’enfant à nourrir… Ryo posa une main sur sa joue et arrêta le trajet de la goutte salée. Sans plus un mot, il tendit son soutien-gorge et le fixa, mettant correctement les bretelles. Il acheva de la sécher et l’aida à s’habiller complètement. Il lui lava ensuite les dents puis la coiffa, finissant par lui pincer légèrement les joues. Elle s’écarta de lui en protestant.

- Je ne suis pas un bon maquilleur. C’est le meilleur moyen que j’ai pour te redonner des couleurs, enfin c’est ça ou te faire rougir., dit-il, le regard malicieux.
- Je… Merci., dit-elle à voix basse.
- Ecoute, je me doute que ce n’est pas facile pour toi de dépendre de quelqu’un mais je voudrais comprendre pourquoi tu es si agressive. Je ne cherche pas à obtenir tes faveurs. Je veux juste être là pour toi., lui demanda-t-il.
- J’ai mal. Eirin me manque, tu me manques mais je ne peux pas m’empêcher de t’en vouloir pour ce qui est arrivé. C’est de ta faute, Ryo. Si tu ne m’avais pas trahie ce jour-là, tout ça ne serait pas arrivé. Nous n’aurions pas dû incinérer notre bébé, je ne me sentirais pas aussi vide et seule et faible. Je serais peut-être encore là à t’attendre comme une conne pendant que tu irais te saouler et draguer des filles d’un soir. Je…, lui dit-elle, s’emportant progressivement.

Il la prit contre lui et la berça un moment.

- Je ne voulais pas tout cela. Je suis désolé, Kaori. Je ne voulais pas te pousser dans le vide et te voir souffrir. Je… Je voulais que tu me reviennes, que tu sois de nouveau à moi. J’avais le sentiment de t’avoir perdue et ça me rendait fou. Je suis tellement désolé, Sugar.
- Il est trop tard, Ryo. On ne peut pas réparer le mal qui a été fait. Eirin est morte et nous avec elle., murmura Kaori.

Elle se détacha de ses bras et sortit de la salle de bains, le laissant seul avec ses pensées. Pour la première fois depuis des jours, elle ne se réfugia pas dans sa chambre ou près de leur fille. Elle monta sur le toit et observa la ville, laissant les bourrasques de froid lui gifler le visage. C’était douloureux physiquement mais elle s’en fichait, cela faisait toujours moins mal que la douleur que lui infligeait son coeur. Elle aimait toujours Ryo mais elle n’arrivait pas à vivre avec ce qui s’était passé et les conséquences qui en avaient découlé. Elle ne savait pas si le temps apaiserait ces souffrances mais elle doutait encore plus qu’il lui apporterait le pardon. Quand elle redescendit enfin, elle trouva Ryo en pleine contemplation de l’urne d’Eirin.

Quand elle l’avait laissé, il était resté un long moment, l’esprit comme vidé, dans la salle de bains. Puis ses pieds l’avaient conduit jusque l’endroit où elle le retrouverait un peu plus tard. Il ne savait pas comment faire pour la ramener vers lui. Il se doutait que ça lui prendrait du temps mais aurait-il la patience ? Il regarda l’urne et revit le visage de leur bébé. Eirin ne méritait pas d’être oubliée ou reléguée au rang de mauvais souvenir. Elle ne pouvait pas n’être que cela. Il voulait croire qu’ils renaîtraient de ses cendres. Bien sûr, il aurait préféré voir sa fille vivre et grandir, la connaître mais le destin en avait décidé autrement et il avait besoin que cet évènement ne fut pas vain, stérile. Cette épreuve devait faire d’eux un couple plus fort. Mais Kaori ne semblait pas l’entendre de cette oreille… Il avait l’impression que, pour elle, la mort d’Eirin signifiait leur mort à eux également. Comment lui faire comprendre son point de vue ? Il ne savait pas et il devait trouver. Il ne voulait pas la perdre à nouveau. Ce fut alors qu’il sentit sa présence dans son dos.

- Je ne te laisserai pas baisser les bras, Kaori. Si, pour une fois, c’est moi qui dois faire preuve d’espoir, je le ferai. Je ne suis pas prêt à faire une croix sur nous deux.
- Tu ne peux pas faire une croix sur ce qui n’a jamais existé, Ryo., soupira-t-elle.
- Ca a existé. Ce n’était peut-être pas conventionnel mais toi et moi étions plus que deux partenaires de travail ou deux amis. Nous ne formons qu’un et tu le sais., insista-t-il.
- Je ne sais rien. Ou plutôt si, je sais le mal que l’on s’est fait.
- Tu sais ce que nous sommes. Tu l’as juste oublié., persista-t-il.

Elle réprima un soupir d’agacement et se tourna vers la porte.

- Je voudrais aller faire un tour. Je suppose que tu ne voudras pas que j’y aille seule.

Pour toute réponse, il alla chercher sa veste et la posa sur ses épaules avant d’enfiler la sienne. Ils sortirent sans un mot. Ils marchèrent une petite heure en silence, profitant juste de l’air frais et de la ville. Les rues étaient quasi désertes, un fait rare mais pas inhabituel par ce froid. Par habitude, Kaori les dirigea vers la gare et se retrouva devant le tableau. Elle se mit à scruter les colonnes quand Ryo la força à reculer. Elle se tourna vers lui sans comprendre.

- Non, je ne veux pas que tu fasses ça., dit-il.
- Quoi ?
- Le tableau, les missions… Tant que tu ne seras pas au clair avec ce que tu veux, tu ne t’impliques pas. Si tu dois vraiment me quitter, tu quitteras le milieu également., affirma-t-il sérieusement.
- Comment peux-tu décider à ma place ?, s’insurgea-t-elle.
- Personne ne saura te comprendre comme moi, Kaori. Personne ne prendra soin de garder tes mains propres. Je refuse que tu aies la mort de quelqu’un sur la conscience.
- Tu en es encore là ? C’est mon choix, Ryo !
- Tu ne comprendras donc jamais que je le fais pour toi ?, s’énerva-t-il.

Ils s’affrontèrent du regard un long moment puis elle le contourna et s’en alla. Fâché, il la rattrapa et la força à le regarder.

- Je… Je tiens à toi, Kaori. J’ai du respect pour toi.
- Jusqu’ici, tu me l’as très mal montré., rétorqua-t-elle, amère.
- Je fais des efforts mais ce n’est pas facile pour moi et tu le sais.

Elle détourna le regard, sachant que c’était vrai. Elle le connaissait assez pour savoir qu’il faisait preuve de beaucoup de patience, que certaines choses avaient changé mais elle ne voulait pas se laisser attendrir. Elle refusait d’abdiquer comme elle l’avait toujours fait.

- S’il te plaît, je ne te demande pas grand-chose. Fais un pas vers moi. Laisse-moi une chance., l’implora-t-il.
- Une chance de quoi, Ryo ? De revenir à la normale ?
- De reconstruire quelque chose., lui proposa-t-il.
- La seule chose qu’il y ait eu entre nous, c’était une relation sado-masochiste où tu me faisais mal et je restais malgré tout. Je ne veux plus de tout cela !
- Moi non plus. Kaori, j’ai enfin vaincu mes peurs. J’ai compris mes erreurs.
- Ca tombe bien moi aussi ! C’est fini, Ryo. Tu veux m’aider jusqu’à ce que je sois rétablie ? Très bien. Je te laisserai ce droit, mais, quand je pourrais de nouveau me débrouiller seule, je ferai mes bagages et je m’en irais !, affirma-t-elle.

Elle tourna les talons et ressortit de la gare. Il lui courut après refusant de la laisser à la merci des truands dans son état. Elle était coriace, il devait l’avouer. Malgré tout, elle n’avait pas encore réussi à vaincre toutes ses défenses et elle aurait encore du travail parce que, cette fois-ci, il n’était pas décidé à lâcher l’affaire. Il lui prouverait qu’ils avaient encore un avenir ensemble, un avenir à conjuguer à plusieurs même parce qu’après les sentiments qu’il avait découverts avec sa grossesse, il ne comptait pas en rester là mais ce sujet-là n’était pas encore d’actualité. Dans son état d’esprit, elle le prendrait certainement de travers et le décès d’Eirin était encore trop frais pour eux deux.

Kaori marcha d’un pas rapide jusqu’à l’appartement, sentant Ryo deux pas derrière elle. Son esprit était en ébullition après l’échange qu’ils avaient eu. Elle était à la fois furieuse et heureuse de savoir que Ryo voulait d’elle. Elle ne voulait plus le laisser régenter sa vie comme elle l’avait laissé faire jusque là, se pliant à son bon vouloir pour l’aimer, la respecter. Elle ne voulait plus se sentir dépendante de lui comme elle l’avait été. En même temps, elle éprouvait ce sentiment exaltant, mais également terrifiant, d’un amour enfin partagé qui lui donnait l’envie de se jeter dans ses bras et ne plus en sortir. Comment pouvait-elle vouloir tout et son contraire ? A vrai dire, elle ne savait plus vraiment où elle en était et c’était plus cela qui la mettait en colère que son comportement.

Quand elle arriva devant l’immeuble, elle se retrouva bête et dut l’attendre, n’étant pas capable d’ouvrir la porte seule. Obstinément tournée vers la porte, elle refusa de croiser son regard et se faufila à l’intérieur dès qu’elle le put. Elle grimpa quatre à quatre les deux premiers étages mais dut s’arrêter au troisième. Sa cicatrice lui faisait mal et elle avait du mal à reprendre son souffle. Elle savait pourtant qu’elle devait encore se ménager mais n’en avait pas tenu compte dans sa hâte à s’éloigner de lui.

- Ca va ?, lui demanda-t-il, s’arrêtant à ses côtés.
- Non. J’ai trop forcé., avoua-t-elle, gardant les yeux baissés de honte.

Il ne dit rien mais la prit dans ses bras. Au bout d’un moment, elle leva les yeux vers lui et croisa son regard. Il ne portait aucune trace de jugement, ni de moquerie, juste une lueur d’inquiétude et elle s’apaisa.

- Je suis désolée., murmura-t-elle.
- Bah, je suis habitué à ton comportement de folle furieuse…, plaisanta-t-il, lui adressant un sourire moqueur.

Elle voulut lui décocher un regard furieux mais ne put s’empêcher de sourire, penaude. Il l’emmena dans sa chambre et la posa doucement sur le lit.

- Repose-toi un peu. Tu es encore convalescente.
- Ryo, pour ce qu’on…
- Chut…, fit-il en mettant un doigt sur ses lèvres.
- On en reparlera plus tard. Tu as eu ton compte d’émotions pour la journée. On a encore du temps.
- Très bien., murmura-t-elle.

Elle le regarda s’éloigner et s’endormit peu de temps après, la marche l’ayant fatiguée. Quand elle se réveilla, le repas était prêt et elle le rejoignit. Il lui adressa un regard inquisiteur et la vit s’asseoir à ses côtés.

- Ce sera plus facile pour que tu m’aides, non ?, dit-elle simplement.

Il lui sourit et lui tendit une première bouchée qu’elle accepta avec plaisir. Elle avait faim...

Laissez moi vos commentaires : Ici
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Jeu 25 Mar - 1:00
Chapitre 18

Pour la quatrième fois, Kaori leva son poignet et regarda l’heure, poussant un long soupir. Cela faisait plus d’une heure qu’elle aurait dû voir le Professeur et, contrairement à ses habitudes, il était très en retard…

- Normalement, c’est moi qui râle et peste en attendant., plaisanta Ryo, lui jetant un regard en coin.
- Ca fait des semaines que j’ai ce plâtre et c’est aujourd’hui qu’il doit me l’enlever. Ca me gratte, c’est lourd. J’en ai assez., maugréa-t-elle.
- Ca fait six semaines, Kaori. Tu n’es pas à une heure près, non ?, se moqua-t-il gentiment.

Elle lui adressa un regard noir et se concentra sur la porte comme si ça le ferait apparaître et il apparut… venant du couloir, visiblement fatigué.

- Je suis navré pour l’attente, un accouchement un peu long…, s’excusa-t-il.
- On peut comprendre, n’est-ce pas, Kaori ?, se moqua le nettoyeur.
- Tout à fait., répondit-elle de manière posée, lui lançant un regard d’avertissement.
- On enlève le plâtre et visite de contrôle., récapitula le médecin en regardant son agenda.

Il la guida vers la salle adjacente et commença par retirer le plâtre avant d’examiner son bras puis son autre poignet et enfin acheva par le contrôle sur les suites de couches.

- Tout va bien. Ton bras est bien remis. La cicatrice de la césarienne est belle et tu n’as pas de séquelles. Si tu tombes enceinte, tu n’auras pas de souci particulier. Tu pourras même accoucher par voie basse, sauf contre-indication spécifique à ta nouvelle grossesse., lui apprit-il.
- Très bien., répondit-elle, l’air fermé.

La seule chose qu’elle pensa, c’était que, de toute façon, elle ne comptait plus tomber enceinte pour ne pas vivre une deuxième fois la douleur par laquelle elle passait. Ryo, de son côté, était soulagé de savoir qu’elle ne souffrirait pas de séquelles physiques de cette expérience. Le moment venu, si tout allait comme prévu, ils pourraient avoir un bébé et formaient une vraie famille. Il observa sa partenaire et s’inquiéta de son air sombre.

- Ca va, Kaori ?
- Oui, oui. Tout va bien., répondit-elle, comme absente.

Finalement, après quelques préconisations supplémentaires pour son bras, le Professeur les libéra et ils sortirent du bureau. Ils se dirigeaient vers la sortie lorsque Kaori, encore plongée dans ses pensées, buta sur un passant et évita la chute, encerclée par deux bras. Cette odeur, ce torse… elle les connaissait et elle se sentit comme tétanisée, n’osant plus bouger d’un pouce.

- Tu vas bien ?, entendit-elle comme de loin.

Elle ne pouvait pas être dans ces bras-là, pas contre celui qui avait fait de sa vie un enfer… Sortant brusquement de sa sidération, elle fit un bond en arrière en repoussant l’homme. Mick recula d’un pas en jetant un regard attristé sur elle. Ainsi, après plus de six mois, elle ne pouvait toujours pas supporter sa présence.

- Bonjour Mick., fit Ryo, déviant son attention de Kaori, le temps qu’elle reprit ses esprits.
- Salut Ryo., répondit-il.
- Qu’est-ce que tu fais ici ?, l’interrogea le nettoyeur.
- Kazue a accouché. Nous avons eu un petit garçon.

Les yeux de Mick pétillèrent de joie à l’annonce. Son sourire et ses traits se firent plus tendres.

- Félicitations., balbutia Ryo, cachant sa peine.

Il ne pouvait s’empêcher de penser à Eirin et à cette joie qu’il ne connaîtrait pas avec elle. Son ami s’en aperçut et domina son excitation.

- Je suis désolé pour votre fille. Si je peux…
- Tu ne peux rien ! Alors fiche-nous la paix ! Plein de bonheur à vous deux !, cracha Kaori avant de s’en aller, les larmes roulant sur ses joues comme la dernière fois qu’ils s’étaient vus.

Elle avait mal de penser que lui avait ce qu’elle n’avait pas malgré ce qu’il lui avait fait. C’était de sa faute si tout était parti en vrille, de sa faute si Ryo s’était jetée sur elle… Sans cela, elle ne serait pas tombée enceinte, pas partie et donc pas revenue pour se retrouver dans ce mouvement de foule et perdre sa fille… Elle ne souffrirait pas aujourd’hui comme jamais… Elle se retrouva dehors et s’arrêta devant la voiture, attendant Ryo qui ne semblait pas arriver et, pourtant, il ne mit pas plus de trente secondes à la rejoindre accompagné de l’américain.

- Je ne veux plus te voir !, hurla-t-elle.
- Kaori, il faudra bien que tu règles tes comptes. C’est le seul moyen pour toi d’aller de l’avant., lui conseilla Ryo patiemment.
- Parce que toi, tu l’as fait ? Vous êtes redevenus potes comme avant ? Tu as eu plus que lui, alors c’est bon ?, se fâcha-t-elle.
- Ne dis pas de bêtise !, lui répondit-il, énervé.
- On a mis les choses à plat un peu avant ton retour., ajouta-t-il.

Mick et lui échangèrent un regard entendu, se rappelant tous deux l’épisode. Ils savaient qu’ils pouvaient remercier Umibozu pour son intervention musclée. Malgré leur multiplication, leurs échanges étaient restés froids et virés régulièrement au lancer de piques. Excédé par une énième joute verbale qui mettait tout le monde mal à l’aise, le géant les avait pris par le col et fait descendre dans sa salle d’entraînement. Il leur avait remis à chacun une paire de gants de boxe et une protection pour la tête et leur avait dit de ne ressortir que lorsqu’ils seraient enfin revenus à la raison. Les trois heures qui avaient suivi avaient été tendues pour Miki et Kazue qui attendaient nerveusement le résultat dans le café alors que le géant attendait patiemment derrière la porte. Quand enfin elle s’était ouverte, les deux nettoyeurs étaient transpirants et surtout amochés mais il les sentit beaucoup moins tendus. Aucun des deux n’expliqua ce qui s’était passé ou ce qui s’était dit dans cette salle mais leurs relations s’étaient apaisées et étaient presque revenues à la normale. Le temps finirait le travail.

- Tant mieux pour vous ! On rentre !, dit-elle, leur tournant le dos.
- Kaori, je sais que tu me détestes mais Kazue n’a rien fait. Tu lui manques. Vous êtes amies, tu ne vas pas lui en vouloir parce qu’elle est ma compagne tout de même ?, lui demanda Mick, se voulant conciliant.

Elle n’en voulait pas à Kazue : elle était jalouse, se rendit-elle compte, jalouse parce qu’elle avait retrouvé son couple et qu’elle avait maintenant un bébé bien en vie. Elle était fâchée contre elle-même parce qu’elle n’avait jamais été envieuse mais, là, c’était plus fort qu’elle et elle n’arrivait pas à dompter ce sentiment.

- Elle voudrait te voir. Je suis sûr qu’elle serait ravie de te présenter le bébé., ajouta-t-il.

« Mais moi je n’ai pas envie de le voir ce bébé. Je veux voir ma fille. », eut-elle envie de hurler. Elle sentit une larme rouler sur sa joue à nouveau et l’essuya de rage.

- Kaori, je vais aller voir Kazue et lui dire bonjour. Tu peux rester ici si tu veux ou m’accompagner., l’informa Ryo.
- Vas-y, je ne te retiens pas., répondit-elle d’une voix faussement détachée.
- Je vais rester ici avec elle, Ryo., ajouta Mick.

La jeune femme se figea. Rester seule avec lui, non c’était au-dessus de ses forces. A tous les coups, il essaierait de lui parler…

- Très bien, à tout à l’heure., fit Ryo, se retournant pour partir.
- Attends, je viens avec toi…, dit-elle précipitamment.

Elle le rejoignit sans un regard en arrière. Ryo lui ne se priva pas de lui adresser un regard de reproche qu’elle ignora. Mick alla se promener dans le parc. L’attitude de son amie lui faisait mal, cela allait sans dire, mais elle était compréhensible et il aurait été étonné qu’elle lui pardonna si facilement. Il avait su ce qui s’était passé, il avait su pour la grossesse de Kaori et Ryo l’avait informé de la mort de leur enfant. Il lui avait expliqué pourquoi ils ne pouvaient pas être là pour les soutenir et Kazue et lui s’étaient dès lors tenus à l’écart malgré la douleur.

Cette douloureuse affaire qui avait eu lieu quelques mois auparavant lui avait néanmoins permis de remettre beaucoup de choses à leur place. Pour lui, Kaori resterait toujours son premier amour mais Kazue était, il en était à présent sûr, la femme de sa vie. Il avait maintenant tout ce dont il avait besoin : une famille, un métier de détective privé qui lui assurait un revenu suffisant, des amis qui les entouraient. Il avait définitivement fait une croix sur le métier de nettoyeur et ne le regrettait plus. Il serait toujours là pour aider Ryo ou Umibozu, le cas échéant, mais ne vivait plus après la poussée d’adrénaline qui allait avec l’emploi. Il avait trouvé une autre étincelle de vie dans le regard de sa compagne et dans la petite vie qu’elle avait abritée et mise au monde le jour même.

Le seul point noir qui subsistait était sa relation avec Kaori. Il attendait avec impatience et appréhension le jour où elle accepterait de lui parler et de, peut-être, tirer un trait sur le passé. Son amitié lui manquait et surtout, il se sentait coupable du mal qu’il lui avait fait. Il voulait la revoir sourire, la savoir heureuse. Il pouvait se montrer patient pour cela. Si aujourd’hui elle acceptait déjà de revoir Kazue et de connaître leur bébé, ce serait un bon départ. Cela soulagerait sa femme qui souffrait de ne plus voir son amie, qui se sentait aussi en partie responsable de sa souffrance… Il alluma une cigarette, la dernière se jura-t-il, et partit s’installer sur un banc devant l’étang.

Quand ils arrivèrent près de la chambre de Kazue, Ryo se tourna vers sa partenaire, soucieux. Il voyait son regard sombre et se demandait comment elle allait réagir. Il était lui-même anxieux de la façon dont il réagirait devant le bébé, craignant de se laisser déborder par sa tristesse.

- Tu peux rester ici si tu préfères., lui proposa-t-il.
- Je… non… Je dois le faire. Kazue n’y est pour rien., répondit-elle, nerveusement.
- D’accord.

Il lui tendit la main pour lui apporter du soutien et elle la prit. Ils furent invités à entrer après avoir toqués et pénétrèrent dans la chambre de Kazue. Ryo fut surpris par la force avec laquelle elle serra sa main en voyant la maman.

- Ryo, Kaori… je suis tellement contente de vous voir !, s’exclama-t-elle, les larmes aux yeux.
- Nous aussi, ma belle. Comment vas-tu ?, demanda Ryo, l’embrassant sur la joue.
- Bien. Fatiguée mais heureuse., répondit-elle, jetant un regard anxieux vers Kaori qui était restée un peu en retrait.
- Comment tu vas, Kaori ?, lui demanda-t-elle.
- Bien., fut la réponse qu’elle reçut.

La rouquine avait les yeux rivés vers le berceau non loin et luttait contre les sentiments contradictoires qui l’assaillaient : elle avait à la fois envie et pas envie de le voir. Elle se sentait attirée par ce bébé tout en sachant qu’elle souffrirait certainement. Un silence pesant s’installa dans la pièce pendant une minute que Kazue finit par briser.

- Je suis désolée pour ce que Mick t’a fait, Kaori. J’imagine que ça doit être dur., commença-t-elle.
- Oui., répondit-elle laconiquement, réprimant une envie furieuse de rire amèrement : dur était un faible mot et, après tout, Ryo avait fait pire.
- Il s’en veut énormément, tu sais. Moi aussi d’ailleurs., ajouta-t-elle après un temps de silence.
- Pourquoi tu t’en voudrais, Kazue ? Tu n’as rien fait., demanda Kaori, surprise.

Ryo regarda l’échange entre les deux femmes et fut soulagé de voir sa partenaire sortir un tant soit peu de sa carapace.

- Je t’en ai voulu un bref instant. J’ai cru que tu avais dit à Mick que j’étais enceinte, que tu avais trahi ta parole mais, en fait, il l’avait deviné avant de disparaître. J’aurais dû te faire confiance., lui expliqua-t-elle.
- Tu n’es pas la seule…, murmura Kaori, lançant un regard douloureux vers Ryo.

La culpabilité le piquant, il baissa les yeux. Il savait que c’était certainement la pire chose qu’il lui avait faite. Il la vit avancer vers le berceau du bébé comme un robot et le regarder fixement. Il attendait avec appréhension sa réaction.

- Il s’appelle Samuel. Tu peux le prendre si tu veux., lui proposa Kazue.

Curieux et inquiet, Ryo approcha et la regarda prendre le bébé délicatement. Il dormait paisiblement et sa bouche était pincée comme s’il tétait. Le nettoyeur sentit son coeur battre douloureusement, l’image d’Eirin se transposant sur le visage de Samuel et il ne put empêcher une larme de tracer sa voie sur sa joue. Sa fille lui manquait horriblement. Il fit un effort considérable pour reprendre le dessus et réussit à retrouver son calme sous le regard peiné de Kazue.

Kaori avait le regard rivé sur le bébé. Elle sentait sa chaleur irradier contre elle, son odeur lui chatouiller les narines, son poids sur son bras. C’était ce dernier point qui l’empêchait de s’imaginer Eirin à sa place. Elle avait été si légère dans leur bras, si petite. Elle aurait tout donné pour pouvoir la tenir vivante et savoir qu’elle allait vivre, même donné sa vie pour elle. Elle sentit soudain quelque chose se libérer en elle et se sentit vaciller. Elle reposa le bébé dans le berceau.

- Prends soin de lui, Kazue., dit-elle avant de sortir en courant.

Ryo et Kazue se regardèrent interloqués un moment.

- Qu’est-ce… Qu’est-ce qu’elle a voulu dire, Ryo ?, demanda-t-elle d’une voix blanche.
- Je ne sais pas., murmura-t-il, encore abasourdi, la peine le rendant un peu gourd.
- Tu crois…, commença-t-elle sans réellement pouvoir y croire.
- Tu crois qu’elle pourrait faire du mal à Mick ?, reprit-elle, sentant la panique monter.

Ryo la regarda sans réagir. Avant, il aurait juré que non, que Kaori était incapable de faire du mal à qui que ce fut. Mais Kaori n’était plus comme avant. Elle était blessée et désespérée. Que serait-elle capable de faire à l’homme qu’elle avait défini comme à l’origine de tous ses problèmes dont le dernier, la mort de son bébé ? Il ne savait pas.

- Ryo ! Fais quelque chose. Assure-toi qu’elle n’est pas en train de faire une énorme bêtise !, lui ordonna Kazue.

Son cri réveilla le nourrisson qui se mit à pleurer et tira définitivement le nettoyeur de sa torpeur. Il sortit à son tour de la chambre.

Kaori avait débouché à l’extérieur à bout de souffle. Elle avait la tête qui tournait et l’air frais lui fit du bien. Elle respirait quelques goulées d’air, les mains appuyées sur les genoux, puis se redressa lentement. Elle avisa Mick assis sur un banc face à l’étang et serra les poings avant d’amorcer le premier pas. Moins d’une minute après, elle lui faisait face et il la regardait sans savoir quoi dire ni penser. Elle avait une lueur étrange dans le regard comme si elle bataillait sec avec plusieurs émotions. La culpabilité qui ne l’avait jamais quitté depuis le moment où il l’avait enlevée refit un bond dans sa poitrine en la voyant si perdue.

- Je suis désolé., souffla-t-il.
- Tu savais qu’elle était enceinte avant de partir avec Nichols ?, demanda-t-elle comme si elle ne l’avait pas entendu.
- Je n’en étais pas sûr mais tout concordait., répondit-il après quelques secondes de surprise.
- C’était pour les protéger tous les deux que tu as fait… ça ?, continua-t-elle, le visage fermé.
- Oui. Ca n’excuse pas mon geste mais oui, je protégeais ma famille. Je savais que tu serais plus forte qu’elle, plus armée et que Ryo remuerait ciel et terre pour te chercher. Je ne voulais pas te blesser, Kaori, mais je devais convaincre Nichols très vite, sinon il l’aurait tuée avec mon enfant. Ca ne pouvait pas arriver., expliqua-t-il, se frottant le visage de lassitude.
- Je donnerais tout pour qu’Eirin vive, tout jusqu’à ma propre vie., affirma la jeune femme.

Mick leva le visage et vit celui baigné de larmes de Kaori tourné vers l’étang. Il se leva et lui fit face, ne sachant quoi faire. Finalement, il ouvrit les bras et attendit. Le mouvement attira son regard et elle le jaugea un instant avant d’accepter son étreinte. Elle se laissa aller contre lui.

- Si j’avais su tout ce qui découlerait de mon geste, je me serais tué avant. Tout ça… ça a pris beaucoup trop d’ampleur., regretta-t-il.

Il sentit les sanglots secouer le corps de son amie et resserra son étreinte. Il posa le menton sur son crâne et tenta de lui apporter du réconfort sans être sûr d’y parvenir. Il vit Ryo sortir de la clinique et regarder dans tous les coins. Finalement, il les vit et parut soulagé. Il approcha mais leur laissa une marge d’intimité.

- Je te jure que, si je pouvais revenir en arrière, je le ferais., répéta-t-il quand elle se calma enfin au bout de plusieurs minutes.

Kaori s’écarta, essuyant ses yeux rougis, et plongea son regard dans le sien, lisant ses regrets, sa culpabilité, sa sincérité…

- Ton fils grandirait sans père. Je sais ce que c’est et je ne l’imagine même pas., dit-elle, sincèrement.
- Tu as perdu ta fille, Kaori…, se justifia-t-il.
- C’était un accident.

La mort d’Eirin était un accident. Ca aurait pu arriver n’importe où, n’importe quand. Ce qu’elle savait désormais, c’était qu’elle aurait fait n’importe quoi pour elle, même des choses inimaginables pour elle avant de la sentir grandir en elle.

- Je… Je te pardonne, Mick. Je n’excuserai peut-être jamais ce que tu as fait mais je te pardonne. Tu as pensé à celle que tu aimais et à ton bébé. Cesse de culpabiliser et aime-les. Je ne t’en veux plus., lui assura-t-elle.
- Kaori…, souffla-t-il, ému.

Pour la première fois de sa vie d’adulte et en dehors de la sphère privée, Mick se mit à pleurer. Il enlaça Kaori avec une force à la hauteur de son soulagement et se laissa aller. Elle le serra dans ses bras, tentant de l’apaiser comme il l’avait fait plus tôt, et, même si c’était elle qui lui avait pardonné, elle se sentit également plus légère.

- Il nous faudra encore du temps pour retrouver une relation normale mais on y arrivera., le rassura-t-elle.
- Ca veut dire que tu vas rester ?, murmura-t-il, jetant un œil vers Ryo.
- Je… Je ne sais pas encore., répondit-elle.
- Tout ce que je t’ai dit sur lui quand on y était, c’était vrai, Kaori. Il t’aime à la folie., lui dit-il.
- Le problème n’est plus là. Il a brisé la confiance qu’il y avait entre nous. Je ne sais pas si je serais capable de la lui accorder de nouveau.
- Il a changé, tu sais.
- Je sais mais il est peut-être déjà trop tard. Reste en dehors de cela, Mick., lui conseilla-t-elle.

Il sentit la tension la gagner et n’insista pas. Au bout d’un moment, elle s’écarta de lui.

- Tu ferais bien de retourner voir Kazue. Elle doit s’inquiéter. Samuel est magnifique. Occupe-t-en bien. Aime-le.
- De tout mon coeur, je te le promets., répondit-il.

Elle acquiesça et le laissa partir. Sentant le froid la gagner, elle serra les bras autour d’elle. Elle était épuisée émotionnellement. Elle resta seule quelques instants avant de sentir la présence de Ryo qui passa sa veste autour de ses épaules.

- Tu vas attraper froid., lui dit-elle.
- Je suis coriace. Ca va ?, s’enquit-il, d’un ton qu’il voulait détaché malgré son inquiétude.
- Oui. J’ai pardonné à Mick. J’ai compris ce qui l’avait poussé. J’aurais été prête à tout pour ma fille comme il l’a été pour son enfant., répondit-elle.
- Comment tu te sens ?
- Un peu mieux.

Elle lui fit face, lisant dans ses yeux son besoin de rédemption également, mais elle n’était pas encore capable d’y répondre et ne savait pas si elle le serait un jour.

- On rentre ?, proposa-t-elle, le contournant pour aller à la voiture.

Ryo la regarda partir et se sentit abattu. Un long soupir lui échappa. Il avait tellement envie de la retrouver, qu’elle lui accorda à lui aussi son pardon. Il voulait l’aimer et lui montrer ce dont il était capable pour elle. Il voulait sentir son amour en retour, l’entendre rire, voir sa joie revenir et illuminer ses jours… Le chemin de la rédemption était long et difficile même avec la meilleure des motivations qu’était Eirin. Sa fille lui manquait. C’était dur de lutter jour après jour pour rester fort pour elle. Prenant sur lui une fois de plus, il la rejoignit à la voiture et prit place derrière le volant.

- Tu penses qu’un jour, tu trouveras la force me pardonner ?, ne put-il s’empêcher de lui demander.
- Je ne sais pas. J’aimerais mais je ne sais pas., répondit-elle, baissant les yeux.

Elle vit ses doigts se crisper sur le levier de vitesse puis il démarra et ils regagnèrent l’appartement…
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Ven 26 Mar - 0:34
Chapitre 19

Tous deux habillés d’un haut blanc sur un bas noir, Kaori et Ryo se retrouvèrent dans le salon, fixant l’urne d’Eirin. Le jour de l’enterrement était arrivé et ils avaient du mal à accepter cette dernière séparation avec leur fille. Cela faisait sept semaines, quarante-neuf jours, maintenant qu’elle était née et décédée sans avoir eu le temps de pousser un cri dans ce bas monde, quarante-neuf jours qu’ils avaient passé dans les limbes d’une relation perdue à tenter de définir ce que pourrait être leur relation à venir, autant de jours de douleurs et de larmes, autant de jours à espérer un avenir meilleur avec ou sans l’autre.

- Je n’arrive pas à croire que ça fait déjà tout ce temps qu’elle est partie., murmura Kaori.
- Il faut y aller., répondit Ryo qui avait du mal à garder son sang froid.

Il ignora le regard blessé de sa partenaire et, après avoir enfilé une veste noire, prit l’urne et le doudou. Il sentait ses mains trembler contre la boite et réprimait difficilement les larmes qui montaient. Il s’était juré de ne pas craquer aujourd’hui. Il avait laissé libre cours à son chagrin pendant la nuit et le ferait de nouveau celle qui suivrait si nécessaire mais il se montrerait fort pour Kaori. C’était elle qui souffrait le plus et qui avait besoin de soutien.

Elle mit sa veste noire et le suivit sans mot dire mais son attitude froide et distante lui faisait mal. Depuis le jour de la naissance d’Eirin, elle ne l’avait pas vu pleurer, triste peut-être une fois ou deux quand ils parlaient d’eux deux, mais il semblait surtout détaché, indifférent. Il lui avait dit qu’il l’aimait, qu’il voulait d’une vie à deux. Il avait avoué lui avoir menti pendant des années et bien des choses avaient changé mais ça ne lui suffisait pas. La mort d’Eirin le laissait indifférent et elle n’arrivait pas à l’accepter.

Quand ils arrivèrent au cimetière, Miki, Umibozu, Saeko et Reika étaient déjà là. Une voiture s’arrêta peu après et Mick et Kazue, Samuel dans les bras, en sortirent. Eriko et le Professeur ne tardèrent pas. Kaori aurait aimé avoir Sayuri à ses côtés mais elle n’avait pas pu se libérer une deuxième fois en si peu de temps. Sentant la main de Ryo dans son dos, elle se tourna vers le cimetière et avança vers la stèle de son frère. Elle avait décidé de lui confier sa fille, ce dont Ryo lui avait secrètement été reconnaissant. Discrets, les employés du cimetière attendaient, laissant le temps aux personnes de faire leurs au-revoir.

- Tu nous as quittés beaucoup trop tôt, mon ange. J’aurais aimé te voir grandir et t’épanouir mais tu es partie avant même de nous avoir montré la couleur de tes yeux. Tu vas nous manquer, Eirin. Je te confie au soin de ton oncle. Occupe-toi bien d’elle, aniki., bafouilla la maman, les larmes roulant sur ses joues.

Elle sentit une main dans son dos et releva le visage vers Ryo qui avait un regard sombre… mais sec.

- Adieu Eirin., dit-il simplement.

C’était le mieux qu’il pouvait. Il ne trouvait aucun autre mot assez juste et, s’il avait dû en dire plus, il se serait effondré et il ne pouvait pas.

Ils sentirent leurs amis s’approcher et les entourer et, au bout d’un certain temps, les employés s’approchèrent pour mettre l’urne et le doudou dans la stèle. Mick et Kazue s’éloignèrent les premiers pour prendre soin de Samuel qui réclamait son repas puis les autres suivirent, laissant les deux parents seuls. Ils restèrent murés dans leurs pensées, dans leur tristesse, pendant de longues minutes, avant de se diriger vers la sortie du cimetière.

- J’ai préparé une collation à l’appartement. Si vous voulez venir, vous êtes les bienvenus., les informa Kaori.

Plus que jamais, elle avait besoin d’eux. Elle venait de prendre une décision radicale quant à son avenir et avait besoin d’un peu de temps pour affronter les conséquences : elle allait partir. Tout était fini pour elle. Elle avait longuement hésité les dernières semaines mais l’attitude de Ryo à l’enterrement avait été la goutte d’eau qui avait fait déborder le vase. Elle venait de comprendre qu’en fait, il se fichait d’Eirin. Sa mort l’avait laissé insensible et, encore, c’était le meilleur scénario dans son esprit. Elle ne voulait même pas imaginer qu’il put en être soulagé. Elle ne pouvait pas vivre avec lui dans ces conditions. Mieux valait tirer un trait sur toute cette histoire et repartir sur de bonnes bases, loin de lui, loin de Tokyo. Elle ferait ses bagages définitivement le soir même et irait certainement rejoindre Sayuri à New York. Elle réfléchirait après à ce qu’elle ferait.

Tous acceptèrent et ils prirent la route vers Shinjuku. Kaori mémorisa chaque image de sa ville qui lui manquerait tant par la suite. Elle se sentait triste à l’idée de ne plus revoir ses amis, de ne plus pouvoir venir se recueillir sur la tombe de son frère, son père et de sa fille mais elle devait aller de l’avant.

Ryo était lui aussi plongé dans ses pensées. Il se demandait comment les choses allaient évoluer à partir de maintenant. La période de deuil était passée, même si la douleur était encore présente. Combien de temps devait-il lui laisser avant de tenter un peu plus de la persuader d’aller plus loin ? Une semaine, un mois, plus ? Il ne savait pas. Ce qu’il savait, c’était qu’il avait besoin d’elle pour tenir le coup parce que ça devenait de plus en plus difficile de maintenir le cap sans signe encourageant de sa part. Il avait muselé tous ses sentiments depuis son retour et il avait besoin de pouvoir en laisser s’exprimer quelques-uns sans quoi il allait exploser. Il se sentait bouillir intérieurement et il savait que ce n’était jamais bon.

Ils se retrouvèrent donc bientôt à une dizaine dans l’appartement, assis ou debout, par petit groupes à discuter dans le calme. De fil en aiguille, les conversations se délièrent et l’ambiance se fit un peu plus légère. Eirin n’était pas oubliée mais la vie reprenait doucement ses droits. En parfaite maîtresse de maison, Kaori passait à travers les groupes s’assurant que tous avaient ce dont ils avaient besoin. Elle en profitait pour adresser un petit mot à chacun, le remercier de sa présence, d’avoir été là, de son amitié… Au bout d’un moment, épuisée émotionnellement, elle monta sur le toit prendre l’air et ce fut sans surprise qu’elle vit arriver Umibozu quelques minutes plus tard.

- Tu as décidé de partir, n’est-ce pas ?, lui demanda-t-il.

Elle ne fut même pas surprise qu’il s’en fut aperçu. Il était le plus apte à voir et entendre au-delà des apparences.

- Oui. Tout ça, c’est fini pour moi. J’ai besoin de partir pour me reconstruire., avoua-t-elle.
- Ryo ?
- Fini. Il n’est pas l’homme qu’il me faut., répondit-elle simplement, refusant de l’accabler.

Elle n’aurait jamais dû être aussi naïve à son sujet. Elle s’était amourachée d’un homme dur et imperméable aux sentiments. Elle s’était laissée enfermer dans une relation à sens unique. Elle était finalement seule responsable du marasme de sa vie sentimentale. Ryo n’avait été qu’égal à lui-même.

- Je pense que tu fais une erreur mais je respecterai ton choix., affirma Umibozu.
- Merci, Umi. Merci pour avoir été là et m’avoir protégée. Merci d’avoir aidé Ryo quand il en a eu besoin., lui dit-elle d’une voix émue.
- Quand pars-tu ?
- Je fais mes bagages ce soir. Demain, je partirai d’ici et dans la semaine de Tokyo. Je vais aller chez Sayuri si elle m’accepte.
- Prends soin de toi., lui conseilla-t-il.

Elle acquiesça et il la laissa seule, croisant Ryo qui montait. Il avait besoin de prendre l’air, sentant la douleur reprendre le dessus un peu trop tôt à son goût, leurs amis étant encore là et Kaori pouvant revenir à n’importe quel moment. Pour cela, Eriko lui avait tendu une énorme perche qu’il avait saisie.

- Ca va, Kaori ?, s’inquiéta-t-il.
- Oui. J’avais juste besoin de prendre l’air. Tout va bien en bas ?
- Oui. Eriko se demandait où tu étais., l’informa-t-il, la fixant du regard.
- Je vais redescendre.

Il l’arrêta, une main sur son bras. Il vit la douleur dans ses yeux ainsi qu’une lueur déterminée, sans arriver à dire si c’était bon pour lui ou non.

- Il faudra qu’on parle, Kaori., murmura-t-il.
- Quand ils seront partis.
- D’accord.

Elle le laissa seul et descendit rejoindre leurs amis. Ryo la suivit une dizaine de minutes plus tard après avoir repris le dessus sur ses émotions. Une heure plus tard, leur appartement commença à se vider et ils restèrent seuls. Kaori s’éclipsa quelques minutes et revint avec deux tasses de café. Ils prirent place dans le divan et burent leur boisson en silence. La journée avait été chargée émotionnellement et touchait enfin à sa fin.

- Je m’en vais, Ryo., lâcha-t-elle soudain, les yeux rivés sur le liquide noir.

Il releva brusquement la tête. Ce n’était pas ce qu’il était prêt à entendre ce jour-là. Il avait besoin d’elle pour vivre, pour lutter contre le désespoir, contre l’envie de tout laisser tomber et elle l’abandonnait. Il allait se retrouver seul une nouvelle fois. Il sentit son coeur se barricader à nouveau comme avant.

- Pourquoi ?, demanda-t-il, les dents serrées.
- Nous n’avons plus rien à faire ensemble. Tout est fini. Eirin est enterrée. Il est temps de tourner la page., répondit-elle.
- Alors tout ce temps que tu as passé ici depuis son décès, ce n’était que cela, l’attente de son enterrement ?
- Non, je ne savais pas ce que j’allais faire.
- Qu’est-ce qui t’a décidée ?

Il se leva et se mit à arpenter la pièce, les mains enfoncées dans les poches pour éviter un geste malheureux, le visage sombre. Il avait envie de casser quelque chose, de passer ses nerfs sur ce qu’il trouverait. S’il l’avait pu, il serait descendu à la salle de tir vider un chargeur mais la conversation n’était pas finie.

- Toi.
- Moi ?, fit-il, s’arrêtant surpris.

Il lui fit face puis s’approcha d’un pas vif. Il l’attrapa par le bras et la força à se lever pour l’affronter.

- Qu’est-ce que j’ai fait qui t’ait décidée, Kaori ? Parce qu’à part me montrer présent et faire le maximum pour toi, je ne vois pas ce que j’ai fait de mal., rétorqua-t-il blessé.
- Eirin. Tu t’en fichais d’elle. Tu n’as pas pleuré une seule fois, Ryo. Tu ne me parles quasiment jamais d’elle. Tu es totalement indifférent à ce qui lui est arrivé. Je… Je ne peux pas le supporter. C’était notre fille, notre bébé… Tu dis que tu m’aimes, tu as changé mais elle était ce que nous avions de plus précieux et elle t’indiffère., lui expliqua-t-elle, pleurant.

Elle sentit la poigne de son partenaire se resserrer sur son bras et laissa échapper un cri de douleur. Réalisant, il la relâcha et posa un regard noir sur elle.

- Hors de ma vue…, gronda-t-il, furieux.

Elle le dévisagea une seconde et partit se réfugier dans sa chambre. Ryo ne se retourna même pas pour savoir où elle alla. Il était furieux et cela lui semblait encore un bien faible qualificatif pour ce qu’il ressentait réellement. Comment osait-elle penser que la mort de leur fille l’avait laissé insensible ? Comment pouvait-elle croire qu’il ne ressentait rien et qu’elle était la seule à souffrir ? Il n’avait fait que mettre un masque pour pouvoir être là pour elle et ça lui revenait en pleine tête comme un boomerang.

S’imaginait-elle que non seulement il pleurait la mort de leur fille mais culpabilisait pour sa souffrance à elle aussi ? Il savait que si Mick était responsable de la situation, il était l’unique coupable parce qu’au fond, Mick ne l’avait pas forcé à coucher avec elle et la mettre enceinte. C’était entièrement de sa faute aussi s’il n’avait pas été capable d’agir sur ses sentiments avant cela et qu’il avait fallu son acte odieux et l’annonce de son départ et de sa grossesse pour trouver en lui la force d’avancer. Il devait lui dire et lui expliquer mais, pour le moment, il devait surtout se calmer. Alors il se tiendrait à l’écart, laisserait la nuit passer et ils reparleraient demain matin à tête reposée. Il refusait d’agir encore une fois sous le coup de la colère.

Dans sa chambre, Kaori sortit les valises, le coeur lourd, et commença à y entasser tous ses vêtements soigneusement. Elle voyait toute sa vie défiler devant ses yeux, repensait à tout ce qu’elle avait vécu avant la mort d’Hide et depuis qu’elle avait emménagé ici. Elle se souvint amèrement de ses rêves de jeune femme qui tournaient autour de lui, de son envie de sentir ses lèvres l’embrasser, ses bras l’entourer et de perdre la tête lovée contre lui. Elle avait eu tout cela mais elle en avait payé le prix, cher, beaucoup trop cher. Son armoire et sa commode vides, elle referma les deux valises pleines et les posa dans un coin. Elle n’avait laissé que des vêtements propres pour le lendemain. Il lui restait à emballer ses quelques bibelots et surtout les livres qu’elle avait entreposés sur une étagère.

Elle jeta un œil dans le couloir et, ne voyant pas Ryo, elle se dirigea vers la pièce voisine pour y récupérer un ou deux cartons. Elle ouvrit la porte et alluma la lumière et resta sidérée sur le pas de la porte. Elle sentit ses jambes vaciller et s’appuya sur le bâti. Où étaient les cartons ? Il y en avait plein avant, il n’y avait pas de chambre de bébé aménagée ici, pas de lit à barreaux blancs, de murs peints en beige avec des motifs d’ours jouant peints en blanc, de table à langer prête à accueillir un bébé hurlant parce que sale, ni encore d’armoire.

Trouvant en elle le courage d’avancer, elle vit que le lit était fait avec des draps d’un ton jaune pâle, une gigoteuse prête à abriter les rêves de l’enfant et un mobile avec des petits ours qui volaient. Elle tira sur la cordelette sans réfléchir et la musique se mit en route, les ours tournant lentement au-dessus du lit. Ses larmes aussi se mirent à couler et elle s’effondra.

Le nettoyeur était à la porte et la regardait, le coeur serré. Il l’avait entendue sortir de sa chambre et se diriger vers la pièce. Il avait voulu l’arrêter pour lui éviter un choc parce qu’il ne lui avait jamais montré ce qu’il avait préparé mais était arrivé trop tard.

- C’était la chambre que j’avais préparée pour le bébé dont je ne voulais pas., dit-il, la gorge serrée.

Ses accusations restaient dures à encaisser. C’était une nouvelle preuve du fossé qui s’était creusé entre eux. Elle se tourna vers lui en entendant sa voix et tout en elle hurla sa douleur et la culpabilité. Elle s’en voulait d’avoir douté de lui et de l’amour qu’il portait à leur enfant. Il craqua face à cela et s’approcha d’elle, l’accueillant quand elle se jeta dans ses bras. Ils restèrent un moment enlacés, partageant enfin l’angoisse qu’ils ressentaient face à cette perte douloureuse.

- Je suis désolée, Ryo. Tu avais l’air si impassible., bafouilla-t-elle.
- Je voulais juste être fort pour toi. Il n’y a que la nuit que je me laissais aller quand j’étais sûr que tu ne m’entendrais pas., lui expliqua-t-il.
- Mais pourquoi ?
- Parce que tout ça, c’est de ma faute, alors la moindre des choses, c’était de t’aider à traverser cette épreuve et te préserver.
- Tu es un idiot, Ryo. J’avais besoin de toi avec moi, pas pour moi., lui reprocha-t-elle doucement.

Il médita ses paroles et admit qu’elle n’avait pas tout à fait tort. Il resserra son étreinte sur elle et elle se laissa aller.

- Dis-moi que tu vas rester. J’ai besoin de toi, Kaori., murmura-t-il.
- Je pense que ce serait bien pour toi aussi. On a encore besoin de temps., ajouta-t-il, la voix emplie d’espoir.
- Du temps pour quoi, Ryo ? Redevenir partenaires ?, l’interrogea-t-elle, tendue.
- Faire le deuil d’Eirin dans un premier temps. Redevenir partenaires serait ensuite un bon point de départ pour plus. Je te l’ai dit : je n’ai plus peur d’avancer. J’ai compris mes erreurs, je ne veux pas les réitérer. Ta place est avec moi et la mienne avec toi., lui dit-il.

Elle resta silencieuse mais ne s’éloigna pas de lui pour autant. Elle était perdue dans ses pensées et pesait le pour et le contre. Il était prêt à enfin accéder à son désir le plus cher mais, aujourd’hui, elle ne savait plus si elle le voulait encore. D’un autre côté, elle avait le sentiment que quelque chose s’était réchauffé en elle, peut-être un fond d’espoir, et elle n’était pas prête à tuer ce quelque chose dans l’oeuf.

- On a perdu quelque chose de précieux, Ryo, en plus de notre fille, je veux dire. On se faisait confiance et c’était ce qui nous permettait de fonctionner si bien ensemble. Cette confiance s’est brisée entre nous bien avant l’affaire avec Nichols. On n’arrivait plus à se parler, tu te rappelles ?, dit-elle à voix basse.
- Oui, je me souviens. C’est mon comportement qui nous a brisés.
- Je ne sais pas si on arrivera à retrouver cette osmose. Je n’aurais plus la patience.
- J’ai changé, Kaori.
- J’ai vu mais tu ne pourras pas m’empêcher de me demander : pour combien de temps ? Le temps que je t’assure définitivement de mon retour, le temps qu’on forme ce couple dont tu me parles ou pour toujours ?, lui demanda-t-elle, s’écartant légèrement de lui sans quitter ses bras pour le regarder droit dans les yeux.

Sa question était légitime. Pour le moment, il était motivé par le souvenir d’Eirin, par l’envie de retrouver sa partenaire et même la femme qu’il aimait mais une fois qu’il aurait tout obtenu, saurait-il gardé le cap ?

- Je veux que ça dure toujours mais je ne me leurre pas. Je connais mes faiblesses et j’aurai certainement besoin de ta force par moments., avoua-t-il.
- Est-ce que tu la trouveras en toi pour au moins nous donner une chance, Kaori ? Je ne suis pas pressé, c’est toi qui donneras le rythme et, si un jour tu veux vraiment jeter l’éponge, je te promets de ne pas m’y opposer.

Elle quitta la chaleur de ses bras et fit le tour de la pièce lentement, réfléchissant, finissant par s’immobiliser de l’autre côté du lit. Elle s’appuya dessus et regarda la gigoteuse qu’elle caressa du bout des doigts.

- Je ne pensais pas que tu réagirais ainsi., murmura-t-elle, pensive.
- Je te crois quand tu me dis que tu aimais Eirin et que sa mort ne t’a pas laissé insensible., admit-elle.
- Je te crois quand tu me dis que tu as changé et que tu veux plus pour nous deux., ajouta-t-elle, les yeux toujours rivés sur le vêtement.

Elle marqua une pause qui rendit Ryo très nerveux et releva le regard pour croiser le sien.

- Je n’ai pas encore la force de te pardonner ce qui s’est passé ce jour-là et j’espère la trouver en moi comme c’est arrivé pour Mick.
- Je l’espère aussi., balbutia-t-il, anxieux.

Il n’avait toujours pas la réponse qu’il souhaitait ardemment entendre et sa patience était mise à rude épreuve.

- Nous n’irons nul part si nous n’arrivons pas à restaurer la confiance qui nous unissait, Ryo, et je t’avoue que je ne sais pas comment faire ni si nous y arriverons mais, pour ce que nous avons été et pour Eirin, j’ai… j’ai envie d’essayer., accepta-t-elle.
- Vraiment ?, demanda-t-il sans y croire.
- Oui, vraiment., répondit-elle.

Ils se regardèrent un moment comme intimidés puis Ryo fit le tour du lit et la prit dans ses bras. Il était soulagé de savoir qu’elle resterait, soulagé de savoir qu’elle voulait essayer de venir vers lui. Il avait envie de beaucoup plus qu’une simple étreinte mais il n’osait même pas l’embrasser de peur de l’effaroucher en allant trop vite. Il n’avait jamais été superstitieux mais croisa les doigts en espérant qu’ils arriveraient à se trouver.

- Merci de nous donner une chance, Kaori., murmura-t-il.
- Ce sera la dernière, Ryo. Je n’aurai pas la force de revivre tout ce par quoi on est déjà passé., le prévint-elle.
- Je ferai de mon mieux pour ne rien gâcher.
- Je n’userai plus de mes massues. Je ne veux plus être une caricature de moi-même. Il n’y aura pas d’avertissement, je ferai mon sac, te dirai au revoir et m’en irai.
- J’ai compris, Kaori. Ca fait huit mois que j’ai compris., répondit-il très sérieusement.
- Mais je dois t’avouer…
- Quoi ?, fit-elle anxieuse en s’écartant de lui.
- Tes massues risquent de me manquer., conclut-il, le regard pétillant.
- Si ce n’est que ça, on pourra toujours s’arranger…, concéda-t-elle sur le même ton.

Ils se sourirent timidement puis sortirent de la pièce un petit moment plus tard, refermant délicatement la porte. Ils se séparèrent devant la chambre de la jeune femme où elle pénétra pour défaire ses bagages précédemment faits. Elle prit avec émotion le cadre-photo.

- Cette journée a été dure, Hide. J’espère qu’on voit enfin le bout du tunnel. J’ai besoin d’un peu de calme et de sérénité. Tu me manques, grand frère, mais je suis aussi rassurée de savoir ma fille avec toi là-haut. J’aimerais tant que tu me fasses un signe pour me dire comment tout cela va se terminer.

Elle caressa le visage de son frère puis posa le cadre sur sa table de chevet. Vingt minutes plus tard, elle descendait en cuisine où Ryo préparait le repas. Elle s’était habituée à le voir ici et cuisiner pendant les six semaines où elle avait dépendu de lui. La dernière semaine, ils avaient alterné. Elle le regarda et se demanda comment agir : s’asseoir et le regarder faire ? Ressortir et le laisser seul ?

- Je peux t’aider ?, demanda-t-elle finalement.
- Un repas à quatre mains ? Ce sera une première pour nous, non ?, répondit-il d’un ton léger, le regard pétillant.
- Il faut bien un début à tout, non ?, répondit-elle, légèrement nerveuse.

Pour toute réponse, il lui tendit un couteau et elle se mit à côté de lui.
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Sam 27 Mar - 21:23
Chapitre 20

Tout doucement, une routine reprit place entre les deux nettoyeurs. Après plusieurs conversations plus ou moins houleuses entre deux caractères bien trempés, Ryo et Kaori convinrent de reprendre un partenariat a minima, ce qui leur laisserait le temps de retrouver leurs habitudes de travail. La jeune femme concéda donc de ne s’impliquer que dans une moindre mesure dans un premier temps, ce qui revenait pour elle à aller au tableau, prendre les rendez-vous et faire le travail de recherche. Ryo ne voulait pas la voir en contact permanent avec le client pour lui éviter tout risque de se retrouver sur le terrain. Il refusait de prendre le risque de la perdre et, ne sachant si la confiance était totalement revenue entre eux au moins professionnellement, le risque existait.

Il dut en revanche lui aussi faire des compromis et le sien fut d’accepter d’entraîner correctement sa partenaire que ce fut en techniques de combat ou au tir. Il fut d’ailleurs surpris du résultat car Kaori était très appliquée et volontaire mais, surtout, elle était beaucoup plus douée qu’il ne l’avait imaginé. Il devait également avouer, et ça ne gâchait rien à l’exercice, bien au contraire, que c’était agréable de pouvoir la toucher sans se prendre un marteau et la voir rougir violemment dès que le contact était un peu intime… Cela allait sans dire que le nombre de douches glacées avait également augmenté…

Quelques temps plus tard, Kaori revint de la gare, le sourire aux lèvres.

- Ryo, tu es là ?, appela-t-elle.

Sans réponse, elle monta dans la chambre de son partenaire et le trouva encore endormi. A sa décharge, il avait fait le tour des bars et cabarets la veille avec Mick mais, pour une fois, elle ne lui en tint pas rigueur. D’abord, il l’avait avertie qu’il rentrerait tard, ensuite, il devait rester à l’affût des informations que le monde de la nuit avait à lui offrir et, enfin, et surtout, il était rentré sobre et sans odeur spécifique autre que le tabac et, ça, elle le savait parce qu’elle l’avait senti quand il l’avait prise dans ses bras pour l’amener dans son lit. Elle n’avait en effet pas pu s’empêcher d’attendre dans le canapé son retour et s’y était endormie. Elle sentit son estomac se nouer à cet agréable souvenir qu’avait été le baiser qu’il avait déposé sur son front après avoir remonté les couvertures sur elle.

Elle approcha du lit, arrivant enfin à ne plus penser à la fois où elle y avait été allongée avec colère et rancoeur, et appela Ryo, le secouant légèrement par l’épaule.

- Ryo, réveille-toi. Allez, debout., l’appela-t-elle.
- Encore cinq minutes., grogna-t-il.

Elle sourit : ça la changeait de ses simagrées avec d’autres femmes. Elle s’assit sur le bord du lit et insista. Il finit par se tourner vers elle et ouvrir les yeux. Il cligna quelques fois et leva la main pour caresser sa joue. Il n’arrivait pas à croire qu’elle était là, dans sa chambre, assise sur son lit. Il vit ses joues se teinter légèrement de rouge et son coeur battit un peu plus fort. Elle était réellement là, dans sa chambre, et ça lui fit un bien fou.

- Il… Il faut que tu te lèves, Ryo., murmura-t-elle.
- Je suis obligé ?, marmonna-t-il.
- Tu as rendez-vous avec une cliente dans une heure au Cat’s. Elle doit être jeune et jolie., l’informa-t-elle, légèrement nerveuse.
- C’est un test ?, lui demanda-t-il, lui jetant un regard interrogateur.

Elle secoua négativement la tête. Certaines habitudes étaient dures à perdre.

- J’irai parce que ça fait un moment qu’on n’a pas bossé. En ce qui concerne le jeune et joli, j’ai ce qu’il faut à la maison., glissa-t-il à son oreille, la faisant frémir.
- Dis-moi que tu m’as gardé du café., l’implora-t-il.
- Oui et même une part de petit-déjeuner., répondit-elle avec un léger sourire.

Il approcha d’elle et laissa errer ses lèvres à quelques millimètres des siennes avant de déposer un sage baiser sur sa joue. Kaori sentit des papillons s’envoler dans son ventre. Elle croisa le regard chaud de Ryo qui la sondait. Elle détourna les yeux et se leva, nerveuse.

- Dépêche-toi, tu vas être en retard., bafouilla-t-elle.
- J’arrive., répondit-il, satisfait de sa réaction, la regardant s’éloigner.

Il partit prendre sa douche et descendit peu après habillé, rasé de près. Il prit son déjeuner en lisant le journal puis, avisant l’heure, alla enfiler sa veste sur son holster.

- Tu es sûr que tu ne veux pas que je vienne avec toi ?, lui demanda-t-elle, se sentant inutile.
- Oui. Notre temps reviendra, Kaori, j’en suis sûr, mais je ne veux pas risquer de te perdre en voulant aller trop vite. On sait assez que même la mission la plus basique peut tourner au vinaigre.
- Je sais. C’est juste que ça me fait bizarre de te voir partir sans moi.
- Viens avec moi au Cat’s si tu veux. Rien ne t’empêche d’aller papoter avec Miki mais je ne veux pas que tu interviennes dans le rendez-vous., lui proposa-t-il.

Elle le sonda du regard et réfléchit.

- Non, je ne suis pas sûre de pouvoir tenir. Il vaut mieux que je reste ici., admit-elle.
- Kaori, si je reviens avec notre cliente, je ne te demande pas de jouer la femme de ménage. Je me débrouillerai s’il le faut, d’accord ?
- Tu veux vraiment que je ne fasse plus rien ?, le taquina-t-elle.
- C’est moi qui vais finir sur le divan avec tes magazines de charme alors…, fit-elle, une lueur amusée dans le regard.
- Il faudra d’abord les trouver…, répliqua-t-il, malicieux avant de sortir de l’appartement.

Elle resta un moment ébahie puis se mit à fouiller toutes ses cachettes et ne trouva rien. Elle ne pensait pas qu’il irait jusque là. Elle resta un moment assise dans le fauteuil à réfléchir. Ces dernières semaines en sa compagnie avait ravivé la flamme de son amour pour lui. Elle ne savait pas si c’était suffisant pour passer à l’étape suivante mais elle sentait l’espoir grandir en elle d’un avenir meilleur. Il avait le don de souffler le chaud comme il l’avait fait le froid et c’était une sensation indéfinissable : elle se sentait bien et en même temps fébrile.

Elle se demandait jusqu’où il était prêt à aller. Elle avait aimé le Ryo d’avant aveuglément mais celui qui se dévoilait à elle maintenant était encore plus craquant parce qu’il était vrai, parce qu’il acceptait de lui montrer ses forces comme ses faiblesses, qu’il partageait enfin quelque chose avec elle. Elle se souvint de la semaine précédente où il avait voulu aller sur la tombe d’Hide et Eirin et où elle l’avait vu tomber le masque. Le chagrin s’était inscrit sur les traits de son visage et elle en avait été bouleversée. Elle n’avait pu s’empêcher de glisser sa main dans la sienne pour lui montrer qu’elle était là, qu’il n’était pas seul et la pression sur ses doigts avait été une réponse suffisante pour elle.

Le retour de ces moments d’intimité entre eux était important à ses yeux. Ils n’étaient pas gênés, ils arrivaient à être là l’un avec l’autre sans arrière pensée. Les liens se retissaient doucement et c’était beau et émouvant.

Ryo revint une heure plus tard en compagnie de leur cliente. Kaori n’avait pas eu tort en disant qu’il s’agissait d’une jeune et jolie femme. Elle avait un flair incroyable sur ce sujet-là. Elle croisa le regard ironique de son partenaire lorsqu’elle la jaugea et que son nez se fronça imperceptiblement en pensant à tout ce qui pouvait arriver et se sentit prise en flagrant délit de jalousie. Elle rougit légèrement.

- Aiko, je vous présente Kaori, mon amie. Kaori, Aiko, ma cliente.
- Bienvenue, Aiko. J’espère que vous vous sentirez à l’aise ici., l’accueillit-elle.
- Merci, Kaori., balbutia-t-elle.

Le nettoyeur la conduisit à la chambre d’ami et la laissa un peu seule pour qu’elle prit ses marques.

- Merci d’avoir fait le lit., fit-il, ayant rejoint Kaori à la cuisine.
- De rien. Il faut bien que je m’occupe. C’est quoi son histoire ?
- Elle a été témoin d’un meurtre. Il faut qu’on la protège tant que l’assassin est dans les parages., lui expliqua-t-il.
- C’est étrange, on dirait presque que Saeko est dans le coup., remarqua Kaori.
- Tu n’as pas tort. C’est elle qui l’a dirigée vers nous., répondit Ryo.
- J’aurais dû m’en douter…, maugréa Kaori.

Elle sentit la colère monter en elle. Saeko avait toujours le chic pour embarquer Ryo dans ses histoires. Elle comptait certainement sur sa collaboration forcée pour arrêter un grand ponte et faire mousser sa carrière. Que lui avait-elle promis en échange ? Quelques coups hypothétiques ou avait-elle même réussi à le faire travailler gratuitement ? Elle serra dans sa main le couteau de cuisine et Ryo vit ses phalanges blanchir. Il prit sa partenaire par les épaules et l’obligea à lui faire face après avoir lâché le couteau.

- Kaori, calme-toi. Regarde…, dit-il en ouvrant sa veste.

Elle jeta un œil circonspect et ne vit que son magnum dans son holster.

- Fouille mes poches intérieures., lui demanda-t-il.
- Non… Je ne veux pas. Ca ne me regarde pas, Ryo., fit-elle, baissant les yeux.
- Tu t’es toujours sentie inférieure à elle à tort. Saeko est mon amie, Kaori. Tu es la femme que j’aime. Regarde., dit-il.

Il sortit de ses poches intérieures, un chargeur prêt avec ses six balles, quelques douilles en vrac, un briquet et son portefeuille qu’il lança ouvert sur la table.

- Regarde bien. Il ne manque pas quelque chose ?, lui demanda-t-il.

Elle examina les objets même si elle avait déjà la réponse.

- Ton carnet de dettes…, murmura-t-elle.
- Oui, mon carnet de dettes. Je l’ai jeté après ce qui s’était passé. Parce qu’aucune autre femme ne pouvait me donner ce que tu m’avais donné. On progresse mais on a encore du chemin à faire., nota-t-il.
- Oui. Il y a des choses qui reviennent facilement, d’autres non…, murmura Kaori, baissant les yeux.

Il posa deux doigts sous son menton et releva son visage, posant un regard confiant sur elle.

- Il suffit d’y croire. Je suis sûr qu’on y arrivera. Un jour après l’autre., l’encouragea-t-il.

Elle acquiesça et ils se séparèrent à regrets, entendant Aiko arriver. Ils passèrent à table et firent connaissance, enfin tentèrent car leur cliente était très réservée et extrêmement nerveuse. Comme Ryo le souhaitait, Kaori tenta de ne pas s’immiscer dans l’enquête. Elle en restait donc à des faits relativement neutres. Ils apprirent donc, difficilement, qu’elle était encore célibataire et travaillait comme secrétaire dans une agence de publicité, ses parents étaient âgés et vivaient sur l’île d’Hokkaido où ils auraient aimé la voir revenir et fonder une famille avec un gentil garçon sérieux.

- Ce n’est pas votre souhait ?, s’interrogea Kaori.
- Non, je n’ai pas de grandes aspirations mais l’homme qu’ils ont en tête ne m’intéresse pas et est amoureux d’une autre femme. Je ne veux pas d’un mariage de convenance., expliqua-t-elle.
- Vous devez me trouver égoïste de ne pas respecter le choix de mes parents., balbutia-t-elle.
- Non. C’est votre vie. Vous avez le droit de choisir qui vous voulez aimer et avec qui vous souhaitez partager votre vie et avoir des enfants., la rassura la nettoyeuse.
- J’imagine que vous avez vous-même dû vous battre avec votre famille pour qu’elle accepte votre couple. Le métier de Monsieur Saeba n’est pas très conventionnel., répliqua Aiko, les regardant tour à tour.

Les deux se regardèrent, gênés, puis détournèrent le regard, ne sachant quoi répondre.

- A vrai dire, je n’ai plus de famille… à part Ryo., répondit Kaori, levant vers lui un regard interrogateur.
- Il n’y a plus que nous deux., confirma-t-il, posant sa main sur la sienne.

Elle n’avait pas rejeté l’idée qu’on les associa à un couple, ce qui était un excellent point pour lui. Il ne pousserait pas encore sa chance, mais il savait que l’idée faisait son chemin et qu’elle voguait dans la bonne direction, ce qui lui suffisait pour le moment. Le repas se termina et Ryo emmena Aiko à son travail, restant non loin pour la surveiller.

Tout se passa bien et ils reprirent en fin d’après-midi, le chemin de l’appartement silencieusement. Soudain, Ryo sentit une tension dans l’air et attrapa Aiko, la mettant derrière lui avant de dégainer. Plusieurs coups de feu furent tirés, projetant des éclats de verre sur eux. La jeune femme se mit à hurler, les mains sur les oreilles, et tenta de s’enfuir mais il l’en empêcha. Il répliqua en direction de la ruelle d’où provenaient les tirs et entendit le bruit de pas s’éloignant. Il rangea son magnum rapidement et prit la jeune femme par le bras, l’entraînant de force avant que la police n’arriva.

Lorsqu’ils rentrèrent, Aiko était en larmes et il la fit s’asseoir sur le divan, la laissant quelques instants avant de revenir avec un verre d’eau sous le regard interrogateur de Kaori qui cuisinait.

- Tenez, buvez., lui dit-il.

Elle refusa en secouant la tête et croisa les bras autour d’elle. Elle était paniquée et complètement perdue.

- Aiko, écoutez-moi. Aiko, regardez-moi. Aiko., fit-il d’une voix douce.

Il l’appela ainsi pendant une dizaine de minutes sans réussir à attirer son attention. Il se sentait démuni. Il soupira, n’aimant pas la conclusion à laquelle il était arrivé. Il repartit en cuisine.

- Kaori, je sais que je t’ai demandé de ne pas intervenir mais j’ai besoin de toi. On nous a tiré dessus…
- Vous…, le coupa-t-elle inquiète.
- Nous n’avons rien mais Aiko est paniquée et je n’arrive pas à la calmer. Tu… Tu peux m’aider, s’il te plaît ?, l’interrogea-t-il.
- Oui. Prépare une infusion pour elle., dit-elle en s’essuyant les mains.

Il acquiesça, soulagé. Kaori rejoignit Aiko dans le salon et prit place à ses côtés. Sans un mot, elle entoura ses épaules et l’attira contre elle, posant la tête de la jeune femme sur son épaule. Elle caressa doucement ses cheveux sans un mot. Quand Aiko passa les bras autour d’elle comme pour s’accrocher, elle sourit légèrement, satisfaite de la voir réagir, même si la jeune femme se mit à pleurer.

- Ca va aller, Aiko. Vous êtes en sécurité ici. Ryo s’occupe de vous. Vous n’avez rien à craindre., lui chuchota-t-elle à plusieurs reprises.
- Pleurez tant que vous en avez besoin. Je ne bouge pas d’ici et reste avec vous., la rassura-t-elle.

Ryo la regarda faire et il se rappela pourquoi City Hunter avait été plus fort depuis qu’il s’était associé avec Hideyuki et surtout Kaori. Ils avaient apporté un coeur, une empathie à sa mission et ils lui avaient donné une raison de vivre. Il croisa le regard de Kaori et tenta de lui transmettre le respect qu’elle méritait : elle n’était peut-être pas la meilleure guerrière mais elle était la plus humaine des personnes qu’il connaissait. Elle lui répondit par un léger sourire et il apporta la tasse qu’il avait préparée.

- Tenez, Aiko. Buvez cela., lui proposa-t-elle.
- Non, je ne veux pas de somnifère., objecta-t-elle.
- Ce n’est pas un somnifère, c’est juste une infusion avec des plantes relaxantes : camomille, verveine… Vous pouvez y aller en toute sérénité., la rassura-t-elle.

Leur cliente la regarda et acquiesça. Elle prit la tasse entre ses mains et la garda un moment pour se réchauffer. Kaori fit signe à Ryo de retourner en cuisine.

- Je vous laisse un peu vous reposer. Je vais finir le repas. Si vous avez besoin de moi, je suis en cuisine, d’accord ?, l’informa la nettoyeuse, lui mettant un plaid sur les épaules.
- Merci, Kaori., murmura-t-elle.

Kaori rejoignit Ryo en cuisine et reprit la cuisine.

- Elle est très secouée mais ça devrait aller mieux après une bonne nuit de sommeil., l’informa-t-elle.
- Merci, Kaori. A part tenter de les draguer pour les mettre en colère, j’ai du mal à gérer les larmes des clientes., avoua-t-il.
- Tu veux me faire croire que tu draguais uniquement pour leur changer les idées ?, fit-elle incrédule.

Il sourit légèrement à sa répartie et à son faux air innocent. Il mourrait d’envie de la prendre dans ses bras et de l’embrasser mais se retint. Kaori ne put réprimer un frisson à la lueur de désir qu’elle vit dans son regard. Elle ne sut dire si elle aurait répondu à ses avances ou non mais elle en fut émue tout de même.

- Uniquement, non. J’avoue que j’aimais la sensation de chasser., répondit-il honnêtement.
- Tu pensais vraiment réussir en te mettant à baver et te conduisant comme un pervers ?, lui demanda-t-elle, un sourcil levé.

Il rigola en se frottant la tête.

- Non, en effet. Je ne t’ai pas montré mon meilleur côté., admit-il, volontairement pensa-t-il.
- J’y ai eu le droit une fois., fit Kaori à voix basse, se souvenant de la fois où il lui avait proposé son aide et avait exercé son charme sur elle.

Elle s’était sentie hypnotisée ce jour-là. Elle aurait tout donné pour lui, pour un geste, un baiser. Il l’avait littéralement subjuguée. Il approcha d’elle et posa un regard envoûtant sur elle, le même que cette fois-là.

- Je ne me suis pas fait un réputation en multipliant les râteaux. J’ai eu mon succès avant que tu entres dans ma vie. Kaori…
- Oui ?, souffla-t-elle.
- Je dois t’avouer…, fit-il d’une voix langoureuse d’un timbre très bas qui la fit vibrer.
- Oui ?, murmura-t-elle au bord de la liquéfaction.
- J’ai très envie de t’embrasser.
- Fais-le…, s’entendit-elle dire.

Son regard se fit plus chaud et il approcha d’elle, la saisissant par la taille. Elle se laissa faire et se mordit la lèvre tant elle était nerveuse. Elle vit son visage se baisser vers le sien, sentit son souffle contre sa joue alors que ses lèvres l’effleuraient doucement dans une première approche. Elle ferma les yeux un court instant puis les rouvrit quand il s’éloigna. Leurs regards se croisèrent un instant et il y chercha le signe qu’elle était toujours d’accord. Hésitante, elle leva la main et la posa dans ses cheveux. Il sourit, content de savoir qu’elle était consentante, et reprit le chemin de ses lèvres. Ils sentaient le souffle chaud de l’autre sur leur bouche, s’immobilisèrent un instant le temps de profiter de ce moment et… le téléphone sonna.

Surpris, ils se regardèrent un moment et le charme se rompit. Kaori piqua un fard et se détourna rapidement vers la gazinière pendant que Ryo réalisait qu’il allait embrasser sa partenaire alors qu’il s’était juré d’attendre au moins jusqu’à la fin de la mission pour ne pas agir sur un coup de tête comme il venait de le faire. Il ne sut quoi dire sans paraître maladroit ou minimiser ce qui venait de se passer alors il se tut et alla décrocher.

Quand il fut sorti, Kaori posa la cuillère qu’elle tenait et s’appuya des deux mains sur le plan de travail, prenant de profondes inspirations pour calmer son coeur qui cognait dans sa poitrine à tout va. Ayant repris le dessus, elle éteignit le gaz et ramena le plat à table, Ryo l’ayant mise entre temps.

- Ca va mieux, Aiko ?
- Oui merci, mais j’avoue que je suis épuisée., répondit-elle, le visage toujours pâle.
- C’est normal. C’est le stress qui retombe. Qui a appelé ?, demanda Kaori, évitant le regard de Ryo.

Elle se sentait encore fébrile suite à leur baiser manqué. Elle se sentait frustrée.

- C’était Saeko. Elle veut qu’on se voit ce soir., lui dit-il, mal à l’aise.

Il avait peur de sa réaction, de la voir se refermer après les progrès qu’ils avaient faits, de voir son sentiment d’infériorité reprendre le dessus. Kaori prit un instant pour régner sur son sentiment premier, la colère, et lui jeta un regard pour puiser en lui ce dont elle avait besoin : de l’assurance. Il avait changé, elle pouvait en faire de même.

- Ca doit être important pour qu’elle t’appelle. Je ne bouge pas d’ici., répondit-elle d’une voix calme et posée.
- Tu es sûre ?
- Oui. Vas-y., lui assura-t-elle.

Il la contempla pensif un moment, songeant à l’effort que ça lui avait demandé. Il était fier d’elle, fier d’avoir à ses côtés une jeune femme qui faisait tout pour renouer avec l’homme qui lui avait fait du mal. Ca l’encourageait à poursuivre sur la voie qu’il avait empruntée et peut-être obtenir ce dont il rêvait en plus de son amour : son pardon.

Aiko partit se coucher juste après le dîner. Ryo sortit une heure plus tard pour retrouver Saeko dans un bar du Kabuki Cho. Il promit à sa partenaire de rentrer et elle s’installa dans le canapé devant un film qu’elle ne regarda qu’à moitié, repensant aux évènements de la soirée. Il était près de vingt-trois heures quand il revint, l’air sombre.

- Ca va ?
- Saeko a découvert l’identité des assassins. Ce sont des membres du Lotus Noir.
- Parmi les plus tendres…, ironisa Kaori, sarcastique.
- Il faut que tu dormes, Ryo., dit-elle en se levant.
- Tu vas avoir besoin d’être frais pour les affronter.

Elle lui tendit la main et il la prit, profitant de ce doux contact. Ils montèrent les escaliers et se séparèrent devant la chambre de Kaori. Tous deux s’endormirent difficilement.

Sans savoir pourquoi, Kaori se réveilla en pleine nuit. Elle regarda son réveil et s’aperçut qu’il était trois heures du matin : c’était l’heure de la visite nocturne. Elle ne put s’empêcher de se lever et d’aller dans le couloir à pas de loup. Elle alla jeter un œil dans la chambre d’Aiko qui dormait à poings fermés, vérifia les passages secrets qui menaient à sa chambre ainsi que les mécanismes de ses pièges et ne put que constater que tout était en ordre, tout sauf une chose…

- Tu as perdu tes lentilles ?, fit une voix amusée derrière elle.

Effrayée, elle fit un bond, son coeur tambourinant dans sa poitrine. Elle se retourna et trouva Ryo appuyé nonchalamment contre le mur. Il lui adressa un sourire moqueur.

- Alors ?, insista-t-il.
- Non… Je… J’ai cru entendre du bruit., se défendit-elle, morte de honte.
- Vraiment ? De quel genre ?, lui demanda-t-il, son sourire s’élargissant en entendant son mensonge.
- Je… Je ne sais pas bien.
- Ce ne serait pas le bruit de ton nez qui s’allonge ?, murmura-t-il à son oreille après s’être approché d’elle.

Elle se sentit frémir de tout son être.

- Si j’avais voulu rendre une visite nocturne à quelqu’un, j’aurais trouvé son lit vide parce qu’elle ne me cherchait pas au bon endroit., lui apprit-il.

Il déposa un baiser sur son front et la laissa rouge pivoine dans le couloir. Autant dire qu’elle eut du mal à retrouver le sommeil cette nuit-là, émue et excitée par ce qu’il lui avait dit.
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Dim 28 Mar - 18:35
Chapitre 21

Il le savait, pensa Ryo en conduisant, les mains crispées sur le volant. Il le savait : même les plus simples missions pouvaient tourner au vinaigre. Pourquoi donc aurait-il été étonné que celle-ci eut dérapé ? Il s’était confronté à l’une des plus violentes familles de Tokyo après tout, il avait refusé de leur livrer le témoin et avait réussi à la soustraire à plusieurs attaques. Aiko était saine et sauve, physiquement en tout cas, et devait témoigner le lendemain si elle ne craquait pas avant. Alors c’était normal qu’acculé, le clan s’en fut pris à sa seule faiblesse connue : Kaori. Pourtant, il avait tout fait pour la tenir éloignée et elle avait respecté ses consignes mais, voilà, ce n’était pas quelque chose qui intéressait le clan du Lotus Noir. Maintenant, elle était entre leurs mains.

Bien que soucieux, il avait bien dû la laisser aller faire les courses seule et, quand elle n’était pas rentrée au bout de deux heures, il ne se posa même pas la question. Quelques coups de fil plus tard, Aiko à l’abri avec Umibozu, il faisait le tour de ses indics du quartier proche de la supérette et apprit tout ce qu’il avait besoin de savoir : elle avait été enlevée avant même d’avoir mis un pied dans le magasin. Pourtant, elle s’était débattue comme une bougresse et avait même réussi à s’échapper mais elle était à pied et eux en voiture… accompagné d’un homme à moto qui l’avait poursuivie dans les ruelles. Le combat était inégal et elle avait faibli, logiquement.

Il avait déjà visité plusieurs lieux appartenant au Lotus Noir et il ne comptait pas s’arrêter avant de l’avoir retrouvée. Le hasard avait voulu que son système de localisation tomba en panne ce matin-là et il devait s’en remettre à des fouilles en règle pour la revoir. Il arrêta la voiture à une centaine de mètres de l’entrepôt et sortit de la voiture après avoir vérifié son arme, prêt à défier le monde pour retrouver sa femme.

Cela faisait maintenant plus d’une heure que Kaori était enfermée dans cette pièce. Elle avait eu le temps de récupérer de sa course-poursuite, même si elle n’aurait pas été contre un bain chaud pour détendre un peu plus ses muscles endoloris, et de déterminer les forces en présence au moins à son niveau. Repensant à toutes les idioties de Ryo, elle sentit la colère monter en elle et une massue apparut dans ses mains. D’un excellent mouvement de swing, elle éclata la porte en fer et put sortir de là.

- Ne reste qu’à trouver la sortie…, murmura-t-elle.

Elle ne s’attarda pas sur place, entendant des bruits de pas courant dans sa direction. Nul doute qu’ils avaient entendu l’énorme bruit de fracas… Elle s’enfuit de l’autre sens et s’engouffra dans une cage d’escalier sombre. Elle grimpa à toute allure et déboucha dans un couloir peu éclairé. Elle regarda rapidement de chaque côté puis partit sur sa gauche entendant les pas derrière elle. Elle tenta de tourner quelques poignées de porte et, lorsque l’une d’elles tourna enfin, elle pénétra dans la pièce, refermant discrètement derrière elle.

- Où est-ce que je suis tombée…, fit-elle effarée.

Elle sentit le rouge lui monter aux joues en voyant tout l’attirail que contenait la pièce. Il y avait des anneaux aux murs, des harnais, des masques, des fouets, ce qui devait faire office de lit recouvert de cuir noir et surtout toute une collection de sextoys.

- Ryo est un ange à côté…

A quelques kilomètres de là, le nettoyeur éternua et reprit son exploration.

Kaori observa les lieux, chercha une fenêtre qui n’existait pas et écouta à la porte. Se rendant compte qu’ils testaient toutes les poignées comme elle l’avait fait, elle chercha désespérément une cachette. Elle retint son souffle lorsque la porte s’ouvrit et que deux hommes entrèrent dans la pièce. Elle vit leur regard lubrique se poser sur les jouets et se tassa dans son coin quand ils fouillèrent la pièce des yeux.

- T’es déjà venu ici, toi ?, fit l’un.
- Non, mais je sais que beaucoup de femmes y sont passées et plus pour son plaisir à lui que le leur…, ricana l’autre.
- Ouais, paraît que c’est un sacré malade pour cela.

La nettoyeuse déglutit difficilement et les regarda finir leur inspection avant de ressortir. Quand ils furent suffisamment éloignés, elle quitta son placard en grimaçant. Elle s’était cachée derrière une tenue en cuir dont l’odeur laissait présager de son utilisation.

- Il y a vraiment des tarés sur Terre., maugréa-t-elle.

Prudemment, elle sortit de la pièce et partit dans la direction par laquelle elle était venue.

Ryo ressortit de l’entrepôt, contrarié. Elle n’était pas là et aucun des hommes ne savait où elle était. Il en eut ras la casquette de chercher à tout va et décida de s’adresser directement à Dieu plutôt qu’à ses saints. Il reprit la voiture et se dirigea sans plus attendre vers la villa du chef de clan. Il défonça la grille d’entrée et arrêta la mini dans un crissement de pneus devant l’entrée. L’heure n’était plus à la discrétion. Armé, il descendit de voiture et neutralisa les gardes qui arrivaient. Il pénétra dans l’immense demeure et, bravant les coups de feu, avança imperturbable dans le hall. Il désarma la plupart des hommes avant qu’ils n’eurent le temps de le toucher. Le champ étant libre, il avança jusqu’au salon, vide… Il continua sa progression dans la maison à la recherche du grand maître.

Kaori plongea dans une alcôve à l’abri d’un grand rideau juste à temps pour échapper au groupe d’hommes qui venait d’arriver. Dominant sa peur et tentant de contrôler les battements de son coeur, elle se recroquevilla derrière la tenture sombre et patienta. Elle sentit soudain tout son être se tendre et entendit ensuite les coups de feu résonner quelque part dans la maison. Ryo, pensa-t-elle. Il était là, il était venu la chercher. Il ne l’avait pas abandonnée, elle devait se battre pour le rejoindre.

Elle prit une profonde inspiration et passa la tête doucement derrière le rideau. Le chemin était libre. Elle sortit de sa cachette et avança le long du mur. Trouvant une nouvelle cage d’escaliers, elle l’emprunta et atterrit dans une autre partie de la maison. Elle réprima un cri de frustration et avança. Cet endroit était un vrai labyrinthe et, bien entendu, personne n’avait songé à laisser un plan en évidence pour les personnes qui chercheraient à le fuir… Elle tenta de se repérer au bruit des coups de feu mais les couloirs faisaient écho et elle n’y parvint pas. Elle continua donc de progresser à l’aveuglette.

Ces hommes commençaient à lui chauffer les sangs, pensa Ryo sombrement. A l’heure qu’il était, il, enfin surtout elle, aurait dû être au fond de son lit à rêver de lui, et lui d’elle d’ailleurs, et, au lieu de cela, il arpentait une maison immense sans aucune trace de sa partenaire. Essuyant un feu nourri, il emprunta les escaliers qui descendaient et atterrit dans une partie humide et vraisemblablement enterrée de la bâtisse. Il déambula prudemment dans les couloirs et tomba sur une porte éventrée. Il jeta un œil dans la pièce et se mit à sourire : une massue trônait à l’entrée.

- Je suis au moins au bon endroit. Reste à te retrouver, Sugar., murmura-t-il.

Des pas venant dans sa direction, il se glissa derrière la massue et laissa les hommes passer.

- Elle est montée., entendit-il.

Elle n’avait pas pu attendre qu’il vint la délivrer. Elle jouait les héroïnes et il croisa les doigts pour qu’elle n’en souffrit pas. Il voulait vraiment la retrouver vivante. Il suivit à distance le groupe et monta les escaliers sombres qu’il trouva.

Kaori déboucha dans une grande pièce illuminée de toutes parts. Elle fut soufflée par la beauté des lieux mais se reprit rapidement.

- Ne bouge pas de là ou on tire !, hurla un homme de l’autre côté de la pièce.

Surprise, elle recula d’un pas et se cogna contre un miroir. Déséquilibrée, elle attrapa le chandelier accroché au mur, tout en sentant son talon s’enfoncer dans le sol et le miroir pivota. Elle se retrouva dans un couloir obscur et commença à tâtonner pour trouver son chemin. Elle sentit sous ses doigts une forme dure et oblongue et la saisit, priant pour que ce ne fut pas l’une des petites fantaisies de la chambre qu’elle avait visitée plus tôt. Son pouce trouva un bouton qu’elle pressa, voyant avec soulagement de la lumière apparaître et éclairer les lieux. Ce n’était qu’une lampe torche. Elle aurait presque ri tant elle était nerveuse.

- L’un de vous sait comment on actionne ce panneau ?, entendit-elle, en plus des coups portés sur le miroir.

Elle ne s’attarda pas plus pour savoir lequel avait la réponse. Elle s’enfonça dans les ténèbres, emportant la deuxième lampe torche pour les priver de lumière. Elle n’avait aucune idée d’où elle allait atterrir mais elle n’avait pas vraiment d’autre choix que de continuer.

Ryo déboucha sur un couloir aux lourdes tentures rouge. Il sourit cyniquement à cette décoration luxueuse et guindée, se sachant dans la maison d’un truand notoire. Il poursuivit son chemin à l’affût du moindre bruit et n’eut d’autre choix que de pénétrer dans l’une des pièces quand il entendit un groupe d’hommes arriver. Il ne craignait pas de les affronter mais il ne voulait pas manquer de munitions et, contrairement aux massues de Kaori, il ne pouvait les faire apparaître à profusion. Il eut un léger sourire en ayant cette pensée, sourire qui s’élargit en imaginant la tête qu’elle aurait faite si elle était entrée dans cette pièce. Apparemment, le clan du Lotus Noir appréciait certains jeux sexuels… Il se plut à détailler ce qu’il trouva mais n’y vit personnellement aucun intérêt. Il ne trouvait aucun plaisir dans ces pratiques-là. Il avait d’autres choses à découvrir avec Kaori, certainement beaucoup plus enrichissantes.

Revenant à la réalité, il ressortit de la pièce et continua dans la direction qu’il avait prise initialement. Les couloirs semblaient dégagés et il entendait que ça remuait dans une autre direction. Malgré tout, son instinct lui disait de continuer et il avait confiance en son instinct.

Kaori vit soudain un filet de lumière passer sous une cloison et éteignit la lampe torche. Elle avança doucement jusqu’à la paroi et plaque l’oreille contre le panneau. Elle n’entendait aucun son particulier et se décida, après quelques hésitations, à sortir de sa cachette. Elle chercha comment faire bouger le panneau et vit un bouton dans le mur. Elle le poussa sans grande conviction et le panneau s’ouvrit. Prudemment, elle avança dans la pièce. Elle se trouvait dans une chambre immense, une chambre d’homme à en juger la décoration assez sombre. Un grand lit envahissait le centre de la pièce, faisant face à une bibliothèque débordant de livres en tous genres. Elle se tourna pour voir l’autre côté de la pièce et aperçut une fenêtre vers laquelle elle se dirigea. Grâce aux rayons de la lune, elle s’aperçut qu’elle était au deuxième étage mais aussi qu’elle ne pourrait pas sortir par là. Juste en dessous de la fenêtre, il y avait une serre : elle ferait beaucoup trop de bruit si elle passait au travers et risquerait de se blesser plus ou moins grièvement.

Il ne lui restait que deux possibilités : repartir d’où elle venait ou sortir par la porte. Elle se dirigea vers la porte mais fut stoppée par une main sur son bras, l’empoignant fermement.

- Mademoiselle Makimura… Vous avez décidé de passer un peu de bon temps avec moi ?

Elle se retourna et fit face au chef du Lotus Noir dont le regard noir la déshabillait. Elle déglutit face à son air sûr de lui. Si elle n’avait su qui il était, elle l’aurait certainement trouvé séduisant. A près de quarante-cinq ans, Nobuto Tanaka était un bel homme, bien bâti, ce qu’elle ne pouvait contester puisqu’il était uniquement vêtu d’une serviette autour des hanches. Il avait un regard pénétrant et une bouche aux lèvres pleines mais cela ne l’affecta pas car elle n’était attiré que par un homme et que celui-ci ne lui inspirait que mépris.

- Je n’ai pas l’habitude de mêler travail et plaisir mais, pour une jolie femme comme vous, je peux faire une exception., fit-il, un sourire carnassier aux lèvres.
- Vous ne me toucherez pas, sale pervers !, gronda Kaori.
- Moi pervers ? Vous me navrez, ma chère. Il est des plaisirs qui ne s’adressent qu’aux connaisseurs. Nous avons un peu de temps pour vous initier : vous saurez certainement en apprécier les subtilités., lui affirma-t-il.

Il s’approcha d’elle, faisant tomber sa serviette, et elle détourna les yeux, gênée. Mal lui en prit car il put ainsi la surprendre et l’attraper, la plaquant contre lui. Elle se débattit contre lui et détourna la tête à plusieurs reprises lorsqu’il tenta de l’embrasser. Elle finit par avoir suffisamment d’espace pour lui envoyer un coup de genou dans l’entrejambe, ce qui le fit se plier en deux. Elle s’échappa alors de son emprise et courut jusqu’à la porte. Celle-ci lui résista, ce qui la déstabilisa. Elle vit la clef et chercha à la tourner quand elle fut plaquée contre le panneau de bois brutalement. Prise au piège entre l’homme et l’obstacle, elle ne put que subir l’assaut de ses mains sur son corps, tentant de rester calme pour pouvoir réfléchir et s’en sortir.

Sa main glissa le long de la porte et trouva la clef. Elle déverrouilla ainsi la porte : la prochaine fois, elle pourrait s’enfuir. Tanaka la retourna brutalement et se plaqua de nouveau contre elle, passant les doigts sous le tissu de ses vêtements provoquant un profond dégoût en elle. La contraignant, il la força à le suivre et la jeta sur le lit, la suivant de peu. Elle fut néanmoins rapide et l’envoya valser dans le décor en le poussant avec ses pieds. Il atterrit dans la bibliothèque. Elle n’attendit pas une seconde de plus et bondit sur ses pieds en direction de la porte. Elle tournait la poignée lorsqu’un coup de feu résonna et qu’un éclat de bois l’atteignit. Comme hypnotisée, elle fixa l’impact, signe que la balle était passée vraiment près d’elle.

- Maintenant, tu vas cesser de te battre et venir ici. Je vais te posséder avant de t’envoyer en enfer avec ton partenaire et votre cliente. Viens ici, dépêche-toi !, lui ordonna-t-il, le visage déformé par la colère.
- Arrête-toi là ! Mets ça, les mains dans ton dos., lui dit-il, lui envoyant une paire de menottes.

Elle hésita mais il pointa l’arme sur elle de nouveau et elle obtempéra, un nœud à l’estomac. Elle se retrouva donc les mains menottées dans le dos à la merci de ce pervers qui voulait la violer. Elle pria pour que Ryo arriva à temps et ce fut la seule chose qui l’empêcha de paniquer. Elle le vit avancer vers elle, un rictus de satisfaction aux lèvres et redressa soudain le menton. Elle le fixa du regard sans une once de peur.

- Je ne ferais pas un pas de plus si j’étais toi., lui conseilla-t-elle d’une voix calme et assurée.
- Ah oui vraiment ? Et pourquoi donc ?
- Parce qu’il va te tuer., répondit-elle.

Dans le couloir, Ryo avait entendu le coup de feu. Il ne savait pas pourquoi mais il était sûr que s’il retrouvait ce tireur, il retrouverait Kaori. Il ne lui fallut pas plus de deux minutes pour arriver et il entendit les dernières paroles de l’homme qui annonçait vouloir s’en prendre physiquement à elle. Son sang ne fit qu’un tour mais il se contrôla néanmoins. Il tourna doucement la poignée et sentit la porte s’ouvrir légèrement. Il jeta un œil sur la scène mais ne vit que le dos de la jeune femme et ses mains menottées. A l’ouïe, il détermina la position de Tanaka et il n’aurait qu’une marge très limitée de tir, encore fallait-il qu’elle bougea légèrement et la bonne partie du corps.

- La bonne blague… Qui il ? Le fantôme de l’opéra ?
- Non, lui. City Hunter., dit-elle calmement.
- Pose ton arme. C’est ce que tu as de mieux à faire., reprit-elle.

Il éclata de rire et releva son revolver.

- C’est toi qui vas mourir et lui après., rétorqua-t-il.
- Je t’aurais prévenu., murmura-t-elle.

Sans aucun doute, elle pencha la tête sur le côté et un coup de feu retentit. Elle sentit la balle passer à côté de son oreille, coupant quelques mèches de cheveux au passage, et la vit se loger dans la main de Tanaka, faisant voler son arme au loin. Celui-ci tomba à genoux par terre sous le coup de la douleur. Ryo attrapa Kaori par le bras et l’entraîna.

- Viens, ne traînons pas ici., l’enjoignit-il.

Elle le suivit sans mot dire, rassurée de le savoir à ses côtés. Il ne pouvait désormais plus rien lui arriver. Après avoir échappé encore à plusieurs tirs, ils finirent par sortir de la villa. Au loin, les sirènes de la police retentissaient, se faisant plus proches à chaque seconde qui passait.

- Le jour se lève, Ryo., murmura Kaori, ayant du mal à croire qu’autant de temps était passé.
- Oui. Ne traînons pas ici. Notre cliente nous attend., dit-il, l’aidant à grimper en voiture.

Ils quittèrent les lieux au moment où les véhicules tournaient dans la rue et prirent la route du Cat’s.

- Je suis désolé, Kaori. J’aurais dû mieux te protéger., murmura-t-il, se sentant coupable de ce qu’elle avait vécu.
- Tu n’as pas à t’en vouloir, Ryo. Je connais les risques et tu ne m’as pas laissé tomber., répondit-elle.
- Je voudrais pouvoir t’éviter ces peurs et ces dangers.
- Je n’ai pas eu peur. Je savais que tu viendrais me chercher.

Il la contempla un instant avant de se concentrer à nouveau sur la route. Ils finirent en silence et retrouvèrent bientôt Aiko au café. Umibozu débarrassa Kaori de ses menottes à son grand soulagement.

- Tu es sûre de ne pas vouloir les garder ? Ca pourrait nous servir plus tard., susurra Ryo à son oreille.
- Ah non ! J’ai vu assez de trucs dégoûtants là-bas pour toute une vie., s’exclama-t-elle, repensant à la fameuse pièce…
- Oh… alors toi aussi, tu l’as vue ? Envie d’expérimenter certaines choses, Kaori ?, la taquina-t-il.
- Aucune de celles-là en tous cas., marmonna-t-elle, rouge pivoine.

Il la prit dans ses bras et se mit à rire, bien vite suivie par sa partenaire, qui se sentait bien dans ses bras. Aiko arriva sur ces entrefaites et fut soulagée de retrouver Kaori, saine et sauve.

- Vous allez bien ?, s’inquiéta-t-elle.
- Oui, Aiko. Tout va bien. Et vous ?
- Je ne tiendrai pas le coup. Je suis morte de trouille., avoua-t-elle.
- Vous êtes tellement courageuse. Je m’en veux de ce qui vous est arrivé., ajouta-t-elle.
- Ne vous en voulez pas. Au contraire, servez-vous de tout cela pour puiser la force d’avancer. Allez témoigner ce matin. Je… nous serons dans la salle avec vous., lui affirma Kaori, jetant un œil sur Ryo qui acquiesça.
- Faites que tout cela n’ait pas servi à rien., lui demanda la nettoyeuse.

Aiko baissa les yeux et se mordit la lèvre. Après quelques secondes, elle releva les yeux.

- Vous avez raison. Je dois me montrer forte. Je vais témoigner., affirma-t-elle.
- C’est une sage décision. Miki, on peut prendre une douche avant d’aller au tribunal ?
- Une douche à deux ?, suggéra Ryo, rebondissant sur ses paroles.

La nettoyeuse sentit ses joues se teinter violemment et lui tapa sur l’épaule.

- Non !, s’écria-t-elle outrée.
- Dommage…, fit-il, s’éloignant en lui faisant un clin d’oeil.

Ryo prit sa douche en premier et laissa la place à sa partenaire. Pendant qu’elle se lavait, il raconta à Miki et Umibozu ce qu’il savait et notamment la scène qui avait eu lieu dans la chambre de Tanaka. Il achevait son récit lorsque Kaori parut et elle dut affronter les regards surpris et admiratifs de ses amis et cliente.

- C’est vrai, Kaori ? Tu savais que Ryo était là et ce que tu devais faire ?, lui demanda Aiko.
- C’est à dire que…, bafouilla la nettoyeuse.
- C’était vraiment risqué de simplement pencher la tête pour lui offrir une fenêtre de tir., renchérit Miki, un léger sourire en coin.

Kaori observa Ryo qui soutint son regard. Oui, ce qu’elle avait fait était certainement risqué pour toute autre personne mais ils n’étaient pas n’importe qui. Il existait ce lien particulier entre eux, cette espèce de télépathie qui faisaient qu’ils anticipaient la plupart de leurs mouvements et pensées dans le domaine professionnel. Elle avait senti sa présence, défini sa position et la trajectoire de sa balle et su ce qu’elle devait faire. Ca avait été instinctif comme l’avait été le fait qu’elle était sûre qu’il viendrait la chercher… comme avant…

Dans l’action, ils n’étaient pas deux êtres, deux individualités. Ils ne formaient qu’un de corps et d’esprit. C’était ce qui rendait leur partenariat si performant professionnellement. C’était aussi ce qui leur manquait personnellement… mais ce n’était pas la préoccupation du jour.

- Non, ce n’était pas risqué. Ca ne peut pas l’être lorsqu’on sait pouvoir confier sa vie à quelqu’un les yeux fermés., admit-elle, se sentant un peu plus légère.

Ryo la regarda et son coeur battit un peu plus fort à son aveu. C’était ce qu’il ressentait. Il avait su qu’elle saurait, qu’elle ferait le bon choix au bon moment. C’était inné entre eux. Il s’avança vers elle et posa une main sur sa joue, un regard chaud posé sur elle. Après quelques secondes de cet échange qui leur fit du bien à tous deux, il se tourna vers les autres personnes.

- Bon, si nous allions au tribunal maintenant. Allons montrer au Lotus Noir comment on se fait botter les fesses., fit-il sur un ton enjoué.

Tous approuvèrent et ils arrivèrent un quart d’heure plus tard dans le bâtiment, y retrouvant Saeko qui vit son témoin arriver bien en vie avec soulagement, bien en vie et détendue, ce qui la surprit plus. Elle lança un regard interrogateur à Ryo qui posa une main sur l’épaule de Kaori.

- C’est l’effet City Hunter, des muscles et un coeur., fit Ryo.
- N’est-ce pas, partenaire ?

Kaori le regarda, incrédule, puis son sourire s’élargit et elle acquiesça, heureuse.
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Lun 29 Mar - 19:31
Chapitre 22

Après avoir fait son tour jusqu’à la gare pour voir s’il y avait des messages, Kaori rentra à l’appartement sans travail mais le coeur léger. Ils avaient enchaîné quelques missions et elle n’était pas contre un jour de repos. Elle croisa dans le salon Ryo qui finissait de remonter son arme après l’avoir nettoyée. C’était encore inhabituel pour elle de le trouver debout à cette heure mais c’était agréable. Il n’y avait que les matins suivant les soirs où il rentrait tard qu’il se levait plus tard et, ces matins-là, elle avait pris le pli d’aller le réveiller comme elle le faisait avant, la massue en moins.

- Alors ?, lui demanda-t-il.
- Pas de message. On est libres aujourd’hui., l’informa-t-elle.
- Enfin…, lâcha-t-il, refermant le barillet de son arme et la rangeant dans son holster.
- Tu files enfiler des vêtements plus confortables et des baskets. Prends un pull., lui dit-il.

Elle cligna des yeux un moment sans bouger, comme si elle n’avait pas compris.

- Allez, Kaori. Dépêche-toi., la rabroua-t-il gentiment.
- Mais… Mais pourquoi ?
- Leçon de confiance, ma grande. Fais ce que je te demande, s’il te plaît.

Elle hésita une seconde puis s’exécuta. Il sortit deux sac à dos du placard et téléphona à Mick.

- Tu te souviens du service que je t’avais demandé ?, lui demanda-t-il.
- Oui.
- On peut partir de suite ?
- Le temps de mettre Samuel dans la voiture. Rejoignez-moi en bas.

Il raccrocha quand Kaori descendit. Il eut le loisir d’admirer sa fine silhouette et eut du mal à en détacher les yeux.

- Alors que fait-on ?, l’interrogea-t-elle.
- On parfait ton entraînement., lui répondit-il mystérieux.

Il la poussa vers la sortie et referma la porte derrière eux. Il la retint quand elle se dirigea vers le garage.

- Ce n’est pas la peine : je nous ai trouvé un chauffeur.

Voyant qu’il voulait la surprendre, elle ne dit rien et le suivit. Ils retrouvèrent Mick devant la porte. Kaori monta à l’arrière à côté de Samuel. Ryo se tourna vers elle, soucieux.

- Tu veux venir devant ?
- Non, ça va aller., répondit-elle, une lueur triste dans les yeux.
- Tu es sûre, Kaori ?, s’inquiéta-t-il.

Elle leva les yeux vers lui et essuya une larme qui perlait. C’était une semaine particulière pour eux deux, la semaine où Eirin aurait dû naître.

- Oui, ça va aller., répéta-t-elle sans trembler.
- Merci d’avoir fait vite, Mick. J’espère que ça ne perturbe pas trop Samuel., le remercia Ryo.
- Tu parles, il est toujours partant pour une balade en voiture. En plus, il est en bonne compagnie, le chanceux., plaisanta-t-il, faisant un clin d’oeil à Kaori.
- Il dort comme un bon., murmura-t-elle, admirative.

Bien qu’il lui fit penser à sa fille, elle ne pouvait s’empêcher de l’observer et, une fois le premier élan de tristesse passé, elle sentit la tendresse poindre. Elle caressa la joue du bébé et le vit suçoter l’air. Ryo l’observait anxieux par le miroir passager sous l’oeil attentif de Mick. Il fut soulagé de la voir sourire légèrement. Leurs blessures cicatrisaient doucement. Ils s’étaient rapprochés, avaient repris leur collaboration professionnelle pleinement mais n’étaient pas encore un couple à proprement parler.

- Kazue est à la maison ?, demanda Kaori.
- Oui. Elle va profiter de notre absence pour se reposer un peu. Ca ne lui fera pas de mal.

Ils discutèrent de tout et de rien pendant tout le temps du trajet. Deux heures plus tard, il les laissa dans le parc national de Chichibu Tama Kai.

- Je reviens dans deux jours à seize heures comme prévu., leur dit-il avant de reprendre la route.

Kaori le regarda partir puis se tourna vers Ryo.

- Tu m’expliques ce qu’on fait là maintenant ?, l’interrogea-t-elle.
- On vient faire un tour., répondit-il, un léger sourire aux lèvres en s’éloignant en direction de la forêt.
- Pourquoi as-tu dit qu’on venait parfaire mon entraînement alors ?, lui demanda-t-elle, le rejoignant.
- Stage de survie… Tiens. Tu ne peux te débrouiller qu’avec ce que tu as là dedans et ce que tu trouveras dans la nature. Interdiction d’user de tes massues., lui apprit-il.

Elle mit le sac sur ses épaules, le trouvant assez léger.

- Très bien. On dort où ?
- Ici…, répondit-il en désignant la forêt.
- Ok., murmura-t-elle.

Elle le suivit dans la forêt. Elle ne s’opposa même pas quand il quitta les sentiers balisés pour s’enfoncer dans la végétation. Ils marchèrent ainsi pendant plus d’une heure, silencieux. D’abord anxieuse de savoir à quoi elle devait s’attendre, Kaori finit par se laisser imprégner par les lieux et se détendit un peu. Elle sentit soudain une main la saisir par le bras et se retrouva coincée contre un arbre, un bras musclé en travers de la gorge.

- Leçon numéro un : toujours te tenir sur tes gardes même en pleine nature…, lui dit-il.
- D’accord…, murmura-t-elle, surprise.

Elle se sentait fébrile, prise en faute. Elle savait qu’elle devait toujours être vigilante mais elle s’était reposée sur lui comme d’habitude.

- Je tiens à toi. Je ne veux pas te perdre., lui murmura-t-il.
- Moi non plus. Je ferai plus attention., lui promit-elle.

Il l’observa encore quelques secondes puis s’éloigna, reprenant le chemin. Elle le suivit et le rejoignit, se mettant à sa hauteur et laissant son regard scruter les environs. Quand il tenta de la surprendre à nouveau, elle le vit agir et para son attaque puis prit ses jambes à son cou pour mettre de la distance entre elle et lui. Elle n’était pas de poids à lutter contre lui, donc elle faisait ce qu’elle pouvait : elle gagnait du temps en s’enfuyant. Elle l’attendit quelques mètres plus loin, prête à réagir s’il lui jouait un nouveau tour, mais il attrapa juste sa main et la porta à ses lèvres.

- Bien joué, Sugar. Tu as bien réagi., la félicita-t-il.
- Je ne serai jamais à ton niveau, Ryo., soupira-t-elle.
- Peut-être pas, mais tu es une excellente partenaire. N’en doute pas. Tu me comprends, Kaori. On se fait confiance, non ?
- Oui., répondit-elle.
- Cesse de te dévaloriser. Allez viens, on n’en a pas fini pour aujourd’hui.

Elle le suivit sans mot dire et ils arrivèrent dans une partie un peu plus dégagée. Il s’arrêta et examina la zone puis posa son sac à dos.

- Tu vas apprendre à voir sans tes yeux. Je vais te bander les yeux et me cacher. Tu devras me retrouver en utilisant tes autres sens.
- Mais… ce n’est pas possible…, se crispa-t-elle.
- Si, fais-toi confiance.

Il passa derrière elle et lui masqua la vue. Quand il eut fini de nouer le bandeau, il la retourna vers lui et l’attira dans ses bras.

- Qui sait peut-être qu’un jour, on utilisera ce bandeau pour un autre jeu…, susurra-t-il à son oreille.

Elle se sentit frémir et se laissa guider quand il la fit tourner pour lui faire perdre ses repères. Il la lâcha et s’éloigna silencieusement. Elle attendit quelques minutes, se demandant s’il lui enverrait un signal, puis décida d’avancer. Elle marcha prudemment et se cogna dans un arbre. Elle se retourna et progressa dans l’autre direction mais se prit les pieds dans des racines et tomba par terre. Elle resta quelques secondes au sol. Elle retint un grognement de frustration et se releva. Elle y arriverait, elle le retrouverait. Que lui avait-il dit déjà ? Elle devait apprendre à voir sans ses yeux.

De là où il était, il pouvait la voir. Il grimaça quand elle tomba et dut se retenir pour ne pas aller l’aider. Il se demanda à quoi elle pensait alors qu’elle restait immobile. Il se perdit dans ses pensées, observant la silhouette de sa partenaire, silhouette très agréable au demeurant, surtout nimbée par la lumière du soleil qui filtrait au travers des arbres. Il se prit à rêver de l’odeur de sa peau, de la douceur de ses lèvres et de ses caresses, de la chaleur de ses bras. Il se demanda ce qu’elle aimait, ce qui la ferait décoller et sentit son meilleur ami se manifester.

- Tout doux…, murmura-t-il, tentant de réajuster son pantalon discrètement.

Kaori sentit soudain une certaine chaleur l’envahir et se dirigea vers la source lentement. Elle reconnaîtrait cette sensation entre mille. Elle allait réussir…

Quand il releva le regard, Ryo fut surpris de ne plus voir sa partenaire. Il la chercha et sentit une main se poser sur son épaule.

- Trouvé., fit-elle, fière d’elle.
- Bravo, bien joué., répondit-il.
- Tu te caches mieux d’habitude. A quoi tu pensais ?, l’interrogea-t-elle.
- Moi ? A rien., mentit-il, mal à l’aise.
- A d’autres…, lâcha-t-elle, le regardant comme droit dans les yeux malgré le bandeau.
- A ce qui te plairait sexuellement., avoua-t-il, se préparant à savourer le spectacle.

Elle regarda dans sa direction, interdite un instant, puis se mit à rougir furieusement. De la vapeur sortit même de ses oreilles. Il se mit à rire et la prit dans ses bras. Elle se laissa faire malgré la honte et profita de ce moment de tendresse. Elle sentit ses doigts dans ses cheveux et le bandeau tomba, lui découvrant la vue.

- Allez viens. On va trouver un endroit où passer la nuit., lui dit-il.
- Tu étais vraiment sérieux ? On va dormir dans la forêt ?
- Oui, à la belle étoile., confirma-t-il en tendant la main vers le ciel qui noircissait.

Il sentit une goutte d’eau tomber sur sa main et la regarda, surpris. Malgré la situation, Kaori ne put s’empêcher de sourire.

- Tu n’as pas regardé la météo avant de partir ?, l’interrogea-t-elle.
- Non, pas vraiment. La décision a été un peu soudaine., dit-il alors que la pluie s’accentuait.
- C’est vrai. Si on s’enfonçait dans la forêt, on serait un peu plus à couvert, non ?, proposa-t-elle.

Il acquiesça et lui tendit la main. Elle la saisit et ils partirent. Ils confectionnèrent un abri de fortune et s’y réfugièrent assis l’un à côté de l’autre. Lorsque la pluie se calma enfin, ils trouvèrent quelques baies et fruits à grignoter avant de se coucher.

Le matin les trouva enlacés et ils se réveillèrent légèrement désorientés. Ils se regardèrent un instant puis Kaori s’écarta, les joues en feu, ayant senti quelque chose de dur et chaud contre sa cuisse.

- Désolé, je… je ne contrôle pas tout…, s’excusa-t-il.
- Ce… ce n’est pas grave. J’ai… J’ai été surprise., bafouilla-t-elle.
- Je… Je dois… enfin…, fit-elle, gênée.
- Je ne regarderai pas.

Elle se leva, rajustant son jean, et s’éloigna d’une dizaine de mètres. Elle revint quelques minutes plus tard et soupira.

- Pas de café…, murmura-t-elle.
- Non. Tiens, avale cela. Après on reprend la route.

Elle prit les quelques fruits et les avala, affamée.

- Demain, quand on rentre, on s’arrêtera chez le traiteur., lui dit-elle.
- Ca devrait être mon idée cela, non ?, la taquina-t-il.
- J’ai faim., fit-elle.
- Je peux m’occuper de toi si tu veux. J’ai de quoi te faire oublier…, lui susurra-t-il, l’attirant dans ses bras.

Il chercha ses lèvres mais se retrouva les quatre fers en l’air, surpris.

- Mais pourquoi ?, gémit-il.
- Ce n’était pas un test ?, s’étonna-t-elle.
- Ben non… Je voulais juste t’embrasser.

Elle le regarda surprise puis se mit à rire de bon coeur. Elle lui tendit la main et l’aida à se relever. Ils s’observèrent un moment puis reprirent leur chemin. Après deux heures de marche, ils firent face à un paroi rocheuse d’une dizaine de mètres de haut.

- Tu me fais confiance ?, lui demanda-t-il.
- Tu le sais bien., répondit-elle comme une évidence.
- Très bien.

Il ressortit de sa poche le bandeau noir et le tendit devant ses yeux.

- Tu dois vraiment avoir un fantasme de domination…, pipa-t-elle, anxieuse.
- Non, on va grimper la paroi tous les deux, à mains nues, sans rappel. C’est moi qui te guiderai.
- Ryo…, l’interpela-t-elle.

Elle avait beau lui faire confiance, c’était vraiment dangereux.

- Aie confiance.

Elle plongea dans son regard et y puisa sa force et son courage. Elle finit par acquiescer et il fixa le bandeau. Il la guida jusqu’à la paroi, posant les mains sur ses épaules.

- Je te dirai quand te déplacer, quel membre et où. Je serai derrière toi, tu n’auras rien à craindre.
- D’accord. Je… J’ai peur, Ryo.
- C’est bien de l’admettre. Surmonte-la. Tout se passera bien et je te promets que la vue en vaut la peine., lui affirma-t-il.

Elle chercha et posa la main sur la paroi rocheuse. Elle était prête. Il la guida patiemment et ils commencèrent à monter doucement.

- Tu t’en sors bien, Kaori. Tu n’es pas fatiguée ?
- Ca va. Ca glisse, Ryo. Fais attention.

Il sourit à sa prévenance et recommença à la guider. Arrivés à mi-hauteur, Ryo sentit son pied déraper et lâcha prise quelques instants avant de se rattraper. Il grimaça à la pointe de douleur qui surgit lorsque ses articulations furent contraintes mais retint le grognement pour ne pas la faire paniquer. Entendant le bruit d’une glissade, Kaori s’immobilisa anxieuse.

- Ryo ?, l’appela-t-elle, assurant sa prise.
- Ryo !
- Ca va. Ne bouge pas. J’ai glissé mais je vais bien. Pose ton pied droit sur la roche qui est juste au-dessus de là où tu es, à deux heures., lui dit-il.
- Tu trouveras une roche pour ta main gauche juste au dessus, oui, c’est ça. On a encore trois mètres à faire et on sera arrivés.

Ils avancèrent et bientôt ils arrivèrent au sommet. Kaori attendit patiemment qu’il défit le bandeau et découvrit avec lui le panorama. Ils n’étaient pas au point culminant mais étaient entourés par les huit sommets du parc. C’était beau et reposant. Les arbres se paraient de leurs atours printaniers.

- C’est magnifique, Ryo., murmura-t-elle.
- Je suis heureux que ça te plaise.

Ils se regardèrent un moment, attirés l’un par l’autre, puis se détournèrent vers le paysage, intimidés. Ils reprirent la route et, vers la fin d’après-midi, trouvèrent un cours d’eau. Ryo enseigna à sa partenaire les rudiments de la pêche et l’activité tourna à la rigolade, les deux nettoyeurs finissant trempés. Malgré leurs déboires, ils attrapèrent quelques poissons qu’ils firent griller sur un feu de bois et eurent un dîner un peu plus copieux que leurs deux derniers repas. Dès qu’ils eurent finis, ils éteignirent le feu pour ne pas se faire repérer et éviter tout risque d’incendie et se couchèrent l’un face à l’autre. Ils s’observèrent un long moment avant de se rapprocher et de finir l’un contre l’autre, certainement pour lutter contre l’air fraîchissant de la nuit...

Le lendemain matin, Ryo se réveilla seul et fut étonné et quelque peu inquiet. Quelques minutes plus tard, Kaori apparut avec des fruits dans les mains et les posa devant lui.

- Je voulais te remercier pour cette escapade. Même si c’était dans le cadre de l’entraînement, ça m’a fait beaucoup de bien de partager cela avec toi.
- A moi aussi, ma douce., dit-il, caressant sa joue.

Il la fixa un moment, se demandant comment une belle personne comme elle pouvait être tombée amoureuse de lui, comment elle avait pu rester aussi longtemps malgré tout le mal qu’il lui avait fait, et il sentit la culpabilité revenir. Il la lâcha et se leva, rangeant ses affaires.

- On devrait y aller. Nous avons encore quelques heures de route à faire.

Elle le fixa sans comprendre : pourquoi était-il soudain devenu froid alors que ce moment avait été particulièrement tendre quelques secondes auparavant ? La réponse sembla jaillir tel un pantin de sa boîte en le voyant éviter son regard et lui tourner le dos délibérément. Son air sombre et la lueur de ses yeux quand il leva enfin le visage vers elle un quart de seconde pour lui dire qu’ils partaient confirmèrent ses doutes. Comment devait-elle réagir ? Quel était le meilleur moyen pour le rassurer ? Elle en avait une petite idée mais était-elle prête à le faire ?

Ils marchèrent silencieusement pendant plusieurs heures, presque sans s’arrêter, et finirent par retrouver Mick à un autre accès du parc.

- Alors cette promenade ?, les interrogea-t-il.
- Rassérénant., répondit Kaori, heureuse de savoir qu’elle retrouverait bientôt sa maison et sa douche.

Mick la regarda, un peu surpris, puis se tourna vers Ryo.

- Elle a fait la balade que tu avais prévue ou vous avez cueilli des champignons ?, l’interrogea-t-il.
- On a suivi le programme., lui répondit-il simplement, pensif.
- Et ?
- Et quoi ?, s’agaça le nettoyeur.
- Ca a porté ses fruits ?
- Oui.

Ryo n’attendit pas plus longtemps et grimpa en voiture à l’arrière. Il avait besoin d’être un peu seul et de retrouver son appartement. Il avait besoin de réfléchir, de prendre du recul sur toute la situation.

- Qu’est-ce qu’il a ? Vous vous êtes disputés ?, s’inquiéta Mick, regardant Kaori froncer les sourcils.
- Non, pas du tout. La fatigue doit jouer. Rentrons. J’éclaircirai tout cela à la maison.

Ils reprirent donc la route de Shinjuku et, deux heures plus tard, Mick les laissa devant la porte de l’immeuble. Ils retrouvèrent leur appartement avec contentement et allèrent chacun leur tour se doucher et changer. Le soir tombait quand Kaori vit Ryo redescendre après sa douche.

- On pourrait aller dîner dehors, non ? Le frigo est vide.
- Si tu veux.
- J’aimerais aller voir Eirin avant. Tu veux venir avec moi ?, lui proposa-t-elle.

Il l’observa un moment puis hocha la tête. Ils partirent donc tous deux jusqu’au cimetière. Ils se tenaient côte à côte devant la stèle, pensifs, quand Kaori se tourna vers lui et prit sa main. Elle se sentait fébrile mais, malgré tout, ne recula pas.

- Ryo…, murmura-t-elle.
- Regarde-moi, s’il te plaît.

Il lutta mais finit par s’exécuter. Il se sentit un peu mieux en faisant face à son regard chaleureux. Il n’avait cessé de ressasser ses péchés de la journée et la culpabilité l’avait rongé petit à petit jusqu’à l’ébranler. Elle posa sa main douce et chaude sur sa joue.

- Merci pour tout ce que tu as fait depuis que je suis revenue. Merci pour ta patience et ton abnégation. Tu es un homme bien, Ryo.
- Je t’ai fait du mal., objecta-t-il.
- Tu as fait des erreurs, comme j’en ai faites. Ryo, oublie tout cela. Je tire un trait sur le passé. Je veux aller de l’avant, pas que professionnellement., lui dit-elle, d’un ton serein.
- Kaori…, souffla-t-il, surpris.
- Je te pardonne.

Il vit deux larmes rouler sur ses joues mais, à la lueur de ses yeux, ce n’était pas de la tristesse, plutôt du soulagement. Il les essuya puis l’attira dans ses bras, la serrant contre lui. Elle se lova avec plaisir sur son torse et écouta son coeur battre la chamade. Elle se sentait sereine et en sécurité.

Au bout de quelques minutes, elle leva le visage vers lui et, croisant son regard aimant sur elle, un sourire fit son apparition. Elle se mit sur la pointe des pieds et posa les lèvres sur les siennes. D’abord étonné par son geste, Ryo laissa sa main remonter jusqu’à sa nuque puis répondit à son appel avec tous les sentiments qu’elle lui inspirait.

- Je t’aime., murmura-t-elle, lorsqu’ils se séparèrent.

Le coeur du nettoyeur aurait pu exploser à cet aveu mais il battit calmement comme rassuré, protégé par cet amour qui l’entourait.

- Moi aussi. Il m’aura fallu du temps pour te le dire mais beaucoup moins pour le savoir.

Main dans la main, ils repartirent du cimetière plongé dans le noir, le coeur léger.
avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Mar 30 Mar - 23:01
Chapitre 23

- Joyeux anniversaire, Ryo.

Kaori se pencha et posa les lèvres sur celles de l’homme qu’elle aimait. Encore allongé dans son lit, peinant à se réveiller après la nuit agitée qu’il avait eue, il l’enlaça et l’attira contre lui. Elle se laissa faire et se blottit contre lui, consciente qu’elle aurait pu le perdre dans le duel qu’il avait dû relever.

- J’ai eu peur, Ryo., lui avoua-t-elle.
- Moi aussi mais j’avais la meilleure raison de rentrer., lui affirma-t-il.

Elle leva un regard interrogateur vers lui et rougit face au regard chaud qu’il posa sur elle.

- A vrai dire, deux même. Je me suis promis de ne plus te faire pleurer.
- Et la deuxième ?
- J’ai très envie de faire mokkori avec toi., répondit-il, un sourire de chenapan aux lèvres.

Elle vira un peu plus au rouge. Ce n’était pas la première fois depuis deux semaines qu’il lui en parlait mais elle avait encore besoin d’un peu de temps pour cette étape-là et il avait dû le sentir car il ne pressait jamais le sujet plus loin. Il l’observa quelques instants de plus et déposa un baiser sur son front, poussant sa tête contre lui. Elle se laissa aller à ce moment de tendresse puis, au bout d’un moment, elle se releva.

- Je dois aller à la gare., s’excusa-t-elle.
- Si tu peux m’attendre, je viens avec toi., lui proposa-t-il.
- Rien ne t’y oblige.
- Je sais mais j’en ai envie.
- D’accord. Je vais faire un peu de ménage en t’attendant.

Il se dépêcha de déjeuner et de se préparer et ils partirent à la gare. Quand il commença à regarder les jolies jeunes femmes qu’il croisait, elle sentit l’appréhension monter. Allait-il repartir en mode pervers et sauter sur tous les décolletés et jupons, voler des sous-vêtements et se prendre des claques et sacs à main en pleine figure ? Elle ne le supporterait pas. Elle l’avait dit : elle n’utiliserait plus sa massue. Elle sentit soudain ses doigts frôler sa main, ce qui la tira de ses pensées. Comme s’il lisait en elle, il lui adressa un petit clin d’oeil complice qui la rassura. La foule se densifiant, il plaça sa main dans le bas de son dos comme s’il la guidait. Elle se sentait bien. Elle ne s’attendait pas à des balades dans Tokyo main dans la main, à des baisers en public ou de grandes démonstrations. Leur métier ne le leur permettait pas et Ryo n’était pas ce genre d’homme malgré les efforts qu’il avait déjà faits. Ces petits gestes, aussi discrets furent-ils, lui suffisaient amplement.

Ils arrivèrent à la gare où le tableau était vide de messages. Ils firent demi-tour et se dirigèrent vers la sortie. La main toujours posée dans son dos, il la guida vers le parc.

- Mais…
- Nous ne sommes pas pressés, non ?
- Je dois faire les courses., objecta-t-elle.
- C’est mon anniversaire et je veux aller faire un tour au parc avec toi., contra-t-il, le regard déterminé.
- Si c’est pour ton anniversaire, je ne peux pas m’y opposer alors., sourit-elle.
- Tout à fait.

Ils se dirigèrent donc vers le jardin public et y passèrent une bonne heure, déambulant dans les allées qui se paraient des couleurs blanche et rose des fleurs de cerisier. Lui faisant signe, il l’entraîna dans un recoin un peu à l’écart. Elle le suivit, cherchant du regard ce qu’il voulait lui montrer. Elle connaissait pourtant bien le lieu pour y avoir ressasser ses pensées sombres pendant des années mais peut-être avait-elle manqué quelque chose… Elle fut soudain tirée par le bras et se retrouva coincée contre un arbre, des lèvres gourmandes dévorant les siennes. Elle se laissa gagner par la sensualité du moment et passa les bras autour du cou de son homme qui se pressa un peu plus contre elle.

Manquant d’air, il s’écarta d’elle, les yeux brillant d’un éclat chaud, et caressa ses lèvres du pouce. Il savait qu’il prenait un risque en s’affichant ainsi en public mais ce recoin était peu fréquenté et il avait vraiment eu envie de goûter à sa belle sans attendre d’être rentré. Sentant le désir monter en lui, il s’écarta à regret car il avait bien compris que ce n’était pas encore le moment pour eux d’aller plus loin.

- Si on reprenait la route ?, proposa-t-il.

Elle acquiesça, encore retournée par ce baiser passionné. Ils s’arrêtèrent au magasin pour faire quelques courses puis ils rentrèrent chez eux. Kaori confectionna pour le soir un gâteau sur lequel elle posa une bougie qu’il souffla avec plaisir. Ils passèrent la soirée ensemble tranquillement à discuter de tout et de rien, s’apercevant qu’au final, malgré sept ans passés sous le même toit, ils n’avaient que peu pris le temps de discuter librement. Kaori parla de son frère quand il était plus jeune, faisant découvrir à Ryo une autre facette de son ami, un peu moins blasée, beaucoup plus idéaliste. Il comprit ce qui l’avait poussé à intégrer les rangs de la police, bien loin de la simple admiration que pouvait avoir un fils pour son père, ce qui au final l’avait aussi fait décider de démissionner au-delà de l’échec de sa dernière mission.

Prenant sur lui, d’habitude si secret et peu enclin aux confidences, il lui parla de sa vie aux Etats-Unis avec Mick, des quatre cents coups qu’ils avaient commis, des missions qu’ils avaient eues, des personnes qu’il avait pu rencontrer en plus de celles qu’elle avait découvertes par le plus grand des hasards. C’était un grand moment pour Kaori qui entendait et comprenait au-delà des mots l’homme qui se construisait au sortir de la guerre et de l’épreuve qu’il avait dû endurer avec la poussière d’ange. Il avait été soldat depuis sa plus tendre enfance et avait dû trouver les armes pour vivre dans un monde en paix. L’épreuve n’avait pas été facile mais il avait réussi. Il aurait pu rester dans le côté obscur mais il avait trouvé le chemin de la lumière et, même si ce qu’il faisait n’était pas toujours légal, il oeuvrait pour le bien du plus grand nombre, bien loin de l’éducation qu’il avait reçue.

- Tu es un homme bien, Ryo., murmura-t-elle, posant une main sur sa joue.
- Tu plaisantes ?, répliqua-t-il, gêné.
- J’ai tué des hommes, Kaori.
- Et tu en as sauvé combien d’autres ? Combien de réseau de drogues ou de trafic as-tu contribué à démanteler quand tu ne l’as pas fait seul ? Combien de personnes as-tu sauvé des griffes d’un assassin ?

Il baissa les yeux, ne se sentant pas à la hauteur de l’admiration qu’elle lui vouait. Elle le força à relever le visage et posa ses lèvres sur les siennes, l’embrassant avec douceur et amour.

- Tu m’as sauvée à de multiples reprises, Ryo. Sans toi, je ne serais plus là., murmura-t-elle, plongeant son regard dans le sien.
- Sans moi, ta vie serait bien moins dangereuse et parsemée de douleur., la contra-t-il.
- Sans toi, ma vie serait terne et froide. Je n’aurais pas trouvé mon âme sœur.

Elle le bâillonna à nouveau de ses lèvres et il entoura sa taille de ses bras l’attirant à lui avant de les allonger sur le canapé. Ils s’embrassèrent ainsi pendant un long moment, entrecoupant les baisers de regards chauds et amoureux. Ne sentant pas les mains de sa compagne s’enhardir, le nettoyeur garda les siennes sagement posées dans le bas de son dos malgré l’envie pressante de partir à la découverte de son corps. Tard dans la soirée, ils décidèrent enfin d’aller se coucher et chacun regagna sa chambre avec une sensation de manque qui ne faisait que croître au fil des jours.

Cinq jours plus tard, les deux amoureux se rendirent ensemble visiter leurs parents : cela faisait huit ans ce jour-là que Hideyuki était décédé. Kaori fêtait ses vingt-huit ans également. Silencieusement, elle déposa deux bouquets de fleurs, l’un blanc pour son frère, l’autre rose pâle pour leur fille, et elle se recueillit un moment, la présence de Ryo lui apportant du réconfort. Les années passaient tarissant les larmes mais la douleur pouvait revenir aussi vivace qu’au premier jour, d’autant plus que cette année, un autre être cher avait rejoint cet emplacement. Bien qu’ils furent dans un lieu public, Ryo passa les bras autour de ses épaules et la serra contre lui, le torse pressé contre son dos.

- Ils me manquent tous les deux., avoua-t-il.
- A moi aussi., murmura-t-elle, s’accrochant à ses avant-bras.

Ils restèrent ainsi un long moment avant de prendre le chemin du retour. Ryo monta sans attendre fumer une cigarette sur le toit, ressentant le besoin de reprendre le contrôle de ses émotions, et laissa Kaori seule. Après avoir erré dans l’appartement, elle se retrouva devant la porte de la chambre de bébé. Elle esquissa un geste de recul puis, finalement, entra dans la pièce. Rien n’avait bougé depuis la dernière fois. Seule la poussière sur les meubles attestait du temps qui était passé. Elle attrapa la gigoteuse et traça les contours de l’ourson, émue. Elle la garda dans ses mains et fit le tour de la pièce lentement, ouvrant les commode et armoire, s’imaginant avec leur fille dans cette pièce et se retrouva assise, sans s’en rendre réellement compte, dans le fauteuil que Ryo avait installé, certainement pour les fois où il faudrait nourrir le bébé en pleine nuit. Son coeur se serra et elle dut faire un effort intense pour ne pas pleurer.

- Je me demandais où tu étais…, entendit-elle soudain.

Ryo était à la porte et la regardait, cherchant à discerner la tendance de son humeur. Il approcha d’elle et caressa son visage du bout des doigts. Elle les saisit instinctivement et posa sa joue dessus, fermant les yeux, profitant de sa chaleur.

- Il serait peut-être temps de débarrasser la pièce, non ?, murmura-t-elle d’une voix tremblante.

C’était dur de penser à cela mais ils devaient avancer. Garder des souvenirs comme celui-ci ne les aideraient pas mais affronter la réalité de leur perte leur serait certainement bénéfique. Cette pièce ne devait pas être un mausolée pour les souvenirs d’une vie perdue.

- C’est vraiment ce que tu veux ?, lui demanda-t-il, le regard insondable.

Il n’en avait pas envie mais, si elle en avait vraiment besoin, il le ferait. Il avait d’autres projets pour l’avenir, des projets qui incluaient l’utilisation de cette pièce telle qu’elle était.

- Ce que je veux… je ne sais pas. Mais on doit avancer, non?, répondit-elle.
- Oui, c’est vrai., admit-il.

Ils restèrent un moment silencieux, Kaori serrant la gigoteuse dans ses mains, Ryo posant un regard pénétrant sur le mobile. Il avait rêvé veiller leur bébé cherchant le sommeil en regardant les images défiler.

- Je n’ai pas envie de vider la pièce. Elle est très bien comme elle est., dit-il soudain.
- On ne peut pas vivre dans les souvenirs éternellement., répondit-elle doucement.
- Je ne te parle pas de souvenir, Kaori. Je te parle d’avenir. J’aimerais qu’on ait un autre enfant… quand nous serons prêts.

Elle leva un regard surpris et douloureux sur lui. Elle avait compté sur le fait qu’il lui avait toujours dit que sa famille ne pouvait compter que deux personnes pour ne plus avoir à se poser la question de la maternité. Ryo voulait un enfant mais elle n’était pas sûre de le vouloir aussi. Enfin, c’était plus compliqué que cela : elle voulait un enfant mais ne voulait plus avoir à affronter la douleur qui va avec la perte. Or tomber enceinte de nouveau, c’était prendre le risque de devoir affronter tout cela une deuxième fois… Elle ne s’en sentait pas la force.

- Je ne te parle pas d’aujourd’hui ou demain. On a le temps mais je voudrais vraiment qu’on fonde une famille à deux., ajouta-t-il.
- Je ne sais pas si j’en ai envie., avoua-t-elle, baissant le regard.

Il avait vu la douleur voiler ses yeux, la peur également. Il savait que, comme pour son frère, elle faisait le deuil d’Eirin en toute discrétion depuis qu’elle avait passé sa période de colère, qu’elle n’était pas encore remise et que ça pouvait encore prendre du temps. Il serait là, il essaierait de rester patient mais il voulait continuer d’espérer.

- Tu as peur ?, lui demanda-t-il, et la vit acquiescer.
- Tu as peur de perdre le bébé à nouveau ?
- Oui., souffla-t-elle.
- C’était un accident, Kaori, regrettable, malheureux et douloureux mais ce n’était qu’un accident. Tu te souviens de ce qu’a dit le Professeur : elle était parfaite, elle aurait même pu naître prématurément et vivre si on avait détecté l’anévrisme plus tôt. Il n’y a pas de raison que ça se reproduise., tenta-t-il de la rassurer.
- Un accident qui peut se reproduire, Ryo., murmura-t-elle, les yeux luisant des larmes qu’elle retenait.
- Tout peut se reproduire, Kaori, même nous…, fit-il dans son élan.

Il se rendit soudain compte de ce que sous-entendait sa phrase sans le vouloir.

- Enfin je veux dire… même nous… enfin notre couple… peut se reproduire… enfin renaître, je veux dire., bafouilla-t-il, nerveux de sa réaction.

Elle l’observa un instant sans mot dire puis un sourire étira ses lèvres et elle éclata de rire. Il se laissa contaminer et se mit à rire également. Cela dura quelques minutes avant qu’ils ne réussirent enfin à se calmer. Kaori se leva et reposa la gigoteuse sur le lit puis s’approcha de lui, glissant ses mains autour de sa taille.

- Merci, Ryo., dit-elle se lovant contre lui.
- De rien, ma belle., répondit-il, en se demandant ce qu’il avait fait.
- Tu as raison. Rien ne presse, la chambre peut rester ainsi encore quelques temps., admit-elle, émue.

Il soupira intérieurement : elle n’avait pas dit qu’elle voulait un autre enfant mais, au moins, elle ne fermait pas la porte à cette éventualité. Le temps ferait certainement son œuvre en espérant qu’il alla dans son sens.

Au bout d’un moment, ils ressortirent de là et allèrent préparer la petite fête qu’ils avaient organisée chez eux pour leurs anniversaires. Toute la bande se retrouva le soir-même dans l’appartement. Les deux couples, le Professeur et Saeko avaient déjà vu le couple ensemble depuis trois semaines maintenant mais Eriko venait juste de revenir de voyage et, bien qu’étant au courant, elle ne les avait pas encore vus ensemble. Elle fut surprise de les voir interagir si naturellement comme si cela faisait des années qu’ils étaient en couple. Ils communiquaient d’un regard, d’un sourire, ils semblaient comprendre lorsque l’autre avait besoin d’eux. Elle n’avait jamais vu Kaori aussi confiante, elle aurait presque resplendi si une fine trace de tristesse n’avait pas marqué ses traits. Eriko sentit son coeur se serrer en repensant à cette petite fille qu’elle avait vu grandir dans le ventre de sa mère et éprouva le besoin de sortir un moment.

- Ca va, Eriko ?, lui demanda Mick, soucieux en la rejoignant.
- Oui, oui, ne t’inquiète pas. C’est ton fils ?, le questionna-t-elle, caressant la joue du bébé.
- Oui, Samuel. Il était un peu énervé, je lui fais prendre l’air. A quoi tu penses ?, s’enquit-il, conscient qu’elle avait tenté de noyer le poisson.
- Kaori et Ryo… Je me sens triste et heureuse pour eux, c’est un peu compliqué à gérer. Je repense au bébé et j’imagine la douleur qu’ils doivent traverser. C’est dur de se dire qu’au moment où elle avait décidé d’avancer, elle a… elle a…, buta-t-elle, sentant sa gorge se serrer.
- Perdu le bébé ?, compléta-t-il pour elle, déposant un baiser sur le crâne de son fils.
- Oui.

Ils restèrent silencieux un moment, observant la nuit noire.

- Quand on est parties, elle était tellement en colère, Mick. Elle ne voulait pas parler du bébé. Dès que j’abordais le sujet, lui conseillais d’aller voir un médecin, elle me rembarrait sévèrement, me demandait de m’occuper de mes affaires. Ce n’était plus la femme que je connaissais. Sayuri a réussi à la faire sortir de sa carapace. Après, elle a commencé à remonter la pente jusqu’au moment où elle s’est sentie prête à rentrer.

Mick digéra les paroles de la jeune femme sur les ravages qu’il avait contribué à créer.

- Elle remonte la pente doucement depuis l’enterrement d’Eirin. D’après ce que j’ai compris, elle a failli partir mais a changé d’avis. Ryo s’est montré présent et a su l’atteindre. Il a dû être patient avec elle avant qu’elle accepte de lui pardonner comme elle l’avait fait avec moi., lui apprit-il.
- Ryo avait changé avant son retour, n’est-ce pas ?, lui demanda-t-elle.
- Oui. D’après ce que j’ai compris, le départ de Kaori et l’annonce de sa grossesse ont été un électrochoc pour lui. Ca l’a comme aidé à dépasser ses peurs.
- Quand elle a perdu le bébé, il a craqué devant moi., murmura Eriko, encore émue au souvenir.

L’américain ne fut pas surpris outre mesure : il savait que, derrière ses airs froids, Ryo était très humain et d’autant plus lorsqu’un certaine jeune femme était concernée. Alors si cela concernait sa chair…

- Tu crois qu’ils vont réussir à dépasser tout cela ?, s’inquiéta-t-elle.

Elle n’osait imaginer l’état dans lequel serait Kaori si son couple venait à rompre. Mick réfléchit un instant à la question et jeta un œil sur Samuel endormi.

- Je pense que oui. S’ils y arrivent, ils seront même plus forts qu’avant., répondit-il.
- Vraiment ?
- J’en suis sûr. Il n’y avait que Kaori pour faire grandir Ryo et il n’y avait que lui pour l’aider à remonter la pente.
- Ils sont faits l’un pour l’autre.

Ils se sourirent, confiants pour l’avenir de leurs amis, et redescendirent.

- Tu étais où Eriko ? Je t’ai cherchée partout., s’enquit Kaori avec un grand sourire.
- J’avais un peu chaud. J’ai pris l’air et croisé Mick., répondit-elle.
- Comment tu vas, ma chérie ?

Kaori la regarda, un léger voile de tristesse dans les yeux mais le sourire aux lèvres.

- Mieux. Beaucoup mieux.
- Alors Ryo et toi, ça y est ?
- Oui. C’est récent mais ça y est., répondit la nettoyeuse avec un léger sourire.
- Tu es heureuse avec lui ?

Kaori tourna le visage vers Ryo non loin et il la regarda aussitôt. Pendant un moment, il ne sembla plus n’y avoir qu’eux et Eriko fut impressionnée par la force de la connexion qui existait entre eux.

- Oui, je suis heureuse., répondit-elle enfin, se tournant de nouveau vers son amie.
- Ca se voit. Je suis contente pour vous deux., fit Eriko, l’enlaçant.
- Je dois m’inquiéter de voir ma femme partir avec une autre ?, plaisanta Ryo derrière elles.

Eriko croisa son regard chargé d’humour qui se teinta de tendresse quand Kaori se tourna vers lui.

- Qui sait ? Peut-être qu’elle trouverait son bonheur sous les caresses d’une autre., répondit Eriko, taquine.

A sa grande surprise, il ne répondit pas mais elle vit entre les deux un échange muet qui détendit son amie. Kaori s’était crispée en entendant la phrase de son amie. Elle n’avait pas envie d’étaler leur absence de vie sexuelle devant tous et avait craint la réponse de son homme mais, heureusement, il s’était abstenu et elle lui en fut gré. Ce fut la teneur de leur échange pendant ce petit laps de temps.

- Il serait peut-être temps de sortir le gâteau, non ?, fit-il soudain.
- Oui, je vais le chercher., répondit Kaori.

Il la suivit dans la cuisine et, la porte refermée, ils se précipitèrent dans les bras de l’autre. Leurs bouches se scellèrent en un baiser passionné. Il se prit à titiller sa belle et l’entendit gémir dans ses bras. Elle lui accorda l’accès à sa bouche et jouta avec la coquine langue qui s’était invitée. Pris dans le moment, Ryo la souleva et la posa sur le plan de travail, s’immisçant entre ses jambes pour pouvoir la serrer contre lui. Ils étaient tels deux affamés et semblaient ne plus vouloir, ne plus pouvoir se quitter. Finalement, le manque d’air eut raison d’eux et ils se séparèrent haletant.

- Wouahou., lâcha Kaori, les joues rosies.
- Ca te fera oublier l’idée de tester les plaisirs saphiques, j’espère ?, la taquina-t-il.
- C’est en bonne voie., murmura-t-elle, malicieuse.
- Tu oublieras vite, je peux te le promettre., dit-il, s’approchant de nouveau de ses lèvres.

Elle interposa son doigt.

- C’est très tentant mais nos amis attendent à côté., s’excusa-t-elle.

Il poussa son doigt et ne fit qu’effleurer ses lèvres avant de l’aider à redescendre et amener le gâteau. Ils eurent droit à quelques sourires de connivence en revenant puis la soirée se passa rapidement.

Ereintés, ils refermèrent la porte derrière Umibozu et Miki puis montèrent à l’étage se coucher. Arrivés devant la chambre de Kaori, Ryo la saisit par la taille et l’embrassa passionnément.

- Dors avec moi cette nuit, Kaori., murmura-t-il.

Elle se figea. Un grand froid l’envahit à l’idée d’être intime avec lui.

- Juste dormir., éclaircit-il, voyant son trouble.
- Je… Oui., accepta-t-elle.

Sa réticence lui fit mal mais il s’en était sorti à bon compte jusqu’ici. Elle aurait pu lui en faire baver beaucoup plus, elle aurait pu être loin et, ce soir, elle dormirait entre ses bras. Ce n’était pas le final qu’il aurait aimé donner à cette soirée dans l’idéal mais c’était déjà une belle fin… et un bon début pour la journée qui suivrait...

Vchollet aime ce message

avatar
Mercury80
Habitué du Cat's Eye
Habitué du Cat's Eye
Messages : 397
Date d'inscription : 17/02/2020
Age : 43

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Mer 31 Mar - 18:29
Chapitre 24

Douchée et habillée, Kaori descendit les escaliers et observa, le coeur serré, Ryo endormi dans le canapé. Cela faisait maintenant près de trois semaines que ça durait et elle se demandait comment ça allait se terminer parce qu’elle sentait qu’il arrivait à bout de patience. Elle n’arrivait cependant pas à dépasser son blocage et à laisser leur relation atteindre un degré d’intimité que tout couple partageait. Depuis cinq mois, ils dormaient ensemble chastement. Ils se couchaient ensemble, partageaient quelques moments de tendresse mais, dès que les caresses se précisaient, elle se figeait et le repoussait. Au début, il ne s’en était pas offusqué, trouvant des mots pour la rassurer sur son amour pour elle, lui disant qu’ils avaient le temps, puis les mots s’étaient raréfiés jusqu’à disparaître. Depuis trois semaines, ils étaient réapparus, plus durs, impatients, et, inlassablement, il quittait le lit pour dormir dans le canapé et elle culpabilisait de ne pas savoir l’aimer jusqu’au bout.

Laissant échapper un léger soupir, elle se dirigea dans la cuisine et prépara un petit déjeuner. Elle ne vit pas deux prunelles grises apparaître et la suivre du regard douloureusement. Ryo passa une main sur son visage pour en effacer la tension. Ca devenait difficile de lutter contre le désir qui l’habitait. Il s’était juré d’attendre mais, là, il ne comprenait pas ce qui la retenait encore d’avancer vers plus d’intimité entre eux. Il sentait que ce n’était pas une question de pudeur, c’était certainement plus profond mais elle ne voulait pas en parler. Il se sentait blessé aussi parce qu’il estimait que son refus signifiait qu’elle n’avait pas totalement confiance en lui, en eux et il ne pouvait le tolérer. Cela nourrissait la colère grandissante qui refaisait surface quand elle le rejetait et c’était ce qui le poussait à quitter leur lit pour éviter de faire un geste ou de dire une parole regrettable.

Il se leva et monta prendre sa douche et s’habiller. Prêt, il redescendit et la rejoignit à la cuisine. Comme tous les matins depuis trois semaines, ils prirent leur petit-déjeuner dans un silence pesant. Ils réussiraient certainement encore à se parler à midi quand chacun aurait vaqué à ses occupations matinales, évacuant la tension de la situation. Sans un mot, Kaori se leva et débarrassa.

- Je vais à la gare. Je ferais la vaisselle en revenant., l’informa-t-elle.

Il la regarda surpris s’en aller puis fronça les sourcils. Ce n’était pas son ordre habituel et il le vécut comme une volonté de s’éloigner au plus vite de lui… et il n’avait pas tort. Sortant de l’appartement, elle s’appuya quelques secondes sur la porte, cherchant à évacuer la tension qu’avait attisée leur repas. Elle se remémora avec nostalgie d’autres moments beaucoup plus chaleureux, plus légers, plus sensuels. C’était seulement deux mois auparavant, avant que la tension ne fit son apparition… Elle descendit les escaliers et se dirigea vers la gare avant de repasser par le Cat’s.

- Bonjour Kaori, comment ça va aujourd’hui ?, la salua Miki.
- Très bien, merci. Et toi ?, répondit-elle d’un sourire enjoué.
- La forme. En plus, nous avons du monde aujourd’hui. Les beaux jours nous ont vraiment été profitables., se réjouit la barmaid.
- Ca ne m’étonne pas avec la chaleur qu’il a fait ces deux derniers mois…
- Alors ça roule toujours avec Ryo ? Le connaissant, il n’y a pas que les journées qui ont été chaudes dernièrement…, lui lança son amie, malicieuse.

La nettoyeuse sentit un grand froid l’envahir. Que lui dire ? Que l’ambiance n’était pas au beau fixe ? Qu’elle refusait d’être intime avec lui ? Que c’était doucement entrain de les séparer ? Elle fut sauvée par l’arrivée d’un groupe d’amis qui chahutait.

- Je vais te laisser. Tu vas avoir du travail. A plus.

Et Kaori s’éclipsa avant que Miki n’ait pu réagir. Elle rentra rapidement à l’appartement qu’elle trouva vide. Elle fit rapidement la vaisselle, lança une lessive, fit les poussières avant de partir en cuisine préparer le déjeuner. Elle achevait de mettre la table quand Ryo rentra.

- Pile à l’heure., l’accueillit-elle, un léger sourire aux lèvres malgré son anxiété.
- Tant mieux., lâcha-t-il sombrement.

Ils mangèrent en silence. Contrairement aux autres jours, la tension ne semblait pas retomber et Kaori s’en mordit les doigts. Après le repas, ils prirent place dans le canapé et regardèrent les informations. La présence de la jeune femme à ses côtés occulta progressivement la colère qu’il ressentait et Ryo finit par se détendre. Il passa un bras autour de ses épaules et, soulagée, elle se laissa aller contre lui. Ils finirent ainsi le programme, l’un contre l’autre, main dans la main. Ryo éteignit la télévision et se tourna vers sa compagne. Doucement, il posa ses lèvres sur les siennes et retrouva avec délice leur chaleur et leur douceur.

Kaori se laissa emporter par les sensations que ce baiser réveillait en elle. Elle était soulagée de retrouver l’homme qu’elle aimait et qui savait si bien l’emmener ailleurs. Elle se colla à lui lorsqu’il la bascula sur le divan, s’allongeant contre elle. Elle passa les bras autour de son cou et entrouvrit les lèvres pour le laisser prendre possession de sa bouche comme elle aimait qu’il le fasse. Il ne se priva pas et fit danser leurs langues à un rythme endiablé. Il quitta ses lèvres pour descendre sur sa joue, la ligne de son menton avant de revenir sur elles. Sa main caressait lentement son flanc, de ses côtes à sa hanche alors qu’elle-même ne descendait pas en dessous de ses épaules. Elle oubliait les tensions de la nuit dernière et profitait de l’effet qu’il lui faisait.

Perdant doucement la tête, Ryo quitta à nouveau ses lèvres et parcourut son cou de baiser, s’aventurant sur sa gorge. Il sentait sa partenaire frémir sous lui et ça l’excitait toujours un peu plus, nourrissant son besoin de la goûter, de la découvrir, de l’aimer physiquement. Sa main remonta dans son dos, accrochant l’attache de son soutien-gorge. Il savait qu’il n’avait qu’un geste à faire pour la défaire mais se retenait… encore. Cette simple caresse attira l’attention de la jeune femme qui retint son souffle et le libéra lorsque ladite main se posa sur son omoplate. Le baiser aidant, elle oublia au bout de quelques instants. Elle redescendit ensuite et se posa sur sa fesse. Elle sentit ses sens s’enflammer au passage mais la position annihila l’effet, d’autant plus que son pouce faisait des va et vient qui la mettait mal à l’aise. Elle soupira presque lorsqu’il remonta sa main mais se figea en sentant ses doigts sur la peau nue de son ventre.

Ryo glissa les doigts sous le haut de Kaori. Il avait envie de sentir sa peau, de la déshabiller et de la tenir contre lui, nue. Il voulait la rendre ivre de désir par ses caresses et baisers, la voir s’abandonner à la démonstration physique de leur amour, communier avec son corps comme ils semblaient le faire avec leurs âmes. Ce n’était qu’une continuation logique des choses pour lui. De son ventre, les caresses remontèrent et effleurèrent bientôt sa poitrine. Pris dans son élan, il ne remarqua pas de suite l’immobilité soudaine de la jeune femme et poursuivit.

- Arrête, s’il te plaît., murmura-t-elle.
- Kaori…, gémit-il.
- Ryo, arrête. Je ne veux pas aller plus loin., répéta-t-elle d’une voix blanche.

Il posa la tête sur son épaule le temps de reprendre contenance puis se releva, le visage fermé. Kaori resta quelques secondes allongée, luttant contre la douleur qui montait, puis se mit assise, attendant de voir quelle serait sa réaction. Il tourna en rond un moment, cherchant visiblement à régner sur sa frustration ou sa colère, puis vint lui faire face, le regard noir.

- Ca ne peut plus durer., gronda-t-il.
- Kaori, soit on est un couple et on fait l’amour, soit on n’en est pas un. Je pense avoir été suffisamment patient, t’avoir assez montré que j’étais devenu sérieux et que tu pouvais compter sur moi, avoir confiance en moi pour passer ce cap-là. Je ne comprends plus.
- Je n’y arrive pas., murmura-t-elle, coupable.
- Ecoute-moi bien, je t’aime et je ferais beaucoup de choses pour toi mais, toi aussi, tu dois avancer vers moi. Je pensais qu’on se faisait confiance mais, visiblement, ce n’est pas le cas puisque tu ne veux ni évoquer ce qui te tracasse ni passer à l’acte. Alors, je te lance un ultimatum : soit tu acceptes d’avoir totalement confiance en nous, soit tu t’en vas. Je ne resterai pas dans une relation qui n’en est pas une et qui finira par nous détruire., lui annonça-t-il.

Elle le regarda, stupéfaite, le coeur serré. Sans même s’en rendre compte, les larmes se mirent à couler sur ses joues et elle ne sut quoi dire. Elle ne pouvait pas croire que tout se terminerait ainsi.

- Tu m’avais dit qu’on irait à mon rythme…, objecta-t-elle faiblement.
- On n’avance pas, Kaori ! Depuis cinq mois, ça n’a pas bougé : tu acceptes les baisers et que je pose mes mains sur toi à des endroits innocents mais c’est tout. Ce que je pouvais comprendre au début, je ne le comprends plus maintenant alors qu’on a dormi pendant cinq mois ensemble dans le même lit sans que j’ai un geste déplacé. Si tu n’as pas confiance en moi après cela, dis-moi ce qu’il te faut de plus ! Je ne suis pas un moine. J’ai une femme que j’aime, qui est désirable et avec qui j’ai envie de faire l’amour. Je ne suis pas un adepte des relations platoniques.
- Je…, commença-t-elle à vouloir expliquer mais les mots restèrent coincés dans sa gorge.
- Je ne peux pas., acheva-t-elle, dépitée.
- Réfléchis-y bien. Mais si les choses n’évoluent pas, ce sera fini entre nous… sur tous les plans., l’avertit-il avant de prendre sa veste et de partir.

Il ferma la porte derrière lui, tendu. Il savait qu’il jouait gros, qu’il s’était laissé guider par sa colère et sa frustration mais il avait été plus que patient et la patience ne semblait pas porter ses fruits sur ce coup-là… Il dévala les escaliers avant de prendre le risque de rentrer et lui demander pardon, d’oublier ce qu’il lui avait dit et sortit faire le tour de ses indics, croisant en chemin Mick qui faisait de même. Voyant l’humeur massacrante de son ami, il lui proposa un petit tour par le jardin public, histoire de discuter.

- Crache le morceau, Ryo. C’est Kaori ?, lui demanda-t-il sans préambule.
- Oui, on… on s’est disputés., avoua-t-il.
- T’inquiète, tu vas la retrouver, une petite discussion et une réconciliation sur l’oreiller et le tour sera joué., le rassura l’américain.
- J’aimerais bien mais ça va être compliqué., lâcha Ryo sombrement.

Mick se redressa, le regard sérieux, et observa son ami.

- Que se passe-t-il ? T’as déconné ?, s’inquiéta-t-il.
- Non… Oui… J’en sais rien en fait.
- Elle t’a fait une scène et tu sais pas pourquoi. Un petit tour au septième ciel la calmera.
- C’est là le problème, Mick., fit Ryo d’une toute petite voix.
- Elle refuse toute intimité.

L’américain le regarda, les yeux plissés, réalisant ce qu’il lui disait.

- Tu veux dire qu’en six mois, vous n’avez pas…
- Non. Je peux l’embrasser des lèvres au cou, la caresser des côtes aux hanches mais uniquement habillée, et c’est tout.
- Mais pourquoi ?, s’étonna Mick.
- Je n’en sais rien et ça me rend dingue. Mick, ça fait cinq mois qu’on dort ensemble sans accident. Cinq mois qu’elle vient dans mes bras spontanément la nuit mais ça ne peut pas aller plus loin. Avec les températures qu’il a fait, elle a dormi en débardeur et culotte et, malgré tout le désir que j’ai pour elle, pas un geste déplacé.
- J’imagine que ça doit être compliqué. Donc vous vous êtes disputés à cause de ça ?

Ryo acquiesça, le regard perdu dans le vide.

- Je lui ai lancé un ultimatum : en gros, le sexe ou la porte. Ne me tue pas. Je l’aime, Mick, mais, si elle n’a pas assez confiance en moi pour aller au bout de notre relation, on va se détruire., avoua-t-il.
- Tu y as peut-être été un peu fort, non ?, pipa l’américain.
- Jusqu’ici, je l’ai protégée. Je me suis plié en quatre pour la reconquérir. J’ai l’intuition qu’elle se complaît dans cette dernière part de douleur ou de colère ou de peur, je ne sais pas. Je veux l’obliger à dépasser cela. J’ai tout donné pour nous, c’est à son tour de faire un geste pour notre couple., lui expliqua Ryo.
- J’espère que tu as vu juste sinon vous souffrirez tous les deux., conclut Mick.

Ils restèrent silencieux un moment avant de continuer leurs chemins séparément.

A l’appartement, Kaori était restée seule. Quand la porte s’était refermée, elle s’était sentie soudain très fragile. Après plusieurs mois de bonheur, elle allait tout perdre parce qu’elle ne voyait pas comment sortir de là. Abattue, elle monta dans sa chambre et ouvrit les armoires, sortant ses valises. Elle en ouvrit une et ce simple geste la ramena des mois en arrière après leur première fois, après leur unique fois. Elle sentit ses jambes se dérober sous elle et se mit à pleurer, tant la douleur revint à pleine puissance. Elle revivait ce sentiment de trahison, sentiment qui l’avait habitée pendant de longs mois après, cinq pour être exacte jusqu’à ce qu’elle arriva chez Sayuri et qu’elle libéra son coeur. Cinq mois, c’était le temps qu’ils avaient passé ensemble comme couple, enfin si échanger quelques baisers et dormir ensemble faisaient d’eux un couple comme l’avait justement souligné Ryo.

Elle aurait pu lui expliquer, elle aurait même dû le faire mais elle n’y arrivait pas. Elle ne voulait pas revoir la lueur de culpabilité dans son regard ni l’incompréhension parce qu’après tout, elle lui avait dit le pardonner mais certaines choses étaient plus dures à effacer que d’autres… Des coups à la porte la tirèrent de sa détresse et elle se força à se lever pour aller ouvrir la porte.

- Sayuri…, souffla Kaori.

La journaliste n’eut même pas le temps de répondre que sa cadette se jeta dans ses bras. Sentant sa détresse, elle ne dit rien et referma les bras sur elle. Pour un accueil, c’était un accueil… Elles restèrent ainsi plusieurs minutes jusqu’à ce que Kaori s’écarta d’elle, les yeux rougis.

- Je suis désolée. Entre., bredouilla-t-elle.
- Tu veux un café ?
- Kaori, laisse tomber les mondanités. Viens ici et parle-moi., lui ordonna-t-elle, tapotant la place à ses côtés.

La nettoyeuse s’exécuta et s’assit. Aussitôt, la main de sa sœur se referma sur la sienne.

- Alors ? C’est Ryo ?
- Il m’a posé un ultimatum., répondit Kaori, les yeux baissés.
- De quel genre ?

La nettoyeuse fit mine de se lever mais fut retenue par sa sœur.

- On fait l’amour ou c’est fini…
- Quoi ?, s’étrangla Sayuri, surprise.
- Tu m’expliques le contexte avant que je n’aille le tuer., lui demanda-t-elle.

Kaori lui résuma les quelques mois qu’ils venaient de passer à deux, quelques mois de bonheur si on exceptait les tensions des trois dernières semaines. Sayuri la dévisagea quand elle eut fini, pesant ses mots.

- Je ne veux pas avoir l’air d’aller dans son sens mais je peux le comprendre, Kaori., lui confia-t-elle.
- Moi aussi., avoua la jeune femme.
- Alors pourquoi tu te refuses à lui ? Tu veux lui faire payer ce qu’il t’a fait ?
- Non ! Je… Je ne suis pas comme ça. Je n’arrive pas à me laisser aller.
- Pourquoi ?, lui demanda Sayuri patiemment.
- Je… je ne veux pas en parler., répondit Kaori.
- Et à lui, tu lui en as parlé ?

La nettoyeuse dégagea sa main et se leva, mettant de la distance entre sa sœur et elle. Elle se sentait vulnérable et ressentait le besoin de se mettre à l’abri.

- Non.
- Si tu n’en parles à personne, tu ne t’en sortiras pas, Kaori. Tu gâcheras tout ce qui a été accompli par ton silence., la sermonna-t-elle doucement.

Kaori resta silencieuse à regarder par la fenêtre. Le doute la prenait. Les paroles de sa sœur pénétraient lentement son esprit, ébréchant quelques certitudes. La voyant se murer, Sayuri se leva.

- Je dois aller au journal. Je dois partir dès ce soir à Kyoto pour couvrir un évènement international mais je serai de retour dans une semaine et j’aurais quelques jours de congés. On aura le temps d’en reparler si tu le souhaites., lui proposa-t-elle.
- Je suis désolée, Sayuri. Tu devais attendre mieux de nos retrouvailles., s’excusa Kaori.
- J’aurais aimé te voir heureuse mais, après cette année tumultueuse, je suis déjà contente de t’avoir presque retrouvée., la consola-t-elle.
- Tu es une battante, Kaori. Ne l’oublie pas.

Elle déposa un baiser sur sa tempe et s’en alla sans savoir si leur discussion lui avait été bénéfique ou non.

Quand Ryo rentra le soir, il trouva Kaori assise à la table, perdue dans ses pensées. Son coeur se serra mais il n’en montra rien. Elle souffrait mais lui aussi et il avait pris une décision pour leur bien commun. Il ôta sa veste et ses chaussures et se dirigea vers la cuisine. Si elle l’ignorait, il en ferait de même. C’était peut-être le temps qu’il lui fallait pour réfléchir.

- A chaque fois que tu me touches plus intimement, je revis la même scène., dit-elle soudain.
- Je suis nue dans la douche et tu me rejoins nu également. Tu m’embrasses et me caresses et, quand je m’écarte effrayée, tu me demandes si je t’aime et si j’ai confiance en toi et, moi, je te dis que oui parce que c’est vraiment ce que je ressens.

Ryo lutta contre la boule dans sa gorge pour déglutir avant de parler. Il se souvenait très bien de chacun de ces moments.

- Je sais que je t’ai menti ce jour-là. Mais je ne te mens plus aujourd’hui, Kaori.
- Je le sais mais ça n’empêche pas les images de revenir, la peur de s’installer.

Il se tourna et s’approcha d’elle, prenant place contre elle. Il caressa doucement sa joue.

- Je ne jouerai plus avec ton coeur ni avec ton corps. J’ai décidé d’assumer mes sentiments pour toi jusqu’au bout. J’ai été transparent sur ce que je voulais pour nous, Kaori., lui rappela-t-il.
- C’est à toi de décider maintenant si tu as vraiment confiance en moi ou non. Je veux t’aimer, Kaori, comme j’aurais dû le faire ce jour-là et bien avant même.

Elle tourna enfin son visage vers lui et leva un regard brillant de larmes vers lui. Il se pencha sur elle et l’embrassa tendrement avant de s’éloigner et de se lever.

- Que décides-tu, Sugar ?, lui demanda-t-il, lui tendant la main.

Elle la regarda, hésitante un moment, puis la prit. Il l’attira à lui et l’enlaça, soulagé.

- Ca ne veut pas dire que je suis d’accord pour avoir un enfant., murmura-t-elle.

Elle n’avait pas encore pris sa décision à ce sujet qui restait encore trop douloureux. Ryo ne laissa rien paraître de sa déception et la serra un peu plus fort.

- On a le temps pour cela. D’accord ?

Elle acquiesça et le vit se pencher sur elle. Il posa ses lèvres sur les siennes et l’embrassa tendrement. Après quelques minutes de ce doux traitement, il la prit par la taille et l’emmena dans leur chambre. Ils s’allongèrent sur le lit et recommencèrent à s’embrasser. La passion grimpa lentement, les baisers s’approfondirent, les mains se mirent à voyager prudemment. Les premiers moments de crispation arrivèrent également mais chacun y mit du sien pour repousser les limites.

Quand il passa pour la troisième fois la main sous le haut de Kaori, Ryo ne la sentit qu’à peine se figer avant de se laisser de nouveau aller au plaisir de leurs baisers. Discrètement, il défit les boutons et, bientôt, l’air frais de la chambre effleura la peau nue du ventre de la jeune femme.

- Détends-toi… Je ne vais pas plus loin pour le moment. Quand tu seras prête, tu m’enlèveras mon tee-shirt., lui chuchota-t-il, plongeant dans ses yeux.

Elle se nicha dans son épaule, effrayée, mais lutta contre la panique qui la gagnait pour ne pas bondir hors du lit. Lentement, il déposa des baisers sur son épaule, remontant jusqu’à son cou puis sa joue quand elle sortit enfin de sa cachette pour lui offrir ses lèvres. Quelques minutes plus tard, il pouvait enfin effleurer la totalité de son dos sans la sentir se raidir à chaque geste. Chaque caresse, chaque baiser sortant des sentiers battus fut un long périple. Il vit son regard inquiet suivre chaque pièce de tissu ôtée et crut bien à un moment qu’elle allait le planter là dans le feu de l’action. Mais elle resta. Chaque regard inquiet était suivi d’une âpre bataille contre elle-même, bataille qu’il suivait sur les traits de son visage, dans son expression corporelle et dans la lueur de ses yeux. C’était le geste qu’il attendait de sa part et, si elle décidait de stopper là le cours de leurs ébats, il aurait été frustré mais n’aurait pas été en colère, parce qu’elle avait au moins essayé.

Doucement donc, il réussit à la faire quitter son monde pour la faire entrer dans le leur. Il retrouva l’amante passionnée qu’il avait connue avant de se rendre compte de son erreur ce jour maudit. Lorsqu’elle commença à laisser ses mains voyager sur son corps, il découvrit les délices de torture qu’elle pouvait lui infliger. Toute trace de peur effacée, il lut dans ses yeux l’amour et le désir qu’elle lui portait et en fut touché au plus profond de son être. Il lui donna le meilleur de lui-même, laissant son coeur et son corps s’exprimer librement.

Avant de venir en elle, Ryo enfila une protection, la regardant droit dans les yeux pour lui dire qu’il l’avait bien entendue. Elle lui faisait confiance pour se donner à lui mais il avait bien entendu ses mots : elle ne voulait pas être enceinte. Il espérait bien que ce ne serait pas définitif mais il devait respecter son choix.

- Prête ?, murmura-t-il.

Elle caressa sa joue puis leva le visage pour l’embrasser. Ils s’unirent tendrement et restèrent immobiles un moment, les yeux dans les yeux.

- Bienvenue à la maison, Ryo., murmura-t-elle, une flamme dansant au fond de ses yeux.

Il s’entendit gémir, l’émotion le prenant, et la serra contre lui, sentant ses bras et ses jambes se nouer autour de lui, se mouvant en elle comme pour s’y perdre. Ils étaient enfin réunis, enfin unis, enfin un…
Contenu sponsorisé

[DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC] Empty Re: [DRAMEXACTION] Que passe un ange...[FIC]

Revenir en haut
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum